II. UN ACCORD DE PARTENARIAT ET DE COOPÉRATION QUI S'INSCRIT DANS LE CADRE DE LA STRATÉGIE DE L'UNION EUROPÉENNE POUR L'ASIE CENTRALE ET QUI DEVRAIT PERMETTRE UN RENFORCEMENT DE LA PRÉSENCE EUROPÉENNE DANS CETTE RÉGION STRATÉGIQUE

L'accord de partenariat et de coopération a pour vocation de remplacer l'accord de commerce et de coopération, signé entre la Communauté européenne et l'URSS le 18 décembre 1989.

Au cours des années 1990, cet accord a été renégocié sous la forme d'accord de « partenariat et de coopération » (APC) avec les cinq Etats d'Asie centrale (Kazakhstan, Kirghizstan, Ouzbékistan, Tadjikistan et Turkménistan), issus de l'éclatement de l'URSS en 1991.

Ce nouveau type d'accord, sans être un accord d'association, dépasse les champs des anciens accords de « commerce et de coopération ». A l'exception de l'APC avec le Turkménistan, tous ont été ratifiés et sont entrés en vigueur.

L'accord avec le Turkménistan complète donc le maillage des accords conclus avec les Etats d'Asie centrale. Son objectif est de créer une base juridique unique pour l'ensemble des relations de l'Union européenne avec un pays donné même si les clauses commerciales et économiques dominent. Il pose les bases d'un renforcement continu des relations de l'Union européenne avec le Turkménistan au moyen des différents programmes d'action extérieure de l'Union.

A. UN ACCORD DE PARTENARIAT ET DE COOPÉRATION « CLASSIQUE »

Le texte de l'accord est très proche de celui des autres accords de partenariat et de coopération signés avec les États de la Communauté des Etats indépendants.

L'accord se compose d'un préambule et de 101 articles. Il est complété par un ensemble de cinq annexes, un protocole et un acte final.

Le préambule souligne « l'importance capitale de l'Etat de droit et du respect des droits de l'homme, notamment de ceux des personnes appartenant à des minorités » . Il reconnaît et soutient « la volonté du Turkménistan d'établir une coopération étroite avec les institutions européennes » , la volonté des parties de promouvoir la paix et la sécurité internationale et le règlement pacifique des conflits, de renforcer les libertés politiques et économiques qui « constituent la base même du partenariat » , d'encourager les processus de coopération régionale. Il reconnaît que « le soutien de l'indépendance, de la souveraineté et de l'intégrité territoriale du Turkménistan contribue à sauvegarder la paix et la stabilité en Asie centrale » .

Il rappelle également que l'Assemblée générale des Nations Unies a reconnu le statut de neutralité permanente déclarée par le Turkménistan, et exprimé son soutien à ce statut.

L' article premier du titre Ier expose les objectifs de l'accord :

- soutenir l'indépendance et la souveraineté du Turkménistan ;

- soutenir les efforts accomplis par le Turkménistan pour consolider sa démocratie, développer son économie et son infrastructure sociale et mener à son terme son processus de transition vers une économie de marché ;

- fournir un cadre approprié au dialogue politique entre les parties afin de permettre le développement de relations politiques étroites entre elles ;

- promouvoir les échanges et les investissements, en particulier dans le secteur énergétique, et les relations économiques harmonieuses entre les Parties afin de favoriser leur développement économique durable ;

- jeter les bases d'une coopération dans les domaines législatifs, économique, social, financier, scientifique civil, technologique et de la coopération culturelle.

Il est établi un lien, à l'article 2 , entre le respect de la démocratie et des droits fondamentaux de l'Homme, ainsi que des principes de l'économie de marché qui « constituent les éléments essentiels du partenariat » et la pleine mise en oeuvre de l'accord.

Dans l'hypothèse d'une violation desdits éléments, l'Union européenne pourra, en vertu des dispositions de l'article 94 et de la déclaration commune relative à cet article, prendre les mesures appropriées en cas d'urgence spéciale, pouvant aller jusqu'à la suspension de l'accord.

L'accent est également mis, à l'article 3 , sur la nécessité de maintenir et développer la coopération régionale entre les États issus de l'ex-URSS ainsi que des relations de bon voisinage.

Le dialogue politique fait l'objet du titre II et des articles 4 à 6 .

Les objectifs du dialogue politique sont les suivants :

- renforcer les liens entre le Turkménistan et l'Union européenne ;

- accroître la convergence de positions sur les problèmes internationaux, favorisant ainsi la sécurité et la stabilité dans la région ;

- coopérer dans les domaines concernant le respect des principes de la démocratie et le respect des droits de l'homme, notamment ceux des personnes appartenant à des minorités.

Les modalités d'exercice de ce dialogue politique sont prévues dans les dispositions institutionnelles, générales et finales, aux articles 77 et suivants :

- au niveau ministériel, le dialogue se déroulera dans le cadre d'un Conseil de coopération, assisté d'un comité de coopération au niveau des hauts fonctionnaires, qui se réuniront une fois par an ;

- une commission parlementaire de coopération se réunira également, associant des membres du Parlement turkmène et des membres du Parlement européen. L'article précise en outre que le dialogue politique peut se dérouler sur une base régionale.

