N° 404
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2011-2012
Enregistré à la Présidence du Sénat le 22 février 2012 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne relatif à la Brigade franco-allemande ,
Par M. Jean-Marie BOCKEL,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Louis Carrère , président ; MM. Didier Boulaud, Christian Cambon, Jean-Pierre Chevènement, Robert del Picchia, Mme Josette Durrieu, MM. Jacques Gautier, Robert Hue, Xavier Pintat, Yves Pozzo di Borgo, Daniel Reiner , vice-présidents ; Mmes Leila Aïchi, Hélène Conway Mouret, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Gilbert Roger, André Trillard , secrétaires ; MM. Pierre André, Bertrand Auban, Jean-Michel Baylet, René Beaumont, Pierre Bernard-Reymond, Jacques Berthou, Jean Besson, Michel Billout, Jean-Marie Bockel, Michel Boutant, Jean-Pierre Cantegrit, Pierre Charon, Marcel-Pierre Cléach, Raymond Couderc, Jean-Pierre Demerliat, Mme Michelle Demessine, MM. André Dulait, Hubert Falco, Jean-Paul Fournier, Pierre Frogier, Jacques Gillot, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Gournac, Jean-Noël Guérini, Joël Guerriau, Gérard Larcher, Robert Laufoaulu, Jeanny Lorgeoux, Rachel Mazuir, Christian Namy, Alain Néri, Jean-Marc Pastor, Philippe Paul, Jean-Claude Peyronnet, Bernard Piras, Christian Poncelet, Roland Povinelli, Jean-Pierre Raffarin, Jean-Claude Requier, Richard Tuheiava, André Vallini. |
Voir le(s) numéro(s) :
Assemblée nationale ( 13 ème législ.) : |
3813 , 3928 , 3995 et T.A. 773 |
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Sénat : |
135 et 405 (2011-2012) |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Symbole de la réconciliation franco-allemande, la brigade franco-allemande a été créée en 1989, à l'initiative du Président François Mitterrand et du chancelier Helmut Kohl. Il s'agit d'une formation binationale, comptant environ 6 000 hommes, et qui est implantée sur différents sites, en France et en Allemagne.
En février 2009, le Président de la République Nicolas Sarkozy et la chancelière allemande Angela Merkel ont souhaité donner une nouvelle impulsion à la brigade franco-allemande, ce qui s'est notamment traduit par l'installation, à compter de l'été 2010, d'un régiment allemand en Alsace, à Illkirch-Graffenstaden, à proximité de Strasbourg.
Or, bien qu'elle dispose de réelles capacités de combat et alors que les unités qui la composent sont très souvent déployées sur différents théâtres d'opérations, comme l'Afghanistan ou le Kosovo, l'engagement de la brigade, en tant qu'unité mixte en opération continue de se heurter à des difficultés, ce qui suscite parfois des interrogations sur son utilité.
Votre rapporteur, qui est lui-même colonel de la réserve opérationnelle de la brigade franco-allemande, affecté auprès de l'état-major, et qui avait eu l'occasion de traiter ce dossier dans le cadre de ses précédentes fonctions de Secrétaire d'Etat à la défense, ne veut pas s'arrêter à ces interrogations et reste, pour sa part, persuadé de la pertinence de la brigade franco-allemande.
L'accord, dont le présent projet de loi vise à autoriser l'approbation, devrait à cet égard permettre de conforter l'existence de la brigade franco-allemande et de lui conférer un fondement juridique plus clair.
Dans le cadre de la préparation de son rapport, votre rapporteur s'est d'ailleurs entretenu, le 20 février dernier, à Mulhouse, avec le général allemand Gert-Johannes Hagemann, commandant la brigade franco-allemande, et son adjoint, le colonel français de Madre, de la situation actuelle et des perspectives d'avenir de la brigade franco-allemande.
Partisan résolu de la construction de l'Europe de la défense et convaincu du rôle moteur du couple franco-allemand, votre rapporteur estime que la célébration du cinquantième anniversaire du traité de l'Elysée, en janvier 2013, devrait se traduire par une relance de la coopération franco-allemande dans le domaine de la défense, dont le « fer de lance » pourrait être le déploiement de la brigade franco-allemande sur un théâtre d'opération.
