N° 920
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 TREIZIÈME LÉGISLATURE |
N° 364
SESSION ORDINAIRE DE 2007-2008 |
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Enregistré à la Présidence de
l'Assemblée nationale
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Annexe au procès-verbal de la séance du 3 juin 2008 |
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE (1) CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI portant modernisation du marché du travail ,
PAR M. DOMINIQUE DORD, , Rapporteur, Député. |
PAR M. PIERRE BERNARD-REYMOND, Rapporteur, Sénateur. |
( 1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, sénateur, président ; M. Pierre Méhaignerie, député , vice-président ; M. Pierre Bernard-Reymond, sénateur, M. Dominique Dord, député, rapporteurs.
Membres titulaires : MM. Michel Esneu, Alain Gournac, Mmes Catherine Procaccia, Christiane Demontès, Annie David, sénateurs ; MM. Jean-Frédéric Poisson, Dominique Tian, Jean-Patrick Gille, Jean Mallot, Alain Vidalies, députés .
Membres suppléants : M. Guy Fischer, Mme Françoise Henneron, M. Dominique Leclerc, Mme Raymonde Le Texier, MM. Georges Mouly, Louis Souvet, Jean-Marie Vanlerenberghe, sénateurs ; MM. Benoist Apparu, Jean-Pierre Decool, Bruno Le Maire, Mme Danièle Hoffman-Rispal, MM. Christophe Sirugue, Francis Vercamer, députés.
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 13 ème législ.) : Première lecture : 743 , 789 et T.A. 133
Deuxième lecture : 879
Sénat : 302 , 306 et T.A. 78 (2007-2008)
TRAVAUX DE LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE
Mesdames, Messieurs,
Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande de M. le Premier ministre, une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant modernisation du marché du travail s'est réunie le mardi 3 juin 2008 au Sénat.
La commission a d'abord procédé à la désignation de son bureau qui a été ainsi constitué :
- M. Nicolas About, sénateur, président ;
- M. Pierre Méhaignerie, député, vice-président.
La commission a ensuite désigné :
- M. Pierre Bernard-Reymond, sénateur, rapporteur pour le Sénat ;
- M. Dominique Dord, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale.
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Puis la commission mixte paritaire a procédé à l'examen du texte.
Le président Nicolas About, sénateur, a souligné le grand intérêt que le Sénat porte à ce texte, qui marque une étape importante dans le renforcement du dialogue social.
M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur pour le Sénat, a rappelé que le projet de loi portant modernisation du marché du travail a été examiné au Sénat les 6 et 7 mai, après son adoption par l'Assemblée nationale, en première lecture, le 29 avril dernier.
Le Sénat a confirmé le bien-fondé du travail de l'Assemblée nationale et a maintenu, à une exception près, les modifications qu'elle a apportées au projet de loi. Il a adopté à son tour une quinzaine d'amendements, en veillant à ne pas remettre en cause l'équilibre de l'accord qui sert de base à ce texte. Toute autre attitude découragerait en effet les efforts entrepris en matière de dialogue social : pourquoi les organisations syndicales et patronales s'engageraient-elles dans des négociations difficiles si le fruit de leurs discussions est ensuite ignoré par les parlementaires ? Le Parlement ne doit cependant pas renoncer à sa mission d'amélioration des textes et conserve la possibilité de procéder à certains aménagements ou d'apporter des compléments.
M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur pour le Sénat, a ensuite présenté les principales modifications apportées par le Sénat :
- à l'article 1 er , un amendement prévoit que l'employeur devra informer les élus du personnel non seulement sur le recours aux contrats à durée déterminée (CDD) et aux contrats d'intérim mais également sur le recours aux contrats conclus avec les sociétés de portage salarial ;
- au sujet de la période d'essai, le Sénat a adopté trois modifications de fond : d'abord, pour prévoir que la possibilité de renouveler la période d'essai est mentionnée dans le contrat de travail ou dans la lettre d'engagement du salarié ; ensuite pour que les salariés en CDD bénéficient d'un délai de prévenance lorsque leur contrat est rompu en cours de période d'essai, à condition que celle-ci dure au moins une semaine ; enfin, pour ramener le délai de prévenance à vingt-quatre heures lorsque le salarié est présent depuis moins de huit jours dans l'entreprise ;
- à l'article 4, le Sénat est revenu sur une modification votée par l'Assemblée nationale qui tendait à rendre obligatoire la motivation de la dénonciation du reçu pour solde de tout compte ; il a considéré que cette disposition serait porteuse d'incertitudes juridiques et source de contentieux et donc contraire à la philosophie générale du projet de loi, qui vise au contraire à sécuriser les procédures ;
