TRAVAUX DE LA COMMISSION
I. AUDITIONS DES MINISTRES
Audition d'Eric WOERTH, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique et Mmes Nadine MORANO, secrétaire d'Etat chargée de la famille et de la solidarité et Nora BERRA, secrétaire d'Etat chargée des aînés
Réunie le mercredi 27 octobre 2010 , sous la présidence de Muguette Dini, présidente , la commission procède à l'audition d'Eric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique et Nadine Morano, secrétaire d'Etat chargée de la famille et de la solidarité et Nora Berra, secrétaire d'Etat chargée des aînés sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.
Muguette Dini , présidente . - Après le projet de loi sur les retraites, il nous faut nous attaquer au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. Nous entendons donc ce matin Eric Woerth, Nadine Morano et Nora Berra.
Eric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique . - J'ai plaisir à vous retrouver après cette longue période d'interruption...
Le déficit des comptes sociaux, qui était de 23,1 milliards en 2010, sera ramené à 21 milliards en 2011. Les mesures du PLFSS reflètent nos orientations : rationalisation des dépenses, mais engagement pour les publics les plus fragiles.
La branche famille aurait connu un déficit de 3,2 milliards en 2011 mais nous l'avons contenu à 3 milliards grâce à deux mesures. La première consiste en une harmonisation des modes de calcul de la prestation d'accueil du jeune enfant (Paje), dont il résultera une économie de 64 millions ; la seconde concerne l'allocation logement, désormais calculée à compter du dépôt de la demande, sans effet rétroactif de trois mois, soit une économie de 140 millions. On préserve le caractère social de ces aides sans en modifier les règles d'accès et, dans le même temps, 200 000 places d'accueil pour les jeunes enfants seront créées, grâce à 1,3 milliard d'argent public accordé entre 2009 et 2012 dans le cadre d'une convention avec la Cnaf.
Pour le secteur médico-social, notre volonté se traduit par une hausse de l'Ondam pour 2011 de 3,8 %, ce qui est significatif. Nous changeons le mode de calcul et abandonnons une comptabilité d'engagement pour être plus près des réalités, c'est-à-dire de la création des places. Pour 2010, nous proposons de restituer 100 millions à l'assurance maladie : les maintenir à la CNSA ne créerait aucune place supplémentaire. Pour la première fois depuis 1997, nous respecterons l'Ondam en 2010. Le plan pour les personnes âgées se poursuit et le plan Alzheimer, qui commence à se traduire sur le terrain, reste une priorité.
Le sujet des retraites a été largement abordé. Le déficit de la branche vieillesse s'établira à 6,9 milliards d'euros, celui du FSV à 3,9 milliards. La réforme qui vient d'être adoptée évitera que le déficit de la branche passe à 10 milliards d'euros. Les mesures de recettes sont efficaces immédiatement alors que les mesures d'âge produisent progressivement leurs effets. Les premières dégageront 3,5 milliards d'euros, dont 3,2 milliards seront affectés à la Cnav. Sur le produit des mesures d'âge, soit 1,7 milliard d'euros, 200 millions iront au FSV.
La mesure clef pour la branche AT-MP est l'allongement du délai de prescription pour les dossiers des victimes de l'amiante. La Cour de cassation ayant mis en évidence un vide juridique, nous avons porté le délai de prescription de quatre à dix ans et prévu que les personnes qui avaient été touchées par le délai de quatre ans disposeront de deux années supplémentaires. Nous avons prévu un point de départ identique pour toutes les victimes, sans distinguer les contaminations au travail ou environnementales. Nous avons cherché la meilleure date et cela reste notre intention.
Nadine Morano, secrétaire d'Etat chargée de la famille et de la solidarité . - Le déficit de la branche famille sera de 2,6 milliards d'euros en 2010 et de 3,2 milliards en 2011. Nous avons choisi de préserver une politique familiale ambitieuse et généreuse : je signerai très prochainement les arrêtés revalorisant les prestations familiales de 1,5 %. Nous consacrons 100 milliards d'euros à la politique familiale, soit 5,1 points de Pib.
Les mesures techniques d'harmonisation seront source d'économies. La suppression de la rétroactivité pour le versement de l'allocation logement représente 240 millions. Cette allocation, de 219 euros en moyenne, bénéficie à 6 290 000 personnes. La Paje sera versée à compter du mois suivant la naissance, ce qui dégagera un gain de 64 millions. Environ 800 000 personnes sont concernées. Les autres aides - prime pour la naissance, de 889 euros, Paje ou complément de libre choix de mode de garde - représentent 12,1 millions.
Nous avons signé une convention d'objectifs et de gestion avec la Cnaf pour augmenter l'offre de garde, grâce notamment aux récentes dispositions sur les assistants maternels. Enfin, l'augmentation du crédit d'impôt famille, de 25 % à 50 %, a favorisé la création de crèches d'entreprise. Nous tiendrons nos objectifs pour 2012.
L'Ondam pour les personnes handicapées connaîtra une progression de 3,3 % en 2011, après 2,8 % en 2010. Le Président de la République a confirmé, le 13 septembre dernier, devant les associations, qu'il n'y aurait pas d'économies dans le secteur du handicap : la solidarité sera totale. Le plan 2008-2012 prévoit l'ouverture de plus de 50 000 places ; nous avons pris de l'avance, et 45,5 % des places sont déjà notifiées. Les objectifs seront tenus en 2011, avec 4 600 places, dont 1 046 pour enfants.
Nous relevons le plafond de ressources de l'aide à la complémentaire santé pour éviter que les bénéficiaires de l'allocation adultes handicapés (AAH) n'en soient exclus. C'est un effort de 23 millions en 2011, de 45 millions en 2012 et de 82 millions en 2013 pour l'assurance maladie. Pour éviter la désinsertion professionnelle, les personnes en arrêt de travail à la suite d'un accident non professionnel pourront accéder à des actions de formation professionnelle tout en percevant des indemnités journalières. Enfin, nous créons quarante groupes d'entraide mutuelle (Gem), consacrés à l'accueil des personnes handicapées à la suite d'un traumatisme crânien.
Bref, nous vous présentons un budget de responsabilité, qui maintient les prestations familiales et où la solidarité envers les personnes handicapées est totale.
Nora Berra, secrétaire d'Etat chargée des aînés . - Preuve que le secteur médico-social est une de nos priorités, les crédits consacrés aux aînés sont en hausse de 4,4 %, avec 412 millions de mesures nouvelles. La moindre progression par rapport aux années précédentes s'explique par le changement du mode de financement du médico-social. Il s'agit d'éviter les excédents de la CNSA tout en maintenant l'engagement de la Nation envers les plus fragiles.
Dans le cadre du plan solidarité grand âge, les ouvertures de places se poursuivront en 2011 : nous avons atteint 91 % des objectifs initiaux, avec 85 000 places financées sur les 93 000 prévues. Il faudra toutefois veiller à l'équilibre entre hébergement et soins à domicile. Enfin, nous ouvrons 80 000 places en maisons de retraite médicalisées.
Dans le cadre du plan Alzheimer, trente-cinq nouvelles maisons pour l'autonomie et l'intégration des malades d'Alzheimer (Maia) seront ouvertes en 2011, en sus des dix-sept en cours d'expérimentation. Pour diversifier l'appui aux aidants familiaux, soixante-quinze plateformes de répit seront déployées. Nous renforçons les pôles d'activités et de soins adaptés (Pasa), les services de soins infirmiers à domicile, l'accueil de jour, l'hébergement temporaire.
Pour le médico-social, 2011 sera une année de maturité, avec un cercle de financement vertueux : crédits votés en loi de financement de la sécurité sociale, gérés par la CNSA, engagés par l'ARS.
Gérard Dériot , rapporteur pour les accidents du travail et les maladies professionnelles . - L'allongement des délais de prescription pour l'indemnisation des victimes de l'amiante est une mesure de justice. Le délai courra à compter du premier certificat médical : s'agit-il de la première visite chez le médecin traitant ? La loi Hyest le faisait courir à compter la date de consolidation. N'est-ce pas préférable ?
Jean-Pierre Godefroy . - L'allongement du délai de prescription est une bonne chose. Mieux vaut toutefois s'en tenir à la date du premier certificat médical car la date de consolidation de la maladie est difficile à établir.
Je regrette que l'on n'ouvre pas de voie d'accès individuelle à l'indemnisation, comme le réclament les associations et comme le préconise le rapport Le Garrec. Un amendement de l'Assemblée nationale prévoit de combiner liste des métiers et liste des secteurs à risque. Comment combiner les deux critères ? Il faut prendre en compte les personnes qui ont travaillé dans une entreprise exposée sans en être salariés.
Eric Woerth, ministre . - Je suis d'accord avec M. Godefroy, une fois n'est pas coutume : la date du premier certificat est moins contestable que celle de la consolidation, qui pose un problème de définition juridique. En outre, attendre que la maladie se consolide suppose que l'on verse des avances entre-temps. Il peut y avoir un second certificat en fonction de l'évolution de la maladie : c'est sans doute un point à préciser.
Sur l'accès individuel au fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Fcaata), nous attendons le rapport de l'agence nationale de sécurité sanitaire (Anses). Il n'est pas si simple de mêler les deux critères, métier et entreprise.
Muguette Dini , présidente . - André Lardeux, notre rapporteur pour la famille, souhaite vous interroger sur le transfert de 0,28 point de CSG de la branche famille à la Cades, sachant que les compensations prévues ne sont pas pérennes. Est-il judicieux de fragiliser ainsi la branche famille et, partant, la jeunesse, pour rembourser la dette ? Pourquoi ne pas augmenter la CSG et la CRDS dès cette année ?
André Lardeux demande également si les prêts pour l'amélioration de l'habitat ouverts aux assistantes maternelles s'appliquent aux maisons d'assistantes maternelles (Mam). Le décret du 9 juin 2010 exclut de son bénéfice les assistantes maternelles qui n'exercent pas à domicile. Comment comptez-vous résoudre ce problème ?
