Rapport n° 571 (2012-2013) de M. Michel VERGOZ , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 15 mai 2013
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AVANT-PROPOS
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I. L'OFFRE ALIMENTAIRE EN OUTRE-MER : DES
INÉGALITÉS INJUSTIFIABLES AVEC L'HEXAGONE
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A. UN TAUX DE SUCRES PLUS ÉLEVÉ DANS
LES PRODUITS COMMERCIALISÉS EN OUTRE-MER : DES CONSÉQUENCES
NÉFASTES POUR LA SANTÉ
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B. L'APPOSITION D'UNE « DOUBLE DATE
LIMITE DE CONSOMMATION » SUR CERTAINS PRODUITS : UNE
INÉGALITÉ DE TRAITEMENT CHOQUANTE DES CONSOMMATEURS
ULTRAMARINS
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A. UN TAUX DE SUCRES PLUS ÉLEVÉ DANS
LES PRODUITS COMMERCIALISÉS EN OUTRE-MER : DES CONSÉQUENCES
NÉFASTES POUR LA SANTÉ
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II. LES PREMIERES REPONSES APPORTEES SE REVELENT
POUR L'HEURE INSUFFISANTES
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III. LES REPONSES DE LA PROPOSITION DE LOI POUR
FAVORISER L'EGALITE ENTRE LES CONSOMMATEURS QUANT À LA QUALITE DE
L'OFFRE ALIMENTAIRE
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A. LUTTER CONTRE L'UTILISATION EXCESSIVE DE SUCRES
AJOUTES DANS LES PRODUITS COMMERCIALISES EN OUTRE-MER
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B. INTERDIRE L'UTILISATION DE DATES LIMITES DE
CONSOMMATION SPECIFIQUES AUX PRODUITS DISTRIBUES EN OUTRE-MER POUR DES RAISONS
UNIQUEMENT COMMERCIALES
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C. FAVORISER LES CIRCUITS COURTS ET LE
DEVELOPPEMENT DE LA PRODUCTION LOCALE
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1. L'importance de la restauration collective pour
l'équilibre nutritionnel des populations et la situation de la
production agricole locale justifient une intervention
législative
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2. La promotion des denrées alimentaires
issues des circuits courts de distribution dans le cadre des marchés
publics de restauration collective en outre-mer
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1. L'importance de la restauration collective pour
l'équilibre nutritionnel des populations et la situation de la
production agricole locale justifient une intervention
législative
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A. LUTTER CONTRE L'UTILISATION EXCESSIVE DE SUCRES
AJOUTES DANS LES PRODUITS COMMERCIALISES EN OUTRE-MER
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I. L'OFFRE ALIMENTAIRE EN OUTRE-MER : DES
INÉGALITÉS INJUSTIFIABLES AVEC L'HEXAGONE
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EXAMEN DES ARTICLES
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Article 1er (art. L. 3232-5, L. 3232-6
et L. 3232-7 [nouveaux] du code de la santé publique) - Fixation d'une
teneur maximale en sucres ajoutés pour les produits alimentaires
distribués dans les outre-mer
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Article 2 - Délai d'application des
dispositions relatives à la fixation d'une teneur maximale en sucres
ajoutés des produits alimentaires distribués dans les
outre-mer
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Article 3 - Interdiction de la fixation de
dates limites de consommation retardées pour les denrées
alimentaires distribués dans les outre-mer
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Article 4 - Promotion des approvisionnements
directs de produits de l'agriculture dans l'attribution des marchés
publics de restauration collective
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Article 1er (art. L. 3232-5, L. 3232-6
et L. 3232-7 [nouveaux] du code de la santé publique) - Fixation d'une
teneur maximale en sucres ajoutés pour les produits alimentaires
distribués dans les outre-mer
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TRAVAUX DE LA COMMISSION
N° 571
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2012-2013
Enregistré à la Présidence du Sénat le 15 mai 2013 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des affaires sociales (1) sur la proposition de loi , ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , visant à garantir la qualité de l' offre alimentaire en outre-mer ,
Par M. Michel VERGOZ,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : Mme Annie David , présidente ; M. Yves Daudigny , rapporteur général ; M. Jacky Le Menn, Mme Catherine Génisson, MM. Jean-Pierre Godefroy, Claude Jeannerot, Alain Milon, Mme Isabelle Debré, MM. Jean-Louis Lorrain, Jean-Marie Vanlerenberghe, Gilbert Barbier , vice-présidents ; Mmes Claire-Lise Campion, Aline Archimbaud, Catherine Deroche, M. Marc Laménie, Mme Chantal Jouanno , secrétaires ; Mme Jacqueline Alquier, M. Jean-Paul Amoudry, Mmes Natacha Bouchart, Marie-Thérèse Bruguière, M. Jean-Noël Cardoux, Mme Caroline Cayeux, M. Bernard Cazeau, Mmes Karine Claireaux, Laurence Cohen, Christiane Demontès, MM. Gérard Dériot, Jean Desessard, Mmes Muguette Dini, Anne Emery-Dumas, MM. Guy Fischer, Michel Fontaine, Mme Samia Ghali, M. Bruno Gilles, Mmes Colette Giudicelli, Christiane Hummel, M. Jean-François Husson, Mme Christiane Kammermann, MM. Ronan Kerdraon, Georges Labazée, Jean-Claude Leroy, Gérard Longuet, Hervé Marseille, Mmes Michelle Meunier, Isabelle Pasquet, MM. Louis Pinton, Hervé Poher, Mmes Gisèle Printz, Catherine Procaccia, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roche, René-Paul Savary, Mme Patricia Schillinger, MM. René Teulade, François Vendasi, Michel Vergoz, Dominique Watrin . |
Voir le(s) numéro(s) :
Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : |
393 , 824 et T.A. 98 |
|
Sénat : |
460 et 572 (2012-2013) |
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
Les consommateurs ultramarins sont frappés par une double inégalité s'agissant de la qualité des produits alimentaires qu'ils consomment.
La première de ces inégalités est d'ordre nutritionnel. Alors que la population ultramarine est particulièrement touchée par l'épidémie mondiale d'obésité, elle se trouve contrainte dans ses choix nutritionnels par une offre alimentaire globalement plus sucrée.
La seconde inégalité concerne les dates limites de consommation apposées sur les denrées très périssables. Pour des raisons purement commerciales, quelques industriels retardent ces dates limites, parfois de plus de 20 jours, pour certains produits destinés au marché ultramarin, ce qui soulève une grave question sanitaire.
De telles différences entre consommateurs hexagonaux et ultramarins, qui concernent qui plus est des produits de première nécessité, ne sauraient être acceptées.
Ce texte entend, dans ce contexte, améliorer la qualité nutritionnelle de l'offre alimentaire destinée aux populations marines, et par là assurer enfin l'égalité entre les consommateurs.
I. L'OFFRE ALIMENTAIRE EN OUTRE-MER : DES INÉGALITÉS INJUSTIFIABLES AVEC L'HEXAGONE
A. UN TAUX DE SUCRES PLUS ÉLEVÉ DANS LES PRODUITS COMMERCIALISÉS EN OUTRE-MER : DES CONSÉQUENCES NÉFASTES POUR LA SANTÉ
1. Une offre alimentaire globalement plus sucrée dans les outre-mer pour les produits de première nécessité
Différentes études récemment conduites à l'initiative des collectivités de Guadeloupe, de Martinique et de La Réunion ont permis de mettre en évidence la présence d' un taux de sucres sensiblement plus élevé dans les produits alimentaires commercialisés en outre-mer que dans les denrées similaires distribuées en France hexagonale .
Ces écarts varient selon la nature des produits concernés et en fonction de leur mode d'élaboration et de fabrication . Tandis que la recette de certains produits distribués en outre-mer et fabriqués en Europe ne varie pas selon le lieu de leur commercialisation, d'autres denrées voient leur composition adaptée pour le marché ultramarin. C'est par exemple le cas des sodas fabriqués sous licence dans les outre-mer par rapport à la référence identique distribuée dans l'hexagone. Une troisième catégorie de produits fait l'objet d'une fabrication locale spécifique et n'est pas commercialisée dans l'hexagone.
Une première étude de décembre 2011, conduite en collaboration entre les conseils régionaux de Guadeloupe et de Martinique avec l'appui du Pôle agroalimentaire régional de Martinique (Parm) 1 ( * ) , a comparé le taux et le profil des sucres entre, d'une part, des boissons de type sodas et des produits laitiers frais distribués en outre-mer et, d'autre part, des références équivalentes commercialisées dans l'hexagone. Des sodas achetés en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à La Réunion, à Mayotte et en Nouvelle-Calédonie et des produits laitiers frais fabriqués et vendus en Martinique ont été acheminés à Nantes pour y être analysés par le laboratoire de biotechnologies de référence Eurofins .
Une autre étude de décembre 2011, conduite par la direction de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (Daaf) de La Réunion , a évalué la teneur en glucides de l'offre alimentaire réunionnaise au regard de l'offre hexagonale pour les mêmes catégories de produits (boissons rafraîchissantes sans alcool et produits laitiers frais). La méthodologie utilisée était fondée sur l'analyse comparative de la composition nutritionnelle des produits figurant sur leur étiquetage.
Une étude comparant la teneur en sucres ajoutés de plusieurs séries de produits alimentaires commercialisés en France hexagonale et dans les outre-mer est par ailleurs actuellement en cours de réalisation par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).
a) Une teneur en saccharose élevée dans les sodas fabriqués localement, notamment dans les boissons pour enfants
Il a été établi par la première de ces études que dans leur grande majorité, les boissons sucrées de type sodas produites en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à La Réunion, à Mayotte et en Nouvelle-Calédonie présentent une teneur en sucres sensiblement plus élevée que les produits comparables fabriqués et commercialisés dans l'hexagone . Cette différence s'explique par la présence d'une quantité plus importante de saccharose dans les recettes ultramarines.
Ces écarts concernent d'abord les sodas locaux correspondant à des productions spécifiques des outre-mer . Dix-sept des vingt références de sodas locaux prélevées étaient plus sucrées que la référence la plus sucrée prélevée dans l'hexagone. Dix références présentaient une teneur en sucres supérieure de 15 % à la teneur en sucres de la référence la plus sucrée prélevée dans l'hexagone. Le constat est plus alarmant encore s'agissant des sodas locaux destinés à la consommation des enfants. Cinq des huit références prélevées étaient plus sucrées que la référence hexagonale la plus sucrée. Six d'entre elles présentaient une teneur en sucres de 10 % plus élevée à celle de la référence la plus sucrée prélevée dans l'hexagone, et c'est dans cette catégorie qu'ont été relevées les teneurs moyennes en sucres les plus élevées.
Ces écarts concernent également certaines des marques de sodas de référence identique commercialisés dans l'hexagone et fabriqués sous licence dans les outre-mer. L'écart atteint 47 % pour l'une de ces références à La Réunion.
Il est cependant à noter que les sodas prélevés dans les territoires concernés par cette première étude mais fabriqués en Europe présentaient la même composition que les boissons distribuées en France hexagonale. L'adaptation des formules ne concerne donc pas l'ensemble des boissons sucrées commercialisées en outre-mer , ce qui met à mal l'idée avancée par certains industriels d'une appétence particulière des consommateurs ultramarins pour les produits sucrés.
Ces tendances sont confirmées par l'enquête réalisée par la Daaf de La Réunion.
b) Une production locale de produits laitiers contenant un taux élevé de sucres ajoutés
Les produits laitiers fabriqués et commercialisés dans les outre-mer, notamment les yaourts, présentent généralement un taux de sucres plus important que leurs équivalents sur le marché hexagonal.
Cette différence s'explique d'abord par la présence d'une quantité plus importante de lactose dans la matière première utilisée par les producteurs ultramarins. En raison de l'absence d'une filière laitière autosuffisante en outre-mer, les industries de produits laitiers travaillent à partir de poudre de lait, dont les quantités nécessaires contiennent davantage de lactose que le lait frais. Le taux de sucres présent dans le produit final se trouve de ce fait mécaniquement augmenté . Une différence de 20 % a ainsi été constatée quant à la teneur en lactose d'un yaourt nature fabriqué en Martinique par rapport à une référence équivalente produite dans l'hexagone. Dans le cadre de l'étude conduite par la Daaf de La Réunion, un écart de 13 % a été relevé pour la teneur en glucides d'un yaourt nature réunionnais par rapport à un produit hexagonal comparable 2 ( * ) .
Cette différence s'explique ensuite par un taux de sucres ajoutés très élevé , par exemple dans les recettes de spécialités aux fruits fabriquées localement. Des yaourts aromatisés à la vanille fabriqués en Martinique contenaient ainsi de 27 % à 46 % de plus de saccharose que leurs équivalents hexagonaux. L'écart atteignait près de 51 % pour une référence de yaourt aux fruits produite en Martinique.
c) Une information nutritionnelle du consommateur insuffisante
En dépit d'une teneur en sucres particulièrement élevée, l'information du consommateur quant à la valeur nutritionnelle des produits locaux issus d'une production spécifique à l'outre-mer n'est que très imparfaitement assurée . En application de l'article 2 de la directive 90/496/CE 3 ( * ) , l'étiquetage nutritionnel des produits alimentaires est en effet facultatif lorsqu'aucune allégation nutritionnelle ne figure sur l'étiquette de ces produits, dans une présentation ou dans une publicité.
