TRAVAUX DE LA COMMISSION
I. AUDITIONS
AUDITION DE M. FRANÇOIS PÉROL, PRÉSIDENT DU DIRECTOIRE DE LA CNCE ET DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA BFBP, LE 29 AVRIL 2009
La commission a procédé à l'audition de M. François Pérol, président du directoire de la Caisse nationale des caisses d'épargne (CNCE), et directeur général de la Banque fédérale des Banques populaires (BFBP).
M. Jean Arthuis, président , a rappelé que la nomination de M. François Pérol en qualité de directeur général a été approuvée par le conseil d'administration des Banques populaires le 25 février dernier, et que sa nomination en qualité de président du directoire a été approuvée par le conseil d'administration de la Fédération nationale des Caisses d'épargne le 26 février. Il a présenté une série de questions portant sur les trois thèmes suivants :
- le rapprochement entre les deux groupes bancaires : quelles sont la valeur ajoutée et les synergies attendues du rapprochement des deux réseaux ? Quel est le périmètre des actifs et filiales qui relèveront du futur organe central commun, dont la création est prévue par le projet de loi récemment déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale ? Quelle appréciation peut-on porter sur ce nouvel ensemble au regard du risque systémique ?
- la situation financière des deux groupes et le soutien financier de l'Etat, considérant les résultats nets négatifs enregistrés en 2008 par les entités du groupe, soit 2 milliards d'euros pour les Caisses d'épargne, 468 millions d'euros pour les Banques populaires et 2,8 milliards d'euros pour leur filiale commune Natixis : quel est l'impact de l' « affaire Madoff » sur les comptes de Natixis ? Le « ménage » a-t-il été fait au sein du portefeuille de cette filiale, en particulier si l'on se réfère aux récentes estimations du FMI sur les dépréciations futures des établissements bancaires américains et européens liées aux « actifs toxiques » ? Sous quelle forme se réalise l'apport en fonds propres de la Société de prise de participation de l'Etat (SPPE), à hauteur de 5 milliards d'euros ? L'Etat sera-t-il appelé à devenir actionnaire du futur organe central ?
- enfin, quel est le bilan de l'ouverture de la distribution et des transferts de livrets A, au regard des soupçons d'entraves à la concurrence exercées par certaines caisses régionales d'épargne, suite à des plaintes déposées par plusieurs entités du Crédit Agricole ?
M. François Pérol a indiqué que la logique du rapprochement, à l'oeuvre depuis le 2 mars 2009, doit permettre d'exploiter au mieux le potentiel économique de deux groupes coopératifs et décentralisés, qui détiennent des positions fortes mais complémentaires dans la banque de détail. Avec 22 % des dépôts en France, 527 milliards d'euros d'encours d'épargne et un produit net bancaire qui dépassera 19 milliards d'euros en 2009, les deux structures représentent le deuxième groupe bancaire domestique et se situent au premier rang sur certains segments de clientèle, tels que les entrepreneurs, les jeunes, les enseignants, les associations et l'économie sociale. A ces parts de marché dans la banque commerciale s'ajoutent des positions de chef de file dans des métiers complémentaires exercés par Natixis et d'autres filiales, tels que les systèmes de paiement, la gestion d'actifs, l'épargne salariale ou l'immobilier.
Le deuxième atout du nouveau groupe réside dans un modèle partagé par les Caisses d'épargne et les Banques populaires, celui d' « entrepreneurs régionaux » de la banque. Le groupe repose avant tout sur trente sept banques régionales de proximité, dont les clients sont souvent les sociétaires, et dont l'autonomie trouve sa contrepartie dans une solidarité financière et un organe central disposant de prérogatives de puissance publique, qui seront détaillées par la future loi. Ces prérogatives relèvent essentiellement du contrôle permanent et périodique, de la sécurité financière (gestion de la liquidité et de la solvabilité de l'ensemble) et du pilotage stratégique et commercial. Les trente sept établissements affiliés détiendront cependant le contrôle actionnarial de cet organe central.
Troisième atout, le groupe dispose d'une identité forte et de marques puissantes au travers de deux réseaux de distribution représentant plus de 8.000 agences. Ces marques ont des positionnements complémentaires dans une large gamme de clientèle et disposent d'atouts distincts : les collectivités territoriales et l'économie sociale pour les caisses d'épargne, les PME et la création d'entreprises pour les banques populaires. Pour autant, ces réseaux demeureront concurrents et conserveront une réelle autonomie dans leur développement commercial, sans une spécialisation par type de clientèle qui risquerait de créer, selon lui, une perte de valeur. Certaines fonctions seront néanmoins autant que possible mutualisées, telles que la distribution commune de certains produits sous la même marque, l'achat d'espaces, la gestion des guichets automatiques et des transports de fonds, ou la réflexion stratégique sur la distribution bancaire.
M. François Pérol a ajouté que le quatrième atout du nouvel ensemble réside dans des valeurs partagées par deux groupes coopératifs construits sur le même modèle décentralisé, dans lequel chaque caisse régionale tient à son autonomie, même si la culture des Banques populaires est sans doute un peu plus décentralisée. Avec le rapprochement de deux grands réseaux de détail, la banque commerciale représentera environ 70 % du produit net bancaire du groupe et s'appuiera sur deux marques concurrentes mais dont l'action commerciale sera coordonnée.
La fusion des deux organes centraux permettra également de réaliser des synergies de coûts, estimées d'ici à 2012 à 25 % de la base globale de coûts du futur organe central, et de mettre en commun des outils industriels pour un meilleur service à la clientèle des deux réseaux, tels que les systèmes de paiement, les achats d'espaces et de matériels informatiques, les télécommunications et les outils d'exploitation. Enfin, le nouvel ensemble sera financièrement plus solide, avec environ 38 milliards d'euros de fonds propres, et pourra mettre en oeuvre une politique claire à l'égard de Natixis, qui n'aura plus deux actionnaires distincts.
Evoquant une rencontre, la semaine précédente, de plusieurs sénateurs de la commission avec le président de Natixis pour les Etats-Unis d'Amérique et le RoyaumeUni, M. Philippe Marini, rapporteur général , a indiqué que le rapprochement des deux groupes coopératifs a été bien perçu par les marchés, avec des conséquences positives pour leur refinancement. Mais, compte tenu de la nature de « patchwork » de Natixis, il s'est interrogé sur la capacité du nouvel ensemble à donner une cohérence et une vraie stratégie à cette filiale, et sur la localisation du véritable « coeur » du groupe dans un schéma actionnarial complexe et présentant des caractéristiques d'autocontrôle.
M. François Pérol a précisé que Natixis, dans le schéma actuel évoqué par M. Philippe Marini, est détenue à parité (à hauteur de 36 % de part et d'autre) par la Caisse nationale des caisses d'épargne et la Banque fédérale des banques populaires. Elle détient, via des certificats coopératifs d'investissement, 20 % des résultats des caisses régionales d'épargne et des banques populaires régionales. Dans le futur schéma, en revanche, Natixis sera détenue à 72 % par le nouvel organe central, actionnaire unique. Il devrait en résulter une simplification de la gouvernance de Natixis, qui évoluera en société à conseil d'administration - et non plus à structure dualiste - avec une dissociation des fonctions de président et de directeur général. A ce titre, il a indiqué que, à l'occasion du conseil d'administration du 30 avril, il ne proposerait pas M. Dominique Ferrero, actuel président du directoire de Natixis, pour le poste de directeur général, mais pour des fonctions de conseiller du président. M. Laurent Mignon, qui dispose d'une longue expérience des métiers exercés par Natixis, notamment à la direction générale des Assurances générales de France (AGF), sera proposé pour cette direction générale.
