II. ANALYSE PAR PROGRAMME

L'analyse des programmes de la mission ne constitue pas une description exhaustive des dispositifs et des crédits qui leur sont consacrés 30 ( * ) . Elle se concentre en effet sur les questions faisant l'objet d'un suivi particulier par votre rapporteur spécial et votre commission des finances .

A. LE PROGRAMME 154 « ECONOMIE ET DÉVELOPPEMENT DURABLE DE L'AGRICULTURE, DE LA PÊCHE ET DES TERRITOIRES »

1. Le programme qui valait deux milliards

Comme on l'a vu plus haut, le programme 154 « Économie et développement durable de l'agriculture, de la pêche et des territoires » a absorbé en 2009 l'ancien programme 227 « Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés ».

Doté de la moitié des crédits de la mission, le programme 154 est le support privilégié de la politique d'intervention du ministère en faveur du monde agricole . Il intervient en complément des financements du fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), qui sont dotés respectivement de 10 milliards d'euros et de 800 millions d'euros par an.

a) Principales évolutions constatées sur les crédits

Dépourvu de dépenses de personnel, le programme 154 est composé à 86 % de crédits d'intervention (1,7 milliard d'euros) et à 14 % de crédits de fonctionnement (276,8 millions d'euros). Il voit ses crédits augmenter de 4 % en AE et de 9 % en CP, pour s'établir à deux milliards d'euros (1,97 milliard d'euros en AE et 2,03 milliards d'euros en CP).

Cette évolution s'explique par deux mouvements de sens contraire :

- la fin de certains dispositifs tels que le plan exceptionnel de soutien à l'agriculture (environ 200 millions d'euros en 2010), la mesure rotationnelle en faveur de l'assolement (135 millions d'euros en 2010) ou, encore, certaines contreparties nationales au bilan de santé de la PAC (22 millions d'euros en 2010) ;

- l'extension des exonérations de cotisations sociales pour les TO-DE (compensation à la MSA de 492 millions d'euros en AE=CP pour 2011, dont 291 millions d'euros seront traités en mesures de périmètre), le plan de développement des filières (300 millions d'euros sur trois ans annoncés par le ministère, dont 60 millions d'euros en AE à la charge du programme 154 en 2011 31 ( * ) ) et la poursuite des mesures prioritaires que sont la prime nationale supplémentaire à la vache allaitante (PNSVA), l' indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN) et les aides aux filières de production des départements d'outre-mer , respectivement dotées de 165 millions d'euros, 248 millions d'euros et 90 millions d'euros et qui nécessitent un niveau de CP adapté en 2011.

Répartition par action et par titre des AE du programme 154

(en euros et en pourcentage)

Action

Titre 2 Personnel

Titre 3 Fonctionnement

Titre 5 Investissement

Titre 6 Intervention

Total

%

11 - Adaptation des filières à l'évolution des marchés

-

100 000

-

482 636 600

482 736 600

24,50%

12 - Gestion des crises et des aléas de la production

-

-

-

45 300 000

45 300 000

2,00%

13 - Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles

-

-

-

269 114 962

269 114 962

14,00%

14 - Gestion équilibrée et durable des territoires

-

675 000

500 000

837 005 188

838 180 188

42,40%

15 - Moyens de mise en oeuvre des politiques publiques et gestion des interventions

-

265 609 000

-

8 000 000

273 609 000

13,80%

16 - Gestion durable des pêches et de l'aquaculture

-

10 422 000

-

55 300 000

65 722 000

3,40%

Total

0

276 806 000

500 000

1 697 356 750

1 974 662 750

100,00%

%

0,00%

14,00%

0,03%

85,97%

100,00%

Source : commission des finances, d'après le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2011

Plus de 40 % des AE (838,2 millions d'euros) est dédié à la « Gestion équilibrée et durable des territoires » (action 14). Cette action contient la plupart des dispositifs de soutien au maintien de l'activité en zones difficiles , en particulier l' indemnité compensatrice de handicap naturel (ICHN), stabilisée à 248 millions d'euros en 2011. L'augmentation de l'action de 81 % en 2011 résulte surtout de la mise en oeuvre de mesures d'exonérations de charges sociales pour les TO-DE, qui donnent lieu à compensation auprès de la MSA (492 millions d'euros en AE=CP pour 2011, dont 291 millions d'euros seront traités en mesures de périmètre, soit un surcoût de 201 millions d'euros pour l'action 14 du programme 154).