Dans le cadre de l'étude réalisée en collaboration par les conseils régionaux de Martinique et de Guadeloupe, tandis que toutes les références prélevées dans l'hexagone et la plupart de celles des sodas produits sous licence dans les outre-mer disposaient d'une information nutritionnelle indiquant au moins la teneur en sucres, aucune information de ce type ne figurait sur les produits issus d'une production locale spécifique.
Cette situation devrait cependant connaître une nette amélioration avec l'entrée en vigueur du règlement européen « Infocom » 4 ( * ) , qui prévoit en son article 30 l'obligation pour les fabricants de faire figurer sur leurs produits une déclaration nutritionnelle indiquant, d'une part, la valeur nutritionnelle et, d'autre part, la quantité de graisses, d'acides gras saturés, de glucides, de sucres, de protéines et de sel. Cette disposition deviendra applicable à compter du 13 décembre 2016.
A l'heure actuelle, contrairement aux consommateurs hexagonaux, les consommateurs ultramarins se voient donc doublement contraints dans leurs choix nutritionnels : l'offre alimentaire est en moyenne plus sucrée pour certains produits de consommation courante et les informations nutritionnelles figurant sur l'étiquetage de ces produits sont insuffisantes.
2. L'existence d'un lien de causalité entre la consommation excessive de sucres et le développement de certaines pathologies qui touchent particulièrement les populations ultramarines
a) Une consommation excessive de sucres présente des dangers importants pour la santé
Dans un rapport de 2004 5 ( * ) , l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) constatait qu'il était difficile de dégager une relation claire entre la consommation de glucides simples (présents dans le sucre, les fruits, les produits laitiers et les boissons sucrées) et l'incidence ou le développement chez l'adulte de pathologies telles que l'obésité, le diabète ou les maladies cardiovasculaires. Les études réalisées sur cette question présentent en effet des résultats discordants qui résultent probablement du fait que les méthodologies employées pour leur réalisation ne sont pas comparables ou apparaissent même discutables. L'étude conclut ainsi que si la consommation de glucides simples ne peut pas être directement incriminée dans le développement de ces pathologies, son influence ne peut pas pour autant être écartée . Plusieurs indices doivent dès lors être pris en compte qui tendent à montrer qu' il est nécessaire de limiter la consommation excessive de sucres pour protéger la santé des personnes, notamment les plus fragiles.
Un rôle spécifique de la consommation de boissons sucrées a été démontré dans l'apparition du surpoids et de l'obésité chez l'enfant , selon deux études américaine et anglaise citées par le rapport de l'Afssa de 2004. Aux Etats-Unis, l'excès de prise de poids chez les enfants est ainsi proportionnel à l'augmentation de la consommation de sodas, qui a été multipliée par trois en vingt ans. En Grande-Bretagne, une stabilisation du pourcentage d'enfants obèses a au contraire été observée dans les cas où des mesures de réduction de la consommation de boissons sucrées pétillantes et de diminution du contenu énergétique des jus de fruits ont été prises.
Or, selon l'organisation mondiale de la santé (OMS) 6 ( * ) , le surpoids et l'obésité constituent d'importants facteurs de risque dans le développement de certaines pathologies non transmissibles et chroniques , comme par exemple les maladies cardiovasculaires (qui représentaient la première cause de décès en 2008), le diabète, les troubles musculo-squelettiques et certains cancers.
Selon l'enquête ObEpi-Roche de 2012 7 ( * ) , la prévalence de l'hypertension artérielle est ainsi multipliée par trois chez les sujets présentant une obésité : le risque d'être traité pour hypertension artérielle est multiplié par 2,3 chez les sujets en surpoids et par 3,6 chez les personnes obèses par rapport aux sujets présentant un indice de masse corporelle (IMC) normal.
L'obésité chez l'enfant, outre un risque accru de fracture, de décès prématuré et d'incapacité à l'âge adulte, peut par ailleurs entraîner des difficultés respiratoires, une hypertension artérielle ou encore une résistance à l'insuline.
A l'heure actuelle, 65 % de la population mondiale réside ainsi dans des pays où le surpoids et l'obésité entraînent davantage de mortalité que l'insuffisance pondérale.
Le développement de ces maladies non transmissibles est en grande partie dû à plusieurs déterminants communs, ainsi que le relève l'OMS dans sa Stratégie mondiale pour l'alimentation, l'exercice physique et la santé de mai 2004 : une forte consommation d'aliments très caloriques, à faible valeur nutritionnelle et riches en graisses, en sucre et en sel , une diminution de l'exercice physique et la consommation de tabac. Les boissons sucrées telles que les sodas, les confiseries ainsi que certains desserts lactés figurent parmi les aliments riches en calories mais à la faible valeur nutritionnelle en raison de l'incorporation dans ces produits de glucides ajoutés , qui permettent d'augmenter leur goût sucré et d'améliorer leur aspect, leur texture et leur durée de conservation.
Selon le rapport de l'Afssa de 2004, il est par ailleurs certain qu' un régime alimentaire présentant un index ou une charge glycémique élevée a « des effets délétères sur la santé, au moins dans certaines catégories de la population (diabétiques, sujets en surpoids ou atteints d'anomalies métaboliques) ». Or, certaines de ces catégories sont particulièrement représentées au sein des populations ultramarines.
b) La prévalence de certaines maladies non transmissibles au sein des populations ultramarines appelle une réponse des pouvoirs publics
• Plusieurs études ont permis de mettre en lumière une prévalence particulièrement élevée du surpoids et de l'obésité parmi les populations ultramarines , notamment parmi les femmes et les enfants 8 ( * ) .
Le rapport remis au Président de la République en décembre 2009 par la commission pour la prévention et le dépistage de l'obésité constatait que la prévalence de l'obésité était, dans les outre-mer, « particulièrement préoccupante chez les femmes ».
Prévalence de l'obésité et du surpoids dans la population adulte des Dom
Obésité |
Surpoids |
Obésité et surpoids |
||||
Hommes |
Femmes |
Hommes |
Femmes |
Hommes |
Femmes |
|
Mayotte
|
7,6 % |
32,3 % |
24,8 % |
25,7 % |
32,4 % |
58 % |
La Réunion
|
8 % |
20 % |
38 % |
33 % |
46 % |
53 % |
Martinique
|
14 % |
26 % |
38 % |
29 % |
52 % |
55 % |
Guadeloupe
|
14 % |
31 % |
37 % |
34 % |
51 % |
65 % |
Source : Rapport au Président de la République de la commission pour la prévention et la prise en charge de l'obésité, décembre 2009
L'enquête « Prévalence de l'obésité, de sa diversité et de son image ultramarine », dite enquête « Podium » 13 ( * ) , présente des résultats non strictement identiques mais néanmoins convergents. Réalisée par l'association Agrum (Action groupée de recherche ultramarine), cette enquête a étudié la prévalence du surpoids et de l'obésité en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane et en Polynésie auprès d'environ 900 personnes sur chacun de ces territoires, dont environ 600 adultes et 300 enfants.
Selon cette étude, la fréquence des problèmes d'excès de poids atteindrait en Guadeloupe 55 % en moyenne chez l'adulte avec une prévalence de l'obésité de 23 % 14 ( * ) .
Prévalence du surpoids et de l'obésité chez les populations ultramarines
Guadeloupe |
Martinique |
Guyane |
Polynésie |
||
Hommes |
Surpoids |
32 % |
35,6% |
35,1% |
38,4% |
Obésité |
18 % |
16,1% |
13,4% |
29,4% |
|
Femmes |
Surpoids |
31,5 % |
31,7% |
25,9% |
30,2% |
Obésité |
27,2 % |
26,8% |
22,1% |
36,9% |
Source : enquête « Podium », données 2007-2008
La comparaison de ces différents chiffres avec les données des enquêtes nationale sur l'obésité et le surpoids permet de constater que les populations ultramarines sont plus touchées que les populations hexagonales par le surpoids et l'obésité.
Selon l'enquête ObEpi-Roche, réalisée selon une méthode déclarative sur un échantillon représentatif de personnes résidant en France hexagonale, 32 % des Français adultes étaient en surpoids en 2009 et 14,5 % d'entre eux étaient obèses . L'obésité ne concernait à cette date que 11,9 % des habitants adultes de Rhône-Alpes et 13,7 % de ceux de l'Aquitaine. Avec 20,5 % d'habitants adultes touchés, le Nord-Pas-de-Calais présentait le taux de prévalence de l'obésité le plus élevé de France hexagonale. Par ailleurs, 15,1 % des femmes étaient touchées par l'obésité en 2009.
Selon l'enquête nationale nutrition santé (ENNS) de 2006-2007, qui repose sur des données mesurées auprès de personnes résidant dans l'hexagone, la prévalence du surpoids et de l'obésité est respectivement de 32,4 % et de 16,9 % chez les adultes.
Outre ceux concernant les femmes, les chiffres relevés pour les enfants sont particulièrement inquiétants. Selon l'enquête « Podium », 6,4 % des enfants guyanais, 8,9 % des enfants guadeloupéens et 9,3 % des enfants martiniquais seraient obèses.
Prévalence du surpoids et de l'obésité chez les enfants de 5 à 14 ans en outre-mer
Guadeloupe |
Martinique |
Guyane |
Polynésie française |
|
Surpoids |
14 % |
15,7 % |
11,5 % |
14,5 % |
Obésité |
8,9 % |
9,3 % |
6,4 % |
17,6 % |
Source : enquête « Podium » 2009
Selon les données sur l'état nutritionnel des populations figurant en annexe du plan national nutrition santé (PNNS) 2011-2015 et du plan obésité 2010-2013, 7,9 % des enfants martiniquais de 5 à 14 ans seraient obèses en 2003-2004 15 ( * ) , contre 3,5 % de la même classe d'âge dans l'hexagone . Cette situation concernait 8,7 % des enfants réunionnais scolarisés en classe de CM2 en 2004-2005 16 ( * ) et 7 % des enfants guadeloupéens en 2001-2002 17 ( * ) .
• Selon une étude de l'Institut national de veille sanitaire (INVS) 18 ( * ) , les outre-mer figurent également parmi les territoires français les plus touchés par l'épidémie de diabète .
Tandis que le taux de prévalence standardisé de cette maladie s'établissait en 2009 à 4,4 % pour l'ensemble de la population, il atteignait 8,8 % à La Réunion, 8,1 % en Guadeloupe, 7,4 % en Martinique et 7,3 % en Guyane contre 2,8 % en Ille-et-Vilaine ou 3,2 % dans le Morbihan et à Paris.
Un taux de prévalence du diabète en 2009
très supérieur à la moyenne nationale dans les
départements d'outre-mer
Source : Institut national de veille sanitaire
• La population mahoraise présente un profil particulier au regard de la prévalence de l'obésité et du surpoids.
Dans une réponse publiée au journal officiel du Sénat du 11 avril 2013, le ministère des affaires sociales et de la santé indiquait que Mayotte se trouve actuellement « dans une phase de transition démographique, épidémiologique et nutritionnelle ». La population mahoraise étant exposée à un problème général de déséquilibre des apports alimentaires, deux situations préoccupantes coexistent sur ce territoire : tandis que des carences sont constatées chez les enfants, 32 % des hommes et 58 % des femmes sont confrontés à un problème d'excès de poids , qui prend la forme d'une obésité pour 7,6 % des hommes et 32,3 % des femmes. La fréquence du diabète y atteint 10,5 % et concerne ainsi une personne sur 10 chez les plus de 30 ans.
B. L'APPOSITION D'UNE « DOUBLE DATE LIMITE DE CONSOMMATION » SUR CERTAINS PRODUITS : UNE INÉGALITÉ DE TRAITEMENT CHOQUANTE DES CONSOMMATEURS ULTRAMARINS
1. Une pratique minoritaire
Il a été observé que certains industriels apposent sur les produits très périssables qu'ils fabriquent en France hexagonale un étiquetage indiquant une date limite de consommation (DLC) différente selon que ces produits sont destinés au marché hexagonal ou au marché ultramarin . Ainsi, tandis que l'étiquetage de la plupart des yaourts distribués en France hexagonale comporte une DLC calculée en fonction d'un délai de 30 jours à compter de leur date de fabrication, ce délai peut atteindre jusqu'à 55 jours pour les mêmes produits de même marque lorsqu'ils sont commercialisés en outre-mer.
Cette pratique dite de la « double DLC » concerne un nombre restreint de fabricants , touche les territoires ultramarins de manière plus ou moins forte et concerne principalement les produits laitiers, notamment les yaourts. Selon un recensement réalisé dans les départements d'outre-mer (DOM) par la Fédération des entreprises d'outre-mer (Fedom), cette pratique concernerait 36 % des produits ultra-frais importés en Guadeloupe (les produits importés représentant 12 % de ce marché) et 17 % en Martinique (pour une part de marché de 16 %). En Guyane, où les importations de yaourts représentent 30 % du marché, l'ensemble des fabricants de yaourts importés pratiquent la double DLC. A la Réunion en revanche, la part des produits « surdatés » est très faible, grâce à une production locale plus importante.
Si la pratique des DLC longues concerne donc au total une part restreinte des produits commercialisés en outre-mer, elle pose une question de principe en termes d'égalité du traitement des consommateurs qui ne saurait être négligée.
