ANNEXE III - TRAVAUX DE LA COMMISSION
Réunie le mercredi 25 mai 2011 , sous la présidence de M. Jean-Paul Emorine, président, la commission procède à l'examen du rapport et du texte de la commission sur la proposition de résolution européenne n° 523 (2010-2011), présentée au nom de la commission des affaires européennes par MM. Yann Gaillard et Simon Sutour , en application de l'article 73 quarter du Règlement, sur une politique européenne de cohésion ambitieuse après 2013.
M. Rémy Pointereau, rapporteur . - Dans le cadre de la préparation des prochaines perspectives financières de l'Union européenne pour la période 2014-2020, un débat s'est engagé au niveau européen sur le bien-fondé de la politique de cohésion, sur les améliorations qui pourraient lui être apportées, et sur les montants de crédits qu'il est justifié de lui consacrer. Dans un souci d'économie, certains États-membres sont tentés de réduire l'ampleur d'une politique commune, qui a pourtant fait les preuves de son efficacité pour réduire les écarts de développement économique et social entre les différentes régions européennes.
Ce débat a été ouvert par la Commission européenne, avec le cinquième rapport sur la cohésion économique, sociale et territoriale qu'elle a rendu public en novembre. Sur la base de ce document, elle a lancé une vaste consultation, à laquelle la commission des affaires européennes du Sénat a participé en adoptant le 26 janvier 2011 un rapport d'information fait par MM. Yann Gaillard et Simon Sutour sur la politique de cohésion. Cette proposition de résolution s'inscrit dans le prolongement de ce rapport, dont elle reprend les principales orientations.
Premièrement, la commission des affaires européennes refuse de devoir choisir entre politique agricole commune et politique de cohésion. Certes, elle estime naturel que la France, premier bénéficiaire net de la PAC, affiche la défense de cette politique comme une priorité, d'autant que l'avenir alimentaire de l'Europe est en jeu. Elle souligne, toutefois, qu'après 2013 la France cessera probablement d'être bénéficiaire nette au titre de la PAC, en raison de l'application de celle-ci aux nouveaux États-membres.
Elle considère donc que la position française dans les négociations sur les perspectives financières après 2013 ne peut se résumer au seul principe selon lequel toute baisse du soutien à l'agriculture affecterait le bilan de la France, alors que la réforme de la politique de cohésion proposée par la Commission européenne pourrait contribuer à améliorer le bilan financier de notre pays à l'égard de l'Union européenne. C'est pourquoi la proposition de résolution, « appelle le Gouvernement à défendre la politique de cohésion, sans préjudice de la défense de la politique agricole commune ». De plus, elle « recommande d'écarter toute tentative de renationalisation de la politique de cohésion, comme des autres politiques communes ».
Deuxièmement, la commission des affaires européenne approuve sans réserve la proposition de la Commission européenne de créer une nouvelle catégorie de régions intermédiaires, dont le PIB par habitant serait compris entre 75 % et 90 % de la moyenne communautaire. Elle fait valoir que cette réforme pourrait bénéficier, outre la Martinique qui sortira en 2013 de l'objectif « convergence », à dix régions métropolitaines : la Corse, le Languedoc-Roussillon, la Picardie, le Limousin, le Nord-Pas-de-Calais, la Basse-Normandie, la Lorraine, la Franche-Comté, le Poitou-Charentes et l'Auvergne. Au total, tout en réduisant les effets de seuil, l'aide supplémentaire apportée à ces régions pourrait s'élever à 3 milliards d'euros, sans rien retirer aux autres régions françaises relevant de l'objectif « compétitivité ».
En conséquence, la commission des affaires européennes regrette la prudence du Gouvernement français à l'égard de cette proposition, dont il n'accepte le principe qu'à la condition d'une baisse de la part du budget européen dédiée à la politique de cohésion.
La commission des affaires européenne propose, pour sa part, un moyen pour limiter la progression des crédits consacrés à la politique de cohésion. Considérant que les nouveaux États-membres peinent à absorber les fonds européens qui leur sont alloués au titre de la cohésion pour la période 2007-2013, elle demande, dans sa proposition de résolution, « une révision à la baisse des plafonds exprimés en pourcentage du PIB décidés en 2006 pour contenir les transferts financiers au titre de la cohésion vers les nouveaux États membres, dans la mesure où le PIB de ces derniers s'est accru depuis ».
