2. Un objectif d'évolution des dépenses très volontariste, et plus indicatif que prescriptif

Ensuite, la programmation repose sur un objectif, très ambitieux, de croissance des dépenses publiques de 0,6 % par an en volume, figurant à l'article 8 du projet de loi de programmation.

Cet objectif est volontariste, tant du point de vue des programmations précédentes que de celui des exécutions passées, comme le montre le graphique ci-après.

La croissance des dépenses des administrations publiques : prévision et exécution

(en % en volume)

PS : programme de stabilité. LPFP : loi de programmation des finances publiques. PJL : projet de loi.

NB : dans le cas des programmations, le taux indiqué est le taux moyen sur la période.

Source : commission des finances, d'après l'Insee et les textes indiqués

Ainsi, alors que les programmations retiennent des hypothèses de croissance des dépenses publiques de l'ordre de 1 % par an en volume, l'exécution moyenne est de 2,4 % depuis le début des années 2000.

L'objectif de 0,6 % affiché par le Gouvernement suscite d'autant plus d'interrogations que celui-ci n'a pas souhaité inscrire dans le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 de dispositif de pilotage global des dépenses publiques. En effet, il ne s'est pas rallié à l'idée selon laquelle il serait utile, pour assurer le respect de l'objectif, de se doter d'outils permettant de compenser, par des mesures sur les dépenses ou les recettes de l'Etat ou de la sécurité sociale, d'éventuels dérapages des comptes des organismes sociaux dont il n'assure pas le pilotage - comme l'Unedic -, puisqu'ils ne relèvent pas de la loi de financement de la sécurité sociale.

Cela est d'autant plus préoccupant que le rapport annexé au projet de loi de programmation des finances publiques prévoit une « diminution spontanée des dépenses d'indemnisation du chômage liée à l'amélioration de la situation économique », dont le programme de stabilité 2009-2013 précise qu'elles diminueraient de 5,4 % par an en valeur (et donc 7,15 % en volume) en moyenne en 2011-2013. Compte tenu du niveau des dépenses de l'Unedic en 2010 (de l'ordre de 35 milliards d'euros), cela implique une diminution de ces dépenses de 7 milliards d'euros constants, soit 0,3 point de PIB. Cette hypothèse est déjà optimiste avec un taux de croissance du PIB de 2,5 % 6 ( * ) . Surtout, si l'on retient - comme votre commission des finances - l'hypothèse « neutre » d'une croissance du PIB de 2 % en volume de 2011 à 2014 (correspondant à la croissance potentielle et à la croissance moyenne observée sur longue période), le taux de chômage reste à peu près stable, de même que les dépenses d'assurance chômage en volume.

Cette position est par ailleurs contradictoire avec la volonté affichée du Gouvernement de ramener le déficit à 3 points de PIB en 2013. En effet, pour que la programmation soit respectée avec des dépenses publiques qui dérapent et sans prendre de mesures supplémentaires sur les recettes, il faudrait que la croissance soit supérieure à 2,5 %, ce qui paraît peu vraisemblable.

Au total, votre commission des finances juge donc plus réaliste de retenir les programmations ci-après, qui marquent déjà une inflexion par rapport à la tendance antérieure.

Différents scénarios de finances publiques

(en points de PIB)

2010

2011

2012

2013

2014

A. Gouvernement

Croissance du PIB

1,5

2,0

2,5

2,5

2,5

Solde des administrations publiques

-7,7

-6

-4,6

-3

-2

Etat et organismes divers d'administration centrale

-5,6

-4

-3,1

-2,1

-1,5

Administrations de sécurité sociale

-1,7

-1,5

-1,2

-0,8

-0,5

Administrations publiques locales

-0,4

-0,5

-0,3

-0,2

0

Dette

82,9

86,2

87,4

86,8

85,3

B. Scénario de la commission des finances avec respect des normes de dépenses*

Croissance du PIB

1,5

2

2

2

2

Solde des administrations publiques

-7,7

-5,8

-5,1

-4,3

-3,5

Etat et organismes divers d'administration centrale

-5,6

-4,3

-3,7

-3,2

-2,7

Administrations de sécurité sociale

-1,7

-1,1

-0,9

-0,7

-0,5

Administrations publiques locales

-0,5

-0,5

-0,5

-0,5

-0,5

Dette

82,9

85,9

88,1

89,5

90,1

C. Scénario de la commission des finances avec respect partiel des normes de dépenses**

Croissance du PIB

1,5

2

2

2

2

Solde des administrations publiques

-7,7

-5,9

-5,4

-5,0

-4,4

Etat et organismes divers d'administration centrale

-5,6

-4,3

-3,7

-3,2

-2,7

Administrations de sécurité sociale

-1,7

-1,2

-1,2

-1,2

-1,2

Administrations publiques locales

-0,5

-0,5

-0,5

-0,5

-0,5

Dette

82,9

86,0

88,5

90,4

91,7

* Sauf pour les dépenses d'assurance chômage, du fait de la moindre croissance.

** Croissance des dépenses de l'ordre de 1,3 % par an en volume (contre 0,6 % selon le présent projet de loi et une moyenne de 2,4 % depuis le début des années 2000).

Remarques :

1. On suppose que les collectivités territoriales poursuivent un objectif de solde. Les variations selon les scénarios des taux de croissance des dépenses locales n'ont donc pas d'impact sur leur solde, les collectivités ajustant leurs recettes en conséquence.

2. Le scénario B est légèrement moins favorable que le scénario de croissance à 2 % inséré par votre commission des finances à l'article 3 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, calculé par variation par rapport au scénario du Gouvernement.

Sources : présent projet de loi ; calculs de la commission des finances


* 6 En effet, selon les estimations usuelles (« loi d'Okun » avec un coefficient de 0,35), un tel taux de croissance devrait susciter une diminution du taux de chômage de 0,5 points d'ici 2013, ce qui correspondrait à une économie de seulement 2 milliards d'euros environ.

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