2. Une pratique aux conséquences néfastes pour les consommateurs comme pour les producteurs locaux
a) La pratique de la « double DLC » va à l'encontre des objectifs de protection de la santé et d'information des consommateurs
Les règles relatives à la fixation d'une DLC répondent à des impératifs de santé publique . Au-delà d'une certaine durée, certains produits peu stables d'un point de vue microbiologique, comme par exemple les yaourts, deviennent en effet potentiellement préjudiciables pour la santé humaine et voient leur qualité nutritionnelle considérablement dégradée. La DLC définit ainsi pour ces denrées une période courte de consommation allant de quelques jours à quelques semaines.
L'obligation prévue par l'article 10 de la directive européenne 2000/13/CE 19 ( * ) de fixer, pour les denrées microbiologiquement très périssables, une DLC et non une date de durabilité optimale, est ainsi justifiée par le fait que ces produits « sont susceptibles, après une courte période, de présenter un danger immédiat pour la santé humaine ». Il est précisé par l'article 24 § 1 du règlement UE du 25 octobre 2011 que, « au-delà de la date limite de consommation, une denrée alimentaire est dite dangereuse conformément à l'article 14 § 2 à 5 du règlement CE n° 178/2008 ».
Dans ces conditions, l'obligation d'apposition d'une DLC sur les produits microbiologiquement très périssables vise à informer le consommateur de la durée pendant laquelle les denrées peuvent être consommées sans danger pour la santé, cette mention étant accompagnée de l'indication des conditions de conservation optimales du produit.
Dans la mesure où la DLC figurant sur l'emballage des produits très périssables ne renseigne pas les consommateurs sur leur date de fabrication, la pratique de la double DLC ne permet pas d'assurer une bonne information du consommateur. Elle peut en effet conduire les consommateurs ultramarins à choisir des produits sur lesquels figure une DLC éloignée en pensant acheter un produit plus frais, alors que ces produits ont en réalité été fabriqués antérieurement à une denrée produite localement.
Cette pratique apparaît dès lors contraire aux dispositions de l'article R. 112-7 du code de la consommation, qui prévoit que « l'étiquetage et les modalités selon lesquelles il est réalisé ne doivent pas être de nature à créer une confusion dans l'esprit de l'acheteur ou du consommateur , notamment sur les caractéristiques de la denrée alimentaire et notamment sur la nature, l'identité, les qualités, la composition, la quantité, la durabilité , l'origine ou la provenance, le mode de fabrication ou d'obtention ».
b) La pratique de la « double DLC » crée une situation de concurrence déloyale entre les producteurs hexagonaux et les fabricants ultramarins de produits très périssables
Tout comme la grande majorité des producteurs hexagonaux, les fabricants de yaourts ultramarins apposent sur leurs produits une DLC établie en considération d'un délai de trente jours à compter de la fabrication de ces produits.
La présence sur le marché ultramarin de yaourts provenant de France hexagonale et indiquant un délai de consommation plus long que ce délai traditionnel constitue une concurrence déloyale à l'encontre des producteurs locaux . Le système de double étiquetage peut en effet donner l'impression au consommateur que des produits hexagonaux sont plus frais que des produits ultramarins, alors même qu'ils ont été produits depuis plus de trente jours. En outre, la pratique des DLC différenciées selon le marché de destination n'est pas utilisée par les producteurs locaux, qui se trouvent ainsi pénalisés pour l'exportation de leurs produits.
3. Une pratique résultant d'une interprétation erronée de la législation applicable
a) La fixation d'une DLC relève par principe de la compétence des fabricants en fonction d'analyses de risques
Il ressort des textes européens et nationaux applicables en matière de sécurité alimentaire et d'étiquetage des produits que la fixation d'une DLC relève de la compétence des exploitants , qui sont responsables de la sécurité des aliments mis sur le marché, à partir d'une analyse de risques effectuée sur les produits.
Plusieurs textes européens fixent les principes généraux sur ces questions. Le règlement (CE) n°178/2002 20 ( * ) prévoit en son article 14 qu'aucune denrée alimentaire ne peut être mise sur le marché si elle est dangereuse, condition réalisée lorsque cette denrée est considérée comme préjudiciable à la santé. Son article 17 dispose que le respect des prescriptions de la législation alimentaire relève de la responsabilité des exploitants du secteur alimentaire . L'article 1 er du règlement (CE) n°825-2004 21 ( * ) précise que « la responsabilité première en matière de sécurité alimentaire incombe à l'exploitant du secteur alimentaire ». Enfin, en application des articles 3 et 10 de la directive européenne 2000/13/CE 22 ( * ) , une DLC doit être définie pour les denrées alimentaires microbiologiquement très périssables .
Par transposition, l'article R. 112-22 du code de la consommation prévoit que l'inscription d'une DLC sur l'étiquetage des denrées microbiologiquement très périssables relève de la responsabilité du conditionneur.
Les exploitants doivent ainsi démontrer la durabilité des produits pour lesquels ils ont déterminé une DLC, notamment en effectuant des études de validation et en mettant en place des procédures de vérification. Ces analyses de risques doivent tenir compte des conditions de conservation attendues par le fabricant, des risques de rupture de la chaîne du froid , notamment lorsque les produits doivent être acheminés sur une longue distance jusqu'à leur lieu de commercialisation, et de l'utilisation prévisible qui en sera faite par le consommateur.
b) La réglementation n'autorise en aucune manière la fixation d'une double DLC pour un même produit selon le lieu de sa commercialisation
Pour autant, la compétence accordée aux exploitants pour fixer la durée de vie des produits très périssables ne leur laisse pas une totale liberté en la matière et ne les autorise pas à reporter la DLC d'un même produit selon son lieu de commercialisation. L'obligation de fixation d'une DLC poursuit en effet un objectif sanitaire et doit être comprise comme découlant des résultats des analyses de risques effectuées par les industriels.
La commercialisation outre-mer de denrées alimentaires fabriquées en France hexagonale emporte des risques spécifiques liés au transport (rupture de la chaîne du froid) et au climat des territoires de destination. Elle pourrait donc, en sens inverse des pratiques de certains industriels, justifier une diminution du délai de durabilité des produits par rapport à celui défini pour les mêmes produits destinés à être commercialisés en France hexagonale.
Il faut donc considérer que, dans le cas des pratiques de double DLC constatées sur le terrain, la date figurant sur l'emballage des produits très périssables ne constitue pas une DLC au sens de la réglementation en vigueur , mais une simple indication commerciale variant selon les marchés de destination des produits considérés. Le report de la DLC permet de commercialiser dans les territoires ultramarins des denrées produites en France hexagonale et qui doivent être acheminées en outre-mer par bateau.
La pratique de la double DLC implique donc que l'une des deux dates apposées sur l'emballage d'un même produit n'est pas justifiée et n'est pas conforme à la réglementation. S'il n'existe à ce jour aucune étude permettant de démontrer un risque sanitaire lié à la prolongation du délai de consommation d'un produit très périssable, il revient cependant au législateur de mettre fin à une inégalité choquante préjudiciable si ce n'est à la santé des consommateurs ultramarins, du moins à leur information.
II. LES PREMIERES REPONSES APPORTEES SE REVELENT POUR L'HEURE INSUFFISANTES
A. LES RESULTATS DECEVANTS DES PLANS DE SANTÉ PUBLIQUE VISANT A LA PROMOTION D'UNE ALIMENTATION EQUILIBREE ET A LA LUTTE CONTRE L'OBÉSITÉ
1. La France s'est dotée de plusieurs outils visant à améliorer l'état nutritionnel de la population
A partir de la constatation que les déséquilibres nutritionnels exercent une influence importante sur le développement de pathologies telles que l'obésité, les maladies cardiovasculaires ou le diabète, un plan de santé publique visant à améliorer l'état de santé de la population en agissant sur l'alimentation, le plan national nutrition santé (PNNS), a été mis en place en 2001. Ce programme, dont le principe est inscrit à l'article L. 3231-1 du code de la santé publique, définit pour une période de cinq ans des principes à respecter, des objectifs à atteindre et des actions à mettre en oeuvre. Le PNNS est complété depuis 2010 par un plan obésité . Sont actuellement mis en oeuvre le PNNS 3 pour la période 2011- 2015 et le plan obésité pour la période 2010-2013.
L'orientation de ces programmes est déterminée à partir des objectifs nutritionnels de santé publique fixés par le Haut conseil de la santé publique, qui recouvrent notamment la réduction de la prévalence de l'obésité et du surpoids dans la population par leur stabilisation chez les adultes et leur diminution chez les enfants.
En raison de l'état de santé préoccupant des populations d'outre-mer mais aussi des particularités culturelles, économiques, climatiques et agricoles de ces territoires, ces plans de santé publique ont fait l'objet d'une déclinaison spécifique aux outre-mer lancée le 10 février 2012. Elaborée en concertation avec les représentants locaux de l'Etat, et notamment avec les Agences régionales de santé (ARS) et les directions de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (Daaf), cette déclinaison s'articule autour de trois axes communs à l'ensemble des départements d'outre-mer : améliorer l'offre alimentaire et favoriser la pratique de l'activité physique et sportive ; renforcer la surveillance de l'état nutritionnel et améliorer le dépistage et la prise en charge de l'obésité et des pathologies associées ; adapter la communication et renforcer l'éducation nutritionnelle. Ce cadre général est complété par des mesures spécifiques pour chacun des territoires concernés.
Un programme national pour l'alimentation , prévu par l'article L. 230-1 du code rural et de la pêche maritime, a par ailleurs été présenté en septembre 2010. Ce programme se donne notamment pour objectif de développer une offre alimentaire de qualité, ce qui passe par exemple par le développement des circuits courts .
2. Les imperfections de ces programmes n'ont pas permis d'observer les résultats escomptés
Une évaluation du PNNS 2 (2006-2010) a été conjointement menée en 2010 par l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) et par le Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAER). Le rapport rendu à cette occasion, après avoir affirmé qu'il est souhaitable d'assurer la pérennisation du PNNS dans la mesure où il satisfait à l'objectif de promotion des bons comportements alimentaires, déplore que les avancées demeurent très insuffisantes s'agissant de certains enjeux de santé publique, et notamment de la prévention et de la prise en charge de l'obésité . Selon l'enquête ObEpi en effet, la prévalence de l'obésité dans la population adulte a progressé de 50 % sur la période 2000-2009, passant de 10 % à 14,5 %, alors que le plan s'était donné pour objectif de réduire de 20 % la prévalence du surpoids et de l'obésité chez les adultes.
Ainsi, « la lenteur des effets de la prévention à l'égard de l'évolution de l'obésité [...] impose une réflexion sur la méthode jusqu'à présent utilisée, reposant pour l'essentiel sur les mesures contenues dans le PNNS, pour stopper l'aggravation de sa prévalence ».
La déclinaison du PNNS dans les départements d'outre-mer s'est traduite par la mise en place d'actions locales ponctuelles qui ont également fait l'objet d'évaluations. Le programme interrégional nutrition santé (PINS) « Les écoles Carambole » a ainsi été évalué en collaboration entre les observatoires régionaux de santé (ORS) de Guadeloupe, de Martinique et de Guyane. Ce programme, qui a bénéficié entre 2005 et 2008 à plus de 3 400 élèves dans trois communes de Guadeloupe, de Guyane et de Martinique, s'était donné pour objectifs de réduire la prévalence du surpoids et de l'obésité chez ces enfants, d'augmenter leur activité physique, de réduire dans leur consommation la part des produits riches en glucides simples ajoutés et d'augmenter celle de fruits et d'eau. Si l'objectif initial d'une réduction de 10 % de la surcharge pondérale des enfants n'a pas été atteint , leur situation sanitaire ne s'est cependant pas dégradée puisque leur surcharge pondérale n'a pas connu d'évolution.
Au total, si les initiatives qui visent à modifier en profondeur les habitudes alimentaires et les modes de vie des populations ne peuvent par définition produire immédiatement leurs effets, le PNNS, le plan obésité et leurs déclinaisons locales semblent aujourd'hui impuissants à enrayer la progression dramatique des affections chroniques non transmissibles dans les territoires ultramarins .
B. LENTEUR ET FAIBLE PORTEE DES ENGAGEMENTS VOLONTAIRES DES INDUSTRIELS A AMELIORER LA QUALITE NUTRITIONNELLE DE LEURS PRODUITS
La possibilité de signer des chartes d'engagement de progrès nutritionnels a été introduite par le PNNS 2 2006-2010. Venant en complément des autres mesures du PNNS et notamment des actions d'information des consommateurs, elles doivent permettre de définir des engagements volontaires de progrès nutritionnels sur la base d'objectifs précis, chiffrés, datés et contrôlables afin d'atteindre les objectifs du PNNS et de la loi de santé publique de 2004. Si les actions et les niveaux d'engagement mis en oeuvre sont librement choisis par les opérateurs économiques demandeurs, la validité des chartes et notamment leur efficacité escomptée doit recueillir l'avis d'un comité d'experts. Celui-ci veille à ce que les mesures proposées soient conformes à un référentiel fondé notamment sur les principes généraux et les objectifs prioritaires du PNNS. Le suivi de la préparation de ces engagements, de leur mise en oeuvre et la mesure de leurs résultats sont assurés par l'Observatoire de la qualité alimentaire (Oqali) créé en 2008. Au total, il s'agit non pas de confier une mission de santé publique aux opérateurs de l'agroalimentaire, mais d'instaurer une démarche d'exemplarité tout en valorisant la concertation entre les acteurs.