En réponse à M. Jean-Jacques Jégou , qui a considéré que M. Dominique Ferrero est aussi responsable de la situation actuelle de Natixis, il a souligné les mérites, la loyauté et le courage de celui-ci dans des circonstances particulièrement difficiles, tout en estimant que le renouvellement de la direction de Natixis participe de cette nouvelle phase de son développement. Il a également jugé nécessaire d'assurer une certaine continuité pour des activités aussi complexes que celles exercées par Natixis.
M. Jean Arthuis, président , a souligné que la crise a mis en évidence les dangers que peut présenter le développement d'une activité de banque d'investissement par une banque de dépôt, et il s'est interrogé sur l'opportunité de revenir à la séparation qui avait été introduite aux Etats-Unis en 1933 par le Glass-Steagall Act.
Revenant à Natixis, M. François Pérol a indiqué que le directeur général de Natixis sera membre du comité de direction générale du futur organe central, afin d'assurer la meilleure intégration possible entre les deux entités. Sur le plan stratégique, Natixis, comme toutes les banques de financement et d'investissement, porte actuellement des actifs risqués devenus illiquides, tels que des actifs titrisés et des expositions aux réhausseurs de crédit et aux véhicules structurés. Ces actifs ont été regroupés dans un canton et placés en gestion extinctive. Il est cependant difficile d'établir un état précis des risques portés par ce canton, les conditions actuelles de marché étant susceptibles de conduire à de nouvelles dépréciations.
Il a infirmé l'appréciation de M. Jean Arthuis, président , sur le caractère incertain du « nettoyage » du bilan de Natixis. En effet, l'application des normes comptables fait dépendre la valorisation des actifs des conditions de marché, de sorte que les variations trimestrielles de leur valeur peuvent être fortes, et qu'il devient nécessaire de passer de nouvelles provisions pour dépréciation en cas de détérioration des marchés. Il a précisé, en réponse à M. Jean-Jacques Jégou , que la valeur nominale des actifs cantonnés est légèrement supérieure à 50 milliards d'euros.
Il a appelé l'attention de la commission sur la nécessaire adaptation des règles comptables, qui tendent à nier la valeur temps inhérente à la nature des activités bancaires et financières. L'application de ces règles conduit, par exemple, des investisseurs disposant d'engagements à très long terme, tels que les compagnies d'assurance, à éviter les placements en actions en cas de baisse des marchés pour éviter de passer de nouvelles provisions. Les nouvelles normes comptables contribuent à entretenir, chez les investisseurs et analystes financiers, la confusion entre des provisions immédiates et des pertes qui ne sont pas encore définitives et, partant, à saper la confiance des marchés et à encourager l'investissement financier à court terme.
M. Philippe Marini, rapporteur général , a corroboré cette appréciation sur l'enjeu majeur des effets pervers des normes comptables, que M. Francis Mayer, ancien directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, avait déjà portée dès 2005 lors d'une audition par la commission, bien avant la crise financière. Faisant référence à la récente adoption de la directive « Solvabilité II » par le Parlement européen, qui applique le même principe de valeur de marché, il a regretté que la présidence française de l'Union européenne n'ait pas davantage abordé cette question, malgré les résultats obtenus sur d'autres sujets. Il a considéré que le mouvement anglo-saxon qui inspire ces normes paraît irrépressible, bien qu'elles soient appliquées de manière très variable par les régulateurs nationaux pour de mêmes catégories d'actifs.
Puis, en réponse à une question de M. Jean Arthuis, président , sur l'exposition de Natixis à l' « affaire » Madoff, M. François Pérol a précisé que cette exposition est indirecte, au travers de fonds investis dans des fonds gérés par M. Madoff. Elle est évaluée à 585 millions d'euros, dont 120 millions d'euros ont été assurés, et le solde est provisionné dans les comptes de Natixis.
Il a ajouté que le principe de valeur de marché rend la lecture des comptes de résultat des banques très difficile, notamment par l'application de la règle du « spread émetteur ». Ces normes comptables se combinent de surcroît avec des règles prudentielles de nature procyclique, alors que la logique économique supposerait, selon lui, de constituer des provisions supplémentaires en période de croissance pour ensuite les reprendre en période de crise. De même, le fait que le système prudentiel soit largement fondé sur les notes attribuées par les agences de notation de crédit conduit à une augmentation des exigences de fonds propres pour faire face à la dégradation des conditions économiques, malgré l'absence de toute nouvelle prise de risques, par les banques françaises en particulier.
En réponse à une observation de M. Jean-Pierre Fourcade , qui a considéré que la profession bancaire n'avait pas demandé une modification des règles comptables, il a expliqué que, en réalité, seules les banques françaises se sont, au niveau européen, clairement opposées à l'application de la valeur de marché aux établissements financiers. En revanche, les banques d'investissement américaines ont exercé une session efficace en faveur de cette norme, qui était dans leur intérêt dès lors qu'elle permettait de constater immédiatement des profits croissants sur leurs activités de marché.
M. Jean Arthuis, président , a jugé que la France s'est longtemps tenue à l'écart des instances internationales de normalisation comptable et a tardivement pris conscience du problème.
M. François Pérol a cependant observé que la prise de conscience est désormais réelle et que les récents aménagements, en particulier la possibilité de reclasser des actifs du « portefeuille de négociation » vers le « portefeuille bancaire », évalué au coût historique, ont été apportés sous l'impulsion de l'actuel Président de la République.
Puis, revenant à la question de la séparation entre banque de dépôt et banque d'investissement, il a considéré que le modèle de la banque universelle, tel qu'il est appliqué par les banques françaises, n'a pas à être remis en cause. Il a observé que les autorités américaines ont d'ailleurs autorisé les banques d'investissement Goldman Sachs et Morgan Stanley à exercer des activités de banque commerciale. De même, le profil de risque du groupe des Banques populaires et des Caisses d'épargne est amoindri par ce rapprochement entre les deux activités. Selon lui, la stricte séparation entre banque d'investissement et banque de dépôt n'est sans doute pas une solution en soi, mais les normes comptables et prudentielles doivent prendre en compte le facteur temps, fondamental dans l'activité bancaire.
En réponse à une question de M. Philippe Marini, rapporteur général , il a confirmé que l'application des principes comptables s'est faite de manière homogène dans les deux entités et ne sera pas remise en cause par la fusion.
Concernant l'apport de l'Etat au nouveau groupe, qui s'élève au total à 5 milliards d'euros, il a précisé que la SPPE a souscrit à des titres super-subordonnés à durée indéterminée (TSSDI) pour 2 milliards d'euros, et à des actions de préférence pour 3 milliards d'euros, ces montants ayant été calibrés pour un ratio de solvabilité de 9 % à l'issue des opérations de rapprochement. Les actions de préférence seront convertibles en actions ordinaires après une période de cinq ans, conférant à l'Etat 20 % du capital du futur organe central.
En réponse à M. Jean Arthuis, président , il a indiqué que la rémunération des actions de préférence est d'environ 10 %, et que celle des TSSDI se situe entre 8 et 8,5 %. La souscription porte sur le capital de l'organe central, mais la rémunération des titres est garantie par l'ensemble du groupe. L'application du principe légal de solidarité financière peut donc, le cas échéant, conduire l'organe central à faire appel aux fonds de ses établissements affiliés et actionnaires. En outre, les actions de préférence détenues par l'Etat confèrent à ce dernier un droit immédiat de représentation dans le futur conseil de surveillance de l'organe central. Il disposera ainsi de deux représentants sur dix huit et proposera la nomination de deux administrateurs indépendants. Certaines décisions, tendant à protéger les intérêts de l'Etat en tant qu'actionnaire minoritaire important, seront prises à la majorité qualifiée de quinze membres sur dix huit.
