EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er A (nouveau) (art. L. 112-2, L. 212-10, L. 212-12, L. 212-14, L. 212-15, L. 241-2-1, L. 252-13, L. 252-17, L. 256-1, L. 262-24, L. 262-26, L. 262-43-1, L. 262-45-1, L. 262-56, L. 272-24, L. 272-26, L. 272-41-1, L. 272-43-1 et L. 272-54 du code des juridictions financières) - Appellation du représentant du ministère public près les chambres régionales et territoriales des comptes
Cet article a été inséré par l'Assemblée nationale en première lecture, sur proposition de sa commission des lois et avec l'avis favorable du gouvernement.
Il supprime l'appellation « commissaire du Gouvernement » dans les différents articles de la partie législative du code des juridictions financières relatifs aux chambres régionales et territoriales des comptes où elle figure 23 ( * ) , pour lui substituer la référence , plus neutre, au « représentant du ministère public ».
Dans une décision n° 2006-208 L du 30 novembre 2006, le Conseil constitutionnel a d'ailleurs considéré que les mots « commissaire du Gouvernement » figurant aux articles L. 7 et L. 522-1 du code de justice administrative relevaient du domaine réglementaire.
La distinction entre les fonctions d'instruction, de poursuite et de jugement, que le projet de loi opère pour assurer la conformité des procédures de jugement des comptes aux stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, justifie la suppression de toute expression qui pourrait prêter à confusion sur le rôle dévolu au ministère public.
Une telle ambiguïté n'existe actuellement pas à la Cour des comptes, où le ministère public est assuré par un procureur général, assisté d'un premier avocat général et d'avocats généraux 24 ( * ) , au nombre de quatre en 2007.
La nomination du procureur général est, comme celle du Premier président, à la discrétion du gouvernement, sans aucune condition d'âge ni de diplôme 25 ( * ) . Les avocats généraux sont nommés par décret, après avis du procureur général. Ils sont choisis parmi les conseillers maîtres ou les conseillers référendaires et délégués dans les fonctions d'avocat général. Le premier avocat général est nommé par décret parmi les avocats généraux 26 ( * ) .
Dans les chambres régionales et territoriales des comptes, les fonctions du ministère public sont exercées par un ou plusieurs « commissaires du Gouvernement » choisis parmi les magistrats membres du corps des chambres régionales des comptes 27 ( * ) , qui sont les correspondants du procureur général près la Cour des comptes. Les intéressés sont délégués dans les fonctions du ministère public par décret pris sur proposition conjointe du Premier président de la Cour des comptes et du procureur général près la Cour des comptes. Comme ils ne sont pas inamovibles, il peut être mis fin à cette délégation dans les mêmes formes 28 ( * ) .
Le code des juridictions financières prévoit que le procureur général près la Cour des comptes oriente et coordonne, s'il y a lieu par des recommandations écrites, l'action des commissaires du Gouvernement près les chambres régionales et territoriales des comptes, et que ces derniers doivent le tenir informé de l'exécution des tâches du ministère public 29 ( * ) . A la différence des juridictions judiciaires, aucun texte ne précise sous quelle forme le gouvernement pourrait donner des instructions ou des orientations au procureur général.
Les représentants du ministère public près les juridictions financières jouent ainsi un rôle de conseiller juridique ou encore de « défenseur de la loi », plus proche de celui de leurs homologues des juridictions administratives que de celui des magistrats du parquet dans les juridictions judiciaires.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 1 er A sans modification .
Article 1er (art. L. 111-1 du code des juridictions financières) - Compétence juridictionnelle de la Cour des comptes en appel
Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture, réécrit le second alinéa de l'article L. 111-1 du code des juridictions financières, relatif à la compétence juridictionnelle de la Cour des comptes en appel, pour tirer la conséquence de la réforme de la procédure de jugement des comptes devant les chambres régionales des comptes opérée à l'article 21 du projet de loi.
Il prévoit que la Cour des comptes statue sur les appels formés contre « les décisions juridictionnelles » rendues par les chambres régionales et territoriales des comptes, et non plus contre les « jugements prononcés à titre définitif ».
En effet, l'article 21 du projet de loi supprime la possibilité actuellement reconnue aux juridictions financières de statuer par des jugements provisoires et leur ouvre celle de statuer par ordonnance à juge unique, en cas de décharge du comptable, ou par jugement d'une formation collégiale, en cas de mise en débet ou de condamnation à l'amende.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 1 er sans modification .
Article 2 (art. L. 131-1 du code des juridictions financières) - Délais de production des comptes imposés aux comptables publics relevant de la juridiction de la Cour des comptes
Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture, précise que les comptables publics relevant de la juridiction de la Cour des comptes sont tenus de lui produire leurs comptes dans les délais fixés par décret en Conseil d'État.
Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 131-1 du code des juridictions financières fait obligation aux « comptables publics autres que ceux qui relèvent de la juridiction des chambres régionales et territoriales des comptes » de produire leurs comptes à la Cour des comptes, tandis que le premier alinéa de son article L. 140-7 renvoie au pouvoir réglementaire le soin de fixer les délais dans lesquels ces comptes doivent être produits.
Selon les renseignements qui figurent dans le rapport établi par M. Eric Ciotti, au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale, les comptables publics relevant de la juridiction de la Cour des comptes sont :
- les comptables principaux de l'État (trésoriers-payeurs généraux, contrôleurs budgétaires et comptables ministériels 30 ( * ) ...), au nombre de 116 en 2005 ;
- les receveurs des impôts et les receveurs des douanes, respectivement au nombre de 116 et de 43 en 2005 31 ( * ) ;
- les comptables des établissements publics nationaux à caractère administratif et assimilés ainsi que des établissements publics à caractère industriel et commercial soumis aux règles de la comptabilité publique (villes nouvelles, opéra de Paris...), soit en 2005, 409 établissements publics administratifs, 91 établissements publics à caractère industriel et commercial et 71 établissements publics de diffusion culturelle à l'étranger ;
- les comptables des groupements d'intérêt public, au nombre de 340 en 2005.
Le tableau ci-après, communiqué par la Cour des comptes à votre rapporteur, retrace l'évolution des postes comptables jugés par la Cour entre 2001 et 2007.