Des accords collectifs sont également prévus par le programme national pour l'alimentation dans le but d'associer un grand nombre d'opérateurs et d'accroître ainsi les effets des engagements pris sur la santé publique.
La déclinaison du PNNS 2011-2015 en direction des populations d'outre-mer prévoit une action de promotion des chartes d'engagement de progrès nutritionnels et des accords collectifs, afin de « faire en sorte que, pour une gamme comparable de produits, la teneur moyenne en sucre soit identique dans les territoires d'outre-mer et en métropole » (axe 1, mesure 1, action 1).
Dès 2011, plusieurs ARS d'outre-mer, à la demande de la direction générale de la santé, ont établi un dialogue avec les professionnels de l'industrie agroalimentaire dans le but d'évaluer l'opportunité de négocier et de mettre en place des chartes d'engagements de progrès nutritionnels. A ce jour, deux chartes seulement ont été signées dans ce cadre, dont une seule ayant pour objectif la réduction de la teneur en sucres des aliments distribués dans les outre-mer. Le mouvement volontaire des industriels pour diminuer la teneur en sucres de leur production demeure donc très lent.
Cette charte, signée par le groupe Socrema, concerne certains yaourts et spécialités laitières contenant des sucres ajoutés de la marque Yoplait (76 % des volumes fabriqués par la Socrema) ainsi que l'ensemble des boissons aux fruits de la marque Caresse antillaise fabriquées et commercialisées par le groupe en Guadeloupe. Elle fixe un engagement de 5 % à 16 % de réduction de la teneur en sucres ajoutés des références concernées, dans la perspective de parvenir à « un alignement progressif au taux de sucre ajouté trouvé dans les produits laitiers Yoplait équivalents fabriqués en métropole ».
D'une manière générale, selon l'évaluation du PNNS 2 conjointement réalisée par l'Igas et le CGAER, seul un faible nombre de chartes d'engagement de produits nutritionnels ont été signées avec les acteurs économiques dans le but de les inciter à améliorer la qualité nutritionnelle de leurs offres, et celles qui ont été conclues l'ont été en majorité avec de grandes entreprises de l'agroalimentaire 23 ( * ) . Ce faible succès doit dès lors conduire à s'interroger sur « la méthode utilisée dans la mise en oeuvre de ce concept de charte, qui devrait être améliorée afin de permettre l'aboutissement des démarches collectives d'industriels [...] ».
III. LES REPONSES DE LA PROPOSITION DE LOI POUR FAVORISER L'EGALITE ENTRE LES CONSOMMATEURS QUANT À LA QUALITE DE L'OFFRE ALIMENTAIRE
A. LUTTER CONTRE L'UTILISATION EXCESSIVE DE SUCRES AJOUTES DANS LES PRODUITS COMMERCIALISES EN OUTRE-MER
1. La limitation du taux de sucres contenu dans les produits de consommation courante, une recommandation largement partagée
Plusieurs organismes ont émis des recommandations concordantes quant à la diminution de la consommation journalière de sucres .
Un rapport publié en 2003 24 ( * ) par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et l'organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) indique ainsi parmi les objectifs nutritionnels définis pour la population que la ration calorique journalière doit comprendre moins de 10 % de sucres libres 25 ( * ) . Cet objectif est repris par le plan d'action 2008-2013 de l'OMS pour la Stratégie mondiale de lutte contre les maladies non transmissibles.
Dans son rapport précité de 2004, l'Afssa recommande également de modérer la consommation de glucides simples en veillant à limiter la taille des portions qui les apportent. L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), qui a succédé à l'Afssa, préconise une modification des apports en glucides en privilégiant les glucides complexes et en réduisant de 25 % la consommation de glucides simples, notamment de glucides simples ajoutés.
Afin d'assurer le respect de ces recommandations, les Etats doivent envisager de mettre en place des politiques visant à aider les populations à adopter une alimentation plus saine, selon la Stratégie mondiale de 2004 pour l'alimentation, l'exercice physique et la santé de l'OMS. Il apparaît ainsi nécessaire de promouvoir « la mise au point de produits contribuant à une alimentation plus saine et conformes aux recommandations diététiques nationales ou internationales ». Les pouvoirs publics pourraient ainsi envisager d'adopter des mesures pour « réduire [...] la teneur en sucre des boissons et en-cas sucrés » .
L'INVS, dans son enquête précédemment citée consacrée à la prévalence du diabète dans la population française 26 ( * ) , préconise également une maîtrise de l'offre alimentaire .
2. La fixation d'une teneur maximale en sucres ajoutés pour les produits distribués sur le marché ultramarin
L'article 1 er de la proposition de loi vise à réduire le taux de sucres présents dans les produits distribués dans les outre-mer en fixant pour ces produits une teneur maximale en sucres ajoutés.
a) Un large champ d'application
L'article 1 er de la proposition de loi vise deux catégories de denrées alimentaires de consommation courante destinées au consommateur final :
- les denrées alimentaires de consommation courante pour lesquelles il existe une denrée similaire de la même marque distribuée en France hexagonale ;
- les denrées alimentaires de consommation courante distribuées dans les outre-mer mais non distribuées par les mêmes enseignes en France hexagonale .
Cette rédaction permet de couvrir, dans le premier cas, les denrées qui, au sein d'une même marque, sont équivalentes sans être strictement identiques, c'est-à-dire les denrées qui ne différeraient que par des aspects minimes de leur conditionnement ou de leur présentation. Elle permet également de prendre en compte, dans le deuxième cas, les denrées exclusivement distribuées dans les outre-mer.
Pour ces deux catégories de denrées, une teneur maximale en sucres ajoutés est fixée par référence à des denrées équivalentes ou comparables distribuées dans l'hexagone. Dans le premier cas, le plafond est fixé par rapport à la teneur en sucres d'une denrée similaire de même marque distribuée en France hexagonale. Dans le deuxième cas, il est déterminé par référence à la teneur en sucres ajoutés la plus élevée constatée dans les denrées alimentaires assimilables de la même famille les plus distribuées en France hexagonale.
L'article 1 er vise la teneur en sucres ajoutés des denrées alimentaires, et non pas leur teneur totale en sucres. Cette rédaction est conforme aux recommandations précitées de l'Anses, qui préconise une réduction de 25 % de la consommation de glucides simples, notamment de glucides simples ajoutés. Cette rédaction permet en outre de prendre en compte les spécificités précédemment évoquées de la fabrication de produits laitiers frais en outre-mer , notamment l'utilisation importante de poudre de lait qui contient davantage de lactose.
Le champ géographique d'application de cet article recouvre les collectivités mentionnées à l'article 73 de la Constitution, c'est-à-dire les départements et régions d'outre-mer ( la Guadeloupe , la Martinique , La Réunion , la Guyane et Mayotte ), ainsi que les collectivités de Saint-Barthélemy , Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon , qui relèvent de l'article 74 de la Constitution.
b) Des modalités de contrôle qui pourraient entraver la pleine application du dispositif
Le contrôle de l'application des dispositions de l'article 1 er est confié aux agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), aux agents de la direction des douanes et à ceux de la direction générale des finances publiques (DGFip).
Un tel contrôle nécessite un important travail de recensement, de comparaison et surtout d'actualisation de la teneur en sucres ajoutés des très nombreuses références de denrées alimentaires distribuées sur les marchés hexagonal et ultramarin. Or, les moyens de la DGCCRF ont été sensiblement réduits dans le cadre de la révision générale des politiques publique (RGPP) et de la réforme de l'administration territoriale de l'Etat (RéATE). Si un contrôle des manquements aux dispositions de l'article 1 er est indispensable pour assurer la bonne application de la loi, il n'est pas certain qu'il puisse être mené à bien dans les conditions de travail actuelles de cette direction et au regard du champ des produits concernés et des analyses complexes à réaliser.
B. INTERDIRE L'UTILISATION DE DATES LIMITES DE CONSOMMATION SPECIFIQUES AUX PRODUITS DISTRIBUES EN OUTRE-MER POUR DES RAISONS UNIQUEMENT COMMERCIALES
L'article 2 de la proposition de loi vise à mettre fin à l'inégalité qui touche les consommateurs d'outre-mer s'agissant des modalités de détermination de la date limite de consommation (DLC). Il prévoit que, lorsqu'une date indiquant le délai dans lequel une denrée alimentaire doit être consommée est apposée sur l'emballage de celle-ci, ce délai ne peut pas être plus long lorsque cette denrée est distribuée en outre-mer que pour la même denrée de même marque distribuée en France hexagonale.
Le texte de cet article mentionne « une date indiquant le délai dans lequel une denrée alimentaire doit être consommée ». Cette rédaction vise les dates limites de consommation (DLC) au sens de la directive 2000/13/CE et de l'article R. 112-22 du code de la consommation, c'est-à-dire les dates apposées sur l'étiquetage des denrées microbiologiquement très périssables , et non les dates limites d'utilisation optimale (DLUO) 27 ( * ) .
Cette disposition ne vise qu'à établir un principe d'égalité entre les consommateurs hexagonaux et ultramarins. Les industriels conservent donc la responsabilité de déterminer la DLC de leurs produits en fonction des analyses de risque qu'ils conduisent. Une DLC différenciée pourra être définie dans le seul cas où, en raison de la mise au jour par une analyse scientifique d'un risque particulier de dégradation, notamment en raison des conditions de transport, le délai de consommation sera réduit pour les produits ultramarins.
Le champ géographique d'application de cet article est le même que celui de l'article 1 er .
C. FAVORISER LES CIRCUITS COURTS ET LE DEVELOPPEMENT DE LA PRODUCTION LOCALE
1. L'importance de la restauration collective pour l'équilibre nutritionnel des populations et la situation de la production agricole locale justifient une intervention législative
L'amélioration de la qualité nutritionnelle de l'offre alimentaire en outre-mer passe également par celle des repas servis en restauration collective et par le développement des filières agricoles locales.
Les repas pris en restauration collective revêtent en effet une importance particulière pour l'équilibre nutritionnel des populations . Bien souvent, les repas pris en restauration collective constituent les seuls repas équilibrés consommés au cours d'une journée. En outre, le milieu scolaire et notamment ses structures de restauration constituent un lieu privilégié pour l'éducation nutritionnelle des enfants. Conformément aux recommandations du PNNS, des actions spécifiques d'information nutritionnelle sont régulièrement menées dans ce cadre.
Il semble donc légitime de favoriser l'utilisation de produits frais et de saison produits localement pour l'élaboration des repas de la restauration collective, dont la qualité nutritionnelle ne pourra ainsi qu'être améliorée.
En outre, l'utilisation de tels produits pourra permettre d' encourager le développement d'une offre alimentaire de proximité , qui permettra d'assurer un approvisionnement alimentaire durable, et de renforcer les filières agricoles locales . Celles-ci demeurent en effet encore peu développées , selon les indications figurant en annexe de la déclinaison du PNNS 2011-2015 et du plan obésité à destination des populations d'outre-mer.
Données sur les productions alimentaires locales en outre-mer
Guadeloupe |
Guyane |
La Réunion |
Martinique |
|
Filière fruits et légumes |
Sous-exploitée notamment par manque d'organisation |
Dominante (81 % de la production végétale) ; autosuffisance en fruits et légumes (couverture d'environ 80 % par la production locale - ODEADOM) ; forte concurrence par des importations illégales provenant du Surinam) |
1/3 de la production agricole locale (satisfait à 80 % des besoins locaux) |
En cours de structuration, faible couverture de la demande locale |
Filière animale (viande et produits transformés) |
10 à 62 % de couverture ; viande bovine 13 % ; viande de porc : 95 % de la consommation de viande fraîche |
De 6 % (filière avicole) à 50 % (viande de porc fraîche) de couverture des besoins Fort potentiel de développement des zones de pâturage pour de l'élevage extensif ou semi-extensif Forte concurrence de la viande d'importation |
30 % de couverture ; en moyenne viande 39 % et oeufs 100 % |
25 % de couverture ; en moyenne viande bovine 13 % ; viande de porc : 95 % de la consommation de viande fraîche |
Source : PNNS 2011-2015 et plan obésité à destination des populations d'outre-mer
La situation de la production agricole dans les outre-mer justifie d'ailleurs l'éligibilité des Dom à la politique européenne de développement rural , conduite à travers le fonds européen agricole pour le développement rural (Feader), pour un montant de 631 millions sur la période 2007-2013.
2. La promotion des denrées alimentaires issues des circuits courts de distribution dans le cadre des marchés publics de restauration collective en outre-mer
L'article 4 de la proposition de loi tend à rendre obligatoire pour l'attribution des marchés publics de restauration collective la prise en compte du critère des performances en matière de développement des approvisionnements directs des produits de l'agriculture .
Le champ géographique d'application de cet article est identique à celui des articles 1 et 3.
• La prise en compte de ce critère par les pouvoirs adjudicateurs est déjà possible en application du code des marchés publics.
Ce critère figure déjà à l'article 53 du code des marchés publics (CMP) où il a été introduit par un décret du 25 août 2011. Cette modification faisait suite à la loi dite « Grenelle I » du 3 août 2009 28 ( * ) , par laquelle l'Etat s'est fixé des objectifs quantitatifs pour l'approvisionnement de ses services de restauration collective en produits saisonniers, à faible impact environnemental, bénéficiant de signes d'identification de la qualité ou de l'origine ou issus d'exploitations engagées dans une démarche de certification environnementale, et à la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche (LMAP) du 27 juillet 2010 29 ( * ) . Celle-ci a ajouté à cette liste les « produits faisant l'objet de circuits courts de distribution, impliquant un exploitant agricole ou une organisation regroupant des exploitants agricoles ».