Les échanges de marchandises font l'objet du titre III ( articles 7 à 17 ).

Il s'agit d'un accord non préférentiel, sans clause évolutive vers la création d'une zone de libre-échange. Les parties s'octroient mutuellement le statut de la nation la plus favorisée. Pendant un période transitoire de 5 ans à compter de l'entrée en vigueur de l'accord, le Turkménistan pourra toutefois accorder un traitement plus avantageux aux autres États nés de la dissolution de l'URSS. L'accord prévoit également la liberté de transit et interdit toute restriction quantitative aux échanges. Le commerce des matières nucléaires est régi par les dispositions du traité Euratom, sans préjudice d'un éventuel accord spécifique à conclure en la matière entre la Communauté européenne de l'énergie atomique et le Turkménistan.

Une clause de sauvegarde analogue à celle de l'OMC permet aux parties de se consulter et de prendre des mesures appropriées lorsque les importations augmentent dans des conditions et des quantités telles qu'elles soient de nature à porter préjudice aux producteurs nationaux. Des mesures anti-dumping ou compensatoires peuvent également être prises.

Rappelons, à cet égard, que le Turkménistan n'est pas membre de l'Organisation mondiale du commerce.

Le commerce et les investissements sont régis par le titre IV de l'accord ( articles 18 à 20 ).

Concernant l'emploi, l'objectif de l'accord est d'éviter toute discrimination d'une des parties en ce qui concerne les conditions de travail, de rémunération ou de licenciement à l'égard des ressortissants de l'autre partie légalement employés sur son territoire.

Il convient de relever que l'accord ne prévoit pas de libéraliser l'accès des ressortissants turkmènes au marché du travail communautaire.

En ce qui concerne l'établissement et l'activité des sociétés, le Turkménistan accorde le traitement national ou le statut de la nation la plus favorisée (selon le régime le plus favorable). Pour sa part, la Communauté accorde le traitement de la nation la plus favorisée pour l'établissement des sociétés turkmènes et le traitement national pour leurs activités.

S'agissant des services, l'accord encourage la libéralisation progressive des services transfrontaliers. Des dispositions particulières régissent les transports maritimes internationaux (article 29).

Concernant les paiements courants et les capitaux, le transfert de paiements et de capitaux est libre, notamment s'il est lié à des opérations commerciales ou à des investissements directs.

Enfin, en matière de propriété intellectuelle, industrielle et commerciale, l'accord prévoit que le Turkménistan doit s'efforcer d'améliorer la protection des droits de propriété intellectuelle, industrielle et commerciale et d'atteindre, cinq ans après l'entrée en vigueur de l'accord, un niveau de protection similaire à celui de la Communauté, y compris les moyens prévus pour assurer le respect de ces droits.

Les domaines de coopération font l'objet des titres V à X.

Concernant la coopération en matière législative (titre V), les parties conviennent d'oeuvrer au rapprochement de leur législation, condition importante du renforcement de leurs liens économiques. L'Union européenne fournira une assistance technique au Turkménistan à cette fin, notamment dans les secteurs suivants : douanes, services bancaires, comptabilité et fiscalité, protection des travailleurs, propriété intellectuelle, services financiers, environnement, marchés publics, vie des personnes, protection des animaux et végétaux, normes, transports et matières nucléaires.

En ce qui concerne la coopération économique (titre VI), celle-ci vise à favoriser la réforme économique, la reconstruction et le développement durable au Turkménistan. Elle concerne de nombreux secteurs : échanges de biens et services, promotion des investissements, coopérations industrielles, marchés publics, matières premières, sciences et technologie, éducation et formation, agriculture, énergie, environnement et santé, transports, services postaux et communications électroniques, services financiers, développement régional, secteur social, tourisme, petites et moyennes entreprises, information, protection des consommateurs, douanes (un protocole d'assistance mutuelle est joint à l'accord), statistiques et sciences économiques, restructuration et privatisation des entreprises.

Une coopération spécifique est prévue en matière de démocratie et de droits de l'homme (titre VII). Cette coopération concerne toute question relative à l'établissement et au renforcement des institutions démocratiques, notamment celles requises pour renforcer l'État de droit et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

S'agissant de la prévention des activités illégales et du contrôle de l'immigration clandestine (titre VIII), la coopération couvre le domaine économique, y compris la corruption et les transactions illégales portant sur les marchandises (déchets industriels ; armes), la contrefaçon. Elle porte également sur le blanchiment d'argent, la lutte contre la drogue, et l'immigration clandestine.

En matière culturelle (titre IX), les parties s'engagent à promouvoir la coopération culturelle.

Enfin, l'accord prévoit (titre X) que le Turkménistan bénéficiera d'une assistance technique de l'Union européenne financée par le biais de l'instrument pour la coopération et le développement (ICD). Cette aide financière s'est élevée à 11,8 millions d'euros pour 2010.

Une déclaration unilatérale du gouvernement français concerne l'exclusion des PTOM du champ d'application de l'accord, en vertu du traité instituant la Communauté européenne.

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