L'action 14 vise également la promotion de pratiques agricoles respectueuses de l'environnement :

- prime herbagère agro-environnementale 32 ( * ) (PHAE) ;

- mesure rotationnelle agro-environnementale 33 ( * ) ;

- programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole (PMPOA) ;

- mesures agro-environnementales régionales (MAER).

Les crédits en faveur de l'agriculture biologique sont en baisse, mais l'effort en faveur de ce secteur n'est pas remis en question puisque cette réduction des crédits est compensée par une prise en charge accrue par la PAC suite à son bilan de santé.

Un quart des dotations (482,74 millions d'euros) est consacré à l'« Adaptation des filières à l'évolution des marchés » (action 11). Cette action, en hausse de 1 % en AE et de 2% en CP par rapport à la loi de finances pour 2010, regroupe notamment les crédits de la prime nationale supplémentaire à la vache allaitante 34 ( * ) (PNSVA), les aides aux filières de production outre-mer 35 ( * ) , ainsi que les autres aides aux filières servies par l'intermédiaire de FranceAgriMer et de l'ODEADOM. La stabilisation des moyens de l'action 11 en 2011 concerne également les interventions des offices et la politique de la qualité, concrétisée par la création du fonds de structuration des filières issues de l'agriculture biologique dit « Fonds avenir bio », qui s'inscrit dans le plan ministériel « agriculture bio : horizon 2012 ». En dehors de ces lignes, les dotations des autres sous-actions sont en baisse. Votre rapporteur spécial s'inquiète en particulier de la réduction des crédits visant le soutien des exportations , qu'il s'agisse du Fonds pour les investissements stratégiques des industries agroalimentaires (FISIAA) ou de nos actions internationales, à travers la Sopexa notamment.

L'« Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles » est, en volume de crédits, la troisième action du programme (14 % des AE, soit 269 millions d'euros). Y figurent les moyens dédiés à l'installation, à la modernisation et au départ . La baisse des crédits de cette action (- 8 % en AE et - 21 % en CP) résulte surtout de la contraction du plan de performance énergétique (PPE), suite au report sine die de la taxe carbone qui devait en assurer une partie du financement, mais aussi de la réduction des prêts bonifiés à l'installation (PBI). On constate, par ailleurs, un gel des dispositifs liés au soutien à l'installation , et notamment les dotations aux jeunes agriculteurs (256 millions d'euros, dont 161 millions inscrits sur le programme et 95 millions d'exonérations fiscales et sociales), dont le taux de cofinancement communautaire de 50 % est maintenu jusqu'en 2015. Enfin, les crédits de préretraite augmentent (aides à la cessation d'activité accrus de 95 % en AE), ainsi que, dans une moindre mesure, les prêts de modernisation et l'indemnité viagère de départ.

Les subventions pour charges de service public des opérateurs ont été regroupées sous l'action 15 « Moyens de mise en oeuvre des politiques publiques et gestion des interventions » (près de 275 millions d'euros et 14 % des AE du programme, stables par rapport à 2010). Ce choix, résultant probablement d'un souci de commodité en gestion, participe d'une catégorisation des dépenses par titre plutôt que par destination et paraît peu compatible avec l'esprit de la LOLF . Les crédits de l'action 15 correspondent ainsi à une partie des subventions pour charges de service public allouées à l'Agence de services et de paiement (112 millions d'euros sur cette action et un milliard d'euros en totalité), à FranceAgriMer (91 millions d'euros sur cette action et 253 millions d'euros en totalité) et à l' ODEADOM (4 millions d'euros sur cette action et 46 millions d'euros en totalité). La subvention revenant aux Haras nationaux, désormais IFCE , fixée à 41,6 millions d'euros en 2011, est quant à elle en baisse de 2,4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2010. A ce stade, les réformes des opérateurs du programme, appelées par la RGPP, semblent encore loin de permettre des économies dignes de ce nom .