Conformément à l'article 47 de la directive 2009/81/CE 30 ( * ) , l'article 53 du CMP prévoit que le pouvoir adjudicateur peut se fonder, pour attribuer un marché public, sur différentes combinaisons de critères :
- soit sur le seul critère du prix ;
- soit sur une pluralité de critères non discriminatoires et liés à l'objet du marché . L'article 53 développe à ce titre une liste non exhaustive de critères, parmi lesquels figurent « les performances en matière de développement des approvisionnements directs de produits de l'agriculture ».
Dans le second cas, l'offre économiquement la plus avantageuse est évaluée globalement, au regard d'un faisceau de critères dont la pondération est précisée par le pouvoir adjudicateur dans l'avis d'appel public à la concurrence ou dans les documents de consultation. La détermination et les modalités de cette pondération, qui affecte un coefficient chiffré à chacun des critères pris en compte, relèvent de la liberté de l'acheteur.
Signalons ici que l'intervention du législateur dans le champ d'application du CMP, qui est habituellement régi par des dispositions réglementaires, n'est pas exclue et connaît un précédent.
Le Conseil constitutionnel a ainsi considéré, dans sa décision n° 2002-460 DC du 22 août 2002, que « ni l'article 34 de la Constitution, ni aucune autre règle de valeur constitutionnelle n'exige que les conditions de passation des marchés et contrats passés par l'Etat soient définies par la loi ».
La nature réglementaire du CMP résulte en fait d'une délégation confiée par le Parlement au pouvoir exécutif. Pour les marchés de services, cette habilitation résulte d'un décret-loi du 12 novembre 1938, pris sur le fondement d'une loi du 5 octobre 1938. Si le Conseil d'Etat a jugé à plusieurs reprises que cette délégation faite au pouvoir exécutif continue de produire ses effets 31 ( * ) , rien n'interdit au législateur de reprendre ponctuellement sa compétence en la matière . Par l'article 118 de la loi n° 2012-397 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allègement des démarches administratives, il a ainsi rehaussé le seuil minimal de mise en concurrence de 4 000 à 15 000 euros.
• Une certaine prudence s'impose quant à l'application de l'article 4, qui pourrait créer les conditions d'une insécurité juridique des marchés publics de restauration collective.
L'obligation pour les pouvoirs adjudicateurs de prendre en compte le critère de la performance en matière d'approvisionnements directs de produits de l'agriculture fait disparaître la possibilité pour les acheteurs de ne s'appuyer que sur le seul critère du prix . L'article 4 de la proposition de loi peut apparaître comme une « sur-transposition » des directives 2004/17/CE et 2004/18/CE relatives à la coordination des procédures de passation des marchés, qui laissent aux pouvoirs adjudicateurs le libre choix des critères d'attribution.
Alors que le droit de la commande publique fait l'objet d'une réglementation particulièrement stricte émanant largement du droit de l'Union européenne, l'introduction d'une nouvelle contrainte pour la passation des marchés publics de restauration collective, qui pourrait être largement utilisée par des candidats évincés, crée un risque contentieux dont la portée n'est pas négligeable, notamment pour les collectivités territoriales.
*
* *
Réunie le mercredi 15 mai, sous la présidence d'Annie David, présidente, la commission des affaires sociales a adopté le texte de la proposition de loi sans modification .
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er (art. L. 3232-5, L. 3232-6 et L. 3232-7 [nouveaux] du code de la santé publique) - Fixation d'une teneur maximale en sucres ajoutés pour les produits alimentaires distribués dans les outre-mer
Objet : Cet article vise à fixer une teneur maximale en sucres ajoutés pour les produits alimentaires distribués dans les outre-mer par référence à la teneur maximale constatée pour les produits équivalents ou comparables distribués dans l'hexagone.
I - Le dispositif proposé initialement
L'article 1 er de la proposition de loi tendait initialement à créer un unique article L. 3232-5 dans le code de la santé publique, aux termes duquel aucune denrée alimentaire de consommation courante destinée à être présentée au consommateur final ou aux collectivités dans les régions d'outre-mer ne pouvait contenir, à compter du 1 er janvier 2014, davantage de sucres que le produit similaire de même marque vendu en France hexagonale.
En outre, l'article 2 du texte initial prévoyait qu'un arrêté du ministre chargé de la santé fixe, après avis du Haut Conseil, la liste des denrées alimentaires de consommation courante soumises à une teneur maximale en sucre et les teneurs y afférentes.
II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a procédé à une réorganisation globale de cet article, en y intégrant les dispositions initialement prévues par l'article 2, afin de préciser sa portée et de le rendre plus lisible.
L'article 1 er de la proposition de loi crée désormais trois nouveaux articles au sein du livre II bis de la troisième partie du code de la santé publique relative à la lutte contre les maladies et dépendances, à la fin du chapitre II du titre unique de ce livre intitulé « Nutrition et santé ».
• L'Assemblée nationale a tout d'abord
précisé
la nature des sucres
concernés
par la fixation d'un plafond.
Est désormais visée la teneur en sucres ajoutés des denrées alimentaires, et non plus leur teneur totale en sucres. Cette rédaction est conforme aux recommandations de l'Anses, qui préconise une réduction de 25 % la consommation de glucides simples, notamment de glucides simples ajoutés .
Cette modification visait en outre à prendre en compte les spécificités de la production de produits laitiers frais en outre-mer . En raison de l'absence d'une filière laitière autosuffisante, les industries de produits laitiers doivent travailler à partir de poudre de lait. Ce procédé de fabrication nécessite d'utiliser une quantité de matière première qui contient davantage de lactose, sucre naturellement présent dans le lait , que le lait frais. Le taux de sucres présent dans le produit final se trouve ainsi mécaniquement augmenté par rapport au taux présent dans les produits fabriqués à partir de lait frais. Le lactose présente cependant un faible indice glycémique.
• L'Assemblée nationale a ensuite
précisé le champ des produits alimentaires
visés
.
La notion de denrée alimentaire est définie à l'article 2 du règlement (CE) n° 178/2002 établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire 32 ( * ) , selon lequel constitue une denrée alimentaire « toute substance ou produit, transformé, partiellement transformé ou non transformé, destiné à être ingéré ou raisonnablement susceptible d'être ingéré par l'être humain. Ce terme recouvre les boissons, les gommes à mâcher et toute substance, y compris l'eau, intégrée intentionnellement dans les denrées alimentaires au cours de leur fabrication, de leur préparation ou de leur traitement. ». Au sens de l'article R. 112-1 du code de la consommation, la notion recouvre « toute denrée, produit ou boisson destiné à l'alimentation de l'homme ».
En l'absence de certitude scientifique sur l'existence d'une teneur maximale fixe souhaitable, la teneur maximale en sucres ajoutés est déterminée par référence à des denrées équivalentes ou comparables distribuées dans l'hexagone .
- En ce qui concerne les denrées alimentaires de consommation courante pour lesquelles il existe une denrée similaire de la même marque distribuée en France hexagonale , l'article L. 3232-5 du code de la santé publique fixe un plafond par référence à celle de cette denrée similaire. La notion de « denrée similaire de même marque » recouvre les denrées qui, au sein d'une même marque, sont équivalentes sans être strictement identiques, ce qui permet de prendre en compte les denrées qui ne différeraient que par des aspects minimes de leur conditionnement ou de leur présentation.
- En ce qui concerne les denrées alimentaires de consommation courante distribuées dans les outre-mer mais non distribuées par les mêmes enseignes en France hexagonale , l'article L. 3232-6 du code de la santé publique fixe un plafond par référence à la teneur en sucres ajoutés la plus élevée constatée dans les denrées alimentaires assimilables de la même famille les plus distribuées en France hexagonale. La liste de ces denrées exclusivement distribuées en outre-mer est déterminée par un arrêté des ministres chargés de la santé, de l'agriculture, de la consommation et des outre-mer .
• L'Assemblée nationale a également
précisé
le champ géographique d'application
du texte.
Alors que le texte initial de la proposition de loi visait les « régions d'outre-mer », l'Assemblée nationale a précisé que l'article 1 er s'applique dans les collectivités mentionnées à l'article 73 de la Constitution, c'est-à-dire les départements et régions d'outre-mer ( la Guadeloupe , la Martinique , La Réunion , la Guyane et Mayotte ), ainsi qu'à Saint-Barthélemy , Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon , qui relèvent de l'article 74 de la Constitution.
La proposition de loi ne s'applique donc pas aux autres collectivités de l'article 74, la Polynésie française et les îles Wallis et Futuna, à la Nouvelle-Calédonie, qui relève du titre XIII de la Constitution, aux Terres australes et antarctiques françaises (Taaf) et à Clipperton.
• L'Assemblée nationale a introduit
une période d'adaptation
dans le cas où la
teneur en sucres des denrées commercialisées dans l'hexagone
diminue.
Afin de permettre aux opérateurs d'écouler leurs stocks, une période d'adaptation d'une durée de six mois est prévue lorsque la teneur en sucres ajoutés des produits distribués dans l'hexagone diminue.
• L'Assemblée nationale a enfin prévu
un contrôle des infractions
aux dispositions de
l'article 1
er
.
Un nouvel article L. 3232-7 du code de la santé publique habilite les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), les agents de la direction des douanes et ceux de la direction générale des finances publiques (DGFip) à contrôler les manquements aux dispositions des articles L. 3232-5 et L. 3232-6 du code de la santé publique.
III - Le texte adopté par la commission
En visant à réduire le taux de sucres présents dans les produits distribués dans les outre-mer, l'article 1 er de la proposition de loi répond à un double objectif . Il s'agit tout d'abord de protéger la santé des populations ultramarines , parmi lesquelles la prévalence de l'obésité est sensiblement supérieure à celle observée dans l'hexagone, dans la mesure où il est établi que la consommation excessive de sucres peut favoriser le surpoids et l'obésité ainsi que certaines pathologies associées comme le diabète et les affections cardiovasculaires. Il s'agit ensuite d'assurer l'égalité d'accès à une alimentation saine entre consommateurs hexagonaux et consommateurs ultramarins.
Par ailleurs, la fixation d'une teneur maximale en sucres ajoutés par référence à des produits équivalents vendus dans l'hexagone ne constitue ni une entrave aux échanges ni une distorsion de concurrence.