Dominique Leclerc , rapporteur pour l'assurance vieillesse . - Nous serons très attentifs au financement de la réforme des retraites, qui s'étalera sur les deux lois de finances, avec des nouvelles dispositions fiscales pour 1 milliard d'euros. Cette année, les mesures d'âge rapporteront 200 millions. Le fonds de solidarité vieillesse (FSV) se verra affecter les 3 à 4 milliards restants. La branche vieillesse percevra également le produit du rabotage des niches.
Alain Vasselle , rapporteur général . - Devons-nous interroger M. Baroin sur le financement ? La branche famille va se trouver fragilisée : moins 2,6 milliards en 2010, moins 3,2 en 2011. Il est curieux de financer la Cades en affaiblissant la branche famille alors que celle-ci est en difficulté... Pouvez-vous nous rassurer sur la dynamique de la recette venant du panier fiscal qui alimentera la branche famille ?
Quelles sont les conséquences de l'allocation personnalisée d'autonomie (Apa) pour les conseils généraux ? Le Président de la République a annoncé une réforme avant la fin de l'année : qu'en est-il ? Quel en sera le contenu ? La solvabilisation des personnes atteintes de maladies neuro-dégénératives nécessite des moyens supplémentaires et un meilleur équilibre entre la contribution de l'Etat et celle des départements.
S'agissant des personnes handicapées, l'objectif est-il de maintenir l'aide à la complémentaire santé au niveau actuel ou d'ouvrir à tous le bénéfice de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-c) ? Dans sa grande générosité, Mme Aubry, alors ministre, en avait exclu les bénéficiaires de minima sociaux ! Ceux-ci n'ont qu'un crédit d'impôt, que l'on n'obtient qu'au terme de multiples démarches administratives, véritable parcours du combattant pour les familles. Il faut absolument simplifier les choses.
Enfin, et je reviens année après année sur ces deux points, sans que rien ne bouge en dépit des engagements des ministres successifs :
- la question de la présidence du conseil de la vie sociale n'est toujours pas réglée : est-il légitime qu'elle soit confiée, dans certains établissements, à des handicapés mentaux qui ne peuvent évidemment l'assurer eux-mêmes ? ;
- la maltraitance passive des handicapés perdure : certains règlements intérieurs interdisent aux adultes de quitter l'établissement plus de quarante-cinq jours par an, pour des questions purement financières : c'est insupportable de les priver ainsi de retourner dans leur famille lorsqu'ils ont la chance d'être entourés ! L'allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) n'est accordée que si l'adulte a quitté l'établissement un minimum de huit jours. Je fais, cette année encore, appel au dynamisme et à la ténacité de Mme Morano pour mettre un terme à ces iniquités.
Sylvie Desmarescaux , rapporteur pour le secteur médico-social . - Je salue la décision de la CNSA de débloquer une enveloppe de 60 millions d'euros pour permettre de faire face à des besoins qui avaient été sous-évalués pour 2010.
S'agissant de la réforme de la dépendance, que pensez-vous de la proposition récemment émise de créer une nouvelle journée de solidarité, prise sur les RTT ? Pourquoi ne pas aligner, dès la loi de financement pour 2011, le taux de CSG applicable aux retraités imposables sur celui des actifs ? Quel sera le calendrier de cette réforme ?
L'amendement de l'Assemblée nationale prolongeant l'expérimentation de la réintégration des médicaments dans le forfait soins des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) est positif, mais pourriez-vous nous préciser les difficultés qui empêchent aujourd'hui sa généralisation ? Pourquoi les parlementaires n'ont-ils pas reçu le rapport d'étape de l'Igas ? Serait-il possible d'en disposer ?
La hausse de l'Ondam médico-social est moins importante que les années passées à cause des nouvelles méthodes de construction, soit. Mais les réserves de la CNSA financent l'investissement dans la réhabilitation d'établissements et l'action de la CNSA est souvent déterminante pour décider les autres financeurs... Comment pourra-t-elle continuer à mettre en place des plans d'aide à l'investissement ?
Pourquoi le Gouvernement refuse-t-il de prendre en compte dans la tarification le différentiel de charges des établissements privés lucratifs ou non lucratifs, différentiel dont l'existence est avérée ?
Enfin, un amendement de l'Assemblée nationale prévoit que les groupements de coopération sanitaire (GCS) prévus par la récente loi HPST n'ont pas le statut d'établissements médico-sociaux. Le Gouvernement va-t-il l'accepter ?
Alain Gournac . - Je regrette l'horaire qui nous est imposé pour cette audition et le peu de temps à consacrer à un sujet aussi important.
Muguette Dini , présidente . - Tous les commissaires comprendront que le ministre ne pouvait être auditionné en même temps qu'il assurait, en séance publique pendant trois semaines, la défense du projet de loi sur les retraites.
Alain Gournac . - Je salue la politique familiale du Gouvernement. De plus en plus de femmes travaillent et peinent à faire garder leurs enfants. Les assistantes maternelles sont souvent très isolées : il faut multiplier les maisons de l'enfance.
Le plan Alzheimer prend un bon départ. Oui à l'ouverture de places pour les personnes handicapées, mais attention à certaines situations qui sont à la limite de la maltraitance. Je salue les avancées du plan solidarité grand âge. Il faut toutefois mieux équilibrer hébergement et soins à domicile car la demande est considérable.
Enfin, oui à l'aide aux hôpitaux mal gérés, mais ne pénalisons pas ceux qui sont bien gérés !
Guy Fischer . - Vous avez voté la loi HPST !
Catherine Procaccia . - Quand commence le grand âge ? Est-ce une question d'âge ou d'état de santé ? Vous proposez de rééquilibrer les aides vers les soins à domicile, mais comment maintenir au domicile des personnes très dépendantes ?
Enfin, quelle est la part respective des collectivités locales et de l'Etat dans le financement des places en établissement ?
Claude Jeannerot . - N'y a-t-il d'autre choix que de redéployer l'excédent de la CNSA vers l'assurance maladie ? Sur les 15 millions que coûte l'allocation de compensation du handicap dans le Doubs, la CNSA n'en rembourse que 5. Ne pourrait-on redéployer ces excédents en direction des départements déficitaires ?
Quel est le calendrier du plan dépendance ? Avez-vous arrêté des principes de nature à éclairer les dispositions à venir ?
Paul Blanc . - Qu'en est-il du renouvellement des conventions tripartites dans les Ehpad ? La région Languedoc-Roussillon dit manquer de crédits pour renouveler la convention !
Par ailleurs, pourquoi n'avoir pas basculé plus tôt les crédits de la CNSA pour abonder la prestation de compensation du handicap (PCH) ?
Marc Laménie . - Quelle est l'évolution de l'allocation logement ? Quelles sont les perspectives pour la mise en place du cinquième risque ?
Guy Fischer . - Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 prévoit une économie de 2,4 milliards sur les dépenses d'assurance maladie, et de 7,2 milliards pour l'ensemble des branches. Cela nous inquiète. Le Gouvernement cherche à rétablir l'équilibre des comptes sociaux pour rentrer dans les clous du pacte de stabilité mais siphonne pour ce faire le fonds de réserve des retraites (FRR), la branche famille et la CNSA !
Combien d'emplois seront supprimés au sein des caisses ? On parle de six mille... La proximité entre les assurés et les organismes ne peut qu'en pâtir.
Jean-Louis Lorrain . - La Maia implantée en Alsace est un succès. Le concept d'intégration devrait être étendu à l'enfance en danger, au handicap, à l'insertion. Les conseils généraux sont codécideurs, mais aussi porteurs de projets. Quels partenariats peuvent-ils nouer ? Les groupes d'entraide mutuelle (Gem) sont-ils la meilleure solution ?
Gisèle Printz . - Ma question porte sur l'égalité professionnelle hommes-femmes. Le projet de loi sur les retraites a prévu une pénalité pour les entreprises défaillantes en la matière. Comment ces sanctions seront-elles mises en place et à quoi servira l'argent ainsi récolté ?
Yves Daudigny . - Je veux enfoncer le clou concernant le cinquième risque : il est urgent d'agir, tous les présidents de conseils généraux le disent. Il serait de bonne politique de réaffecter les 100 millions d'excédents de l'Ondam médico-social au financement de l'Apa et de la PCH, plutôt que de les restituer à l'assurance maladie.
Enfin, le Figaro souligne la dégradation de la mortalité infantile en France : notre pays est passé du cinquième au quatorzième rang en Europe en la matière. Avez-vous un éclairage à apporter sur ce chiffre étonnant ?
Isabelle Debré . - Quels seront les principes retenus pour le plan dépendance ? Il faut tout faire pour favoriser le maintien à domicile : c'est important psychologiquement pour les personnes et ce n'est pas non plus un mauvais calcul financier.
Annie Jarraud-Vergnolle . - Le décalage dans le versement de la Paje aura un effet sur la trésorerie en 2011, mais après ? Idem pour l'ouverture de places dans les établissements médico-sociaux : on réalise des économies en 2011, mais après ? Pourquoi ne pas rechercher des financements complémentaires en augmentant la CSG ou la CRDS pour répondre aux besoins croissants de la CNSA ? Vous faites porter le poids de l'Apa et de la PCH aux seuls départements !
Bernard Cazeau . - Les syndicats de médecins dénoncent la volonté de maîtrise comptable qui fixe l'Ondam à 2,9 %, alors que les dépenses de maladie progressent de plus de 4 % par an et ne vont faire qu'augmenter avec le vieillissement de la population : une personne de quatre-vingts ans consomme six fois plus de soins de santé qu'une personne de vingt ans, et deux fois plus qu'une personne de soixante-dix ans.
Quelles seront les conséquences pour les hôpitaux ? Les revalorisations promises au personnel infirmier signifient-elles la suppression d'emplois ? La pente naturelle d'augmentation de l'Ondam pour l'hôpital est de 3,6 points par an.