Concernant les livrets A, 150.000 demandes de transfert ont été traitées par la structure unique mise en place pour centraliser et simplifier les procédures, et seuls 5 % des dossiers affichent un retard de plus de cinq jours. Dès lors, il a, considéré les critiques et actions en justice du Crédit Agricole comme infondées. Il a également observé que plusieurs millions de livrets auraient été ouverts dans les réseaux « non historiques » (dont 90.000 dans la région Alsace, pour seulement 90 demandes de transfert), ce qui témoigne d'un non-respect des procédures visant à éviter la multidétention.
M. Philippe Marini, rapporteur général , a rappelé que le Sénat, lors de l'examen du projet de loi de modernisation de l'économie, avait pris l'initiative d'ouvrir le débat sur cette question de la multidétention. Par ailleurs, il a entendu écarter toute question sur la législation relative à la déontologie des hauts fonctionnaires, considérant qu'elle ne relève pas de la présente audition mais n'en appelle pas moins une réflexion de la commission. Il a estimé que le projet de loi relatif à l'organe central des caisses d'épargne et des banques populaires est certes utile et nécessaire, mais n'est qu'une étape dans l'évolution à venir du groupe. Evoquant la « subtile » harmonie entre complémentarité et concurrence et la clarification de la gouvernance et du contrôle de Natixis que ce projet de loi est censé promouvoir, il a demandé à M. François Pérol de préciser sa conception du « moteur » du groupe et de la stratégie de Natixis, dont les activités hétéroclites constituent un héritage de la Caisse des dépôts et consignations.
M. François Pérol a exposé que le « poumon économique » du futur groupe est la banque commerciale de proximité, Natixis et ses filiales exerçant des métiers complémentaires (gestion d'actifs, affacturage, assurance, gestion des titres...) devant être davantage placées au service des clients des réseaux. Natixis a cependant aussi une activité de financement des grandes entreprises françaises - avec une part de marché de 10 % - et du commerce extérieur, importante pour la diversification de la clientèle du groupe. Cette activité n'est cependant pas suffisamment autonome et demeure liée à d'autres services relevant de la banque de financement et d'investissement (BFI), tels que le financement de projets, les financements structurés et en titres, ou les couvertures de change.
Ce recentrage de la BFI implique que Natixis ne soit plus positionnée sur la négociation pour compte propre, qui mobilise trop de capitaux pour une rentabilité aléatoire. Une fois la rentabilité financière de Natixis restaurée, de nouvelles opportunités pourront le cas échéant être saisies.
Mme Nicole Bricq a fait allusion à l'appréciation du risque qui a conduit à la lourde perte enregistrée par Natixis, et à la réorientation de ses activités de financement, avant de se demander si M. François Pérol dispose de la légitimité pour affronter les nouveaux défis du futur groupe et fixer sa stratégie.
M. François Marc a constaté que les banques mutualistes, comme les autres établissements, se sont fourvoyées dans les dérives et pratiques abusives liées à la crise, et s'est demandé dans quelle mesure la gouvernance du nouvel ensemble permettra de mieux respecter le principe de prudence.
M. Jean-Pierre Fourcade a reconnu la difficulté de la mission de M. François Pérol et s'est interrogé sur la place du Crédit foncier de France dans la nouvelle organisation, ainsi que sur la pérennité du financement des collectivités territoriales par le réseau des caisses d'épargne, qui dispose d'une offre compétitive en ce domaine.
M. Gérard Longuet a souhaité obtenir des précisions sur le futur positionnement des banques populaires à l'égard des PME, et sur une possible comparaison entre les engagements et pertes enregistrés dans les fonds propres de ces entreprises d'une part, et sur les marchés de capitaux d'autre part.
M. François Pérol a considéré que sa légitimité est celle que lui ont conférée les conseils d'administration des deux entreprises et celle qu'il pourra acquérir en atteignant des résultats conformes aux objectifs qui lui ont été fixés. Il a déclaré vouloir s'entourer d'une équipe forte de talents internes et externes, les deux groupes disposant d'une véritable capacité d'attraction. La gouvernance du futur groupe reposera sur un conseil de surveillance et un directoire, et il appartiendra aux banques et caisses régionales d'exercer leurs prérogatives de contrôle actionnarial sur l'organe central.
Le Crédit foncier de France (CFF) sera quant à lui temporairement détenu par une holding contrôlée par les caisses régionales d'épargne, avant qu'une revue stratégique des actifs portés par cette holding ne soit effectuée avant la fin de l'année pour établir un éventuel projet industriel, en partie en synergie avec les activités bancaires. Le groupe sera en tout état de cause l'établissement bancaire le plus investi dans l'immobilier, à travers Foncia, le CFF, Nexity et des investissements des caisses d'épargne dans le logement social.
Il a ajouté que les caisses d'épargne développeront leur activité de financement des collectivités territoriales, où leur part de marché est croissante, mais en conservant une marge positive. Le groupe des banques populaires restera également très engagé auprès des PME et des entrepreneurs, considérant que le coût du risque associé à cette activité demeure très inférieur à celui constaté dans la banque d'investissement, même s'il croîtra probablement en 2009.
En réponse à une question de M. Jean Arthuis, président , et sous réserve de confirmation, M. François Pérol a indiqué que M. Jean-Pascal Beaufret est demeuré membre du directoire de Natixis pendant neuf mois. Il a ajouté qu'il communiquerait ultérieurement des éléments précis sur les conditions et le montant de l'indemnité de bienvenue qui lui a été accordée et que M. Jean Arthuis, président, a estimée supérieure à un million d'euros. Cette décision d'octroi a en tout cas bien été mise en oeuvre, et le futur directeur général de Natixis ne se verra proposer, lui, aucune prime d'arrivée, ni plan d'option d'achat d'actions, ni indemnité de départ autre que celle prévue par le code AFEP-MEDEF.
AUDITION DES ORGANISATIONS SYNDICALES REPRÉSENTATIVES DES SALARIÉS DES CAISSES D'ÉPARGNE ET DES BANQUES POPULAIRES, LE 19 MAI 2009
La commission a procédé à une table ronde sur le projet de loi relatif à l'organe central des caisses d'épargne et des banques populaires avec les organisations syndicales représentatives des salariés de ces deux réseaux .
M. Jean Arthuis, président , a rappelé que les dispositions prévues par le projet de loi concernant le volet social du rapprochement entre les caisses d'épargne et les banques populaires tendent à :
- créer une branche spécifique pour la négociation des accords collectifs dans le réseau des banques populaires ;
- conférer à l'organe central la qualité de groupement patronal au sein des commissions paritaires nationales des deux réseaux ;
- et adapter, de manière transitoire, le fonctionnement de la commission paritaire nationale du réseau des caisses d'épargne dans l'attente de l'application des nouvelles conditions de représentativité des organisations syndicales prévues par la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail.
Il a souhaité que les représentants des organisations syndicales répondent aux trois questions suivantes. Pouvez-vous dresser un état des lieux de la concertation sociale en cours sur l'organisation du rapprochement des réseaux des caisses d'épargne et des banques populaires ? Êtes-vous favorable à la création d'une branche spécifique pour les banques populaires compétentes, au même titre que pour la branche des caisses d'épargne, pour la négociation des futurs accords collectifs ? Quelles interrogations et quelles recommandations exprimez-vous concernant la représentation des salariés dans la création du nouvel organe central et la gouvernance du groupe qui sera constitué ?
