2. Une « rigueur » tardive mais incontestable, après les effets d'annonce du programme de stabilité et du débat d'orientation des finances publiques

Le déficit de 2010 étant désormais prévu à 7,7 points de PIB (et non 8 points de PIB comme lors du débat d'orientation des finances publiques et 8,2 points de PIB selon le programme de stabilité 2010-2013), l'effort à réaliser en 2011 n'est plus de l'ordre de 105 ou 100 milliards d'euros, mais de 95 milliards d'euros.

La décomposition de l'effort a considérablement varié depuis le débat d'orientation des finances publiques, comme le montre le tableau ci-après.

L'évolution du solde public : une décomposition indicative de la programmation du Gouvernement

(en milliards d'euros)

Programme de stabilité 2010-2013

PLF 2011

Ecart

2011

2011-
2013

2011

2011-2013

2011

2011-
2013

Evolution spontanée du solde

25

45

10

30

-15

-15

Evolution spontanée des recettes

10

25

2

17

-8

-8

Diminution du ratio dépenses/PIB lié à une croissance du PIB supérieure à 2 % si les dépenses augmentaient de 2 % par an

5

15

0

10

-5

-5

Fin du volet « dépenses » du plan de relance

5

5

5

5

0

0

Contrecoup de mesures antérieures (dont suppression de la TP)

10

10

7

7

-3

-3

Augmentation du ratio dépenses/PIB structurel si les dépenses continuaient d'augmenter de 2,4 % par an

-4

-10

-4

-10

0

0

Evolution du solde provenant de l'action du Gouvernement

20

60

25

65

5

5

Economies sur les dépenses de l'Etat

5

20

5

20

0

0

Economies sur les dépenses sociales

5

25

10

25

5

0

Mesures nouvelles sur les PO (hors « coups partis »)

3,5*

7,5*

10

16

6,5

8,5

Réduction du déficit des collectivités territoriales

2

8

-2

4

-4

-4

Total

45

105

35

95

-10

-10

En points de PIB

2,2

5,2

1,7

4,7

-0,5

-0,5

* Dont la compensation alors prévue de la censure de la taxe carbone, évaluée ici à 1,5 milliard d'euros. Cette compensation devait entrer en vigueur au 1 er juillet 2010, mais on suppose ici, par convention, qu'elle fait sentir la totalité de son impact en 2011.

NB : certains montants sont indicatifs, toutes les hypothèses du Gouvernement n'étant pas explicitées.

Source : calculs de la commission des finances

Le Gouvernement annonce en effet aujourd'hui des réductions de « niches » nettement supérieures à ce qui était prévu par le programme de stabilité, comme le montre l'encadré ci-après.

L'augmentation discrète du montant global des augmentations de prélèvements obligatoires prévues d'ici 2013

Le programme de stabilité 2010-2013 prévoyait de réduire les niches de 2 milliards d'euros par an pendant 3 ans, soit 6 milliards d'euros en régime de croisière. A cela devait s'ajouter la compensation de la censure de la taxe carbone par le Conseil constitutionnel à compter du 1 er juillet 2010. Comme la taxe carbone aurait dû rapporter 1,5 milliard d'euros, on peut considérer que cette mesure aurait eu un impact analogue (concentré sur l'année 2011 si, comme cela était probable, cette mesure n'avait pu être adoptée avant la loi de finances pour 2011).

Les déclarations du Gouvernement sont ensuite devenues évolutives et difficilement compréhensibles. Le Premier ministre a indiqué le 25 juin 2010 que le montant des réductions de niches pourrait aller jusqu'à 8,5 milliards d'euros à l'horizon 2013. Le rapport du Gouvernement déposé en vue du DOFP pour 2011, transmis à votre commission des finances début juillet, évoquait en matière de réduction de niches le chiffre d'« au moins 8,5 milliards d'euros », mais sans indiquer s'il s'entendait à l'horizon 2011, 2012 ou 2013, la déclaration précitée incitant à privilégier cette dernière interprétation. Lors du DOFP à l'Assemblée nationale puis au Sénat les 7 et 8 juillet 2010, le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État a évoqué en séance publique « un objectif de 8,5 milliards à 10 milliards d'euros de réduction des niches pour 2011 et 2012 », sans préciser comment la répartition de l'effort se ferait entre ces deux années, et si l'effort se poursuivrait en 2013. Ces différentes déclarations avaient pour point commun de ne jamais évoquer d'effort supérieur à 8,5-10 milliards d'euros à l'horizon 2013.

