2. Un éclairage économique nécessaire
Les travaux du groupe d'experts devraient contribuer à éclairer les pouvoirs publics, les partenaires sociaux et l'opinion sur l'incidence d'une hausse du Smic. Son impact sur l'emploi non qualifié et sur la hiérarchie des salaires, notamment, mérite d'être analysé avec attention.
La grande majorité des économistes s'accordent à considérer que le Smic, au niveau qui est le sien en France, a des effets négatifs sur l'emploi peu qualifié. Le rapport du Cserc, précité, arrive à cette conclusion 6 ( * ) et le CAE souligne que les hausses du Smic semblent « préjudiciables à l'emploi en France », ce qui n'est pas le cas aux Etats-Unis où le salaire minimum est beaucoup plus faible 7 ( * ) . Selon le CAE, après examen approfondi d'une centaine d'études empiriques portant sur les effets du salaire minimum sur l'emploi dans toutes les régions du monde, il apparaît que huit études seulement mettent en évidence un effet significativement positif d'une hausse du salaire minimum sur l'emploi ; l'écrasante majorité des études concluent à un effet négatif sur l'emploi, en particulier celui des jeunes adultes non qualifiés.
La politique d'allègement des charges sur les bas salaires mise en oeuvre depuis 1993 a eu pour effet de réduire le coût relatif du travail peu qualifié. Depuis cette date, la part de l'emploi non qualifié dans l'emploi total s'est d'ailleurs stabilisée malgré la progression assez rapide du Smic.
Depuis 1994, le pouvoir d'achat du Smic a augmenté plus fortement que celui du salaire médian mais les dispositifs successifs d'allègements de cotisations sociales ont permis de contenir la hausse du coût du travail au niveau du Smic autour de 30 %. Plus précisément, ces dispositifs ont permis de diminuer ce coût entre 1993 et 1997 mais n'ont pu empêcher une croissance sensible depuis cette date. Sur les trois années 2003-2005, l'application de la « loi Fillon » relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi du 17 janvier 2003, qui a organisé la sortie du système des « Smic multiples » issu des lois sur la réduction du temps de travail, a conduit à une progression dynamique du pouvoir d'achat du Smic : il faut remonter à 1981 pour observer une augmentation du pouvoir d'achat du Smic supérieure à celle enregistrée chacune de ces trois années. Depuis 2006, le Smic a retrouvé une évolution plus modérée, avec une absence de « coup de pouce » en 2007 et 2008.
La proportion de salariés rémunérés au Smic a augmenté ces dernières années puisque les bas salaires ont été, en quelque sorte, « rattrapés » par la hausse du Smic. Près d'un salarié sur six est actuellement rémunéré au Smic et de nombreux salariés demeurent à ce niveau tout au long de leur carrière.
Salariés des entreprises du secteur marchand non
agricole
concernés par les relèvements du Smic
(en %)
Source Rapport du Conseil d'analyse économique, « Salaire minimum et bas revenus : comment concilier justice sociale et efficacité économique ? », juillet 2008
* 6 Op.cit., p. 7.
* 7 Op.cit., p. 43.