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Rapport n° 248 (2009-2010) de M. René BEAUMONT , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 3 février 2010

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N° 248

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2009-2010

Enregistré à la Présidence du Sénat le 3 février 2010

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , autorisant l'approbation de l' accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d' Angola sur l' encouragement et la protection réciproques des investissements ,

Par M. René BEAUMONT,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Josselin de Rohan , président ; MM. Jacques Blanc, Didier Boulaud, Jean-Louis Carrère, Jean-Pierre Chevènement, Robert del Picchia, Jean François-Poncet, Robert Hue, Joseph Kergueris , vice-présidents ; Mmes Monique Cerisier-ben Guiga, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. André Trillard, André Vantomme, Mme Dominique Voynet , secrétaires ; MM. Jean-Etienne Antoinette, Robert Badinter, Jean-Michel Baylet, René Beaumont, Jean-Pierre Bel, Jacques Berthou, Jean Besson, Michel Billout, Didier Borotra, Michel Boutant, Christian Cambon, Marcel-Pierre Cléach, Raymond Couderc, Mme Michelle Demessine, M. André Dulait, Mmes Bernadette Dupont, Josette Durrieu, MM. Jean Faure, Jean-Paul Fournier, Mme Gisèle Gautier, M. Jacques Gautier, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Hubert Haenel, Robert Laufoaulu, Simon Loueckhote, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Rachel Mazuir, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Jean Milhau, Charles Pasqua, Xavier Pintat, Bernard Piras, Christian Poncelet, Yves Pozzo di Borgo, Jean-Pierre Raffarin, Daniel Reiner, Roger Romani, Mme Catherine Tasca.

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) :

1490 , 1647 et T.A. 280

Sénat :

404 (2008-2009) et 249 (2009-2010)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est saisi d'un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale le 14 mai 2009, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Angola sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements, signé à Paris, le 24 juin 2008.

Cet accord s'inscrit dans une série d'accords bilatéraux similaires récemment négociés avec des États africains qui visent à offrir un cadre protecteur aux investissements.

Signé à la suite d'une visite présidentielle qui a marqué le renouveau de nos relations bilatérales, il vise à inciter les investisseurs à accompagner la sortie de crise de cet État doté d'un potentiel économique indéniable.

Depuis le cessez-le-feu de 2002, qui a mis fin à vingt-sept ans de guerre civile et a été consolidé par les élections législatives de 2008, l'Angola a enregistré une forte croissance, soutenue par la richesse pétrolière du pays. Engagé dans un processus de diversification de son économie, il devra être accompagné par les investisseurs étrangers. Cet accord y contribue.

I. L'ANGOLA, UNE SORTIE DE CRISE SOUTENUE PAR DES RESSOURCES NATURELLES

A. UNE CROISSANCE FONDÉE SUR LE PÉTROLE

L'Angola jouit d'un potentiel économique que les ravages de la guerre civile n'ont pas entamé . Il dispose de ressources en pétrole, en diamants et en gaz mais aussi hydrauliques, agricoles et halieutiques.

Avec une croissance moyenne de 20 pour cent ces trois dernières années, l'Angola fait partie des économies qui progressent le plus rapidement au monde.

Selon l'OCDE, son taux de croissance a ralenti à environ 15,8 pour cent en 2008 et devrait être négatif en 2009 avant de rebondir en 2010. Après 27 ans de guerre civile, la reconstruction est en cours, largement financée par la manne pétrolière. En raison de la hausse des prix des denrées alimentaires, l'inflation a grimpé à 13,2 pour cent en 2008 mais devrait reculer avec la baisse du prix des marchandises et le fléchissement de la demande intérieure. La chute des cours du pétrole et la réduction des quotas de production de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) a ralenti la croissance en 2009.

Même si l'Angola est toujours extrêmement dépendant du pétrole, le secteur non pétrolier a récemment fait preuve d'un nouveau dynamisme, notamment dans l'agriculture, le BTP et les services. Cependant, la diversification est toujours freinée par des problèmes d'infrastructures et le climat des affaires.

Les politiques macro-économiques sont, pour la plupart, restées prudentes. Conforté par sa victoire aux élections de septembre, le gouvernement travaille sur de profondes réformes institutionnelles, notamment la création d'un nouveau ministère de l'Économie, la rationalisation des entreprises publiques et la décentralisation budgétaire au profit des municipalités.