- en matière de rupture conventionnelle du contrat de travail, le Sénat a adopté trois amendements de fond : en premier lieu, pour fixer à quinze jours ouvrables, et non pas calendaires, le délai accordé à l'administration pour instruire la demande d'homologation ; en second lieu, pour réduire la durée des éventuelles procédures judiciaires, en donnant compétence au conseil de prud'hommes pour statuer en premier et dernier ressort ; enfin, pour écarter la compétence du conseil de prud'hommes lorsque c'est un avocat salarié qui a rompu son contrat de travail ; ces salariés bénéficient en effet, depuis 1990, d'un régime juridique spécifique, qui attribue compétence au bâtonnier pour connaître de ce type de litiges ;
- une précision a été apportée au régime du CDD à objet défini, afin de lever une difficulté d'interprétation : dans sa rédaction initiale, le projet de loi indiquait que le contrat pouvait être rompu à sa date anniversaire, donc éventuellement au bout de douze mois, mais aussi que sa durée était au moins de dix-huit mois ; dans un souci de conciliation, il est proposé que le contrat puisse être rompu au bout de dix-huit mois, puis au deuxième anniversaire de sa conclusion ;
- sur la question complexe du portage salarial, le Sénat a apporté deux modifications notables : la première pour autoriser les entreprises d'intérim à exercer l'activité de portage ; la seconde pour rendre obligatoire la consultation des organisations représentant les entreprises de portage salarial avant la conclusion de l'accord qui doit être négocié par le secteur de l'intérim ;
- enfin, le Sénat a adopté, à l'initiative du Gouvernement, un amendement qui l'habilite à adapter, par ordonnance, le projet de loi au cas particulier des marins.
M. Dominique Dord, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a rappelé que le projet de loi constitue une première application positive de la loi de modernisation du dialogue social, qui prévoit qu'une négociation entre partenaires sociaux précède la délibération politique. La démarche de transposition de l'accord des partenaires sociaux qui a ainsi été engagée a suscité, au moins dans un premier temps, des interrogations, voire une certaine méfiance.
Pour rassurer les organisations patronales et syndicales, qui redoutaient que les parlementaires ne dénaturent le contenu de leur accord par l'adoption de nombreux amendements, l'Assemblée nationale a veillé à respecter scrupuleusement la lettre et l'esprit de l'accord. Elle a introduit des dispositions qui figurent dans l'accord mais que le Gouvernement n'avait pas jugé utile de mentionner dans le projet de loi initial, par exemple pour indiquer que le contrat à durée indéterminée est la forme normale « et générale » de la relation de travail et surtout, ce qui constitue une mesure particulièrement importante, pour garantir le droit des salariés à bénéficier de l'assurance chômage en cas de rupture conventionnelle de leur contrat de travail. Elle a par ailleurs précisé, à l'initiative de MM. Jean-Frédéric Poisson et Dominique Tian, les obligations réciproques d'information de l'employeur et du salarié lorsqu'ils décident de se faire assister par un tiers lors de la négociation de la convention de rupture et prévu, sur la proposition de M. Francis Vercamer, une période d'essai pour les contrats « nouvelles embauches » (CNE) requalifiés de droit en contrats à durée indéterminée (CDI).
Afin de préserver le large consensus qui a présidé jusqu'ici à l'élaboration de ce texte, il est indispensable que la commission mixte paritaire reste fidèle au compromis dégagé par les partenaires sociaux.
Le président Nicolas About, sénateur, a souhaité que les prochains textes venant transposer un accord des partenaires sociaux se conforment au même principe.
M. Jean-Patrick Gille, député, a indiqué que le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche (SRC), qui a eu une attitude constructive lors des débats et s'est abstenu au moment du vote, espère ne pas avoir à regretter son choix : le climat social s'est en effet tendu depuis les annonces faites par le Gouvernement en matière de réforme du droit de la durée du travail.
S'agissant de la modernisation du marché du travail, il convient de rester fidèle au texte de l'accord national interprofessionnel (ANI). Or, le Sénat s'en est écarté sur un point majeur en décidant que le conseil de prud'hommes statuerait en premier et dernier ressort sur les recours relatifs à la rupture conventionnelle du contrat de travail. Cette mesure, proposée à l'Assemblée nationale, y avait été rejetée par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Il est nécessaire de revenir, sur ce point, au texte de l'Assemblée nationale ; le choix qu'opérera la commission mixte paritaire à cet égard sera déterminant pour le vote du groupe SRC sur l'ensemble du projet de loi.
En outre, des ambiguïtés subsistent concernant le régime du contrat à durée déterminée à objet défini : un salarié titulaire de ce contrat pourra-t-il le rompre s'il a trouvé un emploi en CDI ? Sur la question du portage salarial enfin, il n'est pas certain que la rédaction adoptée par le Sénat réponde à toutes les inquiétudes.
A l'issue de ce débat, la commission mixte paritaire est passée à l'examen des articles restant en discussion.