Annie David . - Comment les nouveaux modes de garde seront-ils répartis sur le territoire ? Il ne faut pas oublier les territoires ruraux où la demande est grande.
Quelle est la part du financement de l'Etat dans les Maia ?
Je regrette qu'il n'ait pas été question de recettes nouvelles, notamment pour financer la prévention des accidents du travail et maladies professionnelle. Ceux-ci sont trop souvent sous-déclarés. Quelles pénalités pouvez-vous imposer aux entreprises qui n'ont pas rempli leurs obligations en matière de prévention des accidents du travail et de la pénibilité ?
Eric Woerth, ministre . - MM. Lardeux et Vasselle m'ont interrogé sur la solidité du financement de la branche vieillesse. La Cades reçoit désormais des recettes solides mais cela ne revient pas à fragiliser la branche famille puisque celle-ci va d'abord percevoir différentes taxes, qui devaient initialement aller à la Cades. Cela dit, tout cela va encore évoluer car il était prévu que le produit de ces taxes devait baisser en 2013. L'Etat garantit donc le financement en lui affectant les économies réalisées sur diverses niches. Nous supprimons, pour tenir compte des réserves exprimées, le « panier de recettes » affecté au financement de la sécurité sociale : les mesures fiscales seront affectées directement aux branches. Je vous renvoie à M. Baroin sur ce point. Nul doute que vous serez vigilants.
Concernant les 100 millions d'excédent, il n'y avait pas d'autre choix possible : la CNSA étant financée de façon étanche par l'assurance maladie, il est logique que les crédits qui ne sont pas dépensés reviennent à l'assurance maladie. Il n'y a pas lieu de prendre sur ces fonds pour palier les difficultés de gestion des départements.
Yves Daudigny . - L'objectif global des dépenses médico-sociales (OGD) est constitué pour 1,3 milliard de recettes propres. Il suffirait de passer à 1,2 milliard pour retrouver ces 100 millions !
Eric Woerth, ministre . - La question du cinquième risque a déjà été défrichée par divers rapports parlementaires. Pour l'heure, aucune piste n'est privilégiée : le débat doit avoir lieu. Le Président de la République a indiqué qu'il l'ouvrirait une fois la réforme des retraites passée.
Les conventions d'objectifs et de gestion appliquent aux salariés des organismes de sécurité sociale la règle du non-renouvellement d'un départ sur deux. Les transferts ou augmentations de charges, comme la création du RSA, ont toutefois été accompagnés de créations de postes.
L'effet rétroactif de l'allocation logement n'est pas justifié : il faut harmoniser les différentes prestations.
La pénalité de 1 % pour non-respect de l'égalité salariale, prévu dans la loi retraites, sera affectée à la Cnav.
Le financement de l'hôpital relève de la compétence de Roselyne Bachelot-Narquin. Les hôpitaux sont moins nombreux à être déficitaires. La progression de l'Ondam n'est pas une fatalité : 2,9 %, c'est déjà bien en période de sortie de crise, a fortiori 3,8 % pour le médico-social et 4 % pour les personnes âgées.
Les sous-déclarations des accidents du travail et maladies professionnelles sont compensées via une contribution spécifique de 710 millions par an de la branche AT-MP à l'assurance vieillesse.
Enfin, il est prévu que la masse salariale augmente de 2,9 % en 2011, contre 2 % en 2010.
Nadine Morano, secrétaire d'Etat . - Les assistantes maternelles bénéficient d'un prêt à taux zéro de 10 000 euros pour aménager leur habitat si elles travaillent à domicile. Les regroupements ne peuvent en bénéficier car cette aide ne peut être allouée pour un local loué ou mis à disposition par la mairie. Une piste serait de créer un fond pour subventionner les collectivités mettant un local à disposition des Mam, des opérations petite enfance ou des pôles d'excellence rurale. À partir de 2011, la dotation d'équipement des territoires ruraux subventionnera les projets d'investissement. Les Mam, particulièrement adaptées aux territoires ruraux, pourraient être désignées comme investissement prioritaire. Enfin, un prêt à taux zéro pourrait être ouvert aux Mam constituées en association, sans qu'il soit besoin de passer par une loi.
Nous relevons le plafond pour l'accès à la complémentaire santé de 761 à 799 euros pour suivre l'augmentation de 25 % de l'AAH : il y aura 294 000 bénéficiaires supplémentaires fin 2012.
Je confirme à Alain Vasselle que les textes ne permettent pas à une personne handicapée mentale de présider le conseil de vie sociale. La DDASS est intervenue dans votre département. Si le problème n'a pas été résolu, je m'en occuperai personnellement.
L'extension de la PCH aux aides humaines coûterait 200 millions aux départements. Cela relève du débat sur la dépendance. Certains départements, dont le mien, ont été surdotés. Divers projets sont à l'étude concernant les aides ménagères ; la PCH a rendu de grands services.
Il faut regarder de près les cas de maltraitance affective que vous évoquez.
Les procédures administratives pour les personnes handicapées ont déjà été simplifiées, mais il faut aller plus loin, et créer un groupe de travail dédié. Je serai attentive à vos propositions.
L'Etat consacre 1,3 milliard à l'accueil individuel. Nous développons les relais-accueil petite enfance et consacrons 2,9 milliards par an aux prestations comme le contrat enfance et jeunesse ou la prestation de service unique (PSU). Le site internet www.mon-enfant.fr , qui sera amélioré en 2011, offre aux familles une carte recensant les modes de garde disponibles sur le territoire en temps réel.
Au passage, j'en profite pour signaler combien je regrette que certains départements adoptent une posture politicienne en refusant d'accorder le quatrième agrément aux assistantes maternelles. C'est fort dommageable pour les familles. Idem pour la création de jardins d'éveil, dont un rapport a pourtant démontré l'intérêt pour le développement du langage des jeunes enfants.
Guy Fischer . - Vous fermez les maternelles !
Annie David . - Si l'Etat mettait de l'argent...
Nadine Morano, secrétaire d'Etat . - Je confirme que l'Etat participe à ces projets à la hauteur de ses engagements. Je vous invite à vous emparer du dispositif.
L'alignement des prestations sera source d'économies pérennes : ce n'est pas un fusil à un coup, un one shot.
Guy Fischer . - Bref, on pourra toujours gagner des sous !
Nadine Morano, secrétaire d'Etat . - C'est une bonne gestion !
Le Président de la République a été clair : nous aurons un grand débat sur la dépendance.
Monsieur Lorrain, les Gem sont la meilleure solution pour les traumatisés crâniens.
Sur la mortalité infantile, monsieur Daudigny, je vous répondrai par écrit.
Nora Berra, secrétaire d'Etat . - L'intégration des médicaments dans le forfait soins est aujourd'hui en cours d'expérimentation. L'étude ayant démarré avec un an de retard, nous poursuivons l'expérimentation jusqu'à fin 2012. Je vous transmettrai le rapport d'étape.
Les excédents de la CNSA servent en effet à financer des investissements. Nous essaierons de pérenniser une ligne budgétaire pour poursuivre les investissements.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement sur le différentiel de charges : la nouvelle allocation des ressources vise à éviter les conséquences de ces écarts de charge. Nous responsabilisons les établissements.
Les groupements de coopération sociaux et médico-sociaux n'auront pas le statut d'établissement : nous sommes dans une logique de groupements de moyens, pas d'établissements.
Paul Blanc . - Très bien.
Nora Berra, secrétaire d'Etat . - Le grand âge n'est pas une question d'années mais d'aptitudes, d'autonomie physique et mentale. C'est la question de la dépendance qui est posée.
La CNSA a débloqué 60 millions supplémentaires, soit 90 millions en tout, pour le renouvellement des conventions tripartites.
Paul Blanc . - Ils ne sont pas arrivés jusqu'à Montpellier !
Nora Berra, secrétaire d'Etat . - Les Maia sont financées par la contribution solidarité à l'autonomie à hauteur de 12,2 millions. Chacune recrute un pilote et trois coordonnateurs de cas complexes. Les conseils généraux peuvent tout à fait conventionner pour se constituer en Maia.
La question du cinquième risque et de la dépendance ne se réduit pas à la réforme de l'Apa. La prévention de la dépendance passe par l'amélioration des conditions de vie. Nos aînés souhaitent rester chez eux le plus longtemps possible ; ils vieilliront mieux dans leur environnement. Il n'y a pas là de calcul financier : le maintien à domicile revient beaucoup plus cher que le placement en établissement ! Mais il faut retenir la réponse la plus appropriée pour l'autonomie de la personne. Nous n'avons pas de scénario tout prêt : la réforme de la prise en charge de la dépendance sera le fruit de la concertation, que le Président de la République ouvrira dès la réforme des retraites achevée. Le débat durera six mois, le temps d'évaluer tous les dispositifs. Je ne suis pas favorable à une deuxième journée de solidarité : de telles mesurettes ne suffiront pas pour financer la dépendance, il faut réfléchir à des financements innovants. L'Apa représente aujourd'hui 5 milliards : en 2040, ce sera 13 milliards ! Il faut mettre les choses à plat.
Audition de Roselyne BACHELOT-NARQUIN, ministre de la santé et des sports
Réunie le jeudi 28 octobre 2010 , sous la présidence de Muguette Dini, présidente , la commission procède à l'audition de Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.
Muguette Dini, présidente . - Je remercie très chaleureusement Mme Bachelot-Narquin d'avoir accepté de modifier son emploi du temps pour être présente ce matin.
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports . - Je ne pouvais résister à l'invitation de la commission des affaires sociales du Sénat...