Toutefois, l'essor économique génère aussi un processus de développement parfois perçu comme chaotique, donnant lieu à des problèmes d'efficacité et de coordination, exacerbés par de graves restrictions de capacité à tous les niveaux.

Jusqu'à récemment, cette confusion était perçue comme une conséquence inévitable de la croissance rapide, mais il apparaît aujourd'hui aux autorités nécessaire de favoriser un renforcement des contrôles sur la sélection et la mise en oeuvre des projets. L'effondrement récent des cours du pétrole pourrait en outre menacer la pérennité de l'essor. Aussi, afin de préserver l'équilibre budgétaire et de limiter les emprunts à l'étranger, l'État prévoit de revoir ses dépenses ralentissant le rythme des efforts de reconstruction.

Alors que le revenu par habitant est en progression, notamment dans les régions métropolitaines, la vie reste difficile pour la majorité des Angolais, touchés par l'omniprésence de la pauvreté et du chômage.

Source OCDE

B. UNE AMORCE DE DIVERSIFICATION

Jusqu'à récemment, la part du secteur non pétrolier dans le PIB augmentait progressivement, grâce à l'agriculture, au BTP et aux services.

Pourtant, en 2007, le pétrole représentait selon l'OCDE encore près de 56 pour cent du PIB . Avec une croissance moyenne de la production pétrolière de 17,4 pour cent par an entre 2003 et 2007, l'Angola est le deuxième producteur de pétrole en Afrique, après le Nigeria.

En 2008, la production aurait augmenté de 10 pour cent, atteignant un peu moins de 1,9 million de barils par jour (b/j), malgré un accident qui a réduit la production de 210 000 b/j en septembre et en octobre.

La production se concentre dans les gisements en mer de la province de Cabinda, contrôlés conjointement par la compagnie pétrolière publique Sonangol et par des multinationales étrangères, notamment les américaines ChevronTexaco et ExxonMobil, la française Total, la britannique British Petroleum (BP), la britannico-néerlandaise Shell et l'italienne Agip/Eni. En 2007, les réserves totales prouvées atteignaient 9 milliards de barils, soit 0,72 pour cent du total mondial. Sonangol contrôle 41 pour cent des réserves et jouit d'un monopole sur le raffinage et la distribution en Angola.

Encouragés par des cours exceptionnellement élevés, les investissements ont afflué dans le secteur pétrolier ces dernières années, réactivant ainsi les projets d'exploration et de forage dont la rentabilité était faible au moment de la baisse des prix.

Alimentée par un taux de réussite de la prospection de 80 pour cent, cette manne pétrolière a permis à l'Angola de développer sa capacité d'extraction. Des gisements en eaux très profondes devraient devenir opérationnels en 2010 et remplacer des gisements plus anciens. Le potentiel de production devrait atteindre 2,55 millions de b/j d'ici à 2012, faisant du pays le premier producteur de pétrole en Afrique. Un nouveau code minier, destiné à attirer plus d'investissements, est attendu.

L'actuelle crise financière internationale a cependant fragilisé l'essor des investissements liés au pétrole en Angola. De plus, le quota de production de l'Opep pour l'Angola a été baissé à deux reprises. L'Angola devrait néanmoins honorer ses engagements vis-à-vis de l'Opep, dont il assume la présidence du cartel en 2009, la croissance du secteur pétrolier risquant d'être de ce fait négative en 2009.

Les réserves prouvées de gaz naturel sont estimées à 270 millions de mètres cubes, assez pour maintenir la production ces 30 prochaines années. La production est gérée par le Consortium sur le gaz naturel liquéfié, détenu par Sonagas (22,8 pour cent), Chevron (36.4 pour cent), Eni (13,6 pour cent), Total (13,6 pour cent) et BP (13,6 pour cent).

Une usine de traitement de gaz naturel liquéfié (GNL) est en construction et son achèvement est prévu en 2012. Les projets de GNL devraient accroître l'emploi dans le secteur pétrolier et gazier, qui n'emploie aujourd'hui directement que 10 000 personnes.

