ARTICLE 10 - Affectation des surplus des prélèvements obligatoires à la réduction du déficit public
Commentaire : le présent article prévoit d'affecter au désendettement les surplus des impositions de toute nature de l'Etat et des cotisations et contributions de sécurité sociale affectées aux régimes obligatoires de base.
I. LE DROIT EXISTANT CONCERNE LE SEUL ÉTAT
A. L'ARTICLE 34 DE LA LOLF : L'OBLIGATION DE PRÉCISER EN LOI DE FINANCES L'AFFECTATION DES ÉVENTUELS SURPLUS DE L'ETAT
La loi organique n° 2005-779 du 12 juillet 2005 a modifié l'article 34 de la LOLF, qui prévoit désormais, au 10° du I, que la loi de finances de l'année « arrête les modalités selon lesquelles sont utilisés les éventuels surplus, par rapport aux évaluations de la loi de finances de l'année, du produit des impositions de toute nature établies au profit de l'Etat ».
M. Nicolas Sarkozy, alors ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, avait en effet annoncé, au début du mois de mai 2004, qu'il prendrait une initiative tendant à définir une norme de comportement budgétaire vertueuse en cas de surplus non anticipés de recettes. L'apparition d'un éventuel surplus de recettes est, en partie, liée à la qualité de la prévision de recettes, et donc de la prévision de croissance.
Les questions relatives à l'affectation des surplus de recettes sont familières à votre commission des finances. Elle avait, à l'automne 1999, affirmé qu'il existait un surplus de recettes fiscales par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale pour 1999, ce que le Gouvernement avait longtemps contesté, avant de déposer, lors de la discussion de l'article d'équilibre du projet de loi de finances rectificative pour 1999, le 20 décembre 1999, un amendement qui, selon les termes du ministre, tendait à « corriger l'équilibre de ce collectif budgétaire » et, en particulier, « relever le niveau des recettes de 11,3 milliards de francs (1,7 milliard d'euros), soit 0,7 % des recettes fiscales nettes, ce afin de tenir compte des informations les plus récentes ». Cet épisode, qui avait été qualifié indûment « d'affaire de la cagnotte budgétaire » par la presse, laissant ainsi penser qu'existaient des excédents alors que le budget connaissait alors un important déficit, avait constitué un moment de vérité budgétaire.
En pratique, l'article d'équilibre de chaque projet de loi de finances détermine l'affectation des éventuels surplus. Depuis la loi de finances pour 2006, il est d'usage que les surplus de recettes sont affectés en totalité à la réduction du déficit. Ainsi, le IV de l'article 67 de la n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 prévoit :
« Pour 2010, les éventuels surplus mentionnés au 10° du I de l'article 34 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances sont utilisés dans leur totalité pour réduire le déficit budgétaire.
« Il y a constatation de tels surplus si, pour l'année 2010, le produit des impositions de toute nature établies au profit de l'Etat net des remboursements et dégrèvements d'impôts, révisé dans la dernière loi de finances rectificative de l'année 2010 ou, à défaut, dans le projet de loi de finances pour 2011, est, à législation constante, supérieur à l'évaluation figurant dans l'état A mentionné au I du présent article. »
B. L'ARTICLE 9 DE LA LOI DE PROGRAMMATION DES FINANCES PUBLIQUES 2009-2012 : L'OBLIGATION D'AFFECTER AU DÉSENDETTEMENT LES ÉVENTUELS SURPLUS DE L'ÉTAT
L'article 9 de la loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 prévoit qu'au cours de la période de programmation, « les éventuels surplus, constatés par rapport aux évaluations de la loi de finances de l'année, du produit des impositions de toute nature établies au profit de l'Etat, sont utilisés dans leur totalité pour réduire le déficit budgétaire ».
Cette disposition de pure cohérence avec la politique poursuivie par l'actuel gouvernement, et le gouvernement précédent, ne conduit pas à rendre inopérantes les dispositions de la loi de finances de l'année en ce qui concerne la mise en oeuvre du 10 ° du I de l'article 34 de la LOLF.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : L'EXTENSION DE LA RÈGLE AUX RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE
Le présent article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale, prévoit que « les éventuels surplus, constatés par rapport aux évaluations de la loi de finances de l'année ou de la loi de financement de la sécurité sociale de l'année, du produit des impositions de toute nature établies au profit de l'État ou des cotisations et contributions de sécurité sociale affectées aux régimes obligatoires de base et aux organismes concourant à leur financement sont utilisés dans leur totalité pour réduire le déficit public ».
La règle est donc étendue aux régimes obligatoires de base.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Si les dépenses publiques (article 4) et les mesures nouvelles sur les prélèvements obligatoires (article 9) étaient rigoureusement égales aux montants de la programmation, le présent article n'aurait aucune utilité pratique. En effet, lorsque l'on énonce que les surplus sont affectés au désendettement, cela signifie que l'on ne prend aucune mesure supplémentaire sur les dépenses ou les recettes tendant à aggraver le déficit.
Cependant, sous sa forme actuelle, le présent projet de loi ne prévoit aucune procédure permettant de crédibiliser les règles définies par l'article 9 et, surtout, l'article 4. Dans ces conditions, il paraît nécessaire de maintenir le présent article, au moins de manière temporaire.
Par ailleurs, le présent article peut être utile dans le cas de figure où la loi de finances ou la loi de financement de la sécurité sociale prévoirait des mesures plus strictes que ce que prévoit la loi de programmation. Il jouerait un rôle de « cliquet », en retenant pour référence la loi de finances ou la loi de financement de la sécurité sociale.
Décision de la commission : votre commission a adopté cet article sans modification.