Compatibilité de la fixation d'une teneur
maximale en sucres ajoutés
I. La poursuite d'un objectif de protection de la santé publique permet de déroger aux principes de liberté des échanges commerciaux Si les mesures de restriction de la liberté des échanges sont en principe prohibées tant par les traités internationaux que par le droit de l'Union européenne et le droit national, la protection de la santé des personnes figure parmi les intérêts autorisant une dérogation aux principes de libre circulation des marchandises, de liberté du commerce et de l'industrie et de liberté d'entreprendre, sous réserve de procédures de notification préalables. 1) Les dérogations au régime des obstacles techniques au commerce (OTC) dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) L'accord de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) sur les obstacles techniques au commerce (OTC) vise à empêcher que les règlements techniques, les normes volontaires et les procédures d'essai et d'homologation en vigueur dans le cadre d'un Etat membre ne créent des obstacles non nécessaires au commerce. Il reconnaît cependant aux Etats la possibilité d'adopter des mesures répondant à certains objectifs légitimes tels que la protection de la santé et de la vie des personnes ou la préservation de l'environnement. En application des accords de l'OMC, ces exceptions ne doivent pas avoir un effet plus restrictif que nécessaire sur le commerce . La proportionnalité des mesures adoptées est notamment évaluée au regard de l'importance des intérêts qu'elles protègent, étant entendu que l'OMC a affirmé, dans le cadre d'une affaire concernant les mesures prises par la France pour interdire l'amiante et les produits en contenant, que la santé des personnes était « importante au plus haut point » 33 ( * ) . 2) Les exceptions au principe de libre circulation des marchandises en droit européen Le principe d'interdiction des réglementations nationales susceptibles d'entraver la libre circulation des produits La libre circulation des marchandises , qui constitue l'une des quatre libertés fondamentales du marché intérieur européen , est garantie par les articles 28 à 37 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). Elle repose sur la suppression des droits de douane entre Etats membres, sur l'interdiction des restrictions quantitatives aux échanges ainsi que des mesures d'effet équivalent, sur le principe de reconnaissance mutuelle, sur l'élimination des barrières physiques et techniques et sur le développement de la normalisation au niveau européen. En application de ce principe, toute réglementation commerciale des Etats membres susceptible d'entraver, directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement, le commerce entre les Etats membres de l'Union européenne constitue, selon l'arrêt Dassonville du 11 juillet 1974, une mesure d'effet équivalant à une restriction quantitative . Outre l'interdiction de telles mesures, les Etats membres doivent également respecter le principe de reconnaissance mutuelle dégagé par la décision Cassis de Dijon du 20 février 1979 afin de pallier l'absence d'harmonisation européenne des réglementations techniques. Selon ce principe, les Etats membres doivent admettre sur leur marché tout produit légalement fabriqué et commercialisé dans un autre Etat membre conformément à la réglementation et aux procédés de fabrication loyaux et traditionnels de ce pays. Dans le but d'éviter l'apparition d'entraves nouvelles au commerce entre Etats membres de l'UE, une procédure de notification est prévue par la directive 98/34 du 22 juin 1998. Les Etats membres sont ainsi tenus d'informer la Commission et les autres Etats membres de tout projet de règle technique relatif aux produits avant son adoption en droit national, ainsi que des raisons qui le justifient. La protection de la santé constitue un motif de dérogation à l'interdiction des mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives L'article 36 du TFUE permet cependant aux Etats membres de prendre des mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives lorsqu'elles sont justifiées par un motif d'intérêt général non économique , tels que la moralité publique, l'ordre public, la sécurité publique, la protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux, la préservation des végétaux, la protection des trésors nationaux et la protection de la propriété industrielle et commerciale. Cette possibilité de dérogation, contrôlée par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), est d'interprétation stricte. Les mesures nationales prises en application d'une de ces exceptions doivent être en rapport direct avec l'intérêt général à protéger et respecter le principe de proportionnalité , et ne peuvent être justifiées lorsqu'une réglementation communautaire a été prise dans le même domaine. Elles ne doivent ainsi constituer ni un moyen de discrimination arbitraire, ni une restriction déguisée au commerce entre Etats membres. La protection de la santé et de la vie des hommes constitue un motif fréquemment pris en compte par la CJUE pour justifier une dérogation au principe de libre circulation des marchandises. Dans un arrêt De Peijper de 1976, celle-ci a ainsi considéré que « parmi les biens ou intérêts protégés par l'article [36 du TFUE], la santé et la vie des personnes occupent le premier rang ». 3) La possibilité pour le législateur de limiter les principes de liberté d'entreprendre et de liberté du commerce et de l'industrie pour un motif de protection de la santé publique en droit français Par un considérant de principe, le Conseil constitutionnel a jugé à plusieurs reprises qu'il était possible au législateur « d'apporter à la liberté d'entreprendre, qui découle de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général , à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi » 34 ( * ) . Il ne fait pas de doute que la protection de la santé des personnes, citée au onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, constitue un motif d'intérêt général. Le juge des référés du Conseil d'Etat a par ailleurs reconnu que la liberté d'entreprendre, liberté fondamentale au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative (CJA), s'exerce dans le cadre des limites fixées par la loi , spécialement lorsque les prescriptions qui lui sont légalement imposées « poursuivent une exigence aussi impérieuse que la protection de la santé publique » 35 ( * ) . II. La dérogation prévue par l'article 1 er de la proposition de loi présente un caractère proportionné et non discriminatoire Une intervention législative visant à limiter le taux de sucres ajoutés dans les produits commercialisés en outre-mer constitue une réponse adaptée à l'objectif de protection de la santé des personnes demeurant sur ces territoires. Alors que les chiffres relatifs à l'état de santé des populations ultramarines, parmi lesquelles la prévalence de l'obésité et des pathologies associées tels que le diabète ou les maladies cardiovasculaires est particulièrement forte, sont très alarmants, plusieurs études ont mis en évidence un lien de causalité entre une consommation excessive de sucres et le développement de ces pathologies . Le recours à la loi apparaît nécessaire dans la mesure où les actions concertées menées en partenariat avec les industriels dans le but de diminuer la teneur en sucres des denrées commercialisées sur ces territoires sont insuffisantes à répondre au problème de manière rapide et durable . En tout état de cause, l'article 1 er de la proposition de loi n'interdit pas aux industriels de distribuer leurs produits sur les territoires visés , mais leur impose seulement de mettre fin à la différenciation des recettes destinées aux marchés hexagonal et ultramarin.
L'alignement de la teneur en sucres ajoutés
prévu par l'article 1
er
de la proposition de loi vise
à la fois les denrées similaires et de même marque
distribuées en outre-mer et dans l'hexagone (article L. 3232-5 du
code de la santé publique) et les denrées alimentaires
exclusivement distribuées dans les outre-mer et assimilables aux
denrées alimentaires de la même famille distribuées dans
l'hexagone (article L. 3232-6 du code de la santé publique).
Aucune différence de traitement n'est donc instituée
entre les producteurs, ni en raison de l'origine de leurs produits, ni selon le
lieu de leur commercialisation
. La proposition de loi ne vise donc pas
à mettre en oeuvre des mesures discriminatoires mais tend au contraire
à
mettre fin à une inégalité de traitement
entre les consommateurs
hexagonaux et ultramarins.
|
La commission a adopté cet article sans modification.
Article 2 - Délai d'application des dispositions relatives à la fixation d'une teneur maximale en sucres ajoutés des produits alimentaires distribués dans les outre-mer
Objet : Cet article vise à aménager un délai de transition de six mois pour l'application de l'article 1 er de la proposition de loi.
I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale
Le texte originel de la proposition de loi prévoyait que le plafonnement de la teneur en sucres des produits alimentaires distribués dans les outre-mer devait entrer en vigueur au 1 er janvier 2014.
Lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale, cette date a été remplacée par un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi .
Ce délai de transition, qui doit permettre aux industriels d'adapter leur production aux nouvelles exigences, est apparu comme un délai raisonnable , de nature à permettre l'adaptation des recettes des produits concernés tout en garantissant le maintien de prix accessibles pour le consommateur.
II - Le texte adopté par la commission
La commission a adopté cet article sans modification.
Article 3 - Interdiction de la fixation de dates limites de consommation retardées pour les denrées alimentaires distribués dans les outre-mer
Objet : Cet article vise à interdire la fixation, pour une denrée alimentaire distribuée en outre-mer, d'une date limite de consommation emportant un délai de consommation plus long que le délai prévu pour la même denrée de même marque distribuée dans l'hexagone.
I - Le dispositif proposé adopté par l'Assemblée nationale
Cet article, qui a été ajouté au texte lors de son examen en commission des affaires sociales à l'Assemblée nationale, vise à mettre fin à l'inégalité qui touche les consommateurs d'outre-mer s'agissant des modalités de fixation de la date limite de consommation (DLC) apposée sur l'étiquetage de certaines denrées destinées au marché ultramarin.
Selon une étude de la Fédération des entreprises d'outre-mer (Fedom), quelques industriels apposent en effet sur certains de leurs produits microbiologiquement très périssables une DLC déterminant un délai de consommation plus long lorsque ces produits sont commercialisés en outre-mer. Au-delà de la question de l'égalité des consommateurs, cette pratique de la double DLC est contraire à l'esprit de la réglementation communautaire en la matière 36 ( * ) , qui repose sur un objectif de protection sanitaire, et pose problème du point de vue de l'information du consommateur .
Dans ces conditions, l'article 3 de la proposition de loi tend à prévoir que lorsqu'une date indiquant le délai dans lequel une denrée alimentaire doit être consommée est apposée sur l'emballage de celle-ci, ce délai ne peut être plus long lorsque cette denrée est distribuée en outre-mer que pour la même denrée de même marque distribuée en France hexagonale .
Le champ géographique de cet article est le même que celui de l'article 1 er : les départements et régions d'outre-mer (la Guadeloupe, la Martinique, La Réunion, la Guyane et Mayotte), Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.
II - Le texte adopté par la commission
Votre commission a estimé que la pratique de double DLC constitue une inégalité, dont aucune éventuelle motivation n'a de lien avec la santé publique.
Malgré une formulation peu précise, la rédaction de cet article, qui mentionne « une date indiquant le délai dans lequel une denrée alimentaire doit être consommée », entend viser les dates limites de consommation (DLC) au sens de la directive 2000/13/CE et de l'article R. 112-22 du code de la consommation, c'est-à-dire les dates apposées sur l'étiquetage des denrées microbiologiquement très périssables . Toutefois, pour lever toute ambiguïté, votre rapporteur interrogera le Gouvernement sur cette question en séance.
La commission a adopté cet article sans modification.
Article 4 - Promotion des approvisionnements directs de produits de l'agriculture dans l'attribution des marchés publics de restauration collective
Objet : Cet article vise à rendre obligatoire, pour l'attribution des marchés publics de restauration collective en outre-mer, le critère relatif aux performances en matière de développement des approvisionnements directs de produits de l'agriculture.
I - Le dispositif proposé
Cet article, qui a été ajouté au texte lors de son examen en commission des affaires sociales à l'Assemblée nationale, vise à la fois à promouvoir une meilleure qualité nutritionnelle de l'offre alimentaire en restauration collective, en favorisant l'approvisionnement de ces structures en produits frais et de saison, et à inciter au développement des filières agricoles locales , en encourageant le développement des circuits courts.
Pour ce faire, il tend à rendre obligatoire pour l'attribution des marchés publics de restauration collective la prise en compte du critère des performances en matière de développement des approvisionnements directs des produits de l'agriculture.
Le champ géographique de cet article est identique à celui des articles 1 et 2.
• La prise en compte de ce critère par les
pouvoirs adjudicateurs est déjà possible en application du code
des marchés publics
Ce critère figure déjà à l'article 53 du code des marchés publics (CMP) où il a été introduit par un décret du 25 août 2011. Cette modification faisait suite à la loi dite « Grenelle I » du 3 août 2009, par laquelle l'Etat s'est fixé des objectifs quantitatifs pour l'approvisionnement de ses services de restauration collective en produits saisonniers, à faible impact environnemental, bénéficiant de signes d'identification de la qualité ou de l'origine ou issus d'exploitation engagées dans une démarche de certification environnementale, et à la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche (LMAP) du 27 juillet 2010. Celle-ci a ajouté à cette liste « les produits faisant l'objet de circuits courts de distribution, impliquant un exploitant agricole ou une organisation regroupant des exploitants agricoles ».
L'article 53 du CMP prévoit que le pouvoir adjudicateur peut se fonder, pour attribuer un marché public, sur différentes combinaisons de critères :
- soit sur le seul critère du prix ;
- soit sur une pluralité de critères non discriminatoires et liés à l'objet du marché . L'article 53 développe à ce titre une liste non exhaustive de critères, parmi lesquels figurent « les performances en matière de développement des approvisionnements directs de produits de l'agriculture ».
Dans le second cas, l'offre économiquement la plus avantageuse est évaluée globalement, au regard d'un faisceau de critères dont la pondération est précisée par le pouvoir adjudicateur dans l'avis d'appel public à la concurrence ou dans les documents de consultation. La détermination et les modalités de cette pondération, qui affecte un coefficient chiffré à chacun des critères pris en compte, relèvent de la liberté de l'acheteur.
• Compatibilité de cet article avec les
principes de la commande publique
En application de l'article 1 er du CMP, les marchés publics doivent respecter les principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures. Ces principes existent également en droit de l'Union européenne et découlent notamment du principe de non-discrimination en raison de la nationalité 37 ( * ) . Par une décision n° 2003-476 DC du 26 juin 2003, le Conseil constitutionnel a consacré la valeur constitutionnelle de principes comparables.
Dans la mesure où la prise en compte du critère de la performance en matière de développement des approvisionnements directs des produits de l'agriculture doit être prévue dans l'appel public à la concurrence et dans les documents de consultation , le principe de transparence des procédures semble bien respecté par l'article 4 de la proposition de loi.
Le critère prévu ne paraît pas davantage contrevenir au principe de liberté d'accès à la commande publique. Selon une réponse ministérielle du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie publié au Journal officiel de l'Assemblée nationale du 15 novembre 2011, il permet de « privilégier les circuits courts , c'est-à-dire les approvisionnements auprès d'un producteur ou d'un intermédiaire, organisation de producteurs, coopérative agricole, ou négociant s'approvisionnant directement auprès des exploitants agricoles ». Pour autant, il ne s'agit pas d'un critère lié à l'implantation géographique des prestataires candidats , un tel critère étant interdit par le droit européen comme par le droit français des marchés publics 38 ( * ) . Les notions de circuit court et d'approvisionnement direct doivent en effet être entendues au sens relationnel et non au sens géographique.
Enfin, dans la mesure où le critère de l'article 4 fera l'objet d'une pondération librement déterminée par le pouvoir adjudicateur, le principe d'égalité de traitement des candidats n'est pas méconnu par la proposition de loi. Il est en effet possible qu'un marché public de restauration collective soit attribué à un candidat peu performant sur ce critère spécifique s'il se détache sur les autres critères retenus.
La pondération des critères permettra en outre aux acheteurs publics de conserver leur liberté quant aux critères qu'ils souhaitent prendre en compte pour l'attribution des marchés.
Pour autant, une certaine prudence s'impose quant à la sécurité juridique des marchés publics de restauration collective intégrant cette nouvelle contrainte, dans la mesure où le droit de la commande publique fait l'objet d'une réglementation particulièrement stricte émanant largement du droit de l'Union européenne.
Par ailleurs, l'objectif de développement des filières agricoles répond aux mêmes objectifs que la politique européenne de développement rural , conduite à travers le fonds européen agricole pour le développement rural (Feader), et à laquelle les départements d'outre-mer sont éligibles pour un montant de 631 millions sur la période 2007-2013.
II - Le texte adopté par la commission
La commission a adopté cet article sans modification.
TRAVAUX DE LA COMMISSION
Réunie le mercredi 15 mai 2013, sous la présidence de Mme Annie David, présidente, la commission examine le rapport de M. Michel Vergoz sur la proposition de loi n° 460 (2012-2013) visant à garantir la qualité de l'offre alimentaire en outre-mer.