La première idée-force de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est qu'il ne traduit pas une approche malthusienne mais développe l'investissement. L'Ondam, fixé pour 2011 à 2,9 %, représente un volume de dépenses supplémentaire de 4,7 milliards d'euros par rapport à 2010. Conformément au règlement arbitral, la consultation des médecins augmente d'1 euro, ce qui coûtera 260 millions d'euros. L'impact de l'accord LMD, qui reconnaît la qualification des infirmiers, est intégré à l'évolution de l'enveloppe des dépenses hospitalières. J'ai voulu, pour ce quatrième PLFSS, un taux identique d'augmentation de 2,8 % pour l'hôpital et pour la ville, ce qui représente 2 milliards d'euros de plus pour les établissements de santé. La poursuite de la convergence dégagera 150 millions d'euros d'économies et la performance à l'hôpital, pour laquelle j'ai créé une agence nationale d'appui, représente 145 millions d'euros. Nous voulons maîtriser les produits de la liste en sus, dont l'importante progression n'est pas toujours justifiée.
Les 2,4 milliards d'euros d'économies ne pénaliseront pas les malades. La maîtrise médicalisée (550 millions d'euros) passe par la promotion des référentiels, les ententes préalables mais aussi par la mobilisation des agences de santé, avec la fongibilité des dotations régionales. L'ajustement des tarifs de radiologie et de biologie (200 millions d'euros) prend en compte les gains de productivité. La baisse de prix sur les produits de santé correspond à une moindre dépense de 500 millions d'euros, le taux K étant par ailleurs fixé à 0,5 %. Les médicaments à service médical rendu faible verront leur remboursement passer de 35 % à 30 %, tandis que nous nous concentrons sur les produits plus coûteux et les plus utiles. Le taux de prise en charge des dispositifs médicaux baisse également de 5 points : il sera ramené de 65 % à 60 %. Le seuil de déclenchement de la contribution de 18 euros passe de 91 à 120 euros ; il n'avait pas bougé depuis 1992 et un strict rattrapage l'aurait porté à 130 euros. Cela ne touche pas les ALD ni les bénéficiaires de la couverture maladie universelle-complémentaire (CMU-c). Nous reprenons les propositions de l'Uncam sur les diabétiques non insulino-dépendants - je pourrai y revenir, tant de fausses rumeurs circulent à ce sujet. L'idée est d'éviter les gaspillages et de limiter les marges. L'assurance maladie a proposé d'adapter les critères des ALD pour les patients souffrant d'hypertension chronique, qui est plus un facteur de risque qu'une pathologie avérée.
Nous continuons la modernisation de notre système de santé, tout en consolidant un taux de couverture quasi intégral / le reste à charge est ainsi revenu de 9,5 % à 9,4 % et il n'est que de 3 % à l'hôpital. On ne le dit pas assez car on préfère parler de désengagement de l'Etat... Le Gouvernement revendique la politique qui consiste à se concentrer sur les dépenses et les soins les plus utiles et les plus coûteux car elle répond à une exigence. Afin de faciliter l'accès aux soins, nous allons augmenter de six points le plafond de ressources pour l'accès à la complémentaire santé, puis de quatre points en 2012, soit une augmentation de 30 % dont 80 000 personnes bénéficieront. S'il reste des progrès à accomplir, beaucoup a déjà été fait : l'aide à la complémentaire santé concerne 515 000 personnes et a progressé de 10 % au premier trimestre. Cette augmentation résulte à la fois du relèvement progressif du plafond d'accès et des campagnes d'information que nous menons. J'ai demandé à l'Uncam des propositions sur la lisibilité des contrats des complémentaires, car j'ai le sentiment qu'il faut aider les Français à se repérer dans les conditions de prise en charge. Des avancées ont déjà été réalisées et le dialogue se poursuivra. Les difficultés concernent quasi exclusivement l'optique et les soins dentaires. Les Français ne renoncent pas à se soigner, comme certains le prétendent, mais ils renoncent parfois à certains soins.
Au-delà des nécessaires discussions, des formes nouvelles d'organisation permettent des baisses de prix substantielles, exploitons-les. J'ai demandé à la Dress et à la direction de la sécurité sociale de poursuivre le travail sur ce sujet parce qu'il est indispensable de disposer de chiffres solides. Le Haut Conseil pour l'assurance maladie étudie pour sa part la question du reste à charge. Les résultats contradictoires des sondages suscitent en effet quelques doutes... J'ai enfin souhaité la mise en place d'un plan de contrôle des dépassements d'honoraires et les négociations conventionnelles devraient permettre la mise en place d'un secteur optionnel.
Alain Vasselle, rapporteur général . - Quoique vous nous ayez déjà bien éclairés sur le PLFSS, je souhaite avoir des précisions sur l'Ondam. Après le rapport Briet, la conférence nationale des finances publiques avait envisagé que le seuil d'alerte en cas de dépassement soit ramené de 0,75 % à 0,5 %, qu'en est-il ? Elle avait également acté des gels de crédits, lesquels et dans quelles proportions ?
Des questions récurrentes font l'objet de débats passionnés sur l'hôpital.
Guy Fischer . - Il y a de quoi !
Alain Vasselle, rapporteur général . - Notre information sur les missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (Migac) s'améliore ; la loi HPST a prévu un rapport annuel. Quelle enveloppe leur réservez-vous en 2011 ? J'aimerais également savoir où nous en sommes sur la convergence et si vous avez prévu des étapes pour atteindre l'objectif 2018.
Quelles sont vos intentions sur les restructurations de l'offre de soins ? Il avait été question de fermer cent quatre-vingts plateaux techniques, puis la mesure a été reportée. Comment le Gouvernement favorise-t-il les alternatives à l'hospitalisation ? Mme Hermange regrettait hier l'insuffisance des structures de court séjour et d'autres se sont inquiétés des moyens pour les dialyses à domicile. On a déjà réalisé des progrès sur l'ambulatoire mais ne peut-on dresser un bilan de manière à renforcer ces actions ?
Nous aimerions mesurer l'interaction entre l'Ondam hospitalier et l'Ondam de ville. Il semblerait que des établissements externalisent sur l'ambulatoire des actes ou prestations dont le coût est pourtant compris dans les groupes homogènes de séjours qui leur sont remboursés par l'assurance maladie. Un peu plus de transparence serait la bienvenue.
J'aimerais aussi savoir comment ont été utilisés les fonds dédiés aux agences régionales de santé l'an dernier et connaître les intentions du Gouvernement sur la responsabilité civile médicale. En effet, si une avancée a été réalisée à l'Assemblée nationale, nous n'avons pas eu le rapport Johanet.
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre . - Lequel, le premier ou le second ?
Alain Vasselle, rapporteur général . - Nous n'en avons reçu aucun.
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre . - Ils vous seront communiqués.
Alain Vasselle, rapporteur général . - Le sujet est sensible...
S'agissant des renoncements aux soins, contre lesquels le Gouvernement a pris des mesures de solvabilisation, vous semblez dire qu'ils concernent surtout l'optique et les soins dentaires. Se fait-on des idées fausses là-dessus ? Il serait opportun de faire le point. Je voudrais d'ailleurs connaître l'impact des mesures prévues dans le PLF comme dans le PLFSS sur les complémentaires santé : selon la Mutualité, les tarifs des contrats responsables devraient augmenter de 8 % à 10 % ; la progression ne serait que de 1 % selon le Gouvernement.
Les professionnels sont-ils demandeurs du contrat d'amélioration des performances individuelles (Capi) ? Vous êtes favorable à un secteur optionnel, les professionnels aussi de même que la Cnam, mais les organismes complémentaires seraient réservés. Puisque les avis semblent converger, pouvez-vous nous dire où se situent les blocages ?
Bernard Cazeau . - Les années se suivent et se ressemblent, madame la ministre. Le déficit reste à un niveau élevé : 11,5 milliards d'euros prévus pour 2011 après 11,4 milliards en 2010 et 10,6 milliards en 2009, soit trois fois plus qu'en 2008. C'est toujours la même méthode et je rappelle, au risque de vous irriter, que quand vous parlez de maîtrise médicalisée, les syndicats professionnels dénoncent une maîtrise comptable. Je vous souhaite bien du plaisir pour la radiologie et la biologie ! Bien sûr, certaines économies sont de bonnes économies mais quand le déficit reste aussi important, on n'en est plus à 2 milliards d'euros près... On ne résoudra pas le problème par des économies de bouts de chandelle. Est-ce une absence de courage ou faut-il incriminer la proximité des élections ? Je n'ai pas vu de réforme structurelle. La réforme du paiement à l'acte serait la méthode la plus rentable contre les déficits mais vous n'y touchez pas. Pourtant, le succès du Capi montre que la nouvelle génération des médecins est différente de la précédente. Peut-être vous déciderez-vous, en 2013, à rentrer dans une réforme structurelle...
Comment tenir un Ondam aussi ambitieux quand le coût des soins médicaux est sur une pente de 4 % et de 3,6 % pour l'hôpital ? Vous serez obligée d'en rabattre. Je suis extrêmement déçu et c'est avec pessimisme que nous aborderons le débat. Mais peut-être des amendements du Gouvernement nous rendront-ils un peu de moral ?
Catherine Procaccia . - Contrairement à Bernard Cazeau, je crois que c'est en cumulant les petites économies qu'on luttera contre le déficit de l'assurance maladie, même s'il est structurel. Sans avoir la hauteur de vues d'Alain Vasselle, je m'interroge sur l'augmentation de cotisations des complémentaires car, en fin de compte, ce sont les assurés qui paient. Ne vont-ils pas renoncer à la couverture de certains soins ? La sécurité sociale ne rembourse que 15 euros sur une paire de lunettes dont le coût est d'une centaine d'euros pour un enfant et de 600 à 700 euros pour un adulte si j'en juge par les différents devis que j'ai pu faire établir. Comment les gens font-ils ? J'entends dire que les opticiens multiplient les prix par deux ou trois. Quel est votre sentiment à ce sujet ?
Nous avions eu un grand débat l'an passé sur la vaccination H1N1, notamment sur les parts prises en charge par l'assurance maladie et par les complémentaires. Depuis, vous avez pu revendre des vaccins et renégocier les contrats. Les sommes dues aux laboratoires leur seront-elles réglées par un versement ou par une déduction fiscale ?