La politique de la pêche fait l'objet de l'action 16 « Gestion durable des pêches et de l'aquaculture » dotée de 65,7 millions d'euros en AE. L'augmentation des crédits de cette action avait été massive en 2009 en raison de la mise en oeuvre du Plan pour une pêche durable et responsable (PPDR) depuis 2008. La fin du cycle de dépenses de ce plan arrivé à son terme explique la baisse des crédits en 2010 (- 115 millions d'euros en AE et - 54 millions d'euros en CP par rapport à 2009) et en 2011, qui doit être nuancée par la légère reprise des engagements (+ 13 millions d'euros en AE et - 29 millions d'euros en CP, soit une baisse de 34 %).

Enfin, seuls 2 % des crédits sont dédiés à la « gestion des crises et des aléas de production ». L'action 12 n'est en effet dotée que de 45,3 millions d'euros d'AE. Ils sont notamment consacrés à l'assurance récolte (33,3 millions d'euros en AE=CP), à la dotation du fonds d'allègement des charges (FAC), pour 8 millions d'euros en AE=CP, et au mécanisme « Agridiff » pour les agriculteurs en difficulté (4 millions d'euros en AE).

b) Les dépenses fiscales

Pour l'année 2011, le montant total des dépenses fiscales rattachées au programme 154 est d' au moins deux milliards d'euros , y compris les dépenses sur impôts locaux prises en charge par l'Etat, soit un montant identique aux crédits proposés par le présent projet de loi de finances pour 2011.

Les principales dépenses fiscales du programme 154 concernent (les montants indiqués représentent le coût annuel de la mesure) :

- la lutte contre le réchauffement climatique, l'amélioration de la sécurité énergétique et le développement économique des filières agricoles, à travers le taux réduit de taxe intérieure de consommation applicable au fuel domestique utilisé comme carburant , d'un coût estimé à 1,1 milliard d'euros, et l' exonération partielle de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, qu'il s'agisse du gaz naturel ( TICGN ) ou des produits pétroliers ( TIPP ), pour un montant de 200 millions d'euros. Un dispositif complexe encourage en outre le développement des biocarburants ;

- l' installation des jeunes agriculteurs , dans la mesure où le renouvellement des générations d'agriculteurs demeure une priorité du Gouvernement. Ces mesures, mises en oeuvre pendant les cinq premières années d'activités, période où la fragilité des structures est la plus grande consistent en une diminution du bénéfice imposable (abattement de 50 % sur les bénéfices pendant les soixante premiers mois d'activité, pour 60 millions d'euros), une réduction de la taxe foncière sur les propriétés non bâties et un abaissement des droits d'enregistrement en cas d'acquisition d'immeubles ruraux ;

- le soutien à l'investissement et à l'épargne en agriculture, avec la déduction pour investissement (DPI) , qui s'élève à 160 millions d'euros, et la déduction pour aléa (DPA) , de 60 millions d'euros, qui vise pour sa part à inciter les agriculteurs à constituer une épargne de précaution. Contrairement à la DPI, dispositif très apprécié des agriculteurs puisque 50 000 environ l'utilisent, la DPA demeure encore sous utilisée. Afin de la rendre plus attractive, ce dispositif a fait l'objet de plusieurs modifications depuis sa création, notamment dans le cadre de la loi de finances pour 2010 avec la réintroduction de l'aléa économique ;