Après avoir progressé de près de 26 pour cent pendant deux ans, la production non pétrolière a chuté à 18,6 pour cent en 2008, principalement en raison de problèmes d'importation des biens intermédiaires et d'équipement, nécessaires aux projets de reconstruction. Ces difficultés sont imputables aux contraintes de capacités d'infrastructure, notamment dans le port de Luanda.

Le secteur des diamants , décimé par des années de guerre, éprouve toujours des difficultés à se redresser mais dispose d'un potentiel important . Lancé en 2005, le projet d'extraction de diamants de Luo sera en mesure de traiter 6 à 7 millions de tonnes de roche par an, ce qui en ferait l'une des dix premières mines de diamants au monde.

Ce projet devrait nécessiter un investissement de 400 millions de dollars américains (USD) et créer 1 200 emplois. Une usine pilote disposant d'une capacité maximale de traitement de 1 million de tonnes de roche par an est maintenant opérationnelle. L'entreprise publique Endiama, qui a le monopole sur la production de diamants, a produit quelque 7 millions de carats au cours des trois premiers trimestres 2008 (une augmentation de 5,5 pour cent sur l'année précédente), essentiellement à partir de diamants extraits de mines informelles. Une hausse de 10 pour cent est attendue en 2009, soutenue par de nouvelles découvertes, mais les prévisions antérieures se sont souvent révélées trop optimistes. Les activités de polissage et de taille de diamants ont attiré plus d'investissements depuis qu'Endiama a ouvert l'usine angolaise de taille des diamants (Angola PolishingDiamonds Factory - APDF) en 2005.

L'agriculture représente 50 pour cent de l'emploi total. Avant la guerre civile, l'Angola avait l'un des secteurs agricoles les plus productifs d'Afrique , grâce à son sol fertile. Avec la disparition progressive des séquelles de la guerre, l'agriculture connaît un renouveau, bien qu'elle ne représente encore que 8 pour cent du PIB. Les zones cultivées et irriguées se multiplient et la productivité augmente grâce au déminage, à un meilleur accès aux moyens de production et au retour de nombreux anciens petits propriétaires. L'investissement dans l'agriculture commerciale progresse également, notamment dans les provinces de Kwanza Norte, Kwanza Sul, Benguela et Huila. On compte de plus en plus d'associations de fermiers et de coopératives, notamment dans l'élevage et la culture fruitière.

Dans ce contexte, la production agricole a progressé de 28 pour cent en 2007/08, après une hausse de 27,4 pour cent en 2006/07. Comme l'année précédente, la production de céréales à augmenté de 17 pour cent en 2007/08 et devrait s'accélérer, pour atteindre 30 pour cent en 2008/09. Pour la deuxième année consécutive, la production de café a bondi de 130 pour cent en 2007/08, apparemment favorisée par la hausse importante des cours mondiaux. Curieusement, les exportations et la transformation intérieure ont pourtant stagné. En 2008/09, la production de café devrait progresser d'encore 30 pour cent, tandis que l'investissement public pour la modernisation du secteur s'élèvera, selon les estimations de l'OCDE, à un total de 150 millions de dollars sur les quatre prochaines années.

En dépit de ces avancées, la menace de l'insécurité alimentaire persiste, avec un déficit de la production intérieure de céréales de près de 50 pour cent. A l'instar de bien d'autres pays d'Afrique, frappés par le choc des prix des denrées alimentaires sur la période 2007-08, l'agriculture a récemment bénéficié d'un regain d'attention de la part de l'État.

Le programme de développement agricole à moyen terme pour 2009-13, dont le budget est de 400 millions de dollars, a pour but de réduire la dépendance aux exportations du pays par trois moyens : de meilleurs services de vulgarisation agricole et autres modes de soutien à l'agriculture familiale, un encouragement à l'agroalimentaire et une remise en état des infrastructures. En 2008, l'État a approuvé un crédit de 270 millions dollars destiné à soutenir l'achat d'équipement agricole dans les fermes familiales, les associations et les coopératives, conformément au programme d'extension et de développement rural entamé en 2006. Il a également étendu le projet horticole d'Aldeia Nova, qui bénéficiera de l'assistance technique d'Israël, et prévu d'augmenter les cultures irriguées de 52 000 hectares en 2009.