Est-il légitime que la Cnam contribue de plus en plus à des dépenses hors assurance maladie, comme l'Eprus, établissement de préparation et de réponse à l'urgence sanitaire, ou le Fmespp, fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés ? Enfin, de nombreux hôpitaux de mon département m'ont posé la question de savoir comment seront réorganisées les interventions chirurgicales urgentes durant la nuit ? De quel horaire s'agit-il précisément ?
Bernard Cazeau . - C'est une proposition de Claude Evin !
Catherine Procaccia . - Les urgences réaliseraient 80 % de leur activité avant minuit.
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre . - D'une part, il n'y a aucune proposition de M. Evin ; d'autre part, il est vrai que les interventions ont massivement lieu avant minuit, on ne pratiquerait selon certaines sources que quinze opérations entre minuit et 6 heures sur toute la France.
Guy Fischer . - Ce budget, comme la réforme des retraites, tend à lutter contre les déficits publics. L'assurance maladie n'échappe pas à cette tendance, qui supportera 2,4 milliards d'euros des 7,2 milliards d'euros d'économies prévues. Cette stratégie de financement pose des problèmes fondamentaux. Pouvez-vous nous parler un peu plus précisément des réductions décidées pour les hôpitaux ? On a parlé de fermetures ou de restructurations de trois cents à quatre cents établissements et, à terme, de 20 000 suppressions d'emplois dans la fonction publique hospitalière.
Vous avez beau réaffirmer que nous avons un très haut niveau de couverture, il n'y a pas moins transfert de l'assurance maladie obligatoire vers les complémentaires, dont les tarifs vont augmenter de 5,5 % - on parle même de 8 %. Cela concerne l'optique et le dentaire, cela touche surtout les milieux populaires et il suffit de se promener sur le marché des Minguettes pour voir combien il est difficile pour une large part de la population de conserver sa dentition en bon état. Il faut faire évoluer les choses afin que le reste à charge ne soit pas aussi important. Comment s'y prendre ? On parle des dépassements d'honoraires de spécialistes. Si l'augmentation d'1 euro de la consultation des généralistes est légitime, l'accès aux médecins spécialistes devient de plus en plus difficile.
Isabelle Debré . - Pourquoi tout le monde n'a-t-il pas sa photo sur sa carte Vitale et ce nouveau type de document permet-il de lutter contre la fraude ? Par ailleurs, comment évolue l'aide médicale d'Etat (AME) ? En rédigeant le rapport sur les mineurs étrangers isolés que je viens de remettre à Mme Alliot-Marie, j'ai aussi rencontré des jeunes majeurs et je voudrais savoir si l'AME concerne plus de jeunes.
Alain Vasselle, rapporteur général . - L'Etat finance cette aide à 100 %, l'assurance maladie assurant la trésorerie en payant les factures aux établissements hospitaliers. Or, il semble que certains établissements hospitaliers s'en servent de variable d'ajustement et pratiquent un tarif spécifique, différent des GHS habituellement utilisés.
Jacky Le Menn . - M. Vasselle a évoqué les liens entre l'Ondam hospitalier et l'Ondam de ville. Nous sommes assaillis de messages soulignant que quand les ordonnances établies à l'hôpital sont présentées en ville, elles sont comptabilisées en ambulatoire : l'enveloppe soins de ville est finalement pilotée par l'enveloppe hôpital.
J'aimerais également en savoir plus sur la mobilisation de l'administration sanitaire. La fongibilité des fonds des agences régionales de santé (ARS) concernera-t-elle également l'enveloppe médico-sociale ? La mise en place des ARS produit-elle déjà ses effets ? Qu'en est-il des communautés hospitalières de territoire ? Les groupements de coopération de taille moyenne ne rencontrent-ils pas des difficultés ?
Quels effets le secteur optionnel aura-t-il sur le secteur 2, votre optimisme à ce sujet n'est-il pas excessif ? Je note néanmoins que le directeur de la mutualité française est très favorable au secteur optionnel. Enfin, j'aimerais savoir quelle est la part respective de l'effet coût et de l'effet volume, dus au vieillissement de la population.
Annie David . - Je partage les propos de Guy Fischer sur les recettes. Les économies sont bonnes à prendre... à partir du moment où les recettes sont à la hauteur nécessaire. Or, ce n'est pas le cas et notre système gardera un problème de recettes tant que vous maintiendrez les exonérations de cotisations patronales. Oui, madame la ministre, nous avons un bon système de soins et les comparaisons sont bonnes si elles vous permettent de le promouvoir auprès de vos homologues européens ; elles cessent de l'être si elles justifient qu'on en rabatte. Quand vous concentrez l'effort sur les médicaments les plus coûteux, êtes-vous sûre de privilégier les plus utiles et non ceux qui rapportent le plus aux laboratoires ? Si le résultat des comparaisons n'est pas favorable aux malades, nous n'en voulons pas ! Vous voulez vous attaquer aux dépassements d'honoraires : allez-vous aussi regarder les consultations privées dans les hôpitaux publics ?
Allez-vous veiller au bon respect des référentiels par les prescripteurs ? Dans certains territoires, on prescrit plus facilement une prothèse de la hanche ou une consultation chez un kinésithérapeute que dans d'autres.
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre . - La situation de notre système de santé ne me paraît pas justifier la réforme structurelle qui s'imposait pour les retraites. En consacrant 11,2 % de son Pib aux dépenses de santé, la France se situe sur la deuxième marche du podium, derrière les Etats-Unis, où la rémunération des prestations est bien supérieure ; avec l'effet volume, nous nous classons en tête.
Faut-il augmenter les budgets consacrés à la santé ? Je ne suis pas particulièrement une adepte d'Ivan Illich et d'André Gorz, mais l'augmentation de l'espérance de vie dépend avant tout de l'amélioration de la qualité de vie, de l'éducation, du logement, de l'environnement. Un grand humanitaire disait que si l'on veut accroître l'espérance de vie d'une population, mieux vaut construire un tout-à-l'égout qu'un hôpital !
On ne pourra nous faire éternellement le coup des prélèvements sur le capital, déjà mis à contribution pour financer les retraites. L'assurance maladie est financée à 47 % par les cotisations sur les salaires, à 37 % par la CSG, à 15 % par des taxes affectées : augmenter le budget, c'est alourdir les prélèvements sur les ménages. Réfléchissons d'abord aux mesures d'efficience ! C'est ce que je vous propose avec ce budget, qui n'est pas un budget d'austérité. Le débat aura lieu.
Bernard Cazeau . - La dette de la Cades est de 200 milliards !
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre . - Nous mettons en oeuvre les mesures annoncées le 28 mai : gel des provisions non engagées sur la liste en sus à l'hôpital, pour 135 millions ; gel des crédits issus de la déchéance quadriennale du Fmespp, pour 105 millions ; baisse de prix de médicaments, pour 100 millions ; gel sur les Migac, pour 300 millions ; prévision de sous-exécution du médico-social, pour 100 millions ; mesures sur la chirurgie de la cataracte, pour 10 millions.
Sur les 530 millions mis en réserve pour 2011, 400 millions concernent l'hôpital, 30 millions le Fiqcs, 100 millions le médico-social. Les soins de ville n'ont qu'une faible part de dotations budgétaires. Plusieurs mesures de régulation pourront couvrir les risques de dépassement. Le délai de six mois avant toute revalorisation tarifaire est un précieux stabilisateur automatique. L'extension de ce mécanisme est préconisée par le rapport Briet, qui conditionne la revalorisation au respect de l'Ondam. La majeure partie des dépassements étant imputable à l'hôpital, il n'est pas illégitime d'imputer la majorité des mises en réserve, hors médico-social, à partir des dotations Migac et Fmespp.
L'Ondam hospitalier est fixé à 2,8 % : c'est beaucoup. La politique tarifaire est l'un des outils à ma disposition pour faire respecter ce taux. Contrairement à M. Cazeau, je ne suis pas pessimiste ! J'ai respecté l'Ondam à 3 % en 2010 : c'est historique ! La convergence tarifaire participe à l'effort d'efficience et nous en modifions la définition afin de prendre pour cible les tarifs les plus bas, que ce soient ceux du public ou du privé. Je vous ferai parvenir une note technique sur la convergence ainsi que sur la tarification à l'activité (T2A).
L'identification des transferts entre ville et hôpital dans la présentation de l'Ondam est sans doute insuffisante car les interactions réciproques sont complexes à retracer. Les efforts de l'assurance maladie en la matière seront poursuivis. La mise en service du registre partagé des professionnels de santé (RPPS), cher à Alain Vasselle, sera une étape décisive pour l'identification individuelle des prescripteurs. Il faut aussi tenir compte des passages aux urgences hospitalières qui auraient dû faire l'objet d'une prise en charge ambulatoire, sachant toutefois que les échanges ont lieu dans les deux sens... Je vous communiquerai les textes réglementaires en la matière. Pour assurer la traçabilité du registre, il faut l'intégrer au logiciel des pharmacies, des professionnels libéraux, des transporteurs sanitaires. Les nécessaires adaptations seront achevées prochainement.
Le financement des ARS, fixé par le code de santé publique, est assuré par une subvention de l'Etat pour 79 % et par une contribution des régimes obligatoires de l'assurance maladie pour 21 %, qui atteindra 151 millions en 2011, en année pleine.
Il est difficile d'évaluer précisément le renoncement aux soins pour raisons financières. La Tribune indique qu'un quart des Français renonceraient à se faire soigner, en s'appuyant sur une étude effectuée auprès de quatre cents personnes âgées de plus de dix-huit ans dans six pays de l'Union européenne : c'est un peu léger ! Une enquête de l'Irdes, portant sur huit mille ménages en France, indique que 15 % de la population métropolitaine renonceraient à certains soins, définitivement pour un cinquième, provisoirement pour les quatre cinquièmes. Les soins reportés sont très ciblés : il s'agit pour les deux tiers de soins bucco-dentaires, pour un quart d'optique, pour un sixième de soins chez un spécialiste.