Postes comptables jugés par la Cour des comptes entre 2001 et 2007
TPG |
Receveurs des impôts (1) |
Receveurs des douanes |
EPA |
EPIC |
EPDCEFE (2) |
GIP et GSC |
Total |
|
2001 |
127 |
115 |
43 |
379 |
83 |
74 |
177 |
998 |
2002 |
116 |
116 |
43 |
386 |
86 |
74 |
229 |
1 050 |
2003 |
116 |
116 |
43 |
388 |
87 |
75 |
323 |
1 148 |
2004 |
116 |
116 |
43 |
397 |
89 |
79 |
363 |
1 203 |
2005 |
116 |
116 |
43 |
409 |
91 |
79 |
340 |
1 194 |
2006 |
122 |
109 |
42 |
462 |
73 |
11 |
221 |
1 040 |
2007 |
124 |
109 |
42 |
476 |
73 |
10 |
205 |
1 039 |
Source : Arpèges (1) Pour les comptables des administrations fiscales et douanières (receveurs des impôts et des douanes), il a été convenu d'assimiler chacune des directions de services fiscaux et des directions régionales des services douaniers à une comptabilité. (2) Établissements publics de diffusion culturelle et d'enseignement du français à l'étranger. |
Les délais dans lesquels ces comptables sont tenus de produire leurs comptes sont déjà prévus par des décrets en Conseil d'État, quand bien même la loi autorise le recours à des décrets simples :
- l'article R. 131-2 du code des juridictions financières dispose ainsi que « les comptes sont produits annuellement à la Cour des comptes, appuyés des pièces générales et justificatives, dans les conditions fixées par le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique et les instructions prises pour son application », ajoutant que la Cour reçoit trimestriellement les pièces justificatives des recettes et des dépenses du budget de l'État ;
- en vertu du règlement général sur la comptabilité publique, les comptables publics « doivent rendre des comptes au moins une fois l'an » (article 17), les comptes des comptables de l'État doivent parvenir à la Cour des comptes avant le 31 juillet de l'année suivant celle au titre de laquelle ils sont établis (article 143), ceux des comptables des établissements publics administratifs nationaux doivent lui parvenir avant l'expiration du dixième mois suivant la clôture de l'exercice, c'est-à-dire avant le 31 octobre (article 187), tandis que les comptes des comptables des établissements publics à caractère industriel et commercial doivent être adressés dans les quatre mois suivant la clôture de l'exercice soit directement à la Cour des comptes soit à une commission de vérification des comptes avant leur transmission à la Cour (articles 221 et 223).
Les modifications proposées par l'article 2 du projet de loi s'avèrent donc formelles . Elles consistent :
- d'une part, à faire référence aux « comptables publics qui relèvent de la juridiction de la Cour des comptes » plutôt qu'aux « comptables publics autres que ceux qui relèvent de la juridiction des chambres régionales et territoriales des comptes ». Ce changement de terminologie ne devrait emporter aucune conséquence sur les attributions des juridictions financières, même si sa pertinence ne paraît pas évidente dans la mesure où la rédaction actuelle montre bien que la Cour des comptes détient la compétence de droit commun et doit donc juger tous les comptes dont la vérification n'est pas confiée à d'autres ;
- d'autre part, à faire figurer à l'article L. 131-1 du code des juridictions financières la compétence du pouvoir réglementaire pour fixer les délais de production des comptes des comptables publics, par coordination avec l'abrogation de l'article L. 140-7 du même code prévue par l'article 10 du projet de loi, et à exiger que cette compétence soit exercée sous le contrôle du Conseil d'État.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 sans modification .
Article 3 (art. L. 131-2 du code des juridictions financières) - Procédure applicable aux comptables de fait relevant de la juridiction de la Cour des comptes
Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture, modifie l'article L. 131-2 du code des juridictions financières, relatif au jugement des comptes des personnes déclarées comptables de fait par la Cour des comptes, afin de tirer les conséquences de la réforme et de l'unification des procédures juridictionnelles prévues à l'article 11 du projet de loi.
Conséquence de la séparation des ordonnateurs et des comptables, la gestion de fait est l'immixtion dans les fonctions de comptable public d'une personne, physique ou morale n'ayant pas cette qualité ou n'agissant pas sous le contrôle et pour le compte d'un comptable public.
Il peut s'agir, selon les termes du paragraphe XI de l'article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 de finances pour 1963 :
- du recouvrement de recettes affectées ou destinées à un organisme public doté d'un poste comptable ou dépendant d'un tel poste 32 ( * ) ;
- de la réception ou du maniement, directement ou indirectement, de fonds ou de valeurs extraits irrégulièrement de la caisse d'un organisme public 33 ( * ) ;
- de la réalisation d'opérations portant sur des fonds ou des valeurs n'appartenant pas aux organismes publics mais que les comptables publics sont exclusivement chargés d'exécuter en vertu de la réglementation en vigueur.
Ce même paragraphe prévoit que les gestions de fait sont soumises aux mêmes juridictions et entraînent les mêmes obligations et responsabilités que les gestions régulières. Il permet toutefois au juge des comptes, hors le cas de mauvaise foi ou d'infidélité du comptable de fait, de « suppléer par des considérations d'équité à l'insuffisance des justifications produites ».
Les chambres régionales et territoriales des comptes ont ainsi compétence de premier ressort sur les gestions de fait de deniers des collectivités territoriales et de leurs établissements publics, ainsi que des établissements publics nationaux, comme les universités ou les chambres de commerce et d'industrie, dont le contrôle leur a été délégué, pour une période déterminée, par un arrêté du Premier président de la Cour des comptes. Leur jugement peuvent faire l'objet d'un appel devant la Cour des comptes qui est compétente pour statuer en premier et dernier ressort sur les gestions de fait de deniers de l'État et de ses établissements publics. Les arrêts de la Cour des comptes peuvent faire l'objet d'un pourvoi en cassation devant le Conseil d'État.
Le premier alinéa de l'article L. 131-2 du code des juridictions financières dispose donc que la Cour des comptes juge les comptes que lui rendent les personnes qu'elle a déclarées comptables de fait, ajoutant qu'elle n'a pas juridiction sur les ordonnateurs, sauf sur ceux qu'elle a déclarés comptables de fait.
Son deuxième alinéa prévoit l'audition, à leur demande, des personnes déclarées comptables de fait avant l'arrêt définitif de gestion de fait, lorsque la Cour des comptes statue en premier et dernier ressort. Il ajoute que les arrêts statuant sur les appels formés contre les dispositions définitives des jugements des chambres régionales des comptes sont délibérés après l'audition des requérants et des autres parties intéressées qui en ont fait la demande.
Ces dispositions n'ont plus lieu d'être dès lors que l'article 11 du projet de loi soumet les comptes des comptables de fait et ceux des comptables patents à une même procédure de jugement, au cours de laquelle l'audience est en principe publique lorsque le réquisitoire du ministère public relève des éléments susceptibles de conduire à la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable ou présomptifs de gestion de fait.
En conséquence, le 1° de l'article 3 du projet de loi leur substitue des dispositions ayant un tout autre objet : prévoir que les personnes que la Cour des comptes a déclarées comptables de fait sont tenues de lui produire leurs comptes dans les délais qu'elle impartit .
Il consacre et formalise la pratique actuelle de la Cour des comptes : l'arrêt par lequel elle déclare une personne comptable de fait est assorti d'une injonction de produire le compte relatif à la gestion de fait dans un certain délai, qui est généralement de deux ou trois mois mais peut être plus important en fonction de la complexité de l'affaire. Une fois que ce compte a été produit, la Cour peut le juger et, soit prononcer la mise en débet du comptable de fait, en l'assortissant ou non d'une amende, soit lui donner quitus de sa gestion.
