C. DES EFFETS SUR LE NIVEAU DES PENSIONS ENCORE DIFFICILES À MESURER
1. L'évolution du montant des pensions
Quelle évolution du niveau des pensions pour les générations concernées par la réforme de 2010 ?
Dans son rapport de juin 2011, la commission des comptes de la sécurité sociale cite une simulation effectuée par la Cnav selon laquelle le relèvement des âges légaux devrait se traduire, à long terme, par une hausse moyenne des pensions au fil des générations, de 2 % pour la génération 1967 et d'un peu moins de 3 % pour la génération 1977. Ce résultat tiendrait au fait que plus l'âge de départ est élevé, plus il est facile d'atteindre la durée d'assurance requise pour le taux plein et plus le montant du salaire moyen des vingt-cinq meilleures années servant de base au calcul de la pension progresse.
Dans l'immédiat, la Drees 11 ( * ) observe que le niveau moyen des pensions a progressé ces dernières années. Le montant moyen de la pension de droit direct, tous régimes confondus, s'établit à 1 194 euros mensuels en décembre 2009, ce qui traduit une progression annuelle moyenne d'environ 1,3 point de pourcentage en plus de l'inflation.
La Drees attribue ce résultat à l'effet de « noria », c'est-à-dire le remplacement des générations les plus âgées de retraités, moins nombreuses et bénéficiant de retraites de moindre niveau, par des générations plus nombreuses bénéficiant de retraites plus élevées. Ainsi, les personnes qui liquident un premier droit direct de retraite en 2009 perçoivent un montant de pension de 12 % plus élevé que celles qui décèdent au cours de la même année, soit 1 200 euros contre 1 060 euros mensuels. Le phénomène est particulièrement marqué pour les femmes, puisque la pension moyenne de droit direct des femmes liquidant un premier droit en 2009 est supérieure de plus de 40 % à celle des femmes décédées au cours de l'année.
Pour la Drees, « ceci semble indiquer que l'amélioration progressive des carrières salariales l'emporte encore sur l'impact des réformes des retraites, tout au moins de celle de 1993 » . Elle considère cependant qu'il « n'est pas encore possible de savoir si cette évolution va se poursuivre pour des générations plus récentes, et donc touchées de manière plus importante par la réforme des retraites de 2003 » , l'évaluation de l'impact d'une réforme nécessitant que la quasi-totalité de la génération soit partie en retraite.
A fortiori , il est donc difficile d'anticiper l'impact du relèvement de l'âge légal et des durées d'assurance requises pour les générations concernées par la réforme de 2010.
Les effets du report à soixante-sept ans de l'âge d'attribution du taux plein
On ne peut que réitérer les inquiétudes largement exprimées, lors du débat parlementaire, sur les effets du report de soixante-cinq à soixante-sept ans de l'âge d'attribution de plein droit du taux plein .
Le taux plein a été maintenu à soixante-cinq ans pour certaines catégories d'assurés limitativement énumérées : assurés handicapés, aidants familiaux de personnes handicapées, parents d'enfants handicapés, parents de trois enfants des générations 1951 à 1955 ayant interrompu ou réduit leur activité professionnelle au moment de la naissance ou de l'adoption de l'enfant.
Globalement, on peut craindre une pénalisation des assurés n'ayant pas bénéficié d'un parcours professionnel continu et en premier lieu des femmes, avec un accroissement des difficultés liées au niveau de ressources dans les années qui précèdent l'arrivée aux soixante-sept ans.
La question des pensions de réversion
La législation sur les pensions de réversion a connu de nombreuses modifications ces dernières années.
La condition d'âge devait être progressivement abaissée de cinquante-cinq ans à cinquante ans de 2005 à 2009, avant d'être supprimée en 2011, tout comme l'assurance veuvage. Mais la condition d'âge a été rétablie à cinquante-cinq ans en 2009 et l'allocation veuvage a été maintenue.
Le taux de la réversion, progressivement porté de 50 % à 54 % dans le régime général, devait atteindre à terme 60 %, comme s'y était engagé le Président de la République. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 a circonscrit le relèvement à 60 %, sous la forme d'une majoration de pension , aux veuves et veufs disposant de faibles pensions de retraite, dont les droits propres et dérivés sont inférieurs à un seuil fixé à 824,15 euros au 1 er avril 2011. Cette majoration était en outre réservée aux personnes âgées d'au moins soixante-cinq ans, âge qui a été porté à soixante-sept ans par la réforme de 2010 .
Non seulement la réforme n'a pas traité la question des pensions de réversion , alors qu'elle justifie une revalorisation d'ensemble et une réévaluation des conditions d'attribution, afin d'assurer l'équité entre régimes et de prendre en compte les nouvelles formes de vie en couple, en particulier le Pacs, mais elle marque un recul par rapport au mouvement engagé au début de la précédente décennie .
* 11 Etudes et résultats n° 757 - avril 2001 : « Les retraités et les retraites en 2009 ».