II. LA PROBLÉMATIQUE CRUCIALE DU FINANCEMENT DES ENTREPRISES
Le présent projet de loi comporte deux titres. Le premier a pour objet de « renforcer la supervision des acteurs et des marchés financiers » et le second s'intitule, dans la continuité de la politique mise en oeuvre depuis le début de la crise financière, « soutenir le financement de l'économie pour accompagner la reprise ».
De fait, la finalité première du secteur bancaire et financier doit rester le financement de « l'économie réelle » et de ses acteurs, à commencer par les entreprises.
Tel a d'ailleurs toujours été le sens du soutien apporté par votre commission des finances aux mesures « anti crise » ayant concerné ce secteur 22 ( * ) , prises dans le cadre de plusieurs lois de finances rectificatives au cours des années 2008 et 2009, et dont les principales seront rappelées ci-après.
Votre commission a, dès leur mise en place, insisté sur la nécessité d'évaluer ces mesures et souhaité la création du comité du suivi du plan de financement de l'économie française. En outre, elle a mis en place en son sein un groupe de travail sur le financement des entreprises 23 ( * ) , qui s'est réuni entre avril et juillet 2010 et qui a interrogé des représentants des sphères publiques (Banque de France, Caisse des dépôts et consignations - CDC, OSEO, etc.) et privées (banques, sociétés d'assurance, Confédération générale des petites et moyennes entreprises - CGPME, Association française des investisseurs en capital - AFIC, etc .).
Les éléments recueillis par le groupe de travail permettent d'éclairer utilement l'analyse des dispositions du présent projet de loi. Les considérations qui suivent concerneront, pour l'essentiel, les dispositifs de soutien aux prêts aux entreprises.
Il est à noter que l'évaluation des aides à la capitalisation de ces mêmes entreprises, qui passent, en général, par des mesures de nature fiscale, trouvera plus naturellement sa place dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011. A l'heure où l'ensemble des niches fiscales doivent être remises en question, votre commission sera soucieuse d'assurer que ces dispositifs sont réalistes et véritablement orientés vers « l'économie réelle ».
A. UNE MOBILISATION TRÈS FORTE DE L'ETAT POUR QUE LES ENTREPRISES SURMONTENT LA CRISE
1. Une réaction rapide dès le début de la crise
Si le Gouvernement a, dès le début de la crise, pris des mesures visant à améliorer la solidité financière des entreprises, en particulier des PME 24 ( * ) , la survenue de la crise financière de l'automne 2008 a entraîné une réaction particulièrement forte des pouvoirs publics afin d'éviter l'asphyxie de l'économie française.
Ainsi, dès le 2 octobre 2008 , le Président de la République a annoncé un plan de soutien au financement des entreprises comprenant trois volets :
- le renforcement des moyens d'OSEO . Il s'agissait tout d'abord d'augmenter de 50 % la capacité de prêt d'OSEO , grâce à l'ouverture au bénéfice de cet établissement public d'une nouvelle ligne de refinancement de 2 milliards d'euros, à des conditions attractives, par la Caisse des dépôts et consignations (CDC). De plus, le volume des garanties accordées par OSEO aux prêts bancaires aux PME a été augmenté de 2 milliards d'euros , grâce à une hausse des dotations des fonds de garantie (portées à 280 millions d'euros, au lieu de 240 millions d'euros). Par ailleurs, une dotation de 70 millions d'euros a été affectée à un fonds spécifique destiné à garantir la consolidation sur moyen et long terme des prêts à court terme aux PME . Un milliard d'euros de prêts devaient ainsi pouvoir être consolidés ;
- la mise à disposition des établissements bancaires et financiers de quelque 17 milliards d'euros afin de financer les PME. Cette somme a résulté de la décentralisation complète des dépôts collectés par les banques sur le livret de développement durable (LDD, les sommes collectées étant auparavant centralisées à hauteur de 9 % auprès de la CDC), le taux de centralisation des dépôts collectés sur le livret d'épargne populaire (LEP) passant de 85 % à 70 % 25 ( * ) ;
- enfin, la faculté pour le comité des créanciers, statuant à la majorité, d'une entreprise en sauvegarde, de décider la transformation de créances bancaires en actions, de manière à faciliter le retournement de ces entreprises en diminuant leur contrainte d'endettement.
De plus, aux termes de l'article 6 de la loi n° 2008-1061 du 16 octobre 2008 de finances rectificative pour le financement de l'économie, les établissements bancaires et financiers ayant reçu le soutien de l'Etat pour surmonter la crise 26 ( * ) ont dû passer une convention avec l'Etat qui a fixé les contreparties de la garantie, « notamment en ce qui concerne le financement des particuliers, des entreprises et des collectivités territoriales ».
* 22 Voir notamment le rapport Sénat n° 23 (2008-2009) sur le projet de loi de finances rectificative pour le financement de l'économie, octobre 2008.
* 23 Le groupe de travail était composé de Philippe Adnot, Jean-Paul Alduy, Jean Arthuis, Marie-France Beaufils, Nicole Bricq, Yvon Collin, Yves Krattinger, Alain Lambert, Gérard Longuet, Philippe Marini, Marc Massion et Albéric de Montgolfier. La liste des personnes qu'il a entendues est reproduite en annexe au présent rapport.
* 24 La réduction d'impôt de solidarité sur la fortune au titre des investissements dans les PME (article 885-0 V bis du code général des impôts) constitue un effort public important pour renforcer les fonds propres de ces entreprises, dont l'effet sur le financement de l'économie « réelle » devra être évalué au moment de l'examen du projet de loi de finances pour 2011 ; s'agissant du « bas de bilan », il convient de mentionner la réduction des délais de paiement résultant de l'article 21 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (LME).
* 25 Selon l'observatoire de l'épargne réglementée, les encours des différents livrets au 31 décembre 2009 s'élevaient à 183,3 milliards d'euros pour le livret A, à 69,1 milliards d'euros pour le LDD et à 58,3 milliards d'euros pour le LEP.
* 26 Par l'intermédiaire de la Société de financement de l'économie française (SFEF) pour les garanties de refinancement et de la Société de prises de participations de l'Etat (SPPE) quand une prise de participation publique s'est révélée nécessaire.