Plusieurs projets agro-industriels ont également été lancés, sur la base de partenariats public-privé. La plupart des ces projets sont axés sur la production de biocarburants. Le centre agro-industriel de Kapanda est situé à proximité du barrage d'Omonime, afin de garantir un accès peu coûteux à l'énergie et à l'eau. Il a développé une zone de 443 000 hectares pour produire de la canne à sucre destinée à la production de bioéthanol, avec l'appui technique d'une société brésilienne. Le projet Biocomest est financé à hauteur de 370 millions de dollars par l'État et 700 millions de dollars par des investisseurs privés. D'autres projets devraient voir le jour à l'intérieur du pays, afin de contrebalancer le meilleur développement agricole des régions côtières.

Les industries manufacturières n'ont représenté que 5,3 pour cent du PIB en 2007, les denrées alimentaires et boissons n'ayant contribué qu'à 85,6 pour cent à la production du secteur. L'Etat a entrepris plusieurs projets industriels afin de stimuler l'activité manufacturière, notamment la Zone économique spéciale de Viana, où 11 usines sur 70 sont déjà présentes, dont une nouvelle usine d'assemblage automobile Nissan. D'autres zones industrielles sont situées à Futila, Catumbela, Caàla et Matala. La production manufacturière a augmenté de 11,7 pour cent en 2008.

Après avoir progressé de 37 pour cent en 2007, le BTP a reculé à 10,6 pour cent en 2008, à cause de problèmes de retrait des biens d'équipement importés dans le port de Luanda, où la circulation est difficile. Alors que la croissance du secteur a été tirée ces dernières années par les projets d'infrastructures ainsi que par la construction non résidentielle à Luanda, les projets résidentiels prennent une nouvelle importance.

En 2008, un nouveau plan a été lancé pour la construction de 1 million d'habitations à loyer modéré dans les principaux centres urbains. Une société chinoise s'est vue attribuer un contrat de 3,5 milliards de dollars pour la construction de 20 000 appartements, 246 magasins, 24 jardins d'enfants et 17 écoles dans la banlieue de Luanda. L'investissement public devrait rester conséquent, en raison de la Coupe d'Afrique des nations (CAN) de football 2010, du développement des centres commerciaux de Fortaleza et Bela, et du projet de Luanda Bay. Un déficit de 5 000 lits encourage la construction d'hôtels et 39 nouveaux hôtels sont prévus dans le cadre du programme de développement du secteur touristique 2009-2013.

Le dynamisme du secteur du BTP a entraîné une pénurie de ciment, malgré de nombreux projets de nouvelles cimenteries. La production de ciment souffre d'un manque de concurrence. Outre l'usine Nova Cimangola de Cacuaco (Luanda), maintenant opérationnelle, de nouveaux projets voient le jour : deux nouvelles usines à Lobito, qui devraient ouvrir d'ici à 2010, une nouvelle usine dans la circonscription de Cuara (province de Kwanza Sul) et un projet angolo-brésilien de 200 millions de dollars, capable de produire 1,2 million de tonnes de ciment, soit 25 pour cent des besoins annuels du pays.

Le secteur des services s'est aussi montré de plus en plus dynamique, avec 17 pour cent du PIB en 2007. Les sous-secteurs les plus importants sont le tourisme, l'immobilier, les services financiers et dernièrement, la vente au détail et le commerce. Le programme de restructuration des systèmes de logistique et de distribution des biens de première nécessité à la population (Preslid), lancé par les autorités en 2007, a pour objectif de développer la chaîne de distribution de détail afin de réduire le prix des denrées alimentaires. Il prévoit la construction de 10 000 magasins de proximité, 163 marchés municipaux, 31 supermarchés NossoSuper et 8 entrepôts, avec une contribution de l'investissement public à hauteur de 1,7 milliard de dollars jusqu'à la fin 2012. Fin 2008, 25 supermarchés étaient ouverts, 2 entrepôts construits (l'un d'eux étant opérationnel) et 4 000 personnes recrutées. Malgré ce gros effort de construction, les retombées du projet pourraient être limitées, puisqu'on a peu tenu compte de la logistique et des frais de transport, notamment dans les provinces reculées.

Ainsi l'Angola offre de nombreuses opportunités aux investissements français. L'accord de protection des investissements a pour objet de favoriser leur développement.