En France, le reste à charge des ménages est l'un des plus faibles du monde. La prise en charge publique, via le régime obligatoire et les complémentaires, est particulièrement élevée. Je vous ferai parvenir un tableau détaillé retraçant l'impact des mesures d'économies sur les complémentaires. Celles-ci devront absorber 470 millions de charges nouvelles, mais bénéficient aussi des mesures d'économies, comme la baisse des tarifs et du prix de certains médicaments : le solde est en réalité de 129 millions de charges supplémentaires. Or la hausse d'un point de cotisation leur rapporte 320 millions ! Rien ne justifie donc d'augmenter les cotisations de 5 % à 10 % !
Certes, le projet de loi de finances assujettit les complémentaires à la taxe sur les conventions d'assurance (TCA), ce qui représente 1,1 milliard de charges nouvelles pour elles - sachant que la Cour des comptes chiffre à 7 milliards les aides qui leur sont accordées sous forme de détaxations. Cette aide s'établirait donc à 6 milliards d'euros. Il ne paraît pas illégitime de faire participer les complémentaires au financement de la dette sociale, d'autant que celles-ci bénéficient chaque année d'un déport de 600 millions avec les malades en ALD, qui sont pris en charge à 100 % par l'assurance maladie. Je mets chacun devant ses responsabilités !
Je suis pour le développement d'alternatives à la rémunération qui mettent en jeu la performance. La mise en oeuvre du Capi en 2009 s'inscrit dans cette logique. Près de 16 000 médecins se sont portés volontaires. Il faudra une étude fine sur ce dispositif : nul doute que votre rapporteur général y sera attentif ! Les contrats ont été signés sur une base pluriannuelle : les intégrer dans les conventions médicales dès l'année prochaine risquerait d'être source d'instabilité et d'en détourner les médecins.
Sur la responsabilité civile médicale, je défendrai un amendement qui tire les conclusions du rapport Johanet. Ce rapport, qui vous sera transmis, prône la mutualisation des risques exceptionnels entre les assureurs et l'ensemble des praticiens potentiellement concernés : c'est la solution dite de place. Nous proposons une réécriture a minima de l'article 44 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, sans attendre le rapport complémentaire, pour en étendre le bénéfice aux sages-femmes. J'espère qu'Alain Vasselle aura le triomphe modeste, lui qui avait suggéré cette solution ! La mission Johanet II permettra de mieux prendre en compte un certain nombre de pathologies.
Le coût de la campagne de vaccination contre la grippe H1N1 est évalué à 500 millions d'euros ; compte tenu de la résiliation d'une partie de la commande, la contribution exceptionnelle des complémentaires n'a été que de 110 millions, contre les 250 millions initialement attendus. Le PLFSS pour 2011 régularise le taux de contribution, pour éviter que les complémentaires n'aient à faire des avances de trésorerie.
Depuis l'origine, l'aide médicale d'Etat (AME) est facturée à l'assurance maladie par les établissements de santé sur la base du tarif journalier de prestation (TJP) et non sur celle du groupe homogène de séjour (GHS). Or le TJP a beaucoup augmenté au point que nous en avons plafonné le taux d'évolution à 3 %. Calculer le remboursement sur la base du GHS aurait fait économiser 178 millions d'euros à l'Etat - mais le manque à gagner pour les établissements de santé devant être compensé, autant recourir à la technique du sapeur Camember... Cela représenterait par exemple une perte de 58 millions pour l'AP-HP, de 7,5 millions pour l'AP-HM.
Alain Vasselle, rapporteur général . - Pourriez-vous nous donner des précisions sur la restructuration des hôpitaux et des plateaux techniques, sur le secteur optionnel et sur la facturation individuelle ?
Jacky Le Menn . - Et sur la fongibilité !
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre . - Je compte publier prochainement un décret car je souhaite ramener à 1 500 le nombre d'actes de chirurgie requis, en prévoyant une période transitoire pour permettre aux établissements de nouer des coopérations ou de réviser leurs pratiques afin de maintenir ces activités. Ma démarche est proactive et bienveillante : on peut concilier proximité et qualité des soins. Ni laxisme, ni rigueur extrême : c'est ce que j'ai signifié à l'association des maires de petites villes. Une mission d'accompagnement, composée d'experts politiques et techniques, sera à la disposition des acteurs de ces restructurations hospitalières et une enveloppe de 50 millions y sera consacrée.
Les négociations conventionnelles sur le secteur optionnel vont reprendre. L'accord conclu est un rapport d'étape, et de nombreuses questions restent en suspens, à commencer par la participation des organismes complémentaires au financement des dépassements d'honoraires.
Nous constatons des progrès importants en matière de facturation individuelle. Je vous ferai parvenir une note précise sur le sujet.
Concernant la carte Vitale avec photo d'identité, le dispositif monte en charge. Idem pour la carte des bénéficiaires de l'AME.
Guy Fischer . - Les pharmaciens connaissent leurs clients !
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre . - Contrairement à ce qu'on entend souvent, les dépenses de santé des bénéficiaires de l'AME croissent moins vite que celles des assurés du régime général. Ce qui augmente, c'est le nombre des bénéficiaires.
Il ne faut pas confondre gardes et urgences de nuit. Au coeur de la nuit, entre minuit et 6 heures du matin, il n'y aurait qu'une quinzaine d'interventions sur tout le territoire. L'allocation des ressources, des intelligences et des expériences n'est manifestement pas adaptée. Le directeur général de l'ARS d'Ile-de-France a entamé une large concertation sur le sujet.
Bernard Cazeau . - Que ferez-vous quand vous aurez besoin d'une césarienne à 3 heures du matin ? C'est un système idiot.
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre . - La fongibilité des enveloppes doit-elle se faire au niveau de l'Ondam, entre les différents sous-objectifs, ou via des objectifs régionaux, en chargeant le directeur général de l'ARS de distribuer les crédits entre médecine de ville, hôpital et médico-social en fonction des spécificités régionales ? Comme je l'ai dit hier à M. Méhaignerie, la démarche de l'Ordam est intéressante mais il faut un support administratif solide. Je présenterai un amendement sur la fongibilité entre le Fiqcs et le Fmespp : cela pourrait être un début.
Isabelle Debré . - Pourriez-vous nous faire parvenir une note sur l'état d'avancement du dossier médical personnel (DMP) et sur le différentiel de coût entre hospitalisation à domicile et à l'hôpital ?
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre . - Les études de coût sont indispensables. La question du différentiel se pose aussi pour le médico-social.
Audition de François BAROIN, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat
Réunie mardi 2 novembre 2010 , sous la présidence de Muguette Dini, présidente , la commission procède à l'audition de François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.
François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat . - Le Gouvernement a annoncé en juillet dernier, lors du débat d'orientation sur les finances publiques, un objectif clair : ramener le déficit de 7,7 % à 6 % l'an prochain. Des efforts sont demandés à l'ensemble des acteurs de la dépense : l'Etat, les collectivités territoriales, via le gel des dotations, la sécurité sociale. Chacun doit prendre la mesure de l'impact de la crise de 2008-2009, dont les comptes publics, et tout particulièrement les comptes sociaux, portent encore les stigmates. Le Gouvernement se refusant à augmenter les prélèvements obligatoires, qui sont parmi les plus élevés des pays développés, nous devons maîtriser la dépense. C'est le seul moyen de préserver notre modèle social, l'un des plus redistributifs au monde, qu'il faut adapter aux évolutions de la société.
Le déficit du régime général en 2010 est estimé à 23,6 milliards, alors que la commission des comptes annonçait 27 milliards. La masse salariale a augmenté plus rapidement que prévu : nous tablons désormais sur une hausse de 2 % pour 2010 et de 2,9 % pour 2011. En matière d'emploi, le pire semble être derrière nous ; le marché du travail se stabilise, mais la situation n'est pas encore normalisée, comme le montrent les chiffres du chômage de septembre. Décalage habituel, les entreprises ont cessé de supprimer des emplois mais hésitent encore à embaucher. Toutefois, le secteur marchand recommence à créer des emplois pérennes.
La stratégie du Gouvernement a porté ses fruits. La France a réagi dès le début de la crise en acceptant un effondrement de ses recettes fiscales sans précédent : moins 54 milliards d'euros, dont 28 rien que sur l'impôt sur les sociétés. Non seulement le Gouvernement n'a pas augmenté les impôts pour compenser cette baisse de recettes, mais il a soutenu l'activité par un plan de relance, engagé des réformes structurelles, notamment en faveur de l'emploi, et mis en oeuvre des investissements d'avenir à travers le grand emprunt. Les amortisseurs sociaux ont bien fonctionné et la France a globalement mieux résisté que ses voisins. En refusant d'augmenter les impôts mais aussi d'arroser le sable, le Gouvernement a remporté son pari, preuve que le système redistributif français est efficace.
L'excédent du panier fiscal - 1,6 milliard en 2010 - vient compenser les allégements généraux de cotisations patronales. Il sera mobilisé pour financer la dynamique plus forte que prévu de certains dispositifs en faveur de l'emploi. La crise a conduit à réévaluer à la baisse le coût des allégements des charges sociales tandis que l'Etat dépensait davantage pour soutenir l'emploi. Nous rééquilibrerons les choses en loi de finances rectificative en rendant pérenne cette affectation.
Le financement de la sécurité sociale est garanti par la maîtrise des dépenses et de la dette sociale. Le projet de loi de finances et la loi de programmation des finances publiques fixent une trajectoire de réduction du déficit de 40 %, soit 60 milliards : c'est historique. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale s'inscrit dans cette stratégie de maîtrise des finances publiques : respect de la norme zéro valeur, stabilisation des dotations aux collectivités locales, réduction des niches fiscales et sociales à hauteur de 10 milliards, réforme des retraites, strict respect de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) fixé à 2,9 pour 2011 puis à 2,8 % pour les années ultérieures.
