B. LE PRAGMATISME DE LA BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE
Parallèlement à l'élaboration des dispositifs intergouvernementaux, la banque centrale européenne a profondément modifié sa doctrine.
1. Un assouplissement des conditions d'éligibilité des titres d'Etat pris en collatéral
La Banque centrale européenne a considérablement infléchi les conditions d'éligibilité des titres d'Etat pris en collatéral dans le cadre de ses opérations de refinancement :
- assouplissement des critères de notation par les agences jusqu'à la fin de l'année 2010 ;
- annonce le 25 mars 2010 que cet assouplissement continuerait de s'appliquer en 2011 ;
- annonce le 3 mai 2010 que, dans le cas de la Grèce, la notation des emprunts d'Etat ne serait plus prise en considération.
2. La décision de la Banque centrale européenne d'intervenir sur le marché obligataire secondaire
Le 10 mai 2010, le conseil des gouverneurs a décidé de « réaliser des interventions sur les marchés des dettes publiques et privées de la zone euro (...) pour assurer la profondeur et la liquidité des segments du marché qui sont dysfonctionnels » 15 ( * ) . Cette politique constitue ce que l'on appelle le « programme d'intervention sur les marchés obligataires européens » ( Securities Market Program ).
Il s'agit notamment d'acheter sur le marché secondaire des obligations émises par les Etats fragilisés.
Ces opérations sont « stérilisées », c'est-à-dire que la BCE fait en sorte de détruire parallèlement la monnaie ainsi créée. La « stérilisation » se fait sous la forme de dépôts à terme des banques auprès de la BCE d'une durée d'une semaine, collectés par le biais d'appel d'offre à taux variable avec un taux maximal de soumission de 1 %. En pratique, le taux servi (taux moyen pondéré) s'est établi à un niveau légèrement supérieur au taux de la facilité de dépôt (0,25 %) : à 0,28 % lors de la première opération puis à 0,27 % lors de la deuxième opération qui arrive à échéance le 2 juin.
En conséquence de ce changement de politique, les taux d'intérêt grecs à 10 ans ont considérablement baissé. De 12,65 % le 7 mai, ils sont passés à 6,717 % le 10 mai, avant de remonter légèrement.
Le programme d'intervention sur les marchés obligataires européens ne porte pas sur des montants prédéterminés. Au 21 mai 2010, le montant total des achats au titre de ce programme s'élevait à 26,5 milliards d'euros, soit 1,4 % du total des actifs de la BCE. La part des titres publics et des différents Etats émetteurs dans ce montant total n'est pas connue.
Le 24 mai 2010, M. Olivier Blanchard, économiste en chef du FMI, a invité la BCE à clarifier sa position et à convaincre les marchés qu'elle continuerait, si nécessaire, à acheter des obligations d'Etat.
* 15 Traduction de la commission des finances.