- les allègements de charges fiscales liés aux caractéristiques de l'activité agricole. Ainsi les terres agricoles sont totalement exonérées des parts régionale et départementale de la taxe foncière sur les propriétés non bâties et bénéficient d'une exonération de 20 % de la part communale de cette taxe depuis 2006 (étant précisé que cette exonération bénéficie intégralement au fermier quand les terres sont louées par bail). Un crédit d'impôt en faveur de l'agriculture biologique a été créé en 2006 (coût de 33 millions d'euros) et le présent projet loi de finances pour 2011 propose de le reconduire. Enfin, les dépenses engagées par les agriculteurs dont la présence quotidienne est nécessaire sur l'exploitation, afin d'assurer leur remplacement par un tiers durant une période de congé donne lieu à un crédit d'impôt spécifique ; reconduit pour une année par la loi de finances pour 2010, l'avenir de ce dispositif reste incertain Une mission d'évaluation de la mesure a été confiée au Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux et devra éclairer le Gouvernement sur la possible demande de prorogation de ce crédit d'impôt, dans le respect des règles nationales et européennes. Un amendement pourrait donc être déposé dans ce sens lors de l'examen du présent PLF ;

- les dépenses fiscales qui procèdent de l'aménagement du territoire. Pour soutenir l'emploi en milieu rural, les groupements d'employeurs peuvent ainsi constituer des provisions défiscalisées afin de couvrir leur responsabilité solidaire pour le paiement de dettes salariales . De même, dans la mesure où les activités équestres (préparation et d'entraînement des équidés domestiques en vue de leur exploitation, à l'exclusion des activités du spectacle) contribuent à l'aménagement des territoires ruraux, le caractère agricole de ces activités a été reconnu sur un plan fiscal. Les exploitants tirant des revenus de ces activités sont donc imposés dans la catégorie des bénéfices agricoles et bénéficient à ce titre d'une exonération de taxe foncière. Enfin, un taux réduit de TVA est applicable à certains produits phytosanitaires et engrais (60 millions d'euros).

2. Principales observations sur la justification au premier euro
a) La faiblesse du dispositif budgétaire de gestion des crises

Le paradoxe veut que les aléas climatiques, sanitaires ou économiques, dont on a vu qu'ils bouleversaient profondément l'exécution budgétaire chaque année, soient pris en charge par l'action la moins dotée du programme.

Bien que la survenue de crises soit par nature imprévisible et rende difficile toute budgétisation en loi de finances initiale, le caractère récurrent des aléas qui touchent le monde agricole peut ici faire douter de la sincérité de la prévision .

Si la reconduction des crédits du Fonds d'allègement des charges est bienvenue 36 ( * ) , votre rapporteur spécial ne peut que regretter qu'une fois encore, le fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA), qui a pris en 2010 le nom de fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA) 37 ( * ) , ne soit pas doté par le projet de loi de finances pour 2011, alors même que l'article L. 361-5 du code rural dispose que les ressources du fonds sont composées d'une subvention inscrite au budget de l'Etat 38 ( * ) . Le MAAP fait valoir que « le ministère du budget s'oppose à l'inscription de crédits en loi de finances initiale au titre des calamités » 39 ( * ) , au motif que le montant des indemnisations à verser n'est pas connu au moment de l'élaboration du budget. Cette argumentation est contestable, dans la mesure où la loi dispose explicitement que le montant de subvention de l'Etat dont bénéficie le FNGCA doit être au moins égal au produit des contributions des exploitants, et non au montant des indemnisations à attribuer . Lors de son audition par votre commission des finances, le 14 octobre 2009, le ministre de l'Alimentation, de l'agriculture et de la pêche a fait valoir un autre argument : « l'absence de dotation du FNGCA s'explique par l'obligation de la survenue de sinistres préalables ». Votre rapporteur spécial s'interroge encore sur l'existence d'une telle obligation.

Le projet annuel de performances ne mentionne même pas le FNGRA , ce qui constitue un recul par rapport aux PAP des deux années précédentes, qui précisaient au moins que le fonds « serait doté en 2011 » . Il est donc possible, sinon probable, qu'en 2011 votre commission des finances continue à émettre des avis favorables sur d'autres décrets d'avance permettant d'abonder le programme en gestion.