Le produit de la réduction des niches sera affecté à 70 % au financement de la sécurité sociale : 3,5 milliards provenant de la suppression des niches des sociétés d'assurance seront affectés à la branche famille ; 3,8 milliards, dont 3 milliards provenant de niches, financeront la réforme des retraites, sur lesquels 335 millions permettront, via le fonds de solidarité vieillesse (FSV), le maintien des soixante-cinq ans pour les parents de trois enfants et d'enfant handicapé ; 485 millions viendront abonder la branche maladie. L'augmentation de 0,1 point de la cotisation patronale, pour 450 millions, permettra le retour à l'équilibre de la branche AT-MP. La contribution sur les hauts revenus et les revenus du capital rapportera 500 millions dès l'an prochain. En tout, c'est un effort de plus de 8 milliards de réduction des déficits sociaux.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale traduit les mesures financières de la loi organique relative à gestion de la dette sociale et de la loi portant réforme des retraites, qu'il s'agisse des stocks-options - à ne pas mettre sur le même plan que les actions gratuites attribuées à nombre de salariés -, des retraites chapeau, des allégements généraux de cotisations sociales. D'autres mesures fiscales figureront dans le projet de loi de finances. Le FSV prendra en charge une partie des dépenses de solidarité versées par les régimes de base au titre du minimum contributif.
Le traitement de la dette sociale a trouvé une solution équilibrée avec le transfert de 130 milliards à la caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades), qui correspond à une fraction de la CSG de la branche famille. Nous nous engageons à assurer les recettes de la branche famille d'ici 2013. Nous poursuivrons la politique de réduction des niches, ce qui revient à réduire les dépenses de l'Etat. A compter de 2011, l'excédent du panier de recettes sera affecté intégralement et définitivement à la sécurité sociale : 2 milliards en 2011, 1,8 milliard en 2012, 1,6 milliard en 2013, 1,3 milliard en 2014. Nous clarifions ainsi les relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale.
Pour la première fois depuis sa création en 1997, l'Ondam aura été respecté en 2010, grâce à une vigilance permanente. Mise en réserve des crédits, prise en compte des sous-consommations, souci de bonne gestion : nous sommes capables de maîtriser la dépense sans nuire à la qualité des soins. Pour réaliser l'économie de 2,4 milliards nécessaire pour tenir l'Ondam, il faut améliorer l'efficacité et la performance du système de soins. Cela exige de recentrer l'assurance maladie sur le financement des dépenses les plus utiles médicalement, en confortant son caractère solidaire : le reste à charge des ménages n'est que de 8 % en France, contre 12 % en Allemagne et 16 % en Suède.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale traduit certaines propositions du rapport Briet. Le comité d'alerte donnera un avis sur la construction de l'Ondam, pour en améliorer la sincérité : saisi sur l'Ondam pour 2011, celui-ci n'a pas relevé d'erreur. Les crédits mis en réserve pourront être mobilisés si de nouvelles dépenses se révèlent nécessaires en cours d'année, sans modifier l'Ondam. Le projet de loi de programmation des finances publiques fait désormais de la mise en réserve la règle pour tous les PLFSS.
Au total, le déficit du régime général passera de 23,1 à 21 milliards. Je souhaite discuter avec le Sénat du dispositif de contrôle de la tarification à l'activité par l'assurance maladie, que l'Assemblée nationale a affaibli. Le Gouvernement a renforcé les outils techniques et juridiques pour lutter contre les fraudes, qui écornent notre contrat social : répertoire national commun de la protection sociale, fichier des bénéficiaires de la branche famille, échanges accrus entre les administrations publiques et pénalités administratives plus dissuasives.
Je serai dans l'hémicycle aux côtés de mes collègues lors du débat pour répondre à vos questions.
Alain Vasselle , rapporteur général . - Je salue la volonté du Gouvernement de poursuivre la clarification financière entre loi de financement et loi de finances. Celle-ci doit être totale : on ne peut céder à la tentation de répartir les recettes entre les deux textes pour réduire le déficit de l'un ou de l'autre.
Les recettes transférées à la sécurité sociale sont aujourd'hui suffisantes car les allégements de charge qu'elles compensent ont diminué avec la contraction de la masse salariale, d'où un panier excédentaire. Mais quand l'économie repartira, assureront-elles encore une compensation à l'euro près ?
L'Assemblée nationale a exonéré de la contribution sur les retraites chapeau les rentes de moins de 300 euros par mois, pour leur totalité, et partiellement les rentes de 300 à 500 euros. Quelle est la nouvelle estimation du produit de cette mesure, initialement chiffré à 110 millions d'euros ?
Pouvez-vous confirmer que le produit du panier fiscal permettrait à l'Etat d'honorer sa dette vis-à-vis de la sécurité sociale en matière d'exonérations ciblées ? L'Etat peut-il assurer le financement de l'aide médicale d'Etat (AME) et de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) sans reconstituer une telle dette ?
L'Ondam a été respecté en 2010 grâce au gel d'une partie des dépenses prévues, pour 500 millions. Quels secteurs en ont fait les frais ? Pouvez-vous nous détailler les gels envisagés pour 2011 ?
Quelles sont les intentions du Gouvernement concernant le fonds de garantie d'assurance pour les obstétriciens ? Nos propositions se heurtent à l'article 40... A en croire la ministre de la santé, la balle est dans le camp du ministre des comptes publics.
Que penser de l'argumentation des complémentaires santé, qui affirment qu'elles vont devoir augmenter leurs tarifs de 8 % à 10 % ? Une augmentation de 0,5 à 0,76 du taux de la CRDS, dont l'assiette est très large, affecterait moins le pouvoir d'achat. La charge risque de peser in fine sur les départements. Qu'en est-il vraiment ? Les mutuelles crient-elles au loup ?
Serge Dassault , rapporteur spécial « Travail et emploi » de la commission des finances . - La sécurité sociale est financée par les salaires : c'est une hérésie. Cette charge, qui représente 30 % à 40 % de la masse salariale, augmente nos coûts de production et réduit nos capacités de vente.
Je propose un financement de la sécurité sociale sur la base non plus des salaires mais d'un coefficient d'activité, calculé sur le chiffre d'affaires, déduction faite de la masse salariale. Mieux vaut taxer le résultat que l'outil ! Un tel système avantagerait les entreprises de main-d'oeuvre, moins taxées que celles qui réalisent un chiffre d'affaires équivalent avec moins de personnel. La part des importations serait également prise en compte dans le coefficient via le chiffre d'affaires. Un tel système réduirait les coûts de production d'environ 30 %, ce qui favoriserait l'activité et donc l'emploi. Une simple adaptation du coefficient suffirait à équilibrer les comptes de la sécurité sociale : plus de déficits ! Du reste, mieux vaudrait parler de manque de financements...
Seul problème : aucun ministre n'a voulu s'intéresser à cette idée. Je vous demande de l'étudier, et, pourquoi pas, de mettre en place une commission pour ce faire.
Sylvie Desmarescaux , rapporteur pour le secteur médico-social . - Toute mesure financière doit figurer soit dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, soit dans le projet de loi de finances. Si la future loi sur la dépendance, prévue en 2011, ne comporte aucune mesure de recettes, le PLFSS pour 2011 ne devrait-il pas d'ores et déjà s'en charger ? Quid par exemple de l'alignement de la CSG des retraités imposables sur celle des actifs ? Faudra-t-il attendre le projet de loi de financement pour 2012 ?
L'Ondam médico-social augmente moins que les années précédentes du fait de la nouvelle méthode de construction. Vous vous êtes engagé à l'Assemblée nationale à ce que les nouvelles places annoncées soient bien ouvertes. Mais la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) n'aura plus de réserves pour financer des projets d'investissement, notamment des travaux de réhabilitation. Comptez-vous prévoir une ligne budgétaire ad hoc pour ces investissements ? Ou les personnes âgées vont-elles subir une augmentation du reste à charge ?
L'Assemblée nationale, contre l'avis du Gouvernement, a prévu un rapport sur le différentiel de charges des établissements privés non lucratifs. Pourquoi le Gouvernement refuse-t-il de prendre en compte ce différentiel de tarification ? Cette reconnaissance serait pourtant aisée, compte tenu des tarifs plafond.
Le projet de loi de finances pour 2011 supprime les exonérations de charges sociales pour les services à la personne. Je redoute les conséquences pour les services qui interviennent auprès des personnes fragiles... Il faut éviter de pénaliser les services à domicile et les associations qui travaillent dans les familles.
Bernard Cazeau . - Les années se suivent et se ressemblent... Vous vous satisfaites d'un déficit stabilisé à 20 milliards. Pourtant, l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) n'en peut plus d'emprunter, et la Cades n'en peut plus de rembourser !
Tous les acteurs de la santé sont défavorables à vos propositions, même les hôpitaux privés. Vous trouvez des recettes supplémentaires en taxant l'épargne, les cadres, les laboratoires, le forfait social, les accidents du travail... comme d'habitude. Quant aux économies, elles seront payées, directement ou indirectement, par les assurés sociaux...
Comment tenir un Ondam de 2,8 %, quand les statistiques montrent que la demande de soins progresse de 4 % par an ? La fédération européenne des hôpitaux estime qu'avec un Ondam hospitalier inférieur à 3,7 %, on ne peut maintenir le niveau actuel.
Votre budget préélectoral n'apporte pas de solution satisfaisante. N'est-il pas temps de changer votre fusil d'épaule ?
Gilbert Barbier . - De passer à gauche ?
Bernard Cazeau . - Plutôt que tout sacrifier à la maîtrise comptable, ne faudrait-il pas changer la structure de financement de la sécurité sociale ? La réussite des contrats d'amélioration des pratiques individuelles (Capi) est un signe que la médecine de ville cherche d'autres modes de financement ; les jeunes générations veulent une médecine plus fonctionnarisée. Ne faudra-t-il pas un jour trouver d'autres méthodes, et revenir sur le paiement à l'acte ?