En troisième lieu, la proposition de résolution accorde un intérêt particulier aux régions ultrapériphériques, c'est-à-dire aux quatre départements d'outre-mer qui sont les seules régions françaises éligibles à l'objectif « convergence », ainsi qu'aux régions « visées au troisième alinéa de l'article 174 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne », c'est-à-dire aux régions souffrant de handicaps naturels ou démographiques graves et permanents, tels que les régions les plus septentrionales à très faible densité de population et les régions insulaires, transfrontalières et de montagne. Cette dernière mention a été ajoutée à la demande de notre collègue Jacques Blanc, président du groupe d'études sur le développement économique de la montagne.
Enfin, la commission des affaires européennes s'inquiète du fait que le débat actuel sur la politique de cohésion semble ignorer la problématique rurale, alors que les régions à prédominance rurale représentent 50 % du territoire et 20 % de la population de l'Union européenne. Elle observe que la PAC et la politique de cohésion sont intimement liées, puisque le deuxième pilier de la PAC permet la mise en oeuvre de la seconde politique en milieu rural.
La proposition de résolution se conclut donc en insistant « sur l'importance du maintien d'une enveloppe financière consistante pour le volet non agricole du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) ».
Telle qu'elle est rédigée, cette proposition que nous a transmise la commission des affaires européennes peut recueillir notre approbation. Je me permettrai toutefois de vous suggérer de la compléter sur trois points.
Premièrement, nous pourrions réaffirmer la légitimité de la France à faire valoir ses propres contraintes budgétaires. Ceux qui ont participé à la réunion de la semaine dernière se souviennent que, dans la version initiale présentée par MM. Yann Gaillard et Simon Sutour, le dixième alinéa de la proposition de résolution préconisait un rééquilibrage « au profit des États contributeurs nets de la politique de cohésion ». Nous avons eu un vif débat sur cette question. De même, cette version initiale comportait un alinéa supplémentaire jugeant « essentiel de ne pas dégrader encore le solde net de la France à l'égard de l'Union européenne ». Ce membre de phrase et cet alinéa ont été supprimés à l'issue du débat commun à nos deux commissions, plusieurs intervenants ayant estimé que raisonner en termes de solde net est contraire à la logique même de la construction européenne, dans laquelle chaque État-membre ne peut pas exiger un exact retour de sa contribution budgétaire. Partageant ce point de vue, je vous propose un amendement qui dit la même chose de façon plus diplomatique.
Deuxièmement, il convient de prendre position sur la création d'une réserve « performance » à l'échelon de l'Union afin d'encourager la poursuite des objectifs de la stratégie « Europe 2020 ». Une partie limitée des ressources consacrées à la politique de cohésion serait mise de côté et allouée, à l'occasion d'une évaluation à mi-parcours, aux États-membres et aux régions dont les programmes contribueraient le plus à la réalisation de ces objectifs. Mon deuxième amendement estime que cette proposition n'est acceptable que si ces objectifs sont définis clairement au préalable et assortis d'indicateurs de résultats mesurables. Faute d'accord sur ces objectifs et ces indicateurs, je ne crois pas qu'il serait prudent de s'engager dans cette logique de réserve « performance », qui risquerait alors de prêter à des controverses sans fin.
Le dernier amendement tend à assouplir la règle du dégagement d'office, c'est-à-dire du reversement des crédits inemployés au budget européen. C'est en début de programmation que cet assouplissement serait le plus utile, car c'est alors que se concentrent les retards au démarrage des projets sélectionnés.
Tels sont les ajouts que je vous propose d'apporter à la proposition de résolution qui nous vient de la commission des affaires européennes, que nous pouvons alors adopter à notre tour.
M. Daniel Raoul . - Je suis d'accord avec ce qui vient d'être dit, mais je m'interroge sur la méthode qui a été suivie. La semaine dernière, nous avons travaillé de concert avec la commission des affaires européennes, des amendements ont été adoptés, et voilà qu'aujourd'hui vous nous proposez de nouveaux amendements ! La prochaine fois, il faudra travailler autrement.
M. Jean-Paul Emorine, président . - Il s'agit de la procédure normale : la commission des affaires européennes nous a invités par courtoisie mais nous sommes saisis au fond de cette proposition de résolution. En outre, nos amendements sont complémentaires et ne remettent pas en cause ce que la commission des affaires européennes a décidé.
La commission examine ensuite les amendements du rapporteur.
Alinéa additionnel après l'alinéa 14
M. Rémy Pointereau, rapporteur . - L'amendement n° COM-1 réécrit de façon plus diplomatique le consentement de la France, sous certaines réserves, d'être contributeur net.
L'amendement n° COM-1 est adopté, M. Daniel Raoul s'abstenant.
Alinéas additionnels après l'alinéa 18
L'amendement n° COM-2 est adopté ainsi que l'amendement n° COM-3.
Puis la proposition de résolution est adoptée dans la rédaction de la commission.