TITRE IV - DISPOSITIONS RELATIVES À L'ORGANISATION ET AU FONCTIONNEMENT DU DÉFENSEUR DES DROITS
Le titre IV du présent projet de loi organique comporte des dispositions utiles à l'organisation et au fonctionnement de l'institution.
A l'initiative de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement rédactionnel afin de préciser l'intitulé de cette division du présent projet de loi organique.
Article 28 - Personnel du Défenseur des droits
Cet article prévoit que le Défenseur des droits dispose de services placés sous son autorité , au sein desquels il peut recruter des fonctionnaires, des magistrats et des agents non titulaires de droit public, c'est-à-dire des contractuels. Notons que tous les personnels des AAI fusionnées seront transférés au Défenseur des droits quel que soit leur statut (contractuels, détachement, mises à disposition) comme le prévoit l'article 33 en son alinéa 3 (cf infra . commentaire de cet article). Ce transfert garantit la préservation de l'expertise et de l'expérience acquises au sein de chacune de ces autorités.
L'ensemble des personnels du Médiateur de la République, du Défenseur des enfants, de la CNDS et de la HALDE représentent en 2010 environ près de 230 équivalents temps plein (ETPT), ainsi répartis :
Intitulé |
Catégories d'emplois |
||||||
Nombre d'ETPT |
A+ |
A |
B |
C |
Total titulaires |
contractuels |
|
Médiateur de la République |
95 60 ( * ) |
4 |
28 |
7 |
17 |
56 |
39 |
Défenseur des enfants |
27 |
nd |
nd |
nd |
nd |
nd |
nd |
CNDS |
8 |
0 |
1 |
0 |
2 |
3 |
5 |
HALDE |
84 |
4 |
7 |
0 |
0 |
11 |
73 |
TOTAL |
214 |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
Source : Rapports annuels d'activité et http://www.performance-publique.gouv.fr/ .
Cet article donne également aux agents placés sous l'autorité du Défenseur des droits la possibilité d'exercer, par délégation de signature , certaines des compétences d'investigation du Défenseur des droits. Il en est de même des délégués que le Défenseur peut désigner sur l'ensemble du territoire de la République.
Ces dispositions appellent deux observations .
En premier lieu, il est intéressant de noter que le projet de loi organique fait le choix de ne pas donner au Défenseur des droits la possibilité de déléguer certains de ses pouvoirs aux membres des collèges. Ces derniers sont en effet conçus par le Gouvernement comme des organes consultatifs.
En second lieu, votre rapporteur relève que l 'organisation territoriale du Défenseur des droits est un enjeu crucial qui pourrait grandement conditionner l'efficacité de cette nouvelle autorité constitutionnelle. Dans la mesure où le Défenseur intègrerait trois autorités administratives indépendantes organisées aujourd'hui en réseaux (le Médiateur, le Défenseur des enfants et la HALDE), la question de l'opportunité de fusionner les délégués au plan local se pose.
Or, comme l'a justement souligné M. Jean-Claude Peyronnet dans son rapport budgétaire sur le programme « Protection des droits et libertés » 61 ( * ) , il est difficile d'imaginer qu'une même personne, déléguée du Défenseur des droits, puisse, seule, exercer les compétences actuellement dévolues à plusieurs, comme le lui ont indiqué tant le Médiateur de la République que la Défenseure des enfants et la HALDE.
Le Médiateur, souligne ce rapport, a mis en avant le risque de trop « charger la barque » sous peine de décourager les futurs candidats, ajoutant que « si le champ d'intervention de la nouvelle institution est très élargi, peut se poser la question du maintien du statut de bénévole, et donc celle du coût de fonctionnement de l'Institution. Si la fonction de correspondant du défenseur des droits exige un travail à plein temps, le profil des candidats ne sera évidemment plus le même »
De même, la Défenseure des enfants a jugé « impossible qu'une seule personne réunisse toutes les compétences au niveau local, les champs d'intervention étant trop divers et spécialisés ».
Enfin, la HALDE a estimé « peu probable qu'une même personne soit en capacité réelle de réunir toutes les compétences au niveau local compte tenu de la technicité de chacun des domaines ».
Votre commission souligne la pertinence des préventions ainsi exprimées et relève que si les correspondants des différentes AAI sont des bénévoles dévoués, leur champ d'intervention est spécifique, à telle enseigne que les échanges sont actuellement peu fréquents, en dehors des redirections de plaintes.
Sauf circonstances locales particulières, le Défenseur des droits devra donc probablement privilégier, selon le schéma actuel, la mise en place de délégués territoriaux spécialisés bénévoles , exerçant à temps partiel , plutôt que des délégués généralistes, travaillant à temps plein.