Catherine Procaccia . - Je me félicite pour ma part du vote de l'Assemblée nationale : les salariés qui perçoivent 300 euros de retraite dans le cadre d'un régime particulier ne s'imaginaient pas bénéficier d'une retraite chapeau ! J'espère que le Sénat conservera cette mesure.
Les assureurs demandent depuis longtemps que la contribution CMU soit transformée en taxe. Les négociations semblent avoir avancé depuis l'amendement que j'avais déposé en ce sens l'an dernier. Pourra-t-il aboutir cette année ?
René Teulade . - Monsieur le ministre, je ne mets pas en doute votre volonté d'équilibrer notre système, mais le moment n'est-il pas venu de changer de sémantique ? Plutôt que de charges, parlons d'investissement !
Nous recherchons un équilibre entre deux démarches incompatibles : des prescriptions libérales et des prestations socialisées. Cela suppose une responsabilisation des acteurs, prescripteurs et bénéficiaires. Mais on ne choisit pas d'être malade... Que pensez-vous du ticket modérateur ? Et que dire de l'introduction d'un mécanisme de bonus-malus dans la couverture santé que proposent certaines mutuelles ? Ce serait la fin de notre système.
Ce n'est pas parce qu'une loi est votée qu'elle est appliquée : je suis bien placé pour le savoir ! Il faut rechercher ensemble l'équilibre de notre système, qui conditionne l'équilibre de notre démocratie. Ce n'est pas par des faux-semblants que nous y arriverons.
Colette Giudicelli . - L'an dernier, le budget prévisionnel de l'AME était de 535 millions ; cette année, il est de 558 millions. Certains députés ont proposé de créer un forfait annuel de 30 euros pour les 200 000 bénéficiaires - qui ne rapporterait donc que 6 millions. Quelle est votre position ?
Claude Jeannerot . - Les dépenses médico-sociales doivent être appréciées globalement, sans oublier l'engagement des départements, qui prélèvent sur leurs recettes vives les moyens d'assurer les prestations universelles. Dans le Doubs, la prestation de compensation du handicap coûte 15 millions ; 10 millions restent à la charge nette du département. Pourquoi l'excédent éventuel de la CNSA ne serait-il pas affecté pour partie aux départements, qui voient leurs dotations gelées et leurs difficultés croître ?
Ronan Kerdraon . - De plus en plus de nos concitoyens renoncent à se faire soigner pour des raisons financières. Ne craignez-vous pas que la taxation des complémentaires n'aggrave les choses ? Et je ne parle pas des économies fixées par voie réglementaire - baisse de la prise en charge de certains médicaments de 35 % à 30 %, ou exclusion de l'hypertension bénigne du régime ALD...
Jacky Le Menn . - Comment espérer tenir un Ondam à 2,8 % quand la fédération européenne hospitalière évalue la progression des dépenses de santé à 3,7 %, et que la population vieillit ? Nous partageons les mêmes valeurs : une meilleure santé, le plus longtemps possible, pour le maximum de personnes.
Pourquoi ne pas créer un indicateur du reste à charge - une fois la fiction des complémentaires gommée ? Cela positiverait l'effort demandé à nos concitoyens.
François Baroin, ministre . - Pour la première fois depuis 1997, l'Ondam sera respecté : il est plutôt valorisant que le Gouvernement respecte ainsi la volonté de la représentation nationale ! Il faut rééquilibrer nos finances publiques, mais reconnaissez que continuer d'accompagner un taux d'augmentation des dépenses de santé deux fois supérieur à l'augmentation du coût de la vie, c'est un vrai choix de société. Alors que l'Espagne, le Portugal opèrent des coupes claires dans leurs budgets, que la Grande-Bretagne tourne le dos à l'idée anglo-saxonne d'Etat-providence, le Gouvernement préserve l'esprit de 1945.
Qu'Alain Vasselle se rassure : même avec une croissance de 2,5 % en 2012-2014, le panier fiscal demeurera excédentaire. La dette de l'Etat envers la sécurité sociale est passée de 5 milliards en 2007 à moins d'1 milliard fin 2009 ; en 2011, les bases auront été assainies. C'est un geste politique fort, vu la situation des caisses de l'Etat.
Le Gouvernement tient l'engagement du Président de la République d'augmenter l'AAH de 25 % sur la durée de la législature. C'est une priorité.
L'AME est un sujet sensible. Nous conservons l'une des déclinaisons du modèle français d'accueil, mais sans l'abonder pleinement, faute de pouvoir accompagner toutes les demandes. C'est la moindre des choses, dans un pays comme le nôtre, que les personnes qui se trouvent sur notre territoire aient accès aux soins.
Le rendement de la mesure sur les retraites chapeau sera réduit de 15 à 20 millions après les amendements de l'Assemblée nationale.
La taxe sur les conventions d'assurance est augmentée pour financer la Cades. Nous faisons la moitié du chemin. Les mutuelles bénéficient déjà d'un différentiel de 3,5 % par rapport au secteur privé. Toute une série de dispositifs - pour plus d'1 milliard - ne seront plus à la charge des assurances. Vu leur trésorerie, nous considérons qu'elles ont les moyens d'absorber cette mesure de solidarité sans avoir à augmenter leurs tarifs, d'autant qu'elles bénéficient aussi des mesures d'économies, pour 340 millions. Annoncer des augmentations de 8 % à 10 % est hors de proportion : nous le contesterons.
S'agissant de la responsabilité médicale des obstétriciens, le rapport Johanet envisage une mutualisation du risque. L'objectif est de proposer dès l'année prochaine des polices d'assurance adaptées.
Les 500 millions d'euros de gels sur l'Ondam 2010 se décomposent de la sorte : 100 millions sur le fonds de modernisation des hôpitaux, 300 millions sur l'aide à la contractualisation, 100 millions de sous-consommation des crédits médico-sociaux. Le détail pour l'année prochaine sera déterminé en mars.
M. Dassault a ouvert un chantier fort large... Je ne peux engager le Gouvernement sur une piste aussi audacieuse ! Je lui répondrai personnellement demain.
Madame Desmarescaux, il faut arrêter le contenu de la réforme de la dépendance avant de définir son financement. Comment tirer les leçons du passé ? Comment répondre à l'augmentation de la durée de vie ? Le Président de la République s'est engagé à ce que le débat soit ouvert avant la fin de l'année, et trouve une traduction législative l'année prochaine. Les mesures de recettes seront annoncées dans le texte et pourront être inscrites dans une loi de finances rectificative, sans attendre les prochains PLF et PLFSS.
Les excédents cumulés de la CNSA - 1,6 milliard - financent en effet les investissements dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Nous en débattrons lors du texte sur la dépendance.
Je ne suis pas opposé à ce que l'on étudie le différentiel de charges entre établissements publics et privés non lucratifs, mais la tarification à l'activité n'a pas pour but d'y remédier...
En supprimant les exonérations de charges pour les services à la personne, nous avons choisi de préserver l'efficacité d'un système conçu, à l'origine, pour soulager les actifs. Il a ensuite évolué, non sans connaître des dérives : on a vu le dispositif utilisé pour rémunérer un coach de gym à domicile ou un clown pour un anniversaire d'enfant...
Christiane Demontès . - Caricature !
François Baroin, ministre . - Une exonération supplémentaire de quinze points de cotisation sociale avait été consentie pour relancer le mécanisme : c'est ce que nous supprimons. La dépendance doit relever de dispositifs publics ou parapublics. Sans toucher à l'avantage fiscal, nous maintenons la dynamique de l'effort, mais en revenant à l'esprit du dispositif. Il faut flécher les moyens nécessaires vers les dispositifs de solidarité existants.
Monsieur Cazeau, si ce budget était préélectoral, il ne serait pas aussi courageux, voire audacieux disent certains ! Il a d'ailleurs suscité l'ire des étudiants, des handicapés, des mariés, des divorcés, des pacsés, de ceux qui ne veulent pas payer le stationnement ou la hausse de l'électricité... Mon poste n'est pas facile, et ce PLFSS n'a pas été conçu pour flatter l'opinion ! C'est un effort de 8 milliards en faveur du désendettement de notre sécurité sociale.
Madame Procaccia, il ne faudrait pas que les assureurs profitent d'une transformation de la contribution CMU en taxe pour augmenter leurs primes... Un amendement au PLF a toutefois été adopté aujourd'hui en ce sens : nous en reparlerons donc devant le Sénat.
Monsieur Teulade, nous avons déjà beaucoup fait avec les contrats responsables, qui représentent aujourd'hui 99 % des contrats. J'avais proposé un mécanisme de bonus-malus pour moduler les dotations de l'Etat aux collectivités locales en fonction de leur bonne gestion : M. Adnot m'en avait dissuadé, soulignant que l'Etat n'étant pas un parangon de vertu, il n'avait guère de leçons à donner... Je suis bien sûr opposé à l'idée d'un bonus-malus pour les complémentaires santé.
Monsieur Jeannerot, la question de la dépendance sera au coeur de la redistribution des charges qui pèsent sur les conseils généraux. Nous sommes conscients de l'effet de ciseaux. Le Premier ministre a pris des engagements envers les départements en difficulté : l'hypothèque sera levée d'ici l'année prochaine, et leur situation stabilisée.
Monsieur Kerdraon, nous augmentons le plafond de l'aide à la complémentaire santé de 20 % à 30 % de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-c). C'est une aide concrète pour les plus modestes des classes moyennes : 4,2 millions de personnes sont concernées.
Monsieur Le Menn, nous respecterons l'Ondam grâce aux mesures sur les prix des médicaments et les tarifs des professionnels, à la maîtrise médicalisée, à la bonne gestion des hôpitaux. Les agences régionales de santé (ARS) y contribueront. C'est un effort de longue haleine.
Muguette Dini , présidente . - M. Le Menn a évoqué la création d'un indicateur sur le reste à charge supportable...
Jacky Le Menn . - La question n'est pas plus difficile que celle de M. Dassault !
François Baroin, ministre . - Le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie n'a pas apporté de réponse définitive à cette question...