M. Michel Vergoz , rapporteur. - Les consommateurs ultramarins sont frappés par une double inégalité quant à la qualité des produits alimentaires auxquels ils ont accès.
La première de ces inégalités concerne la teneur en sucres de certains produits. Plusieurs études conduites au cours de l'année 2011 à l'initiative des collectivités de Guadeloupe, de Martinique et de La Réunion ont permis de mettre en évidence la présence d'un taux de sucres sensiblement plus élevé dans les boissons sucrées rafraîchissantes et dans les produits laitiers commercialisés en outre-mer que dans les denrées similaires distribuées en France hexagonale. En Martinique, certains yaourts aux fruits produits localement contiennent ainsi de 27 % à 50 % de plus de sucres ajoutés que les spécialités comparables disponibles dans l'hexagone. A La Réunion, des écarts atteignant 47 % ont été relevés entre la teneur en glucides de boissons sucrées distribuées localement et des boissons de même type commercialisées en France hexagonale. On constate en effet que la recette de certains produits est adaptée lorsqu'ils sont distribués sur le marché ultramarin, en raison d'une prétendue préférence pour le sucre des consommateurs des outre-mer.
La seconde inégalité qui frappe les consommateurs ultramarins concerne les dates limites de consommation apposées sur l'étiquetage de certaines denrées alimentaires. Selon une étude menée par la Fédération des entreprises d'outre-mer (Fedom), quelques industriels apposent sur les produits très périssables qu'ils fabriquent en France hexagonale, comme par exemple des yaourts, de la charcuterie ou des fromages frais, un étiquetage indiquant une date limite de consommation différente selon que ces produits sont destinés au marché hexagonal ou au marché ultramarin. Ainsi, tandis que l'étiquetage de la plupart des yaourts distribués en France hexagonale comporte une date limite de consommation calculée en fonction d'un délai de 30 jours à compter de leur date de fabrication, ce délai peut atteindre 55 jours, soit pratiquement le double, pour les mêmes produits de même marque lorsqu'ils sont commercialisés en outre-mer. Si cette pratique ne concerne heureusement qu'un nombre restreint de fabricants, elle pose une question de principe qui ne peut être négligée.
De telles inégalités parmi les consommateurs ne sont guère acceptables, d'autant qu'elles pourraient être à l'origine de risques sanitaires pour les populations d'outre-mer.
Nous sommes tous conscients que l'obésité est un problème de santé multifactoriel, qui ne pourra être endigué par la seule baisse de la teneur en sucres de l'offre alimentaire. Nous ne disposons d'ailleurs pas d'études mettant directement en relation la consommation excessive de sucres avec le développement du surpoids et de l'obésité chez l'adulte. Pour autant, plusieurs indices tendent à démontrer qu'il est nécessaire de limiter la consommation de sucres pour protéger la santé des personnes les plus fragiles.
Deux études ont démontré le rôle spécifique de la consommation de boissons sucrées dans l'apparition du surpoids et de l'obésité chez l'enfant. Une étude américaine de 1999 a ainsi établi que l'excès de prise de poids chez les enfants est proportionnel à l'augmentation de la consommation de sodas. En Grande-Bretagne, une stabilisation du pourcentage d'enfants obèses a pu être observée dans les cas où des mesures de réduction de la consommation de boissons sucrées pétillantes et de diminution du contenu énergétique des jus de fruits ont été prises. Or, selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), le surpoids et l'obésité constituent d'importants facteurs de risque pour le développement de certaines pathologies non transmissibles et chroniques, telles que le diabète, les troubles musculo-squelettiques, certains cancers et surtout les maladies cardio-vasculaires, qui représentaient la première cause de décès dans le monde en 2008. Une enquête de 2012 a ainsi mis en évidence que la fréquence de l'hypertension artérielle est multipliée par 2,6 chez les sujets en surpoids et par 3,6 chez les personnes présentant une obésité. Chez l'enfant, l'obésité entraîne non seulement un risque accru de fracture, de décès prématuré et d'incapacité à l'âge adulte, mais également des difficultés respiratoires ou une résistance à l'insuline. Au total, selon un rapport de l'Afssa de 2004, il est certain qu'un régime alimentaire présentant un index ou une charge glycémique élevée a « des effets délétères sur la santé, au moins dans certaines catégories de la population » comme les diabétiques ou les sujets en surpoids.
Plusieurs organismes ont d'ailleurs émis des recommandations concordantes quant à la diminution de la quantité de sucres consommée chaque jour. Un rapport publié en 2003 par l'OMS et la FAO (organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture) indique ainsi que la ration calorique journalière doit comprendre moins de 10 % de sucres ajoutés. L'Anses préconise quant à elle une réduction de 25 % de la consommation de glucides simples, et notamment de glucides simples ajoutés. Dans sa Stratégie mondiale de 2004 pour l'alimentation, l'exercice physique et la santé, l'OMS recommande même aux pouvoirs publics d'adopter des mesures pour « réduire [...] la teneur en sucre des boissons et en-cas ».
La question est d'autant plus importante que la prévalence du surpoids, de l'obésité et du diabète est particulièrement forte parmi les populations ultramarines. L'enquête dite « Podium » de 2009 a ainsi constaté qu'en Guadeloupe, la fréquence des problèmes d'excès de poids s'établirait à 55 %. La prévalence de l'obésité y atteindrait 23 % contre 14,5 % dans l'hexagone selon l'enquête ObEpi. L'obésité touche fortement les femmes et les enfants. Selon un rapport remis en 2009 au Président de la République, 20 % des femmes seraient concernées à La Réunion, 26 % en Martinique, 31 % en Guadeloupe et 32 % à Mayotte, contre 15 % dans l'hexagone. 9 % des enfants seraient obèses en Guadeloupe et en Martinique, contre 3,5 % dans l'hexagone, soit près du triple. Par ailleurs, selon une étude de 2010 de l'Institut national de veille sanitaire, les outre-mer figurent en France parmi les territoires les plus touchés par l'épidémie de diabète. En 2009, le taux de prévalence de cette maladie s'établissait à 8,8 % à La Réunion contre 4,4 % pour l'ensemble de la population française.
Il semble donc plus que nécessaire de prendre des mesures pour remédier à la progression constante des problèmes d'excès de poids dans la population ultramarine et des comorbidités associées. Quelques-unes, timides, ont été prises au cours de ces dernières années. Elles apparaissent cependant très insuffisantes, ce qui justifie une intervention législative visant à mettre en oeuvre des mesures plus contraignantes.
Le programme national nutrition santé (PNNS, qui existe depuis 2001) et le plan obésité ont fait l'objet d'une déclinaison spécifique en direction des populations d'outre-mer. Les mesures préconisées dans ce cadre se sont traduites par plusieurs initiatives intéressantes au niveau local, comme par exemple le projet « Ecoles Carambole ». Les effets de ces instruments, qui visent à modifier en profondeur les comportements nutritionnels de la population, tardent cependant à se faire sentir.
Des actions ont également été entreprises en direction des industriels de l'agroalimentaire dans le cadre du PNNS 2 et du programme national pour l'alimentation. Sur la base du volontariat, il leur a été proposé d'engager des travaux et de signer des chartes visant à améliorer la qualité nutritionnelle de leur production. Cependant, à l'heure actuelle, seul un très faible nombre de chartes ont été signées. Compte tenu de la responsabilité particulière des industriels dans les problèmes qui nous préoccupent, et puisque la méthode de la concertation semble avoir atteint ses limites, il est indispensable de prévoir un encadrement plus contraignant de la teneur en sucres de leur production.
La pratique de la double date limite de consommation soulève également des questions de santé publique. Selon le droit communautaire, les produits microbiologiquement très périssables tels que les yaourts « sont susceptibles, après une courte période, de présenter un danger immédiat pour la santé humaine » et « au-delà de la date limite de consommation, une denrée alimentaire est dite dangereuse [...] ». Dans ces conditions, une date limite de consommation de leurs produits doit être déterminée par les industriels eux-mêmes, sous leur responsabilité et à partir d'analyses de risque dont ils doivent pouvoir produire les résultats à tout moment.
Or, dans le cas de la pratique de la double date limite de consommation, la fixation d'une date plus éloignée pour les produits destinés aux marchés ultramarins répond à une préoccupation uniquement commerciale. Les denrées produites en France hexagonale doivent en effet être acheminées par bateau vers ces marchés, ce qui implique un délai de transport conséquent. La date limite de consommation de 30 jours est donc souvent presque atteinte lorsque ces denrées atteignent leur destination. Pourtant, de telles modalités de transport impliquent un risque sanitaire plus important en raison notamment des risques de rupture de la chaîne du froid : en toute logique, la date limite de consommation des produits destinés au marché ultramarin devrait être rapprochée et non reculée !
La pratique de la double date limite de consommation résulte donc d'une interprétation erronée, faite par les industriels, de la réglementation applicable. Si celle-ci leur laisse la liberté et la responsabilité de fixer la date limite de consommation des produits très périssables, cela ne signifie aucunement que des dates différenciées puissent être déterminées selon les marchés de commercialisation. Au contraire, la fixation de la date limite doit être contrainte d'un point de vue sanitaire par les résultats des analyses de risque. Ainsi, de deux choses l'une : soit la date limite de consommation déterminée pour l'hexagone est trop proche, ce qui signifie que certaines denrées sont inutilement gaspillées ; soit la date limite de consommation déterminée pour l'outre-mer est trop éloignée, ce qui implique que les populations ultramarines sont exposées à un risque sanitaire inadmissible.
On peut également relever que la présence sur le marché ultramarin de produits provenant de France hexagonale et indiquant un délai de consommation plus long que le délai traditionnel constitue une concurrence déloyale à l'encontre des producteurs locaux qui respectent ce délai.
Ce sont ces inégalités que la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui vise à corriger. Le texte initial reprenait en partie les dispositions de la proposition de loi déposée par Victorin Lurel à l'Assemblée nationale, qui avait été adoptée en commission des affaires sociales avant d'être rejetée à neuf voix près en séance publique en octobre 2011. A l'origine, il concernait uniquement la question de la teneur en sucres des produits alimentaires disponibles sur le marché ultramarin. Lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale, deux sujets se sont ajoutés : celui des doubles dates limites de consommation et celui de la qualité nutritionnelle des repas distribués par les entreprises de restauration collective. Au total, le texte qui nous est proposé porte sur la question plus globale de la qualité de l'offre alimentaire en outre-mer, ce dont je me félicite.
Les dispositions du texte seront applicables dans les collectivités mentionnées à l'article 73 de la Constitution, soit la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, La Réunion et Mayotte, ainsi qu'à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.
Son article 1 er vise à fixer une teneur maximale en sucres ajoutés pour les produits alimentaires distribués dans les outre-mer par référence à la teneur maximale constatée dans les produits comparables commercialisés dans l'hexagone. Deux catégories de produits sont concernées par ce plafond : d'une part, les denrées similaires et de même marque distribuées à la fois en outre-mer et dans l'hexagone ; d'autre part, les denrées alimentaires exclusivement distribuées dans les outre-mer et assimilables à celles de la même famille distribuées dans l'hexagone, dont la liste sera précisée par voie réglementaire. Dans le cas où la teneur en sucres ajoutés des denrées équivalentes distribuées dans l'hexagone diminuerait, une période d'adaptation d'une durée maximale de six mois est prévue afin de permettre aux opérateurs d'écouler leurs stocks.
Le contrôle de ces dispositions est confié aux agents publics compétents, notamment à ceux de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Alors même que le législateur lui attribue de plus en plus de compétences (nous l'avons récemment fait en ce qui concerne le bisphénol A), j'attire votre attention sur le fait que la DGCCRF, qui fournit un travail remarquable et a récemment été très mobilisée dans l'affaire de la viande de cheval vendue comme du boeuf, fait face depuis quelques années à un important problème de moyens.
Afin de permettre aux industriels d'adapter leur production aux nouvelles contraintes définies par l'article 1 er de la proposition de loi, son article 2 fixe un délai de transition de six mois à compter de sa promulgation, ce qui me semble raisonnable.
L'article 3 concerne les dates limites de consommation. Il prévoit que, lorsque la mention d'une date indiquant le délai dans lequel une denrée alimentaire doit être consommée est apposée sur l'emballage, ce délai ne peut être plus long que celui prévu pour la même denrée de même marque distribuée en France hexagonale. Pour lever toute ambiguïté de rédaction, je demanderai au ministre de préciser en séance publique que la formulation retenue concerne bien les « dates limites de consommation » figurant sur les emballages des denrées alimentaires microbiologiquement très périssables, et non les « dates limites d'utilisation optimale » qui sont utilisées pour les produits qui présentent une relative stabilité microbiologique.
L'article 4 vise à rendre obligatoire pour l'attribution des marchés publics de restauration collective la prise en compte des performances en matière de développement des approvisionnements directs de produits de l'agriculture. Cette disposition vise à la fois à promouvoir une meilleure qualité nutritionnelle de l'offre alimentaire en restauration collective, en favorisant l'approvisionnement en produits frais et de saison, et à inciter au développement des filières agricoles locales, en encourageant le développement des circuits courts.