Au-delà de la question du FNGRA, votre rapporteur spécial souligne qu'il accorde une grande attention à la question des dispositifs de gestion des aléas climatiques, sanitaires ou économiques, remaniés en 2010 par la LMAP. Il estime que la problématique de la réassurance publique doit être également appréhendée au regard de son coût budgétaire précis et que d'autres solutions alternatives doivent être envisagées, à l'instar de l'extension de la couverture des risques par les mécanismes de marché . Il remarque en outre que ce point pourrait être approfondi dans le cadre d'une mission de contrôle budgétaire.

b) Le financement de la filière cheval et la réforme des Haras nationaux

En 2011, la réduction de 2,4 % qui suit la baisse de 4,25 % déjà enregistrée pour 2010 par rapport à 2009, de la subvention pour charges de service public attribuée à l'Institut français du cheval et de l'équitation (IFCE) couronne le succès de la démarche de modernisation des Haras nationaux entamée ces dernières années et appelée de ses voeux par votre commission des finances 40 ( * ) .

En application des prescriptions émises en juin 2008 dans le cadre de la RGPP, le regroupement des Haras nationaux et de l'Ecole nationale d'équitation a en effet conduit à la création le 1 er février 2010, par le décret n° 2010-90 du 22 janvier 2010, de l'Institut français du cheval et de l'équitation (IFCE) , sous la forme d'un établissement public à caractère administratif (EPA) placé sous la double tutelle des ministères chargés des sports et de l'agriculture. Alors que l'IFCE, nouvel opérateur unique de l'État pour la filière cheval, n'est centré que sur des missions de service public, les activités des Haras nationaux qui étaient menées dans le secteur concurrentiel sont désormais transférées au groupement d'intérêt public (GIP) France Haras.

Selon le PAP 2011, le recentrage des Haras nationaux sur leurs « seules missions de service public » à travers l'IFCE , et l'évolution de cet établissement vers un organe permettant de mieux structurer l'ensemble de la filière « sont engagés, au travers d'un plan progressif sur cinq ans » . Un programme de réduction des effectifs de l'opérateur à hauteur de 147 ETP sur 2009-2011 a, en outre, été décidé. Ce programme se traduit donc par la diminution progressive de sa subvention pour charges de service public.

Votre rapporteur spécial se félicite de la création de l'IFCE et de ces orientations traduites dans le nouveau contrat d'objectifs et de moyens de l'opérateur, censé couvrir la période 2009-2013. Toutefois, dans un tel contexte de réforme, un bilan objectif du financement de la filière équine devait être entrepris. A son terme, votre rapporteur spécial vous propose un amendement portant sur les crédits du programme de manière à alléger le choc de la baisse de 47 % du soutien budgétaire du ministère aux subventions à la filière cheval hors IFCE . Une baisse de 30 % paraît en effet plus acceptable.

Le financement de la filière équine

L'organisation de la filière prend notamment depuis 2005 la forme d'un fonds de financement de la filière équine , géré par la Fédération nationale des courses françaises (FNCF) , association instituée par le décret n° 97-456 du 5 mai 1997. Il s'agit du « Fonds Eperon », placé sous la direction d'un comité composé de huit professionnels et d'un seul représentant de l'Etat qui représente un montant annuel de l'ordre de 10 millions d'euros , redistribués au profit de l'ensemble des sports équestres, de l'équitation de loisir, ou, encore, de l'attelage et destinés à participer au financement de projets structurants et innovants.

Ce montant paraît bien faible par rapport au retour assuré par les courses hippiques, dont le rôle est essentiel dans le financement de la filière cheval - à la faveur du reversement du résultat net du PMU aux sociétés mères et aux autres sociétés de courses, soit 731,5 millions d'euros en 2009 et qui pourrait être de l'ordre de 820 millions d'euros par an à partir de 2011 avec l'entrée en vigueur de l'article 11 quinquiès du présent projet de loi de finances. Les sociétés de courses et leurs sociétés mères, insérées dans une organisation nationale appelée « l'Institution des courses françaises », elle-même représentée par une association, la FNCF, disposent donc de moyens sans commune mesure avec les autres composantes de la filière équine.