La diversité des affaires implique, comme le prévoit le projet de loi, de laisser à la juridiction le soin d'apprécier les délais de production des comptes relatifs à une gestion de fait, plutôt que de prévoir la fixation par décret en Conseil d'État d'un délai uniforme.
Ajouté par l'article 38 de la loi n° 2001-1248 du 21 décembre 2001 relative aux chambres régionales des comptes et à la Cour des comptes, le troisième alinéa de l'article L. 131-2 du code des juridictions financières est relatif à la prescription de la gestion de fait.
Il prévoit que l'action en déclaration de gestion de fait est prescrite pour les actes constitutifs de gestion de fait commis plus de dix ans avant la date à laquelle la Cour des comptes en est saisie ou s'en saisit d'office.
La modification prévue par le 2° de l'article 3 du projet de loi, consiste exclusivement à supprimer la référence à la possibilité, pour la Cour des comptes, de se saisir d'office d'une gestion de fait -dans un souci d'harmonisation des délais de la prescription extinctive, votre commission vous proposera d'insérer un article additionnel après l'article 29 bis pour réduire la durée de ce délai à cinq ans.
Elle tire la conséquence de la réforme des procédures juridictionnelles opérée par l'article 11 du projet de loi, consistant à subordonner l'ouverture d'une instance contentieuse à un réquisitoire préalable du ministère public.
Actuellement, une juridiction financière peut s'autosaisir d'une gestion de fait, apparaissant par exemple à l'occasion du jugement des comptes d'un comptable public ou d'un contrôle de gestion. Le juge prend une décision provisoire de déclaration de gestion de fait qui introduit l'instance.
Certes, le présumé comptable de fait peut alors faire valoir ses arguments, puisque la procédure est contradictoire, mais il serait fondé à remettre en cause l'impartialité de la formation de jugement appelée à se prononcer définitivement sur l'existence d'une gestion de fait dès lors que l'instance a été ouverte par cette même formation.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 3 sans modification .
Article additionnel après l'article 3 (art. L. 131-5 du code des juridictions financières) - Remplacement de l'expression « territoires d'outre-mer » par celle de « collectivités d'outre-mer »
Votre commission vous soumet un amendement tendant à modifier l'article L. 131-5 du code des juridictions financières, relatif à l'apurement administratif de certains comptes par les comptables supérieurs du Trésor, afin de tirer la conséquence de la substitution de l'expression « collectivités d'outre-mer » à celle de « territoires d'outre-mer » par la loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République.
Tel est l'objet de l'article additionnel que votre commission vous propose d'insérer après l'article 3 .
Article 4 (art. L. 131-6 du code des juridictions financières) - Condamnation à l'amende pour retard des comptables dont les comptes sont directement jugés par la Cour des comptes
Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture, apporte une précision et opère une coordination à l'article L. 131-6 du code des juridictions financières, qui permet à la Cour des comptes de condamner les comptables à l'amende en cas de retard dans la production de leurs comptes ou dans les réponses aux injonctions qui leur ont été adressées.
La précision consiste à spécifier que peuvent être condamnés à l'amende aussi bien les comptables publics que les personnes déclarées comptables de fait par la Cour des comptes. Cette possibilité ne faisait guère de doute puisque, d'une part, l'article L. 131-6 du code des juridictions financières fait référence aux « comptables » et pas seulement aux « comptables publics », d'autre part, le XI de l'article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 de finances pour 1963 dispose que « les gestions irrégulières entraînent, pour leurs auteurs, déclarés comptables de fait par la Cour des comptes, les mêmes obligations et responsabilités que les gestions patentes pour les comptables publics ». Au demeurant, la Cour des comptes l'utilise déjà 34 ( * ) .
La coordination consiste à supprimer l'amende pour retard dans les réponses aux injonctions formulées à l'encontre du comptable, dès lors que l'article 11 du projet de loi supprime la règle du double arrêt, provisoire puis définitif. En effet, c'est au stade de l'arrêt provisoire que les juridictions financières pouvaient formuler des injonctions pour permettre aux comptables d'apporter des explications. L'arrêt provisoire étant supprimé, il n'y a pas lieu de maintenir ce pouvoir de sanction.
Seule subsistera donc, à l'article L. 131-6 du code des juridictions financières 35 ( * ) , l'amende pour retard dans la production des comptes, qui ne peut déjà être infligée que sur les réquisitions du ministère public.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 4 sans modification .
Article 5 (art. L. 131-7 du code des juridictions financières) - Revalorisation du montant maximal des amendes pour retard
Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture, a pour objet, d'une part, de revaloriser le montant maximal des amendes susceptibles d'être infligées à un comptable pour retard dans la production de ses comptes, d'autre part, de procéder à des coordinations.
Aux termes de l'article L. 131-7 du code des juridictions financières, le taux maximum de l'amende pouvant être infligée à un comptable qui n'a pas produit ses comptes dans le délai réglementaire ainsi que le taux maximum de l'amende pouvant être infligée à un comptable pour retard dans les réponses aux injonctions formulées lors d'un jugement sur ses comptes sont fixés par voie réglementaire dans la limite, pour les comptes d'un même exercice, du montant mensuel du traitement brut afférent à l'indice nouveau majoré 250 de la fonction publique, soit 1.139 euros au 1 er mars 2008.
Ce plafond est rarement atteint en raison de la modicité des taux fixés par les articles D. 131-37 à D. 131-40 du code des juridictions financières : 75 euros par compte et par mois de retard dans la production des comptes pour les comptables principaux de l'État, 22 euros par compte et par mois de retard dans la production des comptes pour les autres comptables justiciables du juge des comptes, 3 euros par compte et par mois de retard dans la production des comptes pour les comptables relevant de l'apurement administratif, 3 euros par injonction et par mois de retard dans les réponses aux injonctions adressées au comptable.
La revalorisation prévue par l'article 5 du projet de loi consiste à doubler le plafond légal en faisant référence au montant mensuel du traitement brut afférent à l'indice nouveau majoré 500 de la fonction publique, soit 2.278 euros au 1 er mars 2008 .
Les coordinations proposées consistent :
- d'une part, à supprimer la référence à l'amende pouvant être infligée à un comptable pour retard dans les réponses aux injonctions formulées lors d'un jugement sur ses comptes, par coordination avec les articles 4 et 11 du projet de loi ;
- d'autre part, à lui substituer la référence au délai de production des comptes imparti par la Cour des comptes aux personnes qu'elle a déclarées comptables de fait, par coordination avec le 1° de l'article 3 du projet de loi.