En réponse à la première question, M. Jean-Paul Krief, représentant la CGT pour les caisses d'épargne , s'est étonné de l'absence de présentation d'un quelconque projet stratégique pour le futur groupe alors même que la discussion du projet de loi relatif à l'organe central des caisses d'épargne et des banques populaires était déjà engagée à l'Assemblée nationale. Il a considéré que le dialogue social est très peu développé dans la mesure où une seule réunion du comité d'entreprise a été consacrée à ce sujet.
Confirmant ces propos, M. Jean-François Largillière, secrétaire général du syndicat SUD pour les caisses d'épargne , a précisé que les consultations engagées sont purement formelles et ne contiennent aucun élément de fond concernant les objectifs de la fusion. Ainsi, il a regretté que seules les conditions de création du nouvel organe central soient prévues dans la loi et qu'aucune disposition ne concerne le volet statutaire des salariés des deux réseaux, les régimes de retraite, le statut des filiales informatiques, et, plus largement, les conséquences sociales en matière d'emploi et de conditions de travail.
M. Jean-Marie Zieba, représentant la CGT pour les banques populaires , a noté la précipitation avec laquelle est présenté le projet de fusion et l'absence de véritable plan social concerté entre les deux réseaux. En réponse à M. Philippe Marini, rapporteur général , qui souhaitait connaître son avis sur la prise de participation de l'Etat dans le capital du futur organe central, il a indiqué qu'il n'y est pas a priori défavorable mais que l'importance des capitaux, d'un montant de trois milliards d'euros, que l'Etat souhaite apporter de façon transitoire posera à court terme la question des modalités de leur remboursement par le groupe. Il a exprimé sa crainte que ces titres soient mis sur les marchés, au bénéfice des actionnaires et au détriment des sociétaires et des salariés.
M. André Larose, représentant la CFTC pour les banques populaires , a considéré que le dialogue social n'a pas encore commencé dans la mesure où il n'y a pas de véritable consultation des organisations syndicales mais uniquement une information lacunaire ne prenant pas en compte l'éventualité des restructurations qui pourraient résulter de la fusion.
M. Serge Huber, secrétaire général du syndicat unifié-UNSA pour les caisses d'épargne , a déploré que les problématiques tenant à la finalité du rapprochement, à la gestion des pertes engendrées par Natixis, et à l'organisation des effectifs au sein des deux groupes soient reportées à une discussion postérieure à l'adoption du projet de loi.
M. Bruno Aguirre, secrétaire général de Force ouvrière pour les caisses d'épargne , a fait part de sa surprise sur le choix d'une procédure accélérée qui fait l'impasse sur les modalités précises de gouvernance du nouvel organe central ainsi que sur le bilan de l'application de la loi n° 99-532 du 25 juin 1999 relative à l'épargne et à la sécurité financière qui a doté la caisse d'épargne d'un statut coopératif et a créé une convention de branche spécifique.
M. Philippe Marini, rapporteur général , a considéré que si l'urgence n'est jamais satisfaisante d'un point de vue parlementaire, il convient de prendre en considération l'impact de la crise économique et la nécessité de procéder au rapprochement sur la base de comptes arrêtés au 30 juin 2008. Un délai supplémentaire conduirait à retarder de plusieurs mois l'opération, après un arrêt des comptes au 30 juin 2009, et serait tout à fait préjudiciable dans la perception qu'ont les marchés du bien fondé de la fusion. S'agissant de la gouvernance, il a estimé que la création d'un conseil de surveillance du nouvel organe central permettra de mettre fin à « l'endogamie » aujourd'hui constatée au sein du conseil d'orientation et de surveillance de la caisse nationale des caisses d'épargne qui est essentiellement composé des présidents de directoires des caisses régionales.
Après que M. Bruno Aguirre a fait remarquer que la rédaction actuelle du projet de loi n'empêche en rien que cette « endogamie » perdure au sein du conseil de surveillance du nouvel organe central, M. Claude Lerouge, président de la CGC pour les caisses d'épargne , a demandé qu'une information complète soit donnée par M. François Pérol, président du directoire de la Caisse nationale des caisses d'épargne et directeur général de la Banque fédérale des banques populaires, au sujet des risques que fait peser sur l'emploi le rapprochement des deux réseaux.
M. Claude Bertrand, représentant de la CFDT pour les caisses d'épargne , a salué la nomination de M. Jean-Luc Vergne en qualité de directeur des ressources humaines compétent pour l'ensemble du groupe. Toutefois, il a indiqué que si l'adoption de la loi devait intervenir avant la fin juin 2009 pour des raisons de valorisation comptable, l'absence d'éléments d'information complémentaires sur le volet social de la fusion pourra conduire les comités d'entreprise des deux réseaux à allonger leur calendrier de décision au-delà de la date du 30 juin. Il s'est également interrogé sur les moyens qui seront mis en oeuvre par le groupe pour rembourser l'Etat et sur leurs conséquences en termes de dégradation des conditions de travail et des services à la clientèle.
M. Jean Arthuis, président , a souligné que le trait commun qui se dégage de l'ensemble des interventions est le caractère lacunaire et perfectible de la négociation sociale qui entoure le projet de fusion.
En réponse à la deuxième question portant sur la création d'une branche spécifique pour le réseau de banques populaires, M. Jean-Marie Zieba a mis en exergue le paradoxe qui consiste à créer une branche supplémentaire alors même que le Président de la République a appelé l'ensemble des partenaires sociaux à entamer une réflexion sur la réduction globale du nombre de branches compétentes en matière de négociation des accords collectifs. Il a précisé que, avec la création d'une nouvelle branche pour les banques populaires, quatre régimes de négociation sont appelés à coexister au sein du nouveau groupe :
- la branche propre aux banques commerciales qui réunira notamment le nouvel organe central, les banques régionales ex-HSBC, la société marseillaise de crédit et Natixis ;
- la branche des caisses d'épargne ;
- et la branche de la caisse du crédit mutuel maritime.
Il s'est également interrogé sur le futur statut des salariés du centre informatique I-BP, de Priam et de Foncia. Dans ce contexte, il a considéré que la multiplication des branches contribue à diluer les capacités de négociation des partenaires sociaux, voire à les entraver.
Tout en confirmant le mauvais accueil fait par les salariés des banques populaires à l'annonce de la création d'une branche spécifique les concernant, M. Claude Bertrand a souhaité que soient privilégiées des négociations à l'échelle de l'ensemble du futur groupe dans la mesure où des thématiques telles que la formation professionnelle ou les conditions de travail concernent l'ensemble des salariés, quel que soit leur réseau d'appartenance.
M. Philippe Marini, rapporteur général , a précisé que, nonobstant la mise en oeuvre des nouvelles conditions de représentativité prévues par la loi précitée du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, le projet de loi a pour but de maintenir les statuts actuels des caisses d'épargne, des banques populaires et des filiales qui relèvent de la convention « bancaire ». Il n'a pas exclu qu'un mouvement de convergence s'opère dans la durée.
M. André Larose a indiqué que la CFTC est favorable à la création de la branche des banques populaires qui permettra non seulement de conserver les accords actuels, mais également de protéger les intérêts des salariés et l'indépendance du réseau des banques populaires. A cet égard, il a considéré que la pluralité des statuts sociaux demeure une garantie contre la menace de la constitution d'un réseau unique regroupant les deux enseignes Caisse d'épargne et Banque populaire.