Il convient toutefois de souligner l'existence de crédits budgétaires au service de la politique du cheval. Des ressources dont le montant reste à déterminer proviennent de subventions versées par le ministère de la Santé et des sport s (parmi elles, la subvention allouée à l'IFCE représente 7,2 millions d'euros en 2010 et en 2011) mais, surtout, par le ministère de l'Alimentation, de l'agriculture et de la pêche , qui consacre différentes ressources à la filière. La subvention allouée à l'IFCE par le programme 154 de la mission APAFAR s'est ainsi élevée à 42,6 millions d'euros en 2010 et serait réduite à 41,6 millions d'euros en 2011 . L'IFCE, opérateur de l'Etat, apporte un soutien aux professionnels de la filière et, dans cette optique, met en place des contrats de partenariat. Par ailleurs, il apporte une aide importante aux chevaux de trait en matière d'étalonnage puisque, pour ceux-ci, l'identification est gratuite (soit un coût d'environ 10 millions d'euros par an).

Le soutien budgétaire du ministère de l'agriculture passe également par l'action 14 du programme 154, soit 9 millions d'euros en 2010 , que le présent PLF propose de réduire drastiquement de 47 % en 2011, pour atteindre 4,72 millions d'euros . Cette ligne abonde les subventions destinées à la filière « sport, loisir, travail », dont l'élevage des chevaux de trait et la production de viande. En sont donc exclues les courses hippiques. Ces crédits sont attribuées aux structures (associations nationales de races et fédérations les regroupant), aux associations ayant un rôle national et d'intérêt général (Handi-cheval, Ligue de protection du cheval, Institut du droit équin), aux primes aux compétitions équestres organisées sous l'égide de la Fédération française d'équitation et, enfin, aux primes aux concours d'élevage 0 à 6 ans et, en particulier, aux primes réservées aux épreuves de 4 à 6 ans organisées par la Société hippique française et dont le but est la formation et la valorisation du jeune cheval (étape essentielle, car le cheval doit être prêt à l'emploi et avoir 5 ou 6 ans pour être commercialisé).

Il convient de noter qu'il existe enfin des aides communautaires à la filière , soit dans le cadre général des aides « agricoles », auxquelles peuvent prétendre les éleveurs de chevaux (mesures de « soutien à l'herbe »), soit la « prime aux races menacées d'extinction » (PRME), soutien destiné aux chevaux de trait d'un montant de 1,5 million d'euros par an en France.

Les conclusions de la RGPP de juin 2008 ont recommandé de mieux cibler les aides à la filière cheval et d'éviter le saupoudrage (certaines primes ont un montant dérisoire et donc sans effet), de responsabiliser les acteurs professionnels et de travailler en concertation sur les redistributions au profit de la filière . Ainsi une réflexion s'est engagée avec les professionnels pour revoir la nature et la répartition des soutiens. Il pourrait ainsi être envisagé de mettre en place prochainement un fonds en faveur de l'élevage dans les filières trait et sport , le cas échéant à partir des gains des paris hippiques. D'ici là, ces deux filières méritent d'être soutenues.

Source : commission des finances

Les principales observations de votre
rapporteur spécial sur le programme 154

1. Les dépenses d'intervention du MAAP sont placées, dans l'ensemble, sous le signe de la continuité en 2011 . Cependant, la réforme des principaux opérateurs du programme doit désormais permettre de réaliser des économies . Le montant des subventions allouées n'apparaît pas très rassurant de ce point de vue. Seule la poursuite de la réduction de la dotation destinée aux Haras nationaux représente un progrès significatif .

2. La gestion des aléas climatiques, économiques et sanitaires reste en 2011 le parent pauvre du programme 154. La réforme de ces dispositifs en 2010 par la LMAP appelle une réflexion sur la problématique de la réassurance publique , qui pourrait faciliter la diffusion de l'assurance récolte . Toutefois, une telle approche doit être appréhendée au regard de son coût budgétaire et il conviendrait d'encourager d'autres solutions alternatives, à l'instar de l'extension de la couverture des risques par les mécanismes de marché .

3. La baisse de 47 % du soutien budgétaire du ministère aux subventions à la filière cheval , hors IFCE, est excessive. Un tel choc doit être amorti de manière à ne pas déstabiliser la filière équine, qui, à l'exception du secteur particulier des courses hippiques, ne bénéficie pas de ressources conséquentes . La mise en place d'un fonds en faveur de l'élevage , le cas échéant à partir d'un prélèvement sur les gains des paris hippiques, doit être mise à l'étude. Dans l'attente d'un tel dispositif, les chevaux de trait et de sport doivent faire l'objet de concours publics subissant une réduction plus raisonnable .