La revalorisation du montant des amendes paraît légitime pour inciter les comptables à respecter les délais de production de leurs comptes, M. Eric Ciotti, rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, y voyant pour sa part un moyen de limiter la « distorsion entre le montant des amendes prononcées (quelques centaines d'euros) et les moyens procéduraux utilisés (réquisitoire du parquet, audience contradictoire, réunion de la formation collégiale au stade de l'arrêt provisoire puis de l'arrêt définitif) . »
Elle implique toutefois de revaloriser également les taux fixés par les articles D. 131-37 à D. 131-40 du code des juridictions financières. Selon les indications communiquées à votre rapporteur, un projet de décret en cours de rédaction pourrait entraîner leur triplement.
Sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter l'article 5 sans modification .
Article 6 (art. L. 131-8 du code des juridictions financières) - Condamnation à l'amende pour retard des comptables qui relèvent de l'apurement administratif des comptables supérieurs du Trésor
Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture, modifie l'article L. 131-8 du code des juridictions financières, afin de supprimer la possibilité offerte à la Cour des comptes d'infliger aux comptables qui relèvent de l'apurement administratif des comptables supérieurs du Trésor une amende pour retard dans les réponses apportées aux injonctions prononcées sur leurs comptes.
Rappelons que l'article L. 131-5 du code des juridictions financières confie à un décret le soin d'organiser un apurement administratif, par les comptables supérieurs du Trésor, de certains comptes relevant en principe de la compétence de la Cour des comptes.
Il s'agit des comptes, qui n'excédent pas un certain montant et dont les comptable supérieurs du Trésor ne sont pas eux mêmes les comptables publics :
- des collectivités et établissements publics relevant de leur circonscription financière dans les collectivités d'outre-mer 36 ( * ) ;
- et, surtout, des établissements et organismes culturels et d'enseignement à l'étranger 37 ( * ) .
La Cour des comptes reste toutefois compétente pour juger les gestions de fait afférentes à ces comptes.
Aux termes de l'article D. 131-32 du code des juridictions financières, les comptables supérieurs du Trésor 38 ( * ) peuvent enjoindre aux comptables dont ils apurent les comptes de produire, dans le délai d'un mois, les pièces justificatives qui feraient défaut. Ils prennent sur les comptes qui leur sont soumis des décisions administratives établissant que les comptables sont quittes ou en débet.
Dans le premier cas, leurs arrêtés emportent la décharge définitive du comptable, sous réserve des recours éventuels et des droits d'évocation 39 ( * ) et de réformation de la Cour des comptes.
Dans le second cas, leurs arrêtés fixent le montant du débet à titre conservatoire. La comptabilité et tous documents nécessaires sont transmis à la Cour, qui statue à titre définitif. Compte tenu des conséquences de cette décision, la Cour est ainsi seule compétente pour se prononcer à titre définitif sur la mise en débet du comptable.
A l'instar des comptables dont les comptes sont directement jugés par la Cour des comptes, les comptables dont les comptes sont arrêtés par les comptables supérieurs du Trésor peuvent actuellement être condamnés à l'amende en cas de retard :
- soit dans la production de leurs comptes dans les délais prescrits par voie réglementaire,
- soit dans les réponses apportées aux injonctions prononcées sur leurs comptes dans le délai imparti par le comptable supérieur du Trésor.
Au même titre que les débets, il n'appartient pas aux comptables supérieurs du Trésor mais à une juridiction de les prononcer.
En conséquence, l'article L. 131-8 du code des juridictions financières fait obligation au trésorier-payeur général de saisir la Cour des comptes à cet effet. Le montant maximal de ces amendes est le même que celui des amendes susceptibles d'être infligées aux comptables dont les comptes sont directement jugés par la Cour des comptes.
S'il ne remet pas en cause la procédure d'apurement administratif de certains comptes, le projet de loi supprime néanmoins la possibilité offerte au trésorier-payeur général de saisir la Cour des comptes afin qu'elle inflige une amende au comptable qui a répondu avec retard aux injonctions prononcées sur ses comptes .
Quand bien même les procédures seraient différentes, l' équité commande en effet que les comptables relevant de l'apurement administratif ne puissent pas être condamnés à une amende supprimée pour les comptables relevant directement de la juridiction de la Cour des comptes.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 6 sans modification .
Article 7 (art. L. 131-10 du code des juridictions financières) - Suppression de la possibilité reconnue au juge des comptes d'infliger une amende pour retard dans la production des comptes aux héritiers d'un comptable décédé
Cet article a pour objet, d'une part, de supprimer la possibilité actuellement reconnue aux juridictions financières d'infliger une amende pour retard dans la production des comptes aux héritiers du comptable décédé, d'autre part, de procéder à des coordinations.
Le premier alinéa de l'article L. 131-10 du code des juridictions financières dispose que les amendes pour retard du comptable dans la production de ses comptes ou dans les réponses aux injonctions qui lui ont été adressées sont applicables : à ses héritiers, en cas de décès, ou au commis d'office 40 ( * ) , en cas de défaillance.
Les modifications proposées par le 1° consistent, d'une part, à supprimer toute possibilité de condamnation à l'amende des héritiers du comptable décédé , d'autre part, à ne prévoir la condamnation à l'amende du commis d'office qu'en cas de retard dans la production des comptes, par coordination avec la suppression des arrêts et jugements provisoires des juridictions financières prévues aux articles 11 et 21 du projet de loi.
Votre commission vous propose d'aller plus loin et vous soumet un amendement ayant pour objet de supprimer l'obligation faite aux héritiers d'un comptable décédé en poste de produire les comptes à sa place .
Cette obligation paraît en effet désuète eu égard au fait que l'emploi occupé par un comptable public, fonctionnaire recruté par concours, est pourvu par un autre comptable public dans des délais plus ou moins brefs en cas de mutation ou de décès.
Elle fait en outre peser sur les héritiers d'un comptable décédé des obligations auxquelles ils pourraient difficilement faire face et qu'il ne leur est en pratique généralement pas demandé d'assumer.
L'article 3 du décret n° 79-124 du 5 février 1979 prévoit ainsi que le compte de gestion du défunt, s'il doit en principe être signé par les héritiers, est établi par un comptable public.
Un amendement de coordination à l'article 29 bis précisera qu'en cas de décès du comptable avant le jugement de ses comptes, sa responsabilité personnelle et pécuniaire ne peut être mise en jeu qu'à hauteur du montant des garanties qu'il était tenu de constituer et, le cas échéant, des sommes pour lesquelles il était assuré.
Conformément à la jurisprudence de la Cour des comptes 41 ( * ) , les héritiers d'un comptable ayant été condamné à l'amende avant son décès ne seraient pas tenus de payer cette amende si le décès survenait en cours d'instance mais le resteraient en cas de décision juridictionnelle définitive , l'amende faisant en effet partie du patrimoine successoral. L'article 133-1 du code pénal le prévoit spécifiquement pour les amendes infligées par le juge pénal.
