3. Une étape-clé dans la rationalisation du dispositif français d'APD : le CICID du 5 juin 2009
Votre rapporteur spécial a présenté en détail, l'année dernière 8 ( * ) , les axes que doit emprunter la nécessaire rationalisation du dispositif d'aide au développement de la France, afin de mettre en oeuvre les orientations données en la matière par le Comité de modernisation des politiques publiques (CMPP) du 4 avril 2008 dans le cadre de la « révision générale des politiques publiques » (RGPP). La définition d'un périmètre plus étroit de la Zone de solidarité prioritaire (ZSP) 9 ( * ) pour éviter la dilution de l'aide, l' identification des secteurs prioritaires de cette aide et la poursuite des réformes institutionnelles constituent les principaux enjeux de cet aggiornamento , requis par le changement d'environnement dans lequel évolue désormais l'APD française notamment le caractère devenu très concurrentiel de cette politique publique et son insertion croissante dans les enjeux géostratégiques, la confirmation de l'existence d'un potentiel de croissance élevé en Afrique comme du développement d'un secteur privé productif dans les pays bénéficiaires, enfin l'intervention croissante de grands bailleurs émergents, la Chine en particulier, et le rôle nouveau, à cet égard, des fondations privées et des fonds souverains.
Une étape importante dans la mise en oeuvre de ce programme d'amélioration de l'efficacité de notre APD a été franchie avec le CICID du 5 juin 2009 qui, tout en renouvelant les engagements nationaux en ce domaine, notamment en direction de l'Afrique, a adopté une séries de mesures de modernisation, tant pour le « recentrage » de l'aide que pour l'optimisation des outils.
a) Un appui renouvelé en faveur du développement
(1) Le maintien des engagements français
Lors sa réunion du 5 juin 2006, le CICID avait rappelé l' engagement de la France de consacrer , à l'horizon de 2015 , 0,7 % de son RNB à l'APD . Cet engagement a encore été rappelé par le Président de la République, fin 2008, à l'occasion de la Conférence sur le financement du développement, à Doha. Votre rapporteur spécial observe néanmoins que les contributions budgétaires annuelles nécessaires pour atteindre cet objectif ne pourront être dégagées que si la situation des finances publiques le permet , notamment au regard de nos obligations européennes relatives au retour à un équilibre budgétaire conformes aux règles « maastrichtiennes ».
Or, d'après les indications fournies en application de l'article 49 de la LOLF, « l'engagement de Doha » correspond à une projection de l'APD française supérieure à 17 milliards d'euros en 2015 (sur la base d'une estimation du RNB à hauteur de 2.489 milliards d'euros en 2015). A partir d'une prévision d'APD totale à hauteur de 8,6 milliards en 2011, l'atteinte de l'objectif supposerait une croissance quasiment « miraculeuse » de notre APD , de l'ordre de 17 % par an sur la période 2012-2015.
Dans un contexte marqué par la crise financière internationale, le CICID du 5 juin 2009 a cependant rappelé l'engagement de la France , en faveur d'un développement visant à lutter contre la pauvreté, encourager la croissance et assurer une gestion collective des biens publics mondiaux. Il a confirmé la mise en oeuvre par la France des décisions du G20 de Londres et recommandé l'adhésion à l'initiative internationale sur la transparence de l'aide. Il a également rappelé l'importance de poursuivre la recherche de sources de financements innovants, annonçant la décision d'affecter une partie des enchères de carbone à la lutte climatique dans les pays pauvres et de poursuivre la lutte contre l'évasion fiscale et la facilitation des transferts de fonds des migrants.
(2) Un nouveau partenariat avec l'Afrique
Les orientations adoptées par le Gouvernement marquent en particulier un appui au développement économique en Afrique . Outre les objectifs de concentration de notre APD vers ce continent (cf. ci-dessous), une « initiative de soutien à la croissance économique » en Afrique a été lancée à la suite du discours du Président de la République au Cap en février 2008, destinée à mobiliser 2,5 milliards d'euros de financements d'appui au secteur privé entre 2008 et 2012. Bien qu'ils constituent un soutien aux économies africaines, ces financements, toutefois, ne sont pas intégralement éligibles à l'APD .
De plus, le ministère des affaires étrangères et européenne, en octobre 2008, a présenté un plan d'action pour « renouveler la politique de coopération de la France avec l'Afrique », « Cap 8 », qui reposant sur l'appui au développement économique et sur le rayonnement culturel de la France en vue de soutenir la croissance en Afrique, relancer l'agriculture, valoriser le rôle des femmes dans l'économie, multiplier par trois le nombre de volontaires internationaux, augmenter la part des ONG dans l'aide bilatérale, soutenir l'éducation et promouvoir la langue française, conforter l'audiovisuel extérieur français, enfin rénover la coopération de défense. Votre rapporteur spécial suivra attentivement la réalisation de ces ambitions .
Il souligne d'ailleurs un enjeu particulièrement important : les besoins du continents africain au regard du réchauffement climatique , lequel implique d'adopter sans tarder les stratégies adéquates dans les secteurs de l'agriculture, l'eau et l'assainissement, ainsi que l'énergie notamment 10 ( * ) tous domaines d'intervention privilégiés de l'AFD.
* 8 Cf. le rapport n° 99 (2008-2009), tome III, annexe 4 (PLF pour 2009).
* 9 La ZSP, telle que définie par le CICID du 20 juillet 2004, comprend actuellement 55 pays : en Afrique du Nord : Algérie, Maroc, Tunisie ; en Afrique subsaharienne et dans l'Océan indien : Afrique du Sud, Angola, Bénin, Burkina-Faso, Burundi, Cameroun, Cap-Vert, République Centrafricaine, Comores, Congo-Brazzaville, République Démocratique du Congo, Côte-d'Ivoire, Djibouti, Erythrée, Ethiopie, Gabon, Ghana, Gambie, Guinée, Guinée-Bissao, Guinée Equatoriale, Kenya, Libéria, Madagascar, Mali, Mauritanie, Mozambique, Namibie, Niger, Nigéria, Ouganda, Rwanda, Sao-Tome et Principe, Sénégal, Sierra Leone, Soudan, Tanzanie, Tchad, Togo, Zimbabwe ; au Moyen-Orient : Liban, Territoires palestiniens, Yémen ; en Asie : Cambodge, Laos, Vietnam, et à titre provisoire, Afghanistan ; dans la Caraïbe : Cuba, Haïti, République Dominicaine, Suriname ; dans le Pacifique : Vanuatu
* 10 Cf. l'allocution d'ouverture prononcée par M. Pierre-André Wiltzer, ancien ministre chargé de la coopération, lors du Forum mondial du développement mondial de Ouagadougou, le 9 octobre 2009.