* 30 On se reportera, pour une telle description, au projet annuel de performances de la mission APAFAR annexé au projet de loi de finances pour 2011.

* 31 Le PAP de la mission précise que le solde sur l'exercice 2011 devrait être couvert par le produit de la taxe sur la cession à titre onéreux de terrains nus rendus constructibles, mise en place par la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche (LMAP). Les plans d'aide aux filières ont pour objet d'accompagner les mutations et le renouvellement des générations sur la période 2011-2013, en soutenant la modernisation des bâtiments dans les domaines du bien-être animal et de la performance énergétique des exploitations. Des mesures facilitant la cessation d'activités et la reconversion professionnelle seront également mises en oeuvre.

* 32 La PHAE vise la biodiversité et le soutien de l'élevage par le maintien des surfaces herbagères. Son niveau de CP a été réduit de moitié en 2010 pour atteindre 60 millions d'euros et il est proposé d'inscrire 66 millions d'euros à ce titre pour 2011. La baisse des crédits depuis deux ans résulte d'une prise en charge accrue au titre du cofinancement communautaire (75 % à partir de 2010 au lieu de 55 % précédemment, soit 181 millions d'euros versés par l'UE pour un coût global de la PHAE estimé à 241 millions d'euros). Aucune AE n'est inscrite au titre du présent projet de loi de finances, comme c'était le cas en 2010, ce qui témoigne de la disparition programmée de la PHAE. Elle a permis la signature d'environ 65 000 contrats en cours avec les exploitants agricoles (durée moyenne de cinq ans), ce qui témoigne de son succès mais il est prévu de lui substituer progressivement le nouveau dispositif communautaire de prime à l'herbe.

* 33 Issue du bilan de santé de la PAC, cette mesure rotationnelle en faveur de l'assolement est abandonnée en 2011. Elle avait conduit à prévoir 135 millions d'euros en AE et 29 millions d'euros en CP en 2010. Seuls 27 millions d'euros de CP sont ouverts en 2011 en vue de continuer à couvrir les engagements contractés en 2010.

* 34 La PNSVA reste au même niveau qu'en 2010 et 2009, soit 165 millions d'euros en CP. Cette prime supplémentaire est particulièrement utile dans le contexte des difficultés rencontrées par les éleveurs français.

* 35 90 millions d'euros en 2011, soit un montant similaire à celui arrêté pour 2010.

* 36 Porté de 4 à 8 millions d'euros en 2009, le FAC a été reconduit au même niveau en 2010 et devrait l'être également en 2011. Votre rapporteur spécial observe que le FAC s'est substitué cette année à la bonification des prêts de crise.

* 37 Le champ d'intervention du fonds - qui continuera de couvrir les aléas climatiques - est élargi par la LMAP à la couverture des risques sanitaires et environnementaux. L'incitation ressort surtout de la subvention des primes d'assurance, portée à 65 %, au lieu de 50 %, dans le but de développer la diffusion de l'assurance récolte dans l'ensemble des filières.

* 38 Lors de l'examen du décret d'avance du 25 octobre 2007, qui faisait suite à la pratique récurrente d'un abondement en gestion du FNGCA par des crédits initialement dévolus à la PNSVA, votre rapporteur spécial avait qualifié cette opération d'« acrobatie budgétaire », relevant « d'une interprétation très large de l'urgence et de l'imprévisibilité des dépenses qui doivent fonder le recours à un tel instrument réglementaire ».

* 39 Réponse du ministre de l'agriculture et de la pêche à un référé de la Cour des comptes du 25 juin 2007.

* 40 Voir les rapports d'information n° 64 (2006-2007) « Les Haras nationaux doivent-ils dételer ? » et n° 218 (2007-2008) «  Les Haras nationaux. Pour un outil modernisé au service de la filière cheval ».

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