C. DES MESURES PROPRES À ASSURER L'ÉQUILIBRE BUDGÉTAIRE DE LA RÉFORME
1. Le choix d'un durcissement ciblé de la fiscalité des donations et des successions
Pour financer la réforme de la fiscalité du patrimoine, le Gouvernement a fait le choix de recourir au même bloc patrimonial , en durcissant la fiscalité des donations et des successions de manière ciblée sur les plus hauts revenus . Le Président de la République s'était en effet engagé à ne pas faire porter la réforme par les contribuables non assujettis à l'impôt de solidarité sur la fortune.
Les mesures retenues reviennent sur des dispositifs élaborés depuis 2003, qui - complétées par les mesures adoptées dans le cadre de la loi TEPA - ont contribué à rendre la fiscalité des transmissions plus compétitive, avec pour objectif de favoriser les donations et les successions. Dès lors que les dispositifs issus de la loi TEPA ne sont pas remis en cause, on peut considérer que, malgré les mesures proposées par le présent projet de loi de finances rectificative, notre système fiscal conserve des incitations fortes en matière de successions et de donations .
2. Une adaptation de la fiscalité des donations possible compte tenu de la loi TEPA
a) L'augmentation de six à dix ans du délai de rappel des donations
Toute donation est considérée comme une ouverture anticipée et partielle de la succession à venir. Ainsi, tout donataire, héritier ou légataire doit ajouter à la valeur des biens compris dans la donation ou la succession, les donations qui lui ont antérieurement consenties par le donateur ou le défunt.
Depuis 2006, les transmissions effectuées depuis plus de six ans - et non plus dix ans - n'entrent pas en compte dans le calcul des droits de mutation à titre gratuit dus à l'occasion d'une nouvelle donation ou d'un décès.
L'article 3 du projet de loi de finances rectificative revient sur ce dispositif en prévoyant l'augmentation de six à dix ans du délai de rappel des donations . Les donations effectuées entre l'été 2001 et l'été 2005 seront en conséquence réintégrées aux successions ayant lieu à l'été 2011.
En outre, l'article 3 prévoit la possibilité de rectifier la valeur d'un bien transmis entre six et dix ans afin d'asseoir les droits de mutation à titre gratuit dus à raison de la succession ou de la donation considérée, sur la base de la réalité des donations précédentes.
Les recettes attendues de cette mesure sont estimées à 18 millions d'euros en 2011, puis à 450 millions d'euros à partir de 2012.
b) La suppression des réductions de droits de donation liées à l'âge du donation
Des réductions de droit de donation en fonction de l'âge du donateur existent depuis 1979 . Aux termes de l'article 790 du code général des impôts, celles-ci s'élèvent à 50 % pour un donateur de moins de soixante-dix ans ou à 30 % pour un donateur de plus de soixante-dix ans et de moins de quatre-vingt ans, dans le cas d'une donation en pleine propriété ou en usufruit. En outre, ces réductions s'élèvent respectivement à 35 % et 10 % dans le cas d'une donation en nue-propriété.
L'article 4 prévoit la suppression de ces réductions, dès la promulgation de la loi .
Les recettes s'élèveraient, selon le Gouvernement, à 130 millions d'euros en 2011 , puis à 290 millions d'euros à compter de 2012 .
3. Une contribution supplémentaire pour les successions les plus importantes
L'article 2 du présent projet de loi de finances rectificative propose la modification de l'article 777 du code général des impôts, en augmentant de cinq points le tarif des deux dernières tranches du barème d'imposition applicable aux successions et donations consenties en ligne directe, ainsi qu'aux donations entre époux ou entre partenaires liés par un pacte civil de solidarité (PACS).
Les taux applicables seraient ainsi relevés de 35 % à 40 % pour la fraction de la part nette comprise entre 902 838 euros et 1 805 677 euros, et de 40 % à 45 % pour la fraction de la part nette taxable supérieure à 1 805 677 euros .
Les recettes attendues par le nouveau dispositif s'élèvent à 23 millions d'euros en 2011 et à 185 millions d'euros à partir de 2012.
4. Des mesures de financement satisfaisantes et cohérentes avec l'objet de la réforme
Le choix du Gouvernement apparaît cohérent , dans la mesure où la réforme se limite à la fiscalité sur la détention et la transmission des patrimoines. L'équilibre financier ainsi dégagé apparaît satisfaisant puisque ces trois mesures devraient engendrer des recettes de l'ordre de 171 millions d'euros en 2011 et de 925 millions d'euros en 2012 , et que le Gouvernement a annoncé que la réforme dans sa globalité serait susceptible de dégager à terme de légers surplus de recettes, en se fondant toutefois sur des hypothèses optimistes (cf. infra ).
Au total, les trois mesures examinées sont satisfaisantes : sans remettre en cause les exonérations dont bénéficient les petites et moyennes successions et donations depuis la loi TEPA de 2007, et qui contribuent très largement à encourager les transmissions précoces du patrimoine, au bénéfice de l'installation des jeunes et de la consommation, les présentes mesures relatives aux donations et successions font porter l'essentiel de l'effort sur les transmissions les plus importantes, en ciblant les plus haut revenus et patrimoines .
Enfin, comme l'a souligné le Gouvernement, ces dispositions semblent moins nécessaires, voire inutiles, depuis l'entrée en vigueur de la loi TEPA , qui a considérablement allégé les droits de succession et de donation. Les mesures proposées ne devraient donc pas peser sur le dynamisme des mouvements de patrimoine des anciennes vers les nouvelles générations . Elles sont donc, aussi, légitimes au regard de l'efficacité économique. Malgré tout, votre rapporteur général souligne la sensibilité particulière de la suppression des réductions de droits liées à l'âge du donateur. Il relève à cet égard qu'il conviendra de vérifier à moyen terme qu'elle ne s'avère pas préjudiciable à la fluidité des transmissions intergénérationnelles.