Votre commission a adopté un amendement de son rapporteur visant à :
- donner une plus grande souplesse de recrutement au Défenseur des droits, en particulier en lui permettant expressément de faire appel à des fonctionnaires des assemblées parlementaires, mais excluant la mise à disposition, par des entreprises, de salariés du secteur privé ;
- reprendre, au sein de la loi organique relative au Défenseur des droits, les compétences spécifiques des agents de la HALDE en matière de constatation des délits de discrimination . Il convient en effet, pour que l'action du Défenseur en ce domaine soit efficace, que certains de ses agents puissent être assermentés et habilités par le procureur de la République, afin de constater par procès-verbal les délits de discrimination, y compris lorsqu'ils sont commis lors d'opérations de « testing », comme le prévoit l'article 225-3-1 du code pénal (article 2 de la loi de 200 précitée sur la HALDE).
Votre commission a adopté l'article 28 ainsi modifié .
Article 29 - Secret professionnel
Cet article prévoit l'obligation pour le Défenseur des droits, les membres des collèges qui l'assistent, les délégués du Défenseur des droits et l'ensemble des personnes qui travaillent sous son autorité de respecter le secret professionnel pour les faits, actes ou renseignements dont ils ont pu avoir connaissance, en raison de leurs fonctions.
Cette obligation est d'autant plus importante que, conformément à l'article 17 du projet de loi organique, le Défenseur des droits peut recueillir sur les faits portés à sa connaissance « toute information qui lui apparaît nécessaire » sans que leur caractère secret ou confidentiel ne puisse lui être opposé, sauf en matière de secret de l'enquête et de l'instruction et de secret concernant la défense nationale, la sûreté de l'État ou la politique extérieure.
Le secret professionnel ne saurait toutefois être absolu : deux réserves sont prévues dans le présent article :
- le Défenseur des droits peut également, lorsqu'il a été saisi par un enfant mineur, informer son représentant légal ainsi que les autorités susceptibles d'intervenir dans l'intérêt de l'enfant ;
- par définition, il ne peut mettre à mal la mission du Défenseur des droits et sa faculté de rendre publics des avis, recommandations, injonctions et rapports mentionnés dans le projet de loi organique, dès lors que ces documents ne permettent pas l'identification des personnes dont le nom aurait été révélé au Défenseur des droits.
A cet égard, votre commission a souhaité, par un amendement de son rapporteur, renforcer cette interdiction par la suppression de la formule peu normative « le Défenseur des droits veille à ce que... » et préciser que l'anonymat concerne les personnes physiques , et non les personnes morales, conformément aux pratiques actuelles des autorités administratives indépendantes. Cet amendement a également, par coordination, prévu la soumission des adjoints au secret professionnel, et clarifié la rédaction proposée : en effet, le secret professionnel ne doit pas faire obstacle au bon accomplissement de la mission du Défenseur des droits dont l'efficacité repose, en grande partie, sur la publicité donnée à ses positions.
Votre commission a adopté l'article 29 ainsi modifié .
Article 29 bis (nouveau) - Règlement intérieur et code de déontologie
A l'initiative de son rapporteur, votre commission a inséré un article 29 bis prévoyant que le Défenseur des droits établit et rend public un règlement intérieur et un code de déontologie applicables aux Défenseur des droits, à ses adjoints, aux autres membres des collèges, aux agents et aux délégués.
Par « règlement intérieur », il faut entendre un document prévoyant certaines modalités de fonctionnement et d'intervention du Défenseur des droits, telles que le délai laissé aux personnes mises en cause pour répondre aux recommandations du Défenseur, les modalités de publicité des réponses des personnes mises en cause aux côtés des prises de position du Défenseur, le délai pour répondre à une sollicitation des juridictions...
Par « code de déontologie », il faut entendre un ensemble de règles destinées à éviter tout conflit d'intérêt entre les fonctions exercées au sein de l'institution et les fonctions antérieures ou postérieures. Rappelons que la création d'un tel code a été préconisé pour toutes les autorités administratives indépendantes par le rapport précité de l'Office parlementaire d'évaluation de la législation (recommandation n° 26) : « l'Office juge indispensable que chaque autorité apporte la plus grande attention aux garanties d'indépendance de ses services. Il estime que la définition des règles propres à assurer cette indépendance revient aux autorités elles-mêmes, qui doivent en rendre compte au Parlement. » Notons que la CNIL et le Médiateur se sont dotés d'un tel code de déontologie au cours de ses dernières années.
Votre commission a adopté l'article additionnel ainsi rédigé .
* 60 A ces personnels s'ajoutent 11 agents :
- 6 fonctionnaires mis à disposition sans remboursement par des services de l'Etat, les assemblées parlementaires ou encore des collectivités territoriales ;
- 5 agents du Pôle santé sécurité des soins chez le Médiateur de la République au terme d'une convention de mise à disposition avec transferts de crédits.
* 61 Avis n° 104 (2008-2009) de M. Jean-Claude Peyronnet, fait au nom de la commission des lois, déposé le 20 novembre 2008 ; rapport disponible sur Internet http://www.senat.fr/rap/a08-104-8/a08-104-8.html