I. LA BRIGADE FRANCO-ALLEMANDE : UN SYMBOLE FORT DE L'AMITIÉ FRANCO-ALLEMANDE MAIS AUSSI UNE FORCE OPÉRATIONNELLE QUI RESTE ENCORE INSUFFISAMMENT UTILISÉE
Créée en 1989, la brigade franco-allemande représente un symbole fort de la relation franco-allemande, comme l'illustre l'installation, à partir de l'été 2010, d'un régiment allemand en Alsace, à Illkirch-Graffenstaden.
Outre son caractère symbolique, cette brigade binationale dispose de réelles capacités de combat. Les unités qui la composent sont d'ailleurs très souvent déployées sur différents théâtres d'opérations, comme l'Afghanistan ou le Kosovo, mais de plus en plus en tant qu'unités nationales.
L'engagement de la brigade franco-allemande, en tant qu'unité constituée, en opération extérieure se heurte, en effet, depuis quelques années à des difficultés, ce qui suscite parfois des interrogations sur son utilité.
Dans ce contexte, le présent accord permettra de conforter l'existence de la brigade franco-allemande et de lui conférer un fondement juridique plus clair.
A. UN SYMBOLE FORT DE LA RÉCONCILIATION FRANCO-ALLEMANDE ET UNE FORCE OPÉRATIONNELLE DOTÉE DE RÉELLES CAPACITÉS DE COMBAT
La brigade franco-allemande trouve son origine dans le traité de l'Elysée, signé le 22 janvier 1963 entre le général de Gaulle et le chancelier Adenauer, qui demeure le socle de la relation franco-allemande et qui prévoyait un volet consacré à la coopération en matière de défense.
A l'occasion du 50 e Sommet franco-allemand des 12 et 13 novembre 1987 à Karlsruhe, le Président François Mitterrand et le chancelier Helmut Kohl ont décidé de créer une brigade franco-allemande, qui a été instituée par un arrangement administratif signé par les deux ministres de la défense le 2 octobre 1989.
La brigade franco-allemande est une brigade binationale , composée d'unités françaises (deux régiments), d'unités allemandes (quatre régiments) et d'unités mixtes (un état-major et un bataillon de commandement et de soutien).
Elle compte actuellement environ 6 000 hommes , dont 1 500 Français et 4 500 Allemands, et elle est alternativement commandée par un officier général français et allemand, étant entendu que le commandant en second est toujours de l'autre nationalité.
Elle est implantée sur cinq sites différents , en France et en Allemagne.
Les unités mixtes, c'est-à-dire, l'état-major et le bataillon de commandement et de soutien, sont implantés à Müllheim en Allemagne.
Les unités françaises se composent du 110 e régiment d'infanterie, situé à Donaueschingen, ce qui en fait la dernière unité de l'armée française stationnée en Allemagne, et du 3 e régiment de hussards, implanté à Metz.
Trois régiments allemands sont implantés en Allemagne : le 292 e bataillon de chasseurs ( « Jagerbataillon 292 ») à Donaueschingen, le 295 e bataillon d'artillerie ( « Artilleriebataillon 295 » ) et la 550 e compagnie du génie blindé ( « Panzerpionierkompanie 550 » ) à Immendingen.
En février 2009, en marge de la 45 e conférence de sécurité de Munich, le Président de la République Nicolas Sarkozy et la chancelière allemande Angela Merkel ont pris la décision de renforcer la brigade franco-allemande.
Cette impulsion s'est notamment traduite par l'installation, à partir de l'été 2010, sur le territoire français, à Illkirch-Graffenstaden, à proximité de Strasbourg, d'un régiment allemand, le 291 e régiment de chasseurs ( « Jagerbataillon 291 » ).
Comme votre rapporteur peut le constater dans l'exercice de ses fonctions locales à Mulhouse, cette présence de militaires allemands en France et en Alsace, pour la première fois depuis 1945, a été très bien acceptée par la population.
Elle témoigne du chemin parcouru par nos deux pays depuis soixante ans et représente un symbole fort de la réconciliation franco-allemande.
La brigade franco-allemande a ainsi été amenée à participer au défilé du 14 juillet sur les champs Elysées, en 1994 et en 2009, et aux cérémonies du 11 novembre, en 2009.