Le second alinéa de l'article L. 131-10 du code des juridictions financières dispose que l'amende infligée au commis d'office, est calculée à partir de l'expiration du délai imparti par la mise en demeure du procureur général près la Cour des comptes.
Les modifications proposées par le 2° de l'article 7 du projet de loi consistent à renvoyer à un décret en Conseil d'État le soin de fixer le délai dans lequel le commis d'office doit produire ses comptes et à confier au ministère public, plutôt qu'au procureur général près la Cour des comptes en personne, le soin de le mettre en demeure de s'acquitter de cette obligation en cas de retard.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 7 ainsi modifié .
Article 8 (art. L. 131-11 du code des juridictions financières) - Modification du régime des amendes pour gestion de fait
Cet article a pour objet, d'une part, d'étendre les hypothèses dans lesquelles une amende pour gestion de fait peut être infligée, d'autre part, de permettre à la Cour des comptes de tenir compte du comportement du comptable de fait dans la fixation du montant de cette amende.
1. L'extension des hypothèses dans lesquelles une amende pour gestion de fait peut être infligée
Le premier alinéa de l'article L. 131-11 du code des juridictions financières permet à la Cour des comptes de condamner à l'amende les comptables de fait, en raison de leur immixtion dans les fonctions de comptable public, sauf s'ils ont fait l'objet des poursuites prévues à l'article 433-12 du code pénal, qui punit de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende le fait, par toute personne agissant sans titre, de s'immiscer dans l'exercice d'une fonction publique en accomplissant l'un des actes réservés au titulaire de cette fonction.
La modification proposée par le 1° de l'article 8 du projet de loi consiste à prévoir que les poursuites engagées sur le fondement de l'article 433-12 du code pénal ne privent la Cour des comptes de la possibilité d'infliger une amende pour gestion de fait que si elles concernent « les mêmes opérations » que celles ayant entraîné la déclaration de gestion de fait . Le juge des comptes pourrait ainsi, à l'avenir, condamner à l'amende un gestionnaire de fait faisant l'objet de poursuites pénales pour une autre affaire de gestion de fait ou pour immixtion illégale dans l'exercice d'une autre fonction publique que celle de comptable publique.
Selon la jurisprudence du Conseil d'État, le juge des comptes doit être regardé comme décidant du bien-fondé d'accusations pénales au sens de l'article 6, §1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales lorsqu'il inflige une amende pour gestion de fait 42 ( * ) .
Consacrant le principe non bis in idem , l'article 4 du protocole n° 7 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ratifiée par la France le 17 février 1986, stipule que « Nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du même État en raison d'une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de cet État ». Toutefois, la France a déposé une réserve précisant que « seules les infractions relevant en droit français de la compétence des tribunaux statuant en matière pénale doivent être regardées comme des infractions au sens des articles 2 à 4 du présent protocole ».
Dès lors, selon la jurisprudence du Conseil d'État et comme le prévoit la loi française, le cumul d'une amende pour gestion de fait avec une sanction pénale « n'est exclu que lorsque les poursuites pénales ont été engagées sur le fondement de l'article 433-12 du code pénal 43 ( * ) ».
Le principe non bis in idem , n'est pas violé car, selon la Cour des comptes, « l'amende pour gestion de fait n'est pas en elle-même une sanction pénale » mais « l'alternative de l'amende correctionnelle pour usurpation de fonctions publiques portée par le code pénal 44 ( * ) ».
La Cour européenne des droits de l'homme considère quant à elle que l'article 4 du protocole n° 7 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales « ne s'oppose pas à ce que des juridictions distinctes connaissent d'infractions différentes, fussent-elles les éléments d'un même fait pénal 45 ( * ) ».
Rappelons que la condamnation à l'amende pour gestion de fait constitue une simple faculté ouverte à la juridiction financière après qu'elle a prononcé la gestion de fait, fixé la ligne de compte de cette gestion et mis le comptable en débet.
Les condamnations à l'amende sont rares, comme en atteste le tableau ci-après. Il est à noter que les statistiques établies par la Cour des comptes ne distinguent pas les amendes pour gestion de fait proprement dites des amendes infligées au comptable de fait pour retard dans la production de ses comptes ou dans les réponses apportées aux injonctions qui lui ont été adressées.
Arrêts ou jugements prononcés en matière de gestion de fait
Arrêts ou jugements prononcés en matière de gestion de fait |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
|
Cour des comptes |
débet |
22 |
14 |
10 |
14 |
14 |
amende |
2 |
2 |
3 |
1 |
0 |
|
CRTC |
débet |
1 |
5 |
0 |
0 |
4 |
amende |
8 |
10 |
2 |
3 |
15 |
|
source : rapport de la Cour des comptes de 2008. |
A la différence des amendes pour retard, les amendes pour gestion de fait peuvent atteindre des montants élevés, le plafond fixé par le second alinéa de l'article L. 131-11 du code des juridictions financières étant le « le total des sommes indûment détenues ou maniées ». Il est vrai qu'elles ne sanctionnent pas les mêmes fautes.
Si la Cour des comptes a parfois infligé des amendes symboliques, en revanche elle a par exemple condamné MM. Nucci et Chalier en 1996 à s'acquitter respectivement de 600.000 francs et 500.000 francs 46 ( * ) et confirmé l'amende de 5 millions de francs qui avait été infligée par la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d'Azur à Jacques Médecin 47 ( * ) .
2. L'extension des prérogatives de la Cour des comptes dans la fixation du montant de l'amende pour gestion de fait
Le second alinéa de l'article L. 131-11 du code des juridictions financières prévoit également que l'amende pour gestion de fait est calculée suivant l'importance et la durée de la détention ou du maniement des deniers.
Dans la pratique, les juridictions financières prennent en considération d'autres critères au motif qu'elles ne sont pas tenues de condamner le comptable de fait à l'amende.
Comme le souligne M. Eric Ciotti, rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale : « la jurisprudence de la Cour des comptes prend toujours en considération l'attitude personnelle du comptable, sa promptitude à coopérer avec le juge des comptes, la destination des fonds maniés (profit personnel ou non), les autres sanctions, la situation personnelle et patrimoniale du comptable de fait... En effet, l'existence d'une gestion de fait ne signifie pas forcément malhonnêteté de son auteur, lequel a pu agir en prenant en compte l'intérêt de la collectivité. Avant de prononcer une amende, le juge des comptes tient donc compte de l'ensemble des éléments qui caractérisent une gestion de fait . »
Le 2° de l'article 8 du projet de loi, qui a fait l'objet d'un amendement rédactionnel à l'Assemblée nationale, réécrit donc ces dispositions pour permettre au juge de tenir compte non seulement de l'importance et de la durée de la détention ou du maniement des deniers mais aussi du comportement du comptable de fait et , du fait de l'ajout de l'adverbe « notamment », de toute autre considération .