Le Gouvernement prévoit désormais explicitement d'alourdir les prélèvements obligatoires de 10,9 milliards d'euros dès 2011, dont 9,4 milliards d'euros de suppressions de niches. Le présent projet de loi de programmation des finances publiques indique quant à lui que les mesures nouvelles sur les prélèvements obligatoires seraient d'au moins 10 milliards d'euros en 2011 et 3 milliards d'euros chacune des années 2012 à 2014, soit 19 milliards d'euros au total et 16 milliards d'euros de 2011 à 2013 (sans que soit indiqué ce qui dans ce total concerne les réductions de niches).

Les programmations successives des mesures nouvelles sur les prélèvements obligatoires : une tentative de reconstitution

(en milliards d'euros)

2011

2012

2013

2014

2011-2013

Programme de stabilité 2010-2013

13,5

2

2

17,5

dont niches

2

2

2

6

dont compensation de la suppression de la taxe carbone

1,5 (1)

1,5

dont mesures antérieures

10 (2)

10

Débat d'orientation des finances publiques pour 2011

?

?

?

18,5 ?

dont niches

?

?

?

8,5 ? (3)

dont mesures antérieures

10 (2)

10

Programmation actualisée du Gouvernement

17,7 (4)

3 (5)

3 (5)

3 (5)

23,7

dont PLF 2011 et PLFSS 2011

10,9 (4)

2,7 (4)

dont niches

9,4 (4)

2,1 (4)

dont mesures antérieures au 1er juillet 2010

6,8 (4)

Présent projet de loi (mesures post-1 er juillet 2010)

10

3

3

3

16

(1) Cette compensation devait entrer en vigueur au 1 er juillet 2010, mais on suppose ici, par convention, qu'elle fait sentir la totalité de son impact en 2011. (2) D'après le rapport sur les prélèvements obligatoires et leur évolution annexé au PLF 2010. (3) Le Premier ministre a indiqué le 25 juin 2010 que le montant des réductions de niches pourrait aller jusqu'à 8,5 milliards d'euros à l'horizon 2013. Le rapport du Gouvernement déposé en vue du DOFP pour 2011 évoquait en matière de réduction de niches le chiffre d'« au moins 8,5 milliards d'euros », sans indiquer à quel horizon. (4) Rapport sur les prélèvements obligatoires et leur évolution annexé au PLF 2011. (5) Par convention, montants du présent projet de loi.

Source : commission des finances

Au total, les mesures nouvelles résultant de dispositions postérieures au premier semestre 2010 sont accrues de 8,5 milliards d'euros par rapport au programme de stabilité 2010-2013 et de 7,5 milliards d'euros par rapport à une lecture stricte du rapport du Gouvernement déposé en vue du DOFP pour 2011. Cependant, comme les mesures nouvelles pour 2010 résultant de mesures antérieures ont été revues à la baisse pour environ 3 milliards d'euros, alors que le présent projet de loi prévoit paradoxalement des mesures nouvelles en 2011 inférieures de 0,9 milliard d'euros à ce qui résulte des PLF et PLFSS pour 2010, au total le présent projet de loi prévoit des mesures nouvelles totales d'ici 2013 supérieures d'environ 6 ou 5 milliards d'euros par rapport, respectivement, au programme de stabilité et au DOFP.

Les mesures nouvelles sur les prélèvements obligatoires prévues par le présent projet de loi : évolution par rapport aux annonces antérieures

(en milliards d'euros)

Mesures nouvelles prévues post juillet 2010

Total des mesures nouvelles

Evolution par rapport au programme de stabilité 2010-2013

8,5

6,2

Evolution par rapport au DOFP

7,5

5,2

Source : commission des finances, d'après le tableau ci-avant

Cette révision à la baisse des mesures nouvelles en 2011 provenant de mesures antérieures aux PLF et PLFSS 2011 s'explique notamment par celle de l'impact de la suppression de la taxe professionnelle. Le coût en régime de croisière a été revu à la hausse (5,2 milliards d'euros contre une prévision initiale de 3,2 milliards d'euros), le coût légèrement inférieur aux prévisions en 2010 devant s'accompagner d'un « contrecoup » nettement inférieur en 2011.