M. Serge Huber a considéré que la pluralité des branches au sein d'un même groupe permet d'afficher l'apparence du statu quo mais qu'à terme il s'agit d'un « trompe l'oeil » dans la mesure où il n'y aura en tout état de cause qu'un seul interlocuteur patronal. Il a estimé que l'introduction de dispositions transitoires concernant les caisses d'épargne dans l'attente de la première mesure d'audience prévue par la loi du 20 août 2008 précitée n'est pas nécessaire.
M. Jean-Marie Zieba a rappelé l'attachement des salariés des banques populaires à la banque fédérale des banques populaires et leur crainte relative à la disparition de la seule instance qui représente aujourd'hui leurs intérêts.
M. Bruno Aguirre a considéré que l'opération de rapprochement ne peut se justifier pour des raisons exclusivement conjoncturelles alors qu'aucun projet industriel n'est présenté. Il a redouté que la mise en place d'une branche spécifique pour les banques populaires ne soit qu'une étape en direction d'une convergence de l'ensemble du groupe vers la convention bancaire conclue entre les banques commerciales et l'Association française des banques (AFB). Considérant les résultats désastreux de la création de Natixis, il a appelé l'ensemble des acteurs de la fusion à prendre leur temps pour élaborer une stratégie de communication sur les objectifs de l'opération.
M. Jean Arthuis, président , a souligné que le rôle du législateur demeure modeste dans la mesure où il est fait une large place à la négociation pour la détermination des modalités précises de gouvernance.
Mme Nicole Bricq a indiqué qu'elle partage la préoccupation des organisations syndicales quant à la procédure d'urgence mise en oeuvre par le Gouvernement.
De son côté, M. Joël Bourdin a souligné l'urgence économique qu'il y a à réunir la force des deux réseaux pour surmonter la crise actuelle.
M. Philippe Marini, rapporteur général , a fait part de ses préoccupations quant à l'état des pertes financières de Natixis, dont les limites ne sont pas encore connues, mais a souligné que la recapitalisation du groupe par l'Etat constitue, dans ce contexte, la seule garantie apportée à la signature du nouvel ensemble banques populaires-caisses d'épargne. Tout retard dans la mise en oeuvre de ce rapprochement, d'ores et déjà annoncé aux marchés, risquerait d'entraîner des signaux de défiance qui pourraient être très préjudiciables. Tout en considérant que le projet de loi est un texte « a minima » portant sur la création du nouvel organe central, il a souhaité que le maintien des statuts des salariés des banques populaires soit clairement affirmé.
Mme Nicole Bricq a estimé que des garanties devront être apportées sur les capacités contributives du futur groupe en ce qui concerne le remboursement de sa dette envers l'Etat. Les interrogations suscitées par le rapprochement ne portent donc pas seulement sur les statuts propres à chacun des réseaux et à Natixis, mais aussi sur leur santé financière.
M. Jean-Marie Zieba a confirmé ses craintes relatives à la crédibilité du groupe dans la mesure où Natixis pourrait faire l'objet de pertes s'élevant à près de 35 milliards d'euros. Cette menace pèse lourdement sur le réseau des caisses d'épargne qui dispose d'une collecte d'épargne importante et participe au financement du logement social, ainsi que sur le réseau des banques populaires qui soutient plus particulièrement le secteur du commerce et de l'artisanat. Il a redouté que les problèmes financiers provoqués par Natixis ne mettent fin au caractère mutualiste et coopératif de ces groupes et n'imposent à terme une « casse sociale » en matière d'emploi et de conditions de travail des salariés.
M. Jean Arthuis, président , a précisé qu'il est inapproprié de classer au chapitre des pertes la totalité des « actifs toxiques » de Natixis dont le montant s'élève effectivement à 33,7 milliards d'euros.
En réponse à la troisième question relative à la représentation des salariés dans la gouvernance du groupe, M. Jean-Paul Krief a fait remarquer que le protocole d'accord relatif à la composition du conseil de surveillance du nouvel organisme central ne prévoit que deux représentants des salariés, un pour chacun des réseaux des caisses d'épargne et des banques populaires, avec voix uniquement consultative. Il a revendiqué la nomination de quatre représentants des salariés avec voix délibérative, un pour chacun de deux réseaux, auxquels s'ajouteraient un représentant pour Natixis et un autre pour le pôle immobilier.
M. Jean Arthuis, président , a confirmé que le projet de loi ne définit ni la gouvernance du nouvel organisme central, ni la composition du conseil de surveillance, l'ensemble de ces points étant fixés par le protocole d'accord conclu le 16 mars 2009 entre la caisse nationale des caisses d'épargne et la banque fédérale des banques populaires.
M. Jean-François Largillière a jugé qu'il est d'autant plus inacceptable que les représentants des salariés n'aient pas voix délibérative au conseil de surveillance de l'organe central que celui-ci a la possibilité de révoquer les membres des conseils d'orientation et de surveillance élus par les sociétaires des banques populaire et des caisses d'épargne. Tout en approuvant cette réflexion, M. Claude Lerouge a ajouté qu'il convient également de modérer le montant des jetons de présence qui peuvent atteindre près de 35.000 euros pour cinq à six réunions par an.
M. Serge Huber a mis en lumière la régression sociale que représente ce protocole d'accord dans la mesure où les deux représentants actuels des salariés au conseil d'orientation et de surveillance des caisses d'épargne ont aujourd'hui voix délibérative. Cette mesure d'éviction des salariés est d'autant plus inutile qu'ils seraient dans l'incapacité numérique de bloquer les décisions stratégiques.
En outre, M. Jean-Marc Augustin, représentant de la CFTC pour les caisses d'épargne , a regretté que les sociétaires copropriétaires ne soient pas non plus consultés sur ce projet.
M. Claude Bertrand a exposé les propositions d'amendements présentés par la CFDT tendant à inscrire dans la loi la présence de représentants des salariés dans la composition des organes de gouvernance. Il a estimé que l'absence de dialogue social est considérée comme une marque de mépris pour les quelque 110.000 salariés du groupe.
Mme Nicole Bricq a partagé le point de vue selon lequel les salariés doivent disposer d'une voix délibérative au sein du conseil de surveillance de l'organe central au même titre que dans l'actuel conseil d'orientation et de surveillance de la caisse nationale des caisses d'épargne. Elle a considéré que cette revendication est d'autant plus justifiée qu'elle s'inscrit dans la logique de la proposition de loi de M. Frédéric Lefebvre, député, visant à définir les modes de nomination et de rémunération des mandataires sociaux des sociétés cotées, à renforcer la présence des salariés au sein des conseils d'administration et de surveillance et à réglementer la composition des comités des rémunérations.
M. Jean Arthuis, président , a estimé que cette demande, d'ordre conventionnel et non législatif, peut être satisfaite par une modification du protocole d'accord du 16 mars 2009, afin d'aménager les pouvoirs des salariés au sein du conseil de surveillance, sans qu'il soit nécessaire d'amender les dispositions du projet de loi.
En réponse à Mme Nicole Bricq qui souhaitait connaître le point de vue des organisations syndicales sur la participation de quatre représentants de l'Etat, dont deux personnalités indépendantes, au sein du conseil de surveillance, M. Jean-Marie Zieba a considéré que cette présence relève d'une tactique du Gouvernement tendant à conforter le pouvoir de M. François Pérol sur l'ensemble du groupe. A cet égard, il a exprimé la crainte que parmi les représentants de l'employeur soient privilégiés les directeurs généraux au détriment des présidents des caisses régionales qui représentent les sociétaires.