Votre commission vous soumet un amendement ayant pour objet de préciser les critères dont les juridictions financières doivent tenir compte pour infliger une amende pour gestion de fait , en supprimant cet adverbe, qui est le plus souvent source d'insécurité juridique, et en ajoutant deux autres critères : les circonstances dans lesquelles l'immixtion dans les fonctions de comptable public s'est produite , d'une part, la situation du comptable de fait , d'autre part. Le terme de situation vise par exemple la situation matérielle de l'intéressé.
En conséquence de cette consécration des prérogatives du juge des comptes, l'article 9 du projet de loi retire au ministre chargé du budget son pouvoir d'accorder la remise gracieuse des amendes infligées aux comptables de fait.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 8 ainsi modifié .
Article 9 (art. L. 131-12 du code des juridictions financières) - Suppression du pouvoir de remise gracieuse du ministre chargé du budget en matière d'amendes
Cet article supprime le pouvoir de remise gracieuse reconnu au ministre chargé du budget pour les amendes infligées aux comptables, mais non pour les débets prononcés à leur encontre.
1. Le droit en vigueur
• L'obligation faite au comptable public de constituer des garanties pour assumer sa responsabilité pécuniaire
Pour permettre aux comptables publics d'assumer leur responsabilité personnelle et pécuniaire, le paragraphe II de l'article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 de finances pour 1963 leur fait obligation de « constituer des garanties ».
En vertu d'un décret n° 64-685 du 2 juillet 1964 relatif à la constitution et à la libération du cautionnement exigé des comptables publics, ils sont ainsi astreints à constituer un cautionnement , à hauteur d'un montant fixé par arrêté ministériel 48 ( * ) .
Ce cautionnement peut être réel (dépôt de numéraire, de rentes sur l'État ou d'autres valeurs du Trésor) ou personnel (engagement d'une caution solidaire constituée par l'affiliation du comptable à une association de cautionnement mutuel agréée par le ministre de l'économie et des finances). Il est exigé jusqu'à ce que le comptable obtienne un certificat de libération délivré, selon les comptables, par son ministre de tutelle, par le directeur général des finances publiques, ou par le trésorier-payeur général.
Les collectivités publiques disposent de surcroît de deux sûretés . Le privilège du Trésor, privilège mobilier, porte sur la généralité des meubles du comptable public mais passe après les privilèges spéciaux mentionnés dans le code civil. L'hypothèque légale porte sur l'ensemble des immeubles possédés par le comptable lors de son entrée en fonction ou acquis par lui depuis, ainsi que sur tous les immeubles acquis par son conjoint moyennant paiement, sauf justification de l'origine des fonds qui ont servi au paiement. Cette hypothèque n'est pas inscrite d'office mais seulement quand la responsabilité pécuniaire et personnelle du comptable apparaît engagée et pour le montant du débet présumé. A cet effet, il est tenu un inventaire permanent des biens immobiliers des comptables en fonction.
Dans la mesure où le montant du cautionnement exigé des comptables publics n'est pas à la hauteur de la responsabilité pécuniaire qu'ils encourent, la plupart souscrivent en outre une assurance personnelle et facultative .
• Les possibilités de décharge de responsabilité pour cause de force majeure et de remise gracieuse, par le ministre chargé du budget, des débets et des amendes des comptables publics
Le paragraphe V de l'article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 prévoit un régime de décharge de la responsabilité pécuniaire et personnelle des comptables publics en cas de force majeure , c'est-à-dire de circonstances extérieures à la personne du comptable, imprévisibles et irrésistibles.
Avant le 1 er juillet 2007, les circonstances constitutives de la force majeure ne pouvaient être appréciées que par le ministre de l'économie et des finances . Depuis lors, et en vertu de l'article 146 de la loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 de finances rectificative pour 2006, cette compétence est également reconnue au ministre dont le comptable relève 49 ( * ) ainsi qu'au juge des comptes . La procédure a également été simplifiée : dorénavant, le constat de l'existence de circonstances constitutives de la force majeure emporte l'absence de mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable.
Les déficits que ce constat entraîne doivent en principe être supportés par le budget de l'organisme intéressé, exceptionnellement par l'État -celui-ci pouvant bien entendu être par ailleurs l'organisme intéressé.
Dans la plupart des cas, le ministre sera saisi par le comptable avant même que le juge des comptes n'examine ses comptes. Toutefois, dans l'hypothèse où la force majeure aura été invoquée en premier lieu devant la juridiction financière, le ministre sera lié par l'appréciation de cette dernière.
Selon les renseignements communiqués à votre rapporteur, les comptables se voient accorder des décharges de responsabilité dans des cas très limités : fausse monnaie non détectable, vol à main armée (trésoreries) ou avec effraction (régies), fausse facture non détectable au moment du paiement, perte de chèques par la Poste ou la Banque de France, paiement de chèques sur le Trésor (par exemple la prime pour l'emploi) soit sur fausse pièce d'identité soit sur chèque falsifié. Sur les cinq dernières années, le montant global des décharges accordées est d'environ deux millions d'euros pour plus de 1.200 dossiers traités . Le montant moyen est de 1.662 euros .
En l'absence de décharge pour cause de circonstances constitutives de la force majeure, et quand bien même celle-ci n'aurait pas été demandée ou aurait été refusée, le paragraphe IX de l'article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 précitée prévoit que, dans des conditions prévues par décret, « les comptables publics dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu peuvent obtenir la remise gracieuse des sommes laissées à leur charge ».
Ce pouvoir de remise gracieuse a deux explications principales .
En premier lieu, la plupart des débets prononcés à l'encontre des comptables publics n'entraînent aucun préjudice pour les finances publiques : une irrégularité a été commise dans le paiement de la dépense mais cette dépense était justifiée. Tel est le cas, par exemple, lorsque le comptable paie une dépense au mépris des règles de forme (absence de visa du contrôleur financier par exemple) alors même que cette dépense a trouvé une contrepartie sous forme de services rendus, de fournitures livrées ou de travaux exécutés. Si le comptable devait effectivement reverser les sommes irrégulièrement payées, il y aurait enrichissement sans cause de la collectivité publique. M. Eric Ciotti, rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, a indiqué en séance publique que, sur les 42 millions d'euros de débet constatés en 2006, 35 millions d'euros n'emportaient aucun préjudice financier pour les collectivités publiques.
En second lieu, la remise gracieuse permet de tenir compte des circonstances ayant conduit à la mise en débet du comptable, dont ni le cautionnement ni l'assurance personnelle ne suffisent parfois à couvrir le montant du débet, alors que celle-ci revêt un caractère automatique.
