2. La réduction des niches : un PLF 2011 « à retardement »
a) Les effets différés du bouquet et du rabot sur la dépense fiscale
Le tableau et le graphique qui suivent confirment l'analyse développée sur le faible impact des mesures nouvelles en recettes en 2011. Ils montrent en effet que la plupart des mesures de diminution, de suppression, voire d'augmentations de niches ne produisent qu'un effet limité en 2011, estimé à 519 millions d'euros.
Cet effet quadruple en revanche à compter de 2012 , pour passer à 2,13 milliards d'euros. Ce phénomène est aisément explicable : la plupart des mesures de niches portent en effet sur l'impôt sur le revenu et sont donc tributaires du décalage d'un an entre déclaration et imposition.
La montée en puissance progressive des
mesures
du projet de loi de finances pour 2011 sur les niches
fiscales
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, d'après les annexes budgétaires
Il est, en outre, intéressant de relever que ce recensement ne tient pas compte des effets de la suppression du taux réduit de TVA sur les offres composites (Téléphone, télévision et internet). Ce taux réduit n'était, en effet, pas considéré comme une dépense fiscale, mais comme une modalité de calcul de l'impôt. Cette appréciation était manifestement erronée et démontre le caractère incertain et fluctuant de la définition des dépenses fiscales .
Niches fiscales : un projet de loi de finances « à retardement »
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, d'après les annexes budgétaires
b) Une évaluation à fiabiliser
Plusieurs déclassements et réévaluations de dépenses fiscales interviennent en 2011, notamment dans le prolongement des recommandations du rapport de l'inspection générale des finances sur l'évaluation des niches fiscales et sociales relatives aux revenus d'épargne financière.
En 2011, le jeu des classements et déclassements entraîne l'effacement de plus d'un milliard d'euros de dépenses fiscales. Trois dispositifs fiscaux sont classés pour la première fois comme des dépenses fiscales, pour un coût total de 12 millions d'euros . Outre le classement de la déduction, au titre de l'IR, de certains travaux de grosses réparations 27 ( * ) (4 millions d'euros), deux dépenses 28 ( * ) relatives au dispositif « Scellier » outre-mer ont été créées afin d'identifier le coût spécifique de ce dispositif dans les départements d'outre-mer (8 millions d'euros).
En sens inverse, deux dépenses fiscales font l'objet d'un déclassement , pour un coût beaucoup plus significatif de 1,19 milliard d'euros. Il s'agit :
1) de la déduction des cotisations versées au titre de l'épargne individuelle et facultative (PERP et produits assimilés), pour un coût de 390 millions d'euros ;
2) de la déduction du revenu imposable des cotisations de retraite ou de prévoyance complémentaire versées à titre facultatif par les non-salariés et leurs conjoints collaborateurs, pour un coût de 800 millions d'euros.
Ces deux dépenses fiscales ont donc été déclassées sur recommandation de l'inspection générale des finances, au motif que les dispositifs visés confèrent bien un avantage aux contribuables et ont un coût pour l'Etat en trésorerie, mais ne conduisent pas à une perte de recettes définitive , le contribuable étant bien assujetti in fine à l'impôt ou aux contributions sociales sur l'ensemble de ses revenus. Ces mesures sont donc dorénavant considérées comme de simples reports d'imposition .
Par ailleurs, une comparaison des dépenses fiscales les plus coûteuses entre 2010 et 2011 montre que le coût associé à certaines d'entre elles a été révisé dans des proportions considérables. Il en va ainsi :
1) du coût de l'exonération ou de l'imposition réduite attachée aux bons ou contrats de capitalisation et d'assurance vie, qui n'est plus estimé à 3, mais à 1 milliard d'euros en 2010 et en 2011 (- 2 milliards d'euros) 29 ( * ) ;
2) de la dépense fiscale associée au taux de TVA de 5,5 % pour la fourniture de logement dans les hôtels, qui voit également son coût révisé de 1,56 milliard d'euros à 900 millions d'euros pour 2010 (- 660 millions d'euros), puis 930 millions d'euros en 2011. Cette révision résulte d'un changement de méthode de chiffrage 30 ( * ) ;
3) en sens inverse, de l'exonération des sommes versées au titre de la participation, de l'intéressement et de l'abondement aux plans d'épargne salariale, dont le coût était évalué à 1 milliard d'euros en 2010, et qui est désormais estimée à 1,4 milliard d'euros au titre de 2010 puis de 2011 (+ 400 millions d'euros) 31 ( * ) .
Le tome II de l'annexe « Voies et moyens » rappelle que « conformément à l'article 12 de la loi de programmation des finances publiques du 9 février 2009, un rapport d'évaluation de l'ensemble des dispositifs de dépenses fiscales et de niches sociales sera transmis au Parlement avant le 30 juin 2011. Dans cette optique, après une refonte de la méthodologie d'évaluation des dépenses fiscales réalisée par l'inspection générale des finances, un comité d'évaluation a été installé le 23 juin 2010 » . Votre rapporteur général recueillera avec le plus grand intérêt le fruit de ces travaux, dont il est très souhaitable qu'ils fiabilisent enfin l'évaluation de la dépense fiscale.
* 27 Travaux supportés par les nus-propriétaires dans le cas de démembrements de propriété consécutifs à une succession ou une donation.
* 28 Réductions d'impôt au titre de l'investissement locatif et de l'investissement locatif dans le secteur intermédiaire.
* 29 Sur recommandation de l'inspection générale des finances.
* 30 La dépense prend désormais en compte un taux de consommation finale de 60 % dans ce secteur et non plus de 100%, les entreprises intermédiaires déduisant la TVA.
* 31 Sur recommandation de l'inspection générale des finances.