M. Serge Huber s'est interrogé sur les critères qui seront retenus par le Gouvernement pour désigner les deux personnalités indépendantes.
M. André Larose a estimé que des minorités de blocage doivent pouvoir se manifester contre toute tentation de l'Etat de retirer sa participation de l'organe central résultant de cessions d'actifs du groupe. Une telle éventualité aurait pour effet d'affaiblir les deux réseaux et de détériorer les conditions de travail des salariés.
M. Jean Arthuis, président , a souligné que dans le cadre d'un conseil de surveillance composé de dix-huit membres, la majorité qualifiée étant fixée à quinze, les sept représentants des caisses d'épargne et les sept représentants des banques populaires ne pourront constituer, à eux seuls, cette majorité.
AUDITION DE MME CHRISTINE LAGARDE, MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI, LE 19 MAI 2009
La commission a procédé à l'audition de Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi , sur le projet de loi n° 424 (2008-2009) relatif à l'organe central des caisses d'épargne et des banques populaires .
M. Jean Arthuis, président , a précisé le contexte de l'audition, qui intervient alors que l'actualité est doublement chargée pour le futur groupe des caisses d'épargne et des banques populaires : tout d'abord, la mise en place de l'organisation et de la stratégie du groupe, qui comprend notamment la définition de la gouvernance et du périmètre du futur organe central que crée le projet de loi en cours d'examen à l'Assemblée nationale ; ensuite, l'impératif de redressement de la rentabilité de certaines activités et d'élagage des actifs « toxiques », en particulier au sein de la banque de financement et d'investissement Natixis, qui a récemment annoncé plus de 1,8 milliard d'euros de pertes au premier trimestre de 2009 et dont 33,7 milliards d'euros d'actifs ont été placés dans une structure interne de cantonnement.
Il a considéré que le futur groupe est donc confronté à de multiples défis et que l'Etat a un rôle important à jouer après avoir oeuvré en faveur de ce rapprochement. Celui-ci est doublement impliqué : tout d'abord, à travers la future souscription de la Société de prise de participation de l'Etat (SPPE) au capital du groupe, qui devrait atteindre 5 milliards d'euros ; par ailleurs, grâce à la représentation de l'Etat au sein du conseil de surveillance du futur organe central.
Il a, dès lors, souhaité que la ministre puisse livrer sa conception du positionnement, de l'organisation et de la gouvernance du futur groupe, comme de l'étendue du soutien que lui apportera l'Etat.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi , a présenté le positionnement du futur groupe des caisses d'épargne et des banques populaires, qui se situera au deuxième rang en France avec 34 millions de clients, 7 millions de sociétaires, 7.700 agences et plus de 110.000 salariés. Le rapprochement ne conduira pas à une fusion complète des caisses d'épargne et des banques populaires, puisque chaque réseau conservera une politique commerciale et des marques autonomes, et respectera l'esprit coopératif et mutualiste qui anime les deux réseaux.
L'apport de l'Etat en fonds propres, d'un montant de 5 milliards d'euros, a été validé par la Commission européenne le 8 mai dernier. Il s'effectuera par l'intermédiaire de la SPPE en deux étapes :
- une souscription à des titres super-subordonnés pour un montant de 2 milliards d'euros, qui doit intervenir avant le 31 août 2009 ;
- une souscription à hauteur de 3 milliards d'euros, sous réserve de la réalisation du rapprochement, à des actions de préférence sans droit de vote convertibles en actions ordinaires, qui permettra à l'Etat de participer à la gouvernance du groupe. L'Etat disposera néanmoins d'une faculté de sortie du capital par le biais d'un mécanisme d'incitation au remboursement de ces titres par le groupe.
Mme Christine Lagarde a précisé les contreparties demandées par l'Etat, qui concernent respectivement :
- l'Etat actionnaire, les actions de préférence étant convertibles en actions ordinaires à partir de la cinquième année, sans que la participation de l'Etat puisse excéder 20 % du capital de l'organe central du groupe ;
- la gouvernance du futur organe central, société anonyme à conseil de surveillance et directoire. Le conseil de surveillance sera composé de vingt membres dont deux représentants des salariés avec voix consultative et dix-huit membres disposant d'une voix délibérative, parmi lesquels quatorze membres issus à parité des réseaux des caisses d'épargne et des banques populaires, et quatre membres désignés par l'Etat dont deux personnalités indépendantes, selon la définition prévue par le code de gouvernement d'entreprise publié par l'Association française des entreprises privées (AFEP) et le Mouvement des entreprises de France (MEDEF) en décembre 2008.
Elle a indiqué que la création de ce nouvel organe central requiert des dispositions législatives. Le périmètre de cette société inclura les principales filiales des deux groupes, en particulier Natixis, la Société marseillaise de crédit, la Société d'investissement du groupe Banque populaire (SIBP), la Financière Océor, le Groupe Caisse d'épargne Assurances, la Banque centrale populaire (BCP France) et sa filiale d'assurances, DV Holding et la participation de 17,7 % dans la Caisse nationale de prévoyance (CNP), à l'exception des filiales relevant du pôle immobilier et de quelques autres établissements, tels que la Banque Palatine, DZ Bank AG et Ma Banque, qui seront dans un premier temps conservés par les holdings des deux réseaux. Les moyens techniques et humains nécessaires à la réalisation des missions de l'organe central lui seront également transférés, et les caisses d'épargne et les banques populaires détiendront conjointement la majorité absolue de son capital et de ses droits de vote.
Mme Christine Lagarde a ensuite exposé brièvement les principales dispositions du projet de loi, qu'elle a qualifié de court et « technique » :
- l'article premier détaille les missions de « quartier général » du nouvel organe central - dont certaines sont héritées de la Caisse nationale des caisses d'épargne, qui portent sur la définition de la stratégie du groupe, la coordination des politiques commerciales des deux réseaux, la représentation du groupe et des deux réseaux auprès des organismes de place et dans la conclusion des accords nationaux et internationaux, la définition des principes de contrôle interne et de gestion des risques, et l'adoption des mesures nécessaire pour garantir la liquidité et la solvabilité du groupe ;
- l'article 2 comporte des dispositions de coordination et l'article 3 prévoit que le nouvel organe central se substituera de plein droit, à la date d'entrée en vigueur de la loi, à la Caisse nationale des caisses d'épargne (CNCE) et à la Banque fédérale des banques populaires (BFBP). Il sera agréé en tant qu'établissement de crédit par le Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement (CECEI) ;
- l'article 4 prévoit des dispositions d'ordre public assurant la transmission universelle du patrimoine des deux actuels organes centraux, sans qu'il soit nécessaire d'effectuer de quelconques formalités à l'égard des créanciers ni que ces derniers puissent remettre en cause les contrats conclus avec les deux réseaux ;
- l'article 5 organise le dialogue social du nouveau groupe. Il prévoit le maintien des statuts actuels des personnels des deux réseaux et la qualité de groupement patronal pour le nouvel organe central, dont les salariés disposeront de leur propre statut ;
- l'article 6 comporte des dispositions de coordination dans le code général des impôts, et l'article 7 prévoit les modalités de mise en oeuvre de la loi, dont la plupart des dispositions entreront en vigueur, sous réserve de l'agrément du CECEI, à compter de l'approbation du rapprochement par l'assemblée générale du nouvel organe central.
