II. DES INDICES AYANT FAIT L'OBJET DE FRAUDES MASSIVES
En ce qui concerne le LIBOR, deux types de fraude ont été identifiés . En revanche, l'EURIBOR ne semble pas avoir fait l'objet de manipulations de grande ampleur. Plusieurs enquêtes sont néanmoins toujours en cours.
Le premier type de fraude consistait, pour les banques du panel, à orienter à la hausse ou à la baisse le LIBOR en fonction des positions ouvertes dans leurs livres. Dans plusieurs cas, il y aurait pu y avoir des collusions entre banques afin de représenter un poids suffisant pour orienter le taux dans le sens qui les avantageait.
Les banques, à la fois contributrices et utilisatrices du LIBOR, étaient donc dans une situation de conflits d'intérêts . D'après la commission parlementaire britannique sur les standards bancaires, au sein de la banque UBS, la fraude aurait impliquée, sur une période de neuf ans, au moins 40 personnes directement et 70 indirectement.
La seconde fraude découverte est intervenue en 2008, après la chute de Lehman Brothers. A l'époque, le marché interbancaire « en blanc » s'est totalement arrêté car les banques doutaient de leur solidité respective.
Lorsque ce marché a redémarré, les taux auxquels certaines banques pouvaient emprunter restaient très élevés, signe de cette profonde défiance. C'est ainsi que, dans le cadre du calcul quotidien du LIBOR, la banque Barclays a volontairement déclaré des taux sous-évalués, car elle ne voulait pas révéler la méfiance des autres banques à son égard.
Dans le cas du LIBOR, la banque dévoile la position du marché à son encontre puisqu'elle déclare le montant auquel elle pourrait emprunter. Cette information peut être lourde de conséquence et la tentation de la manipulation peut donc être très forte.
En revanche, dans le cas de l'EURIBOR, la banque déclare le montant auquel elle accepterait de prêter . Fondamentalement, cela limite les manipulations destinées à éviter un risque de réputation, mais pas les potentiels conflits d'intérêts. Il faut aussi souligner que le panel des banques contributrices est presque deux fois moins grand pour le LIBOR que pour l'EURIBOR, rendant les manipulations encore plus aisées.
Ainsi que le rappelle notre collègue Richard Yung dans l'exposé des motifs de sa proposition de résolution européenne : « en juin 2012, la banque Barclays a été condamnée à verser une amende de 360 millions d'euros pour mettre fin aux enquêtes du régulateur britannique, la Financial Services Authority (FSA), et américain, la Commodity Futures Trading Commission (CFTC). [...] D'autres sanctions ont suivi. La banque suisse UBS a dû régler une amende de 1,1 milliard d'euros après un accord avec les autorités américaines, britanniques et suisses et a renoncé à participer au panel Euribor. La Royal Bank of Scotland a versé 444 millions d'euros d'amendes. Rabobank devrait prochainement verser une amende de 336 millions d'euros. Près d'une vingtaine d'autres grandes banques internationales font actuellement l'objet d'enquêtes des autorités, notamment aux États-Unis. Les analystes de Morgan Stanley estiment à 12 milliards d'euros le coût total pour 11 des 18 banques du panel du Libor : 5,67 milliards d'euros environ d'amendes auxquels il faudrait ajouter 6,38 milliards d'euros pour régler les contentieux liés à cette affaire. En effet, aux sanctions prononcées par les régulateurs, s'ajoutent dorénavant les plaintes ou les actions collectives principalemen t aux Etats-Unis ».