II. L'ACCORD DE PROTECTION DES INVESTISSEMENTS

A. DES  RELATIONS  ECONOMIQUES  BILATÉRALES  QUI
S'INTENSIFIENT ...

1. Des échanges commerciaux croissants

L'importance de l'Angola dans nos approvisionnements en pétrole fait de ce pays depuis 2007, le premier fournisseur de pétrole de la France dans l'Afrique subsaharienne devant le Nigeria. L'Angola est, derrière l'Afrique du Sud, le deuxième partenaire commercial de la France en Afrique australe . Quant à la France, elle exporte surtout du matériel d'équipement industriel destiné à un usage pétrolier et agroalimentaire, sa part de marché en Angola avoisinant 4 % en 2008 (septième partenaire commercial, avec des exportations s'établissant à 505 millions d'euros en 2007).

En 2008, la part de marché de la France de 4 % était en baisse par rapport à 2007 (5 %) et 2006 (6 %). La baisse des exportations est due au ralentissement des projets dans le secteur pétrolier accentué par la crise. La baisse de la part de marché est due à l'augmentation des exportations américaines, chinoises (exécution des contrats signés en 2006 et 2007), coréennes du sud (structure flottante offshore pour BP incorporant des équipements français), espagnoles, portugaises et brésiliennes. La concurrence pour la France vient surtout de l'Espagne, du Portugal, du Brésil : biens pour la maison et le BTP, l'agro-alimentaire.

Les exportations françaises vers l'Angola restent constituées d'une part importante d'équipements destinés au secteur pétrolier. Cependant, la part du parapétrolier baisse. En un an, le poids des 16 postes les plus significatifs liés au pétrole a diminué de 225,5 millions d'euros à 156,6 millions d'euros, soit de 42 % à 38 % du total des exportations en 2007 et 2008.

Les exportations se diversifient et des progressions encourageantes sont à relever sur les créneaux où l'Espagne et le Portugal ont traditionnellement devancé la France. La baisse dans le parapétrolier est déjà compensée en partie par des avancées dans d'autres postes. La part de l'agroalimentaire se maintient au-dessus de 10 %. Des progressions ont été enregistrées pour l'aéronautique (+ 32,9 %), l'électroménager (+ 2,5 %), le mobilier et l'aménagement de la maison (+ 93 %), les vins et champagnes (+ 51,6 %), les cosmétiques (+ 2,5%), la viande (+ 63 %), l'automobile (+ 48 % en plus des + 50 % de 2007). Il faut cependant également relever la stagnation pour les postes agro-alimentaires, tandis que les progressions pour les biens de consommation ont été inégales selon les postes. Des progressions enregistrées en 2007 qui ne se répètent pas, vraisemblablement par manque de fidélisation des circuits d'importation et de la clientèle. Malgré tout, l'agroalimentaire, la santé, l'automobile, les biens de consommation, les produits liés à la maison ont atteint en cumulé 22,1 % des échanges en 2008 des exportations contre 18,7 % en 2007. Il faut en outre noter qu'une partie des exportations françaises n'apparaît pas car transitant par pays tiers, en particulier par le Portugal (matériel électrique, pharmacie) ou la Corée du sud (parapétrolier incorporé à un FPSO, unité de production offshore flottante livrée à l'Angola).

2. Les investissements directs français en Angola

L'Angola est un des principaux bénéficiaires d'investissements directs étrangers en Afrique, mais à 90 % pour le secteur pétrolier. Selon le rapport sur l'investissement dans le monde de la CNUCED publié en 2008, le stock d'investissements directs entrants s'élevait à 12 207 millions de dollars en 2007 (7 978 millions de dollars en 2000), représentant 19,9 % du PIB.

Au regard des investissements directs, les Etats-Unis sont un partenaire majeur de l'Angola. En effet, une grande partie du pétrole angolais est extraite par des compagnies américaines (54 %) et exportée aux USA (1/3). L'Angola entretient des relations anciennes et privilégiées avec la Russie et leur coopération bilatérale s'accroît de manière importante (pétrole, gaz, diamants, secteur militaire ...).