Mme Christine Lagarde a ensuite évoqué le cas de Natixis, qui a constitué un facteur d'accélération d'un rapprochement déjà envisagé depuis plusieurs mois. Elle a estimé que ce rapprochement et la création du nouvel organe central conforteront la solidité financière des banques populaires et des caisses d'épargne. Faisant référence au placement en gestion extinctive d'actifs de Natixis dans une structure interne analogue à une structure de cantonnement, elle a entendu prévenir toute confusion entre le montant de ces actifs, de 33,7 milliards d'euros, et les pertes que Natixis a constatées ou pourrait connaître à l'avenir. A cet égard, elle a indiqué que la Commission bancaire avait, le 15 mai dernier, estimé que l'apport en fonds propres de l'Etat était suffisant pour placer Natixis au meilleur niveau de solvabilité des banques européennes, avec un ratio de 9 %.
Elle a expliqué que le modèle du nouveau groupe est celui d'une « banque universelle » reposant sur deux piliers : la banque de détail constituée de deux réseaux au positionnement commercial complémentaire, et la banque de financement et d'investissement avec Natixis, qui est aujourd'hui l'activité la plus exposée à la crise mais sera de dimensions plus réduites que la banque de détail. A ce titre, elle a appelé à relativiser les pertes de Natixis à l'échelle du nouveau groupe, et a souligné que le rapprochement permettra désormais à un actionnaire unique de piloter et de rationaliser ses activités. Natixis a d'ailleurs engagé un plan de réduction de ses risques sous le contrôle étroit et mensuel du secrétariat général de la Commission bancaire.
Cet exposé a été suivi d'un large débat.
M. Philippe Marini, rapporteur général , a qualifié le projet de loi de « minimaliste » en ce qu'il ne modifie pas le statut juridique des réseaux, ce qui lui apparaît légitime dans l'immédiat. La gouvernance « moyenne » du nouvel organe central lui paraît équilibrée et constituer un progrès au regard d'errements antérieurs, notamment du caractère « endogamique » de la gouvernance des caisses d'épargne, qui rendait difficile la distinction entre la logique des « managers » et celle des sociétaires. Il s'est interrogé sur le sort de la Fédération nationale des caisses d'épargne et sur la répartition entre « managers » et représentants des sociétaires au sein des quatorze représentants du réseau qui siègeront au conseil de surveillance de l'organe central.
Sur un plan économique, il a souhaité connaître les raisons qui ont conduit le Gouvernement à ne pas opter pour la défaisance des actifs « toxiques » de Natixis dans une structure publique ad hoc de cantonnement, compte tenu en particulier de l'impact des fluctuations de la valorisation de ces actifs sur les besoins en fonds propres de Natixis, au moment où cette banque a besoin d'une meilleure coordination et d'établir son plan de développement sur le long terme.
Mme Christine Lagarde a indiqué que la question du maintien d'une instance fédérative au sein des caisses d'épargne fait encore débat et que des sociétaires s'en sont émus. Elle a ajouté que la discussion en cours à l'Assemblée nationale pourrait conduire à prévoir une majorité de représentants des sociétaires au sein du conseil de surveillance de l'organe central. Puis, en réponse à une question de M. Jean Arthuis, président , elle a précisé que ces représentants seront désignés par le collège des présidents de conseil d'orientation et de surveillance ou de conseil d'administration.
M. Jean Arthuis, président , et M. Philippe Marini, rapporteur général , ont insisté sur l'utilité, compte tenu du calendrier très contraint de l'examen du projet de loi, que la commission des finances du Sénat soit bien informée et associée en amont sur les modifications envisagées dès l'examen à l'Assemblée nationale.
Mme Christine Lagarde a ensuite justifié l'absence de structure publique de défaisance par le précédent du Consortium de réalisation (CDR) et de ses avatars successifs. Elle a affirmé sa préférence pour une structure interne à Natixis, assumée par les actionnaires et non assortie de la garantie de l'Etat, dans laquelle les actifs douteux sont portés jusqu'à maturité afin de permettre à certains d'entre eux de retrouver progressivement des valorisations satisfaisantes.
En outre, le rapprochement des banques populaires et des caisses d'épargne comme l'apport en fonds propres de l'Etat permettront au groupe et à Natixis de se placer au niveau des meilleurs standards européens de solvabilité. Au total, elle a considéré que le dispositif en place est sans doute le plus efficace et le moins coûteux pour l'Etat. En cas de nouvelle dégradation de la conjoncture et des notations des agences, d'autres options pourront être envisagées, parmi lesquelles le recours au marché ou la mise en place d'une structure analogue au CDR.
Mme Nicole Bricq a contesté l'appréciation portant sur le caractère « technique » du projet de loi. Faisant référence au contexte de l'adoption du projet de loi, notamment les conditions « rocambolesques » de la nomination de M. François Pérol et le choix de la procédure accélérée pour l'examen du texte, elle en a souligné le caractère politique et a regretté que le Parlement soit « sommé » d'approuver la fusion avant le 30 juin sous la pression du Gouvernement et des marchés financiers. De même, ce texte en apparence « minimaliste » couvre en réalité des sujets de grande importance dont le Parlement peut difficilement apprécier la portée exacte, ainsi que l'ont illustré les auditions par la commission de M. François Pérol, le 29 avril 2009, et des organisations représentatives du personnel des deux réseaux, le matin même.
Elle a fait part de ses autres motifs d'inquiétude liés à ce projet de loi, en particulier sur la représentation des sociétaires copropriétaires et des salariés au sein du conseil de surveillance de l'organe central, ces derniers ne disposant que de deux voix consultatives alors qu'ils ont voix délibérative au sein du conseil de surveillance de la CNCE ; l'absence de concertation avec les organisations syndicales sur le projet d'entreprise ; la situation financière dégradée de Natixis et la pérennité du caractère coopératif, mutualiste et décentralisé du groupe.
Relatant des propos tenus par Mme Christine Lagarde, lors de son audition par la commission des finances de l'Assemblée nationale, sur le fait que l'apport financier de l'Etat correspondrait à une sorte de « prime au rapprochement versée par un tiers », elle s'est interrogée sur le caractère proportionné de cet apport au regard des récentes pertes enregistrées par Natixis, sur les modalités de son remboursement par les caisses et banques régionales ou par un appel au marché, et sur l'influence que pourra réellement exercer l'Etat au sein du conseil de surveillance du futur organe central.
Rappelant qu'il avait, en tant que député, participé en 1999 aux débats sur la loi portant prorogation des mandats des membres des conseils consultatifs et des conseils d'orientation et de surveillance des caisses d'épargne et de prévoyance, M. Jean-Jacques Jégou a déploré que des pratiques commerciales non-conformes au modèle coopératif et des choix d'investissement malencontreux aient pu se développer au sein des caisses d'épargne, notamment avec le rachat d'Ixis à la Caisse des dépôts et consignations pour un montant de 7 milliards d'euros.
Il s'est, dès lors, interrogé sur le bon modèle de gouvernance et a craint que les mêmes causes ne produisent les mêmes effets, compte tenu du caractère effectivement « minimaliste » d'un projet de loi qui apporte peu d'évolutions dans un contexte qu'il a qualifié de « dramatique ». Il a également regretté que les deux représentants du personnel ne disposent que d'une voix délibérative au sein du conseil de surveillance de l'organe central, et a souhaité qu'un accord facteur d'apaisement soit trouvé avec le Gouvernement sur ce point.
M. François Marc a estimé que les importantes pertes subies par Natixis peuvent certes, du point de vue comptable, être relativisées à l'échelle du groupe, mais n'en sont pas moins peu cohérentes avec le mutualisme qui caractérise le groupe. Il a ajouté que cette « philosophie mutualiste », selon lui, ne ressort pas suffisamment du projet de loi comme des explications apportées par M. François Pérol lors de son audition par la commission des finances.
