B. UNE RÉDUCTION DU DÉFICIT DE LA ZONE EURO PROBABLEMENT FAIBLE À COURT TERME EN RAISON DE SON IMPACT SUR LA CROISSANCE
Les Etats de la zone euro doivent donc absolument réduire leur déficit. Cette perspective est toutefois rendue difficile à moyen terme par le fait que les mesures de réduction du déficit tendent, à court terme, à réduire la croissance, ce qui diminue l'efficacité des mesures prises.
1. Un objectif de fin des déficits excessifs en 2013 ambitieux et aux effets économiques incertains
Il paraît très difficile d'atteindre l'objectif, fixé par le Conseil à la quasi-totalité des Etats membres - et en particulier à la France - de ramener leur déficit en dessous de 3 points de PIB en 2013.
Certes, un tel objectif correspond à une réduction du déficit d'environ « seulement » trois points de PIB en trois ans, soit 1 point de PIB par an. Cependant, il faut prendre en compte le fait que les mesures de réduction du déficit ont un impact négatif sur la croissance, réduisant l'amélioration finale du déficit. Ce phénomène dépend du niveau du « multiplicateur keynésien », c'est-à-dire de l'impact sur le PIB d'une évolution ex ante du déficit. Si au niveau individuel des Etats membres le multiplicateur keynésien est modeste (du fait des importations), au niveau de l'ensemble de l'Union européenne ou de la zone euro, il est environ deux fois plus élevé.
Si l'on retient, au niveau de la zone euro, une hypothèse de multiplicateur keynésien de 1, l'effort nécessaire est de 2 points de PIB, mais il est de 4 points de PIB avec un multiplicateur de 1,5, et il est infini avec un multiplicateur de 2. Certes, ce dernier scénario est manifestement trop pessimiste 3 ( * ) , mais le scénario intermédiaire est préoccupant puisqu'il implique que, pour atteindre les objectifs de la Commission, il faudrait chaque année prendre des mesures de réduction du déficit de 4 points de PIB (soit 80 milliards d'euros pour la France) pour parvenir à améliorer le déficit de seulement 1 point de PIB (soit 20 milliards d'euros pour la France), l'écart venant d'un impact négatif sur la croissance du PIB de la zone euro d'environ 6 points par an. Autrement dit, dans ce scénario, pour atteindre l'objectif de retour au seuil de 3 % en 2013, il faudrait plonger la zone euro dans une récession encore plus forte que celle de 2008-2009.
La prise en compte de l'effet dépressif de la réduction du déficit public des Etats de la zone euro : quelques ordres de grandeur indicatifs
Hypothèse de multiplicateur keynésien au niveau de la zone euro |
Réduction du déficit résultant de mesures de réductions de dépenses ou d'augmentations de recettes d'1 point de PIB |
Mesures de réductions de dépenses ou d'augmentations de recettes nécessaires pour réduire le déficit d'1 point de PIB |
(en points de PIB) |
(en points de PIB) |
|
1 |
~ 0,5 |
~ 2 |
1,5 |
~ 0,25 |
~ 4 |
2 |
~ 0 |
[montant infini] |
Source : calculs de la commission des finances
* 3 Il correspond en fait à un scénario où l'effort porterait exclusivement sur des dépenses à fort effet multiplicateur, comme l'investissement ou les transferts en faveur des ménages modestes.