Des initiatives en ce sens ont déjà été prises. A la suite de la loi « Grenelle I » du 3 août 2009 et de la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche du 27 juillet 2010, l'article 53 du code des marchés publics a été modifié et prévoit que les pouvoirs adjudicateurs peuvent intégrer les performances en matière de développement des approvisionnements directs de produits de l'agriculture parmi les critères pris en compte pour déterminer l'offre économiquement la plus avantageuse. Rendre ce critère obligatoire permettra d'encourager le développement d'un approvisionnement alimentaire durable, fondé sur la production locale plutôt que sur l'importation de denrées acheminées sur des milliers de kilomètres, et sur l'utilisation de produits frais et de saison plutôt que de produits industriels. Pour autant, les acheteurs publics ne verront pas leur liberté de fixer les critères d'attribution des marchés publics remise en cause. Ils disposeront en effet toujours de la possibilité de pondérer ces critères en fonction de l'importance qu'ils souhaitent donner à chacun d'entre eux.
Si elle est adoptée par le Sénat, cette proposition de loi constituera un pas important pour l'amélioration de la qualité nutritionnelle de l'offre alimentaire à destination de populations ultramarines particulièrement touchées par le surpoids et l'obésité. Elle permettra surtout d'assurer enfin l'égalité entre les consommateurs, et c'est pourquoi je vous demande d'approuver ce texte.
M. Alain Milon . - Pour améliorer la qualité de l'offre alimentaire et réduire les disparités de cette offre en fonction des territoires, une loi générale de santé publique est nécessaire. Or, ce texte a une portée restreinte. En outre, certains outils ont déjà été mis en place pour répondre à ces objectifs - même s'ils sont probablement insuffisants. Le programme national nutrition santé, instauré certes en 2001 mais qui a été actualisé plusieurs fois depuis lors, ainsi que le plan obésité comportent un volet spécifique pour l'outre-mer. Trente-trois chartes d'engagement ont été signées avec les industriels, dont une qui porte sur la diminution de la teneur en sucre des sodas.
Une grande loi de santé publique est régulièrement annoncée depuis le début de la présidence « normale ». Pourquoi alors une proposition de loi au champ limité ? En outre, ces problèmes auraient pu être réglés par la voie réglementaire. Pour toutes ces raisons, même si nous partageons les objectifs de ce texte, nous ne le voterons pas.
Mme Karine Claireaux . - Les outils en place ne sont pas suffisants. Il était nécessaire de prendre des mesures claires et spécifiques à l'attention de l'outre-mer. Deux points appellent cependant notre vigilance.
Il est indispensable de mettre en oeuvre l'objectif de réduction du taux de sucre dans les aliments, qui est partagé par tous. Il faudra toutefois veiller à ce que l'arrêté qui fixera la liste des produits concernés prenne en compte les difficultés d'approvisionnement de certaines collectivités visées par le texte.
Il importe également de savoir si la date limite de consommation est justifiée : soit le délai de trente jours est impératif et il doit être respecté partout, soit il est utilisé par les industriels pour encourager à la surconsommation. S'il s'avère que ce délai doit être strictement respecté, les produits frais devront être acheminés en outre-mer par avion, ce qui rendra leur coût prohibitif et ira à l'encontre des objectifs fixés par la loi contre la vie chère. C'est pourquoi il faut faire la lumière sur ce sujet.
Mme Aline Archimbaud . - Nous soutenons ce texte, parce qu'il est nécessaire de prendre des mesures énergiques et contraignantes. Les premiers articles reprennent des dispositions que notre groupe avait proposées dans un amendement à la loi sur la vie chère à l'automne. Rien ne justifie les différences de teneur en sucres entre les produits de l'hexagone et ceux de l'outre-mer. L'article 1 er précise qu'un arrêté ministériel déterminera la liste des produits concernés : nous devrons veiller à ce que cette liste ne soit pas trop restrictive. Nous sommes également favorables aux circuits courts qu'encourage l'article 4.
Mme Catherine Deroche . - Les différences de teneurs en sucre sont incompréhensibles. Au-delà des motivations commerciales évoquées, les dates limites de consommation intègrent certainement une forte marge de sécurité de la part des industriels. Quelles sont les possibilités d'avoir des produits locaux de substitution ?
Mme Laurence Cohen . - Je salue le travail du rapporteur. Chacun souhaite évidemment une loi de santé publique générale. On pourrait évoquer aussi le taux en sel des produits destinés aux jeunes enfants ou l'éducation au goût.
Ce texte part du constat d'une inégalité profonde. On peut sincèrement s'interroger pour savoir si les différences ne résultent pas d'un colonialisme qui a perduré pour que des industriels écoulent leurs produits plutôt que d'une tradition locale. C'est pourquoi nous soutenons ce texte.
Mme Colette Giudicelli . - Je partage le souhait que l'outre-mer soit traité comme la métropole, mais les goûts y sont peut-être différents. Parviendrons-nous avec une loi à changer les habitudes culinaires outre-mer ?
Mme Marie-Thérèse Bruguière . - L'ajout de sucre permet d'allonger le délai de conservation. Voyez la différence entre une confiture normale et une confiture light...
M. Jean Desessard . - Je suis surpris de l'existence de productions spécifiques pour l'outre-mer. Je ne comprends pas comment ce système peut être rentable.
M. Michel Vergoz , rapporteur . - Il faudra en effet veiller à ce que la liste des produits exclusivement distribués en outre-mer qui sera fixée par arrêté ne pénalise pas certaines régions.
La date limite de consommation est-elle un rideau de fumée ? Difficile de répondre à cette question... Dans tous les cas, il revient à la loi de protéger les citoyens et aux acteurs de l'économie d'en tirer les conséquences.
Les industriels, à maintes reprises, nous ont affirmé que les ultramarins ont un goût marqué pour le sucre. Quand cette appétence est entretenue pendant des années, elle confine à l'addiction. Seule la loi peut corriger une telle déviance.
Le dialogue a montré ses limites. Il se heurte à la mauvaise foi des industriels. Parmi les trente-trois chartes qui ont été mentionnées en figure en effet une qui concerne le taux de sucres dans les sodas, qui date de 2008. Il existe par ailleurs deux chartes qui concernent spécifiquement les produits distribués en outre-mer, dont une traite de la question des taux de sucres.
M. Alain Milon . - Les dispositions que vous nous proposez relèvent plutôt du domaine du règlement.
M. Michel Vergoz , rapporteur. - Une loi est nécessaire pour encadre les teneurs en sucres et les modalités de fixation des DLC des produits destinés à l'outre-mer.
Une loi de santé publique ? On en parle depuis 2009, Xavier Bertrand, après d'autres, l'avait promise, elle est toujours attendue ! Pendant ce temps, les problèmes se sont aggravés. Il est temps de sortir de l'immobilisme. Il s'agit de santé publique : derrière les termes techniques se cachent des cas de cécité, d'obésité, d'amputation, des dialyses, des infarctus, des morts ! Il y a urgence. On a trop tergiversé. L'obésité ne cesse de se répandre, je le constate à La Réunion depuis quinze ans. Souhaiter que soit adoptée une loi de santé publique n'empêche pas d'adopter cette proposition de loi.
Les industriels justifient l'allongement de la date limite de consommation par des arguments commerciaux, et non par des raisons de santé publique. C'est aux industriels qu'il appartient de fixer les dates limites de consommation. Mais une fois qu'elle a été déterminée, elle doit être respectée, dès lors qu'il existe un risque pour la santé humaine.
M. Dominique Watrin . - Sachant qu'il s'agit bien d'une question de santé, quel sera le ministre présent en séance publique ?
M. Michel Vergoz , rapporteur. - A l'Assemblée nationale étaient présents le ministre des outre-mer et le ministre délégué à l'agro-alimentaire.
La proposition de loi est adoptée sans modification.
* 1 « Taux de sucres et profil des sucres de boissons de type sodas et de produits laitiers frais prélevés dans les outre-mer », enquête réalisée en collaboration entre les régions Guadeloupe et Martinique avec l'appui du pôle agroalimentaire régional de Martinique, décembre 2011.
* 2 Les sucres présents dans un yaourt nature sont principalement constitués de lactose.
* 3 Directive n° 90/496/CEE du Conseil du 24 septembre 1990 relative à l'étiquetage nutritionnel des denrées alimentaires.
* 4 Règlement (UE) n°1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires.
* 5 « Glucides et santé : état des lieux, évaluation et recommandations », octobre 2004.
* 6 OMS, « Obésité et surpoids », Aide-mémoire n° 311, mars 2013.
* 7 Etude trisannuelle ObEpi-Roche sur l'obésité et le surpoids, 6 e édition, 2012.
* 8 Une personne dont l'indice de masse corporelle (IMC) est compris entre 25 et 30 kg/m 2 est dite en surpoids. L'obésité concerne les personnes dont l'IMC dépasse 30 kg/m 2 .
* 9 Vernay M. et al., « Etat nutritionnel et état de santé dans l'île de Mayotte : l'étude Nutrimay 2006 », InVS 2009.
* 10 Favier F., « Consommation alimentaire et activité physique des réunionnais », REDIA, Inserm.
* 11 Pierre Louis K. et al., « Prévalence du surpoids, de l'obésité et de l'hypertension artérielle en Martinique : l'étude Escal », 2003-2004.
* 12 Kelly Irving M. et al., « Surcharge pondérale et obésité en Guadeloupe: la prévention devrait-elle tenir compte des inégalités sociales ? », enquête Consant, revue épidémiologique de santé publique, 2008.
* 13 J.-L. Daigre, A. Atallah, J.-L. Boissin, G. Jean-Baptiste, P. Kangambega, H. Chevalier, B. Balkau, D. Smadja, J. Inamo, «The prevalence of overweight and obesity, and distribution of waist circumference, in adults and children in the French Overseas Territories: The PODIUM survey. Diabetes and Metabolism», 2012.
* 14 Selon les propos du Dr André Atallah, secrétaire de l'association Agrum, rapportés sur le site internet de France-Antilles Guadeloupe.
* 15 Enquête Escal, 2003-2004.
* 16 « La santé des enfants scolarisés en CM2 en 2004-2005 à La Réunion », Etudes et statistiques de la Drass, n° 10, janvier 2009.
* 17 « L'obésité dans une population d'enfants et adolescents en Guadeloupe », 2001-2002.
* 18 Institut national de veille sanitaire, Bulletin épidémiologique hebdomadaire (9 novembre 2010/n°42-43), p 425 à 431.
* 19 Directive 2000/13/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mars 2000 relative au rapprochement des législations des États membres concernant l'étiquetage et la présentation des denrées alimentaires ainsi que la publicité faite à leur égard.
* 20 Règlement (CE) n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l'Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires.
* 21 Règlement (CE) du Parlement européen et du Conseil n° 825-2004 du 29 avril 2004 relatif à l'hygiène des denrées alimentaires.
* 22 Directive 2000/13/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mars 2000 relative au rapprochement des législations des États membres concernant l'étiquetage et la présentation des denrées alimentaires ainsi que la publicité faite à leur égard.
* 23 A titre d'exemple, dans le secteur des boissons rafraîchissantes sans alcool, une charte d'engagement de progrès nutritionnels portant sur la réduction des teneurs en sucres ajoutés a été signée en 2008 par le groupe Orangina Schweppes (engagement de réduction de 7 % à 12 % entre 2008 et 2012).
* 24 « Régime alimentaire, nutrition et prévention des maladies chroniques », rapport d'une consultation d'experts, 2003.
* 25 Ces sucres incluent les monosaccharides et les disaccharides ajoutés aux aliments par les fabricants, les cuisiniers ou les consommateurs, ainsi que les sucres naturellement présents dans le miel, les sirops et les jus de fruits.
* 26 Institut national de veille sanitaire, Bulletin épidémiologique hebdomadaire (9 novembre 2010/n°42-43), p 425 à 431.
* 27 Les DLC correspondent à des mentions de type « à consommer jusqu'au ... » et les DLUO à celles du type « à consommer de préférence avant le ... ».
* 28 LOI n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.
* 29 LOI n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche.
* 30 Directive 2009/81/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 relative à la coordination des procédures de passation de certains marchés de travaux, de fournitures et de services par des pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices dans les domaines de la défense et de la sécurité, et modifiant les directives 2004/17/CE et 2004/18/CE
* 31 CE, 5 mars 2003, Ordre des avocats de la cour d'appel de Paris.
* 32 Règlement (CE) n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l'Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires.
* 33 Communautés européennes - Mesures affectant l'amiante et les produits en contenant, rapport de l'organe d'appel, WT/DS135/AB/R, 12 mars 2001, paragraphe 172.
* 34 Par exemple, décision n° 2001-451 DC du 27 novembre 2001.
* 35 CE, référé, 29 avril 2004, n° 266902, Département du Var ; CE, référé, n° 308602, 17 août 2007, SARL Les Cigales.
* 36 Règlement (CE) n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l'Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires ; règlement (CE) du Parlement européen et du Conseil n° 825-2004 du 29 avril 2004 relatif à l'hygiène des denrées alimentaires ; directive 2000/13/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mars 2000 relative au rapprochement des législations des États membres concernant l'étiquetage et la présentation des denrées alimentaires ainsi que la publicité faite à leur égard ; article R. 112-22 du code de la consommation.
* 37 CJCE, 7 décembre 2000, Telaustria.
* 38 Rép. min. n° 40461 : JOAN Q 23 nov. 2004, p. 9271 ; CJCE, 11 juill. 1991, aff. C-351/88 : Rec. CJCE 1991, I, p. 3641 ; CE, 29 juillet 1994, n° 131562, Commune de Ventenac-en-Minervois.