L'Angola développe également depuis plusieurs années ses relations avec l'Asie et notamment avec la Chine qui a octroyé plusieurs prêts à Luanda gagés sur les ressources pétrolières. Les échanges commerciaux entre les deux pays ont crû de manière très importante ces dernières années (1 er partenaire commercial de l'Angola en 2006) et la Chine a obtenu la plupart des grands chantiers de reconstruction angolais (aéroports, routes, chemins de fer).

L'investissement direct français en Angola est également important et dépasse 10 millions d'euros. Sous réserve d'obtention des statistiques angolaises, la France est probablement le troisième investisseur étranger en Angola . Les investissements français sont principalement le fait de Total qui a également des projets dans le secteur gazier. Total, deuxième opérateur derrière Chevron-Texaco, produit un tiers de la production angolaise. La production de Total devrait atteindre 500 000 barils/jour en 2008 et lui permettre de devenir le 1 er producteur du pays. Près de 70 entreprises françaises sont établies en Angola, essentiellement dans le secteur pétrolier et parapétrolier mais aussi dans l'agroalimentaire et les biens de consommation.

B. ...ET QUE L'ACCORD VISE À CONFORTER

On retrouve dans l'accord avec l'Angola les clauses classiques des accords de protection des investissements.

1. Un principe général de promotion des investissements

Le préambule de l'accord souligne la volonté des deux pays d'intensifier leurs relations économiques, financières et commerciales bilatérales en créant des conditions favorables à l'accueil des investissements.

L'article 2 est consacré à la définition des principaux termes utilisés dans l'accord, notamment les « investissements », les « nationaux », les « investisseurs », les « revenus » et le « territoire ». La définition retenue est suffisamment large pour étendre le champ d'application de l'accord à tous les investissements réalisés par les nationaux ou sociétés de chaque partie. En particulier, elle vise les droits de la propriété intellectuelle.

L'article 3 précise le champ d'application de l'accord : la protection accordée par l'Accord s'étend aux investissements légalement constitués avant ou après son entrée en vigueur. En revanche, l'accord ne s'applique pas aux réclamations et différends survenus avant son entrée en vigueur, qu'ils aient été résolus ou non.

2. Les garanties offertes

En application de l'article 4, chaque partie contractante accorde aux investissements de l'autre partie un traitement juste et équitable. Cet article prévoit également qu'aucune des parties contractantes n'entravera le plein usage de leurs investissements par les investisseurs de l'autre partie et qu'elle examinera de façon bienveillante dans le cadre de sa législation, l'entrée sur son territoire, en lien avec des investissements, de nationaux de l'autre partie.

L'article 5 expose les clauses classiques de traitement national. Ainsi, les investisseurs de l'autre partie ne seront pas traités moins favorablement que les investisseurs nationaux, et, en vertu du traitement de la nation la plus favorisée, reçoivent un traitement au moins aussi favorable que celui accordé aux investisseurs étrangers les plus favorisés. Des exceptions sont prévues pour les avantages résultant d'accords économiques régionaux, tels que l'Union européenne pour la France. Les dispositions de cet article ne s'appliquent pas aux questions fiscales, l'Angola n'étant pas signataire d'une convention fiscale avec la France.

L'article 6 prévoit qu'en cas de sinistre ou de dommages provoqués par les événements politiques (guerre, conflit armé, révolution, insurrection...), les investisseurs de chacune des deux parties devront pouvoir bénéficier d'un traitement non moins favorable que celui qu'applique l'autre partie à ses propres investisseurs ou à ceux de la nation la plus favorisée.

L'article 7 pose le principe de la protection des investissements effectués par les investisseurs de chaque partie sur le territoire de l'autre partie. Les mesures d'expropriation, de nationalisation ou de dépossession sont interdites. Dans l'éventualité d'une dépossession motivée par l'utilité publique et non discriminatoire, l'accord établit le droit au versement d'une indemnité prompte et intégrale dont il fixe en détail les modalités de calcul. L'indemnité est librement réalisable et transférable.

Le libre transfert des diverses formes de revenus que peut engendrer l'investissement est prévu à l'article 8, sous réserve de déséquilibres exceptionnels de la balance des paiements d'une des parties ou de respect de leurs obligations internationales.