M. Joël Bourdin a approuvé le principe du rapprochement entre deux réseaux complémentaires et de culture analogue, même s'ils présentent des particularismes de gouvernance. Il a porté une appréciation positive sur le principe de la participation et de la représentation du personnel, selon lui mieux respecté dans les caisses d'épargne que dans les banques populaires, et s'est demandé dans quelle mesure cette représentation ne pourrait pas être mieux assurée au sein du futur organe central, pour une gouvernance plus moderne.
M. Jean-Pierre Fourcade s'est interrogé sur la notion d'administrateur indépendant et sur le traitement des fonds d'épargne des deux banques au regard du ratio de solvabilité. Il a jugé opportun que les actifs à risque de Natixis soient conservés jusqu'à maturité, une future reprise des marchés étant susceptible de révéler leur véritable qualité intrinsèque. Il a également appelé les économistes de Natixis à faire preuve de davantage de modestie.
M. Yann Gaillard s'est étonné de ce que les salariés des caisses d'épargne et des banques populaires appartiennent manifestement à deux mondes très différents, ainsi qu'il avait pu le constater le matin même lors de l'audition des représentants des organisations syndicales, et s'est demandé comment il serait possible de développer un esprit d'entreprise commun dans ces conditions.
M. Aymeri de Montesquiou a corroboré l'appréciation sur le caractère technique du projet de loi, mais a estimé que dans un contexte où tout prend une coloration politique, il est malvenu d'exclure les salariés des délibérations du conseil de surveillance de l'organe central.
M. Jean Arthuis, président , a souhaité que Mme Christine Lagarde puisse oeuvrer en faveur d'une révision du protocole de négociations conclu en mars 2009 entre les caisses d'épargne et les banques populaires, afin que les salariés puissent disposer d'une voix délibérative, bien que l'efficacité du modèle des caisses d'épargne ait été mise en doute ces dernières années. Abordant le problème du risque systémique engendré par des établissements bancaires de grande taille et symbolisé par l'expression anglo-saxonne « too big to fail » (« trop important pour sombrer »), il s'est demandé jusqu'où ira le mouvement actuel de concentration et dans quelle mesure le risque systémique peut être évalué et contenu, considérant en particulier le rôle d' « assureur systémique » joué par l'Etat.
En réponse à ces différentes interventions, Mme Christine Lagarde a tout d'abord souligné que l'urgence du projet de loi n'est pas motivée par la volonté du Gouvernement de conférer les pleins pouvoirs au nouveau responsable du groupe, mais par la double nécessité de redresser la situation financière de Natixis et, sur le plan comptable, de réaliser l'opération de rapprochement d'ici à la fin du premier semestre de 2009, sur la base des comptes arrêtés au 31 décembre 2008.
Concernant la représentation des salariés, elle a déclaré comprendre les préoccupations exprimées tout en précisant que le protocole de négociations est conforme au droit commun des sociétés commerciales, qui prévoit bien que les représentants du comité d'entreprise siègent avec voix consultative dans les organes dirigeants. Elle a néanmoins déclaré qu'elle transmettrait aux dirigeants des deux groupes les suggestions portant sur une représentation avec voix délibérative, en rappelant que ce principe de la voix délibérative demeure dans les caisses régionales d'épargne.
Après que M. Jean-Jacques Jégou a souligné la distinction entre les représentants des salariés et ceux du comité d'entreprise, Mme Christine Lagarde a mis en exergue l'alignement du mode de représentation de ces représentants au sein de l'organe central du nouveau groupe sur celui aujourd'hui en vigueur au conseil d'administration de la Banque fédérale des banques populaires.
Elle a ensuite rappelé que l'article premier du projet comme l'esprit du rapprochement font bien référence au caractère coopératif et mutualiste du groupe, qui suppose en particulier que la recherche du profit n'est pas une fin en soi mais un moyen au service des missions dont sont légalement investies les caisses d'épargne et les banques populaires. Elle a de nouveau considéré que l'apport de l'Etat s'apparente à une « prime de fusion » dans la mesure où le rapprochement, qui se traduit par le franchissement du seuil de contrôle et la détention de 72 % du capital de Natixis, implique une comptabilisation intégrale du risque porté par cette structure, et non plus proportionnelle à hauteur des 36 % détenus séparément par les banques populaires et les caisses d'épargne. Ce risque supplémentaire, selon elle, s'élève à environ 3,4 milliards d'euros. Les 5 milliards d'euros apportés par l'Etat permettront de respecter les exigences réglementaires de fonds propres du groupe consolidé.
Elle a également indiqué que le contrôle de l'Etat reposera sur :
- les engagements souscrits au titre du financement public, comme pour l'ensemble des banques aidées par l'Etat, en application de la loi de finances rectificative pour 2009 du 20 avril 2009 et du décret du même jour ;
- le fait que certaines décisions du conseil de surveillance de l'organe central requièrent une majorité qualifiée de quinze membres sur dix-huit, ce qui permet de préserver les intérêts publics ;
- les mécanismes d'incitation au remboursement des apports de la SPPE et de conversion, à compter de la cinquième année et plafonnée à 20 % du capital, des actions de préférence en actions ordinaires avec droit de vote.
Mme Nicole Bricq a considéré que la perspective d'une « nationalisation partielle » du groupe est conditionnée à une capacité de remboursement des actions de préférence souscrites par la SPPE qui n'est pas avérée aujourd'hui.
Mme Christine Lagarde a précisé que les objectifs poursuivis sont de faire en sorte que le groupe consolidé dispose d'une capacité de remboursement de ces apports et puisse assurer la gestion extinctive de son portefeuille d'actifs à risques, sans « rétrécissement » de son bilan ni remise en cause de sa mission de financement de l'économie dans le cadre des engagements souscrits à l'égard de l'Etat. Elle a exprimé son souhait que le rapprochement soit constructif et permette une mise en commun des atouts et un enrichissement des différences, avec des équipes soudées.
Faisant référence à la loi Sarbanes-Oxley en vigueur aux Etats-Unis, qui avait mis en évidence la difficulté de trouver des administrateurs réellement indépendants, elle a estimé que le code de gouvernement d'entreprise élaboré par l'AFEP et le MEDEF a permis de progresser et de proposer une définition claire de cette notion.
M. Philippe Marini, rapporteur général , a relevé que l'administrateur indépendant peut être celui qui l'a été dans le passé mais dont on ne sait s'il le restera à l'avenir.
Mme Christine Lagarde a poursuivi en précisant que les fonds d'épargne des deux réseaux continueront d'être centralisés à hauteur de 70 % auprès de la Caisse des dépôts et consignations, un dispositif transitoire étant toutefois prévu pour les caisses d'épargne, suite à la généralisation de la distribution du Livret A.
Concernant le risque systémique, elle a évoqué l'engagement pris en octobre 2008 par le Président de la République, à l'occasion de son discours à Toulon, de ne laisser aucune banque française faire faillite pour maintenir la confiance des épargnants et déposants. Relevant les stratégies actuelles d'acquisition de parts de marché par certains établissements, elle a ajouté que plusieurs voies peuvent être envisagées pour limiter le risque systémique, telles que les exigences actuelles de fonds propres en fonction de la dimension des bilans, les règles de prévention de l'abus de position dominante au niveau européen voire régional, et les réflexions en cours au niveau international sur la révision des normes de fonds propres réglementaires selon la taille des établissements et la nature de leurs actifs, ainsi que sur d'éventuels mécanismes de mutualisation des risques.