La révision de l'impact de la suppression de la taxe professionnelle

(en mesures nouvelles
et en milliards d'euros)

2010

2011

Cumul

Ecart pour les mesures nouvelles de 2011

Rapport PO 2010

-11,7

8,5

-3,2

Rapport PO 2011

-9,6

4,4

-5,2

-4,1

Etat

24,3

-23,4

0,9

Administrations publiques locales

-33,9

27,8

-6,1

Source : rapports du Gouvernement sur les prélèvements obligatoires et leur évolution, calculs de la commission des finances

Les mesures sur les recettes prévues par le Gouvernement sont indiquées par le tableau ci-après.

Suppressions/réductions de dépenses fiscales et niches sociales, et recettes nouvelles

(en millions d'euros)

Mesures nouvelles 2011

Mesures nouvelles 2012

2012

Ménages

Entr.

Total

Ménages

Entr.

Total

Ménages

Entr.

Total

Réforme des retraites

825

2200

3025

190

100

290

1015

2300

3315

Suppression du crédit d'impôt sur les dividendes

645

645

0

0

0

645

645

Imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières au premier euro

0

0

180

0

180

180

180

Hausse des contributions sur les stock-options

70

70

10

0

10

80

80

Suppression de l'abattement et instauration d'une contribution sur les retraites-chapeaux

110

110

0

0

0

110

110

Annualisation des allègements généraux de cotisations sociales

2 000

2000

0

100

100

2 100

2100

Suppression du plafonnement de la quote-part pour frais et charges sur les dividendes

200

200

0

0

0

200

200

Financement de la dette sociale

1 600

2 150

3 750

-200

0

-200

1 400

2 150

3 550

Imposition aux contributions sociales des compartiments euros des contrats d'assurance-vie multisupports au fil de l'eau

1 600

1 600

-200

0

-200

1 400

1 400

Imposition à la TSCA à taux réduit des contrats d'assurance maladie solidaires et responsables

1 100

1100

0

0

0

1 100

1100

Taxation des sommes placées dans la réserve de capitalisation par les sociétés d'assurance

1 050

1050

0

0

0

1 050

1050

Autres mesures « niches » PLFSS

25

420

445

0

0

0

25

420

445

Hausse du forfait social

350

350

0

0

0

350

350

Assujettissement aux cotisations sociales des rémunérations versées par des tiers

70

70

0

0

0

70

70

Limitation du champ de la déduction de 3 % de CSG pour frais professionnels

25

25

0

0

0

25

25

Autres mesures « niches » PLF

1130

1090

2220

1795

170

1965

2925

1260

4185

Réduction de 10 % d'un ensemble de crédits et réductions d'impôt sur le revenu

0

0

430

0

430

430

430

Suppression du taux réduit de TVA sur les offres composites « triple play »

550

550

1100

0

0

0

550

550

1100

Aménagement des dispositifs d'aide à l'investissement dans des équipements photovoltaïques

150

150

700

0

700

850

850

Recentrage des dispositifs d'aide à l'investissement dans les PME

30

30

50

0

50

80

80

Révision des modalités déclaratives en cas de mariage, divorce, PACS

0

0

500

0

500

500

500

Application de la taxe sur le véhicule de tourisme de société aux véhicules immatriculés N1

40

40

0

0

0

40

40

Suppressions ou réduction d'exonérations de cotisations employeurs (dont plateaux repas, ZRR OIG, JEI, emplois à domicile des publics non fragiles, etc.)

400

500

900

115

170

285

515

670

1185

Autres mesures

495

950

1445

610

50

660

1105

1000

2105

Contribution sur les hauts revenus et les revenus du capital

495

495

10

0

10

505

505

Augmentation du taux de cotisation ATMP

450

450

0

0

0

450

450

Taxe sur les banques

500

500

0

50

50

550

550

Réforme de l'accession à la propriété

0

600

0

600

600

600

Total niches fiscales et sociales

3 580

5 860

9 440

1 785

270

2 055

5 365

6 130

11 495

Total recettes nouvelles

4 075

6 810

10 885

2 395

320

2 715

6 470

7 130

13 600

En %

37 %

63 %

48 %

52 %

Source : d'après le dossier de presse du projet de loi de finances pour 2010

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page