L'article 9 prévoit la possibilité que, lorsqu'une partie ou une de ses agences a consenti une garantie contre des risques liés à des investissements réalisés par un de ses investisseurs sur le territoire de l'autre partie, cette partie ou cette agence est subrogée dans les droits et actions de l'investisseur.

3. Le règlement des différends

L'article 11 expose les modalités de règlement des différends entre un investisseur et l'État accueillant son investissement. En conformité avec l'accord type français, l'accord avec l'Angola prévoit la possibilité pour l'investisseur de saisir le Centre international pour le règlement des différends liés aux investissements (CIRDI) en cas de différend l'opposant à l'Etat d'accueil (Article 11). Il prévoit toutefois aussi la possibilité, au choix de l'investisseur, de soumettre les différends aux tribunaux nationaux compétents de l'Etat d'accueil ainsi qu'à un tribunal international ad hoc constitué selon les règles d'arbitrage de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI).

L'article 12 prévoit, sans préjudice de l'accord, que les investissements des nationaux de l'autre partie peuvent faire l'objet d'un engagement particulier plus favorable de la part d'une des parties.

Suivant des principes classiques en la matière, la procédure de règlement des différends pouvant survenir entre les parties contractantes pour l'interprétation et l'application de l'accord s'effectue par la voie diplomatique ou, à défaut, par le recours à un tribunal d'arbitrage, si la voie diplomatique est restée infructueuse pendant au moins six mois.

Enfin, les dispositions finales de l'article 14 décrivent classiquement l'entrée en vigueur, la dénonciation et la durée de validité de l'accord. L'accord est conclu pour une durée de dix ans et demeurera en vigueur après ce terme, sauf dénonciation avec préavis d'un an. À l'expiration de la période de validité, les investissements réalisés précédemment bénéficient d'une garantie de dix ans.

CONCLUSION

L'accord entre la France et l'Angola reprend les clauses classiques du droit international en matière de protection des investissements étrangers.

Il offrira aux investisseurs français en Angola une protection contre le risque politique.

Il permettra ainsi de renforcer la présence économique française dans ce pays qui représente un partenaire stratégique de la France en Afrique.

Votre rapporteur vous recommande donc son adoption selon la procédure simplifiée.

.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le 3 février 2010, sous la présidence de M. Josselin de Rohan, président, la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées a examiné le présent projet de loi.

M. Josselin de Rohan, président, a d'abord souligné l'intérêt stratégique de ce pays compte tenu de l'importance des investissements français, notamment dans le domaine pétrolier, alors que la concurrence chinoise était de plus en plus vive. Il s'est aussi interrogé sur la solidité de l'implantation de la France dans ce pays.

M. René Beaumont, rapporteur, a indiqué que la situation politique en Angola semblait stabilisée, comme l'illustraient les très récentes élections législatives. Il a cependant fait observer que les récents événements survenus lors de la coupe d'Afrique de football montraient que cette situation, tout récemment pacifiée, pourrait facilement se dégrader. Il a souligné que cet accord s'inscrivait dans le renouveau des relations entre la France et l'Angola et pouvait contribuer à asseoir la solidité des implantations françaises dans ce pays.

Évoquant une mission effectuée en 2006 en Afrique du Sud et au Sénégal, avec ses collègues André Dulait et Robert Hue, M. Yves Pozzo di Borgo a souligné que le Nigéria, l'Afrique du Sud et maintenant l'Angola constituaient des pays stratégiques dans lesquels la France doit s'investir. Il a fait part de ses craintes relatives à la fragilisation de la position de la France en Angola et à la tentation pour les autorités de ce pays de changer un jour de position et d'écarter la présence de la société Total.

M. Didier Boulaud a évoqué la tenue, sur la chaîne LCP, d'un débat sur le thème « l'Afrique tourne-t-elle le dos à la France ? ». Il a estimé que l'avenir de la politique africaine de la France constituait un enjeu majeur de notre politique étrangère. Par ailleurs, il a fait observer que le niveau de vie dans les ex-colonies françaises était aujourd'hui bien inférieur à celui des ex-colonies anglaises, traduisant ainsi les conditions dans lesquelles la décolonisation s'était effectuée.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission a alors adopté le projet de loi et proposé que ce texte fasse l'objet d'une procédure d'examen simplifiée en séance plénière.

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