C. ... AUXQUELLES LE SÉNAT A VOULU APPORTER UNE RÉPONSE DÈS L'AUTOMNE 2011
Votre rapporteur souligne que notre Haute Assemblée s'est saisie de ces difficultés dès octobre 2011 en examinant et en enrichissant la proposition de loi déposée par le président de la commission des lois, M. Jean-Pierre Sueur, et dont l'objet initial était de « préserver les mandats en cours des délégués des EPCI menacés par l'application du dispositif d'achèvement de la carte de l'intercommunalité » 11 ( * ) .
L'examen de cette proposition de loi a permis au Sénat de mener un travail approfondi et partagé et de conduire des discussions fructueuses sur la situation des élus locaux face à l'application du volet intercommunal de la réforme des collectivités territoriales : l'examen du texte a ainsi duré plus de dix heures en séance publique.
Au terme de son examen par notre Haute Assemblée, la proposition de loi était porteuse d'innovations qui répondaient aux craintes des élus et aux insuffisances de la loi de réforme des collectivités territoriales. Elle prévoyait ainsi :
- que la composition du conseil communautaire et du bureau des EPCI transformés, étendus ou fusionnés dans le cadre de la rationalisation de la carte de l'intercommunalité resterait régie, jusqu'en 2014, par les règles en vigueur avant l'adoption de la loi du 16 décembre 2010 (article 1 er ) ;
- qu'une « prime à l'accord » serait attribuée aux EPCI en cas d'accord entre les communes membres sur la répartition des sièges au conseil communautaire : un tel accord permettrait ainsi de relever de 25 % l'effectif du conseil communautaire défini par la loi (article 2) ;
- que les suppléants des délégués communautaires pourraient remplacer le titulaire sans formalité et auraient accès aux informations relatives aux affaires de l'intercommunalité (article 3) ;
- que le nombre maximal de vice-présidents des EPCI serait augmenté et fixé en fonction de la population (article 1 er bis ) ;
- que des indemnités pourraient être accordées aux membres des organes délibérants des communautés de communes.
En outre, le texte adopté par le Sénat exposait une conception plus décentralisatrice pour l'élaboration du schéma départemental de coopération intercommunale :
- il assouplissait les orientations du SDCI d'une part, en confiant à la CDCI (et non plus au seul préfet) la faculté d'abaisser le seuil démographique de 5 000 habitants prévu pour la constitution d'un EPCI à fiscalité propre en raison des spécificités locales ; d'autre part, en subordonnant la suppression de syndicats ou la modification de leur périmètre à la reprise de leurs compétences par un EPCI à fiscalité propre (article 4) ;
- il prévoyait que les syndicats compétents en matière d'action sociale ou en matière scolaire ne seraient pas soumis à l'encadrement prévu par la loi du 16 décembre 2010 (article 10) ;
- il allongeait à deux ans le délai accordé aux EPCI issus d'une fusion pour déterminer le sort des compétences facultatives exercées par l'un des EPCI initiaux (article 1 er ter ) ;
- il soustrayait les îles composées d'une seule commune à l'exigence de couverture intégrale du territoire par des intercommunalités (article 8) ;
- il permettait de déroger au principe de continuité territoriale des EPCI pour tenir compte de la situation des communes d'un département enclavées dans un autre (article 9) ;
- il unifiait le processus d'achèvement et de rationalisation de la carte intercommunale pour favoriser la concertation au niveau local (articles 5 à 7). Pour ce faire, le Sénat avait notamment :
-- attribué un rôle-moteur à la CDCI qui serait compétente pour élaborer et adopter le schéma ; le préfet demeurait toutefois au coeur de ce processus puisqu'il pouvait présenter son analyse de la situation locale à la CDCI, qu'il préside, et formuler des recommandations ;
-- rationalisé la procédure d'élaboration du schéma en prévoyant la consultation des collectivités, en début de procédure, sur les compétences que pourrait exercer chacun des EPCI à fiscalité propre envisagés ;
-- remis au préfet le soin d'établir la proposition finale et d'arrêter le schéma en cas de blocages à la CDCI ;
-- mis en place une « clause de rendez-vous » permettant à la CDCI, à compter du 1 er octobre 2015, d'évaluer le fonctionnement des EPCI résultant du processus d'achèvement et de rationalisation de la carte intercommunale.
Le texte adopté par le Sénat permettait, en outre, aux présidents d'EPCI de renoncer au transfert partiel des pouvoirs de police spéciale des maires (article 11) et imposait aux administrations déconcentrées d'apporter un appui technique, à la demande des élus et en matière financière et fiscale, aux EPCI à fiscalité propre nouvellement créés ou modifiés (article 12).
On ne peut que déplorer que cette proposition de loi -très proche sur le fond du texte déposé par M. Jacques Pélissard (v. infra )- n'ait pas été inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale , ce qui aurait permis un gain de temps non négligeable et aurait renforcé la lisibilité de l'action des pouvoirs publics pour répondre aux craintes des élus locaux.
* 11 Proposition de loi n° 793 (2010-2011), déposée le 19 septembre 2011.