Actuellement, la remise gracieuse est accordée par le ministre chargé du budget , après avis du supérieur hiérarchique et, le cas échéant, de l'organisme public et du ministre intéressé. Dans le cas où la somme allouée en remise est supportée par un organisme public autre que l'État, le ministre est lié par l'avis de l'organisme intéressé. Jusqu'à l'entrée en vigueur du décret n° 2008-228 du 5 mars 2008 relatif à la constatation et à l'apurement des débets des comptables publics et assimilés, tout projet de remise gracieuse dont le montant excédait une limite fixée par arrêté du ministre chargé du budget 50 ( * ) devait être soumise à l'avis préalable du Conseil d'État. Depuis lors, le ministre doit solliciter l'avis de la Cour des comptes. S'il décide de ne pas suivre cet avis, il doit motiver sa décision et en informer la Cour.
Enfin, le second alinéa de l'article L. 132-12 du code des juridictions financières dispose que les amendes infligées aux comptables sont assimilées aux débets « en ce qui concerne les modes de recouvrement, de poursuites et de remises ».
• Le pouvoir controversé du ministre chargé du budget d'accorder une remise gracieuse des débets et amendes infligés aux comptables de fait
Au vu de ces dispositions, on pourrait considérer que les comptables de fait, qui ne sont généralement pas assurés, peuvent obtenir la remise gracieuse des amendes qui leur sont infligées, à l'instar des comptables publics, mais ne peuvent solliciter ni une remise gracieuse ni une décharge de responsabilité pour cause de circonstances constitutives de force majeure des débets prononcés à leur encontre.
En effet, le IX de l'article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 fait référence aux « comptables publics », ce qui devrait exclure les gestionnaires de fait, tandis que l'article L. 132-12 du code des juridictions financières fait référence aux « comptables », ce qui inclut incontestablement les gestionnaires de fait.
Telle est d'ailleurs la position de la Cour des comptes, aux yeux de laquelle les dispositions du XI de l'article 60 de la loi du 23 février 1963 précitée, selon lesquelles « les gestions irrégulières entraînent, pour leurs auteurs, déclarés comptables de fait par la Cour des comptes, les mêmes obligations et responsabilités que les gestions patentes pour les comptables publics », n'impliquent pas le droit de présenter une demande de remise gracieuse et encore moins celui d'être exaucé.
Telle n'est pas l'interprétation retenue par le ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, fort heureusement pour les gestionnaires de fait, comme en témoigne la réponse à une question écrite de M. Patrick Labaune, député 51 ( * ) :
« Les chambres régionales des comptes ne prononcent que très peu de débets à l'issue des procédures de déclaration de gestion de fait. Ainsi, de l'année 2000 jusqu'en 2004, quelle que soit la qualité du gestionnaire déclaré de fait (élu, fonctionnaire, ou autre), dix-neuf jugements ont prononcé des débets consécutifs à une gestion de fait. En 2005 et 2006, aucun jugement n'a prononcé de débets à l'encontre de gestionnaires de fait (chiffres issus du rapport d'activité 2006 de la Cour des comptes) .
« Parallèlement, le service compétent du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique a instruit, sur cette même période, dix demandes de remise gracieuse déposées par des élus locaux, déclarés comptables de fait et constitués débiteurs envers leur collectivité. Il est précisé que les décisions de remises gracieuses concernant des élus sont systématiquement précédées d'une saisine pour avis de l'organe délibérant de la collectivité territoriale concernée avant d'être établies par le ministre. Les collectivités ont donné un avis favorable dans tous les cas, et les débets ont donné lieu à remise gracieuse. »
• Un pouvoir de remise gracieuse très largement utilisé
Le tableau ci-après retrace l'utilisation du pouvoir de remise gracieuse du ministre chargé du budget en matière de débets et d'amende.
Année |
Nombre de débets |
Montant en euros |
Sommes laissées à charge en euros |
2006 |
|||
- débets |
262 |
42 335 444 |
1 866 281 (1) |
- amendes |
15 |
14 803 |
4 630 |
2007 |
|||
- débets |
255 |
15 359 873 |
280 387 |
- amendes |
5 |
26 771 |
4 171 |
Source : direction générale des finances publiques (1) dont trois dossiers portaient sur un total de plus de 300.000 euros. |
Selon les indications communiquées à votre rapporteur, sur les 42 millions d'euros afférents aux dossiers traités pour l'année 2006, près de 30 millions concernaient 4 dossiers de demande en remise gracieuse relatifs à deux établissements publics nationaux (Aéroports de Paris et CNASEA 52 ( * ) ). Les conseils d'administration de ces deux établissements avaient donné un avis favorable à l'octroi d'une remise gracieuse à leurs agents comptables.
De même, en 2007, sur les 15 millions d'euros de demandes en remise gracieuse traitées, plus de 5 millions concernaient le paiement de gardes et astreintes dans des établissements hospitaliers. Pour ces dossiers, les conseils d'administration ont aussi donné un avis favorable aux remises gracieuses.
En 2006, après avoir soustrait les quatre plus gros dossiers représentant près de 30 millions d'euros et un dossier de gestion de fait de 1,5 million d'euros, le montant global des débets juridictionnels était de 11,2 millions d'euros pour 259 dossiers, dont 5 supérieurs à 500.000 euros, soit une moyenne par dossier traité de 43.000 euros. En 2007, le montant global était de 15,01 millions d'euros pour 206 dossiers, dont 5 supérieurs à 500.000 euros, soit une moyenne de 58.000 euros.
Selon les indications communiquées à votre rapporteur, la part des débets prononcés par le juge des comptes n'ayant pas d'impact en termes de trésorerie représente plus de 80 % du montant total. Ils correspondent notamment à des paiements sur pièces justificatives jugées insuffisantes (en témoigne l'exemple des hôpitaux avec le paiement des gardes et astreintes), ou encore en dépassement de seuil des marchés. Ces remises se traduisent par une opération d'ordre et sont toujours prononcées sur avis conforme de la collectivité bénéficiant du jugement.
2. Des dispositions controversées
• Un héritage ancien
Considéré comme une survivance de la justice retenue et de la théorie du ministre juge, le pouvoir de remise gracieuse reconnu au ministre chargé des comptes publics est décrié.
Cette survivance d'une époque où l'administration se jugeait elle-même a été définitivement abandonnée par le Conseil d'État en matière de justice administrative, après qu'une loi du 24 mai 1872 lui eut octroyé un pouvoir de justice « déléguée », dans une décision « Cadot » du 13 décembre 1889.
Elle persiste encore devant les juridictions financières au motif que, selon un vieil adage qui s'est forgé au XIX e siècle, « le juge des comptes juge les comptes, et non les comptables ». Cet adage a été repris, sous une forme atténuée, à l'article L. 111-1 du code des juridictions financières, aux termes duquel « La Cour des comptes juge les comptes des comptables publics ».
En vertu de cet adage et bien qu'aucun texte ne le prévoie formellement, le Conseil d'État a nettement précisé que la Cour des comptes ne peut légalement fonder les décisions qu'elle rend dans l'exercice de sa fonction juridictionnelle que sur les éléments matériels des comptes soumis à son contrôle, à l'exclusion de toute appréciation du comportement personnel des comptables intéressés ; à défaut, elle serait conduite à méconnaître les compétences dévolues par décret au ministre des comptes publics 53 ( * ) .
Cette analyse est aujourd'hui contestée au motif qu'elle saperait l'autorité du juge et ne correspondrait plus à la réalité de ses pouvoirs.
• Une remise en cause de l'autorité du juge ?
Dans un article paru en 2007 dans la Revue française de droit administratif, MM. Michel Lascombe et Xavier Vandendriessche, professeurs respectivement à l'Institut d'études politiques de Lille et à l'université de Lille 2, écrivent ainsi 54 ( * ) : « Qu'est-ce qu'un juge dont les décisions ne sont pas exécutées ? Sans polémique de notre part, c'est simplement un juge qui se décourage. Et on le voit bien, l'activité juridictionnelle des juridictions financières (le contrôle de la régularité) décroît progressivement au profit du contrôle de gestion et des autres activités (rédaction de rapports, certification des comptes). Pourquoi se lancer dans une mise en débet lorsqu'on sait qu'elle n'aboutira tout au plus qu'à montrer du doigt un comptable qui, dans bien des cas, n'y peut mais ? ... Nous persistons à penser que c'est au juge, et au juge seul, d'apprécier si le comportement du comptable et sa faute éventuelle doivent le conduire à lui faire supporter l'intégralité du débet ou si les circonstances de fait peuvent venir en atténuer le montant ».
Le pouvoir de remise gracieuse dévolu au ministre chargé du budget ne leur paraît guère compatible avec l'article 6, §1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui s'applique à la procédure de jugement des comptes des comptables patents comme des comptables de fait. Comment la Cour de Strasbourg pourrait-elle admettre que les comptes soient jugés par une juridiction et les comptables par un ministre ?
Dans ses conclusions sur un arrêt du Conseil d'État du 10 janvier 2007, « commune d'Estevelles », M. Mattias Guyomar, commissaire du Gouvernement, convient qu'« il est certain que le caractère purement objectif du contrôle des comptes doit être nécessairement combiné avec la reconnaissance que la procédure devant le juge des comptes est regardée comme portant sur la contestation d'une « obligation de caractère civil » au sens de la convention européenne ». Il ajoute cependant que « nous n'y décelons pas la condamnation de la ligne selon laquelle la juridiction financière juge les comptes et non les comptables. Et nous ne croyons pas davantage qu'à terme la jurisprudence de la Cour de Strasbourg implique que la totalité des questions en cause -régularité du compte et comportement du comptable- soit examinée par le seul et même juge . » Observant que la compétence du ministre s'exerce sous le contrôle du juge administratif de droit commun, il estime que « le partage des compétences entre le juge des comptes et le ministre des finances ne recèle, selon nous, par lui-même aucune méconnaissance des règles du procès équitable 55 ( * ) . »
Selon MM. Michel Lascombe et Xavier Vandendriessche, le pouvoir de remise gracieuse dévolu au ministre au ministre des comptes n'est pas non plus conforme aux principes d'une bonne administration : « On présente généralement cette intervention du ministre dans la procédure comptable comme étant une garantie donnée aux comptables contre les excès (supposés) du juge des comptes. Le ministre, connaissant mieux les questions comptables que le juge, serait plus enclin à comprendre les difficultés qui assaillent ses subordonnés et donc à les excuser, plutôt qu'un juge, nécessairement plus éloigné de la réalité du terrain pour ne vivre que dans le monde ésotérique de la perfection juridique absolue (...) Admettons. Mais alors, pourquoi les comptables prennent-ils autant de soin à présenter devant le juge des comptes ces arguments dont ils savent qu'ils ne peuvent pas être retenus (jurisprudence Nicolle) et que le juge est incapable de les apprécier à leur juste valeur ? (...) On le comprend dès lors, considérée du côté du ministre, la perte de ce moyen d'action sur les décisions rendues par le juge est avant tout la perte d'un extraordinaire moyen de pression sur les fonctionnaires qui dépendent de lui. C'est par la carotte que constitue la remise gracieuse ou le bâton que constitue son refus que le ministre réalise, dans son ministère, la gestion des ressources humaines . »
Enfin, toujours selon les auteurs précités, le pouvoir de remise gracieuse du ministre entraîne une opacité réelle de la responsabilité des gestionnaires publics : « les responsabilités sanctionnées ne sont pas les responsabilités réelles mais simplement les responsabilités apparentes. Aux dires même des comptables, toute constitution en débet est vécue par eux comme une atteinte à leur honneur. Dès lors, pourquoi vouloir à tout prix maintenir un système qui les condamne aux débets sans qu'ils puissent se justifier ? Par l'application de la jurisprudence « Nicolle », le comptable (...) a été constitué en débet. La décision du juge est publiée, commentée, diffusée. Ensuite, le comptable obtient la remise mais nul ne le sait. Et surtout, les raisons pour lesquelles il l'obtient sont inconnues. N'est-il pas encore plus dommageable d'avoir ainsi l'opprobre d'un débet sans que la réhabilitation de la remise soit connue ? C'est encore plus vrai lorsque le comptable (...) n'a, dans le manquement dont il est constitué responsable, absolument aucune part . »
• Une méconnaissance des pouvoirs du juge des comptes
A ces arguments qui militent en faveur de la suppression du pouvoir de remise du gracieuse du ministre chargé du budget ou, à tout le moins, à son encadrement par le juge, s'ajoute le constat que les juridictions financières ne jugent plus seulement les comptes.
Ce constat est particulièrement vrai en matière d'amendes puisque, comme votre rapporteur l'a indiqué dans son commentaire de l'article 8 du projet de loi, la jurisprudence de la Cour des comptes prend toujours en considération l'attitude personnelle du comptable.
Il vaut également de plus en plus en matière de débets. Comme l'a reconnu le Conseil d'État 56 ( * ) , il appartient en effet au juge des comptes de se prononcer sur le point de savoir si, en matière de recouvrement de créances, un comptable public a exercé dans les délais appropriés toutes les diligences requises. Dans ses conclusions sur cette affaire, M. Alain Seban, commissaire du gouvernement, estimait que « les diligences sont bien, si l'on veut, des éléments du comportement du comptable, mais ce sont des éléments matériels... » Ensuite, et comme votre rapporteur l'a déjà rappelé, la loi de finances rectificative pour 2006 a permis au juge des comptes de décharger un comptable public de sa responsabilité en cas de circonstances constitutives de force majeure. Force est donc de constater que la mission du juge des comptes ne se borne plus comme l'indiquait M. Mattias Guyomar dans ses conclusions précitées à « vérifier la sincérité du compte ».
Ce dernier convenait d'ailleurs « du caractère quelque peu artificiel de la répartition des compétences » entre le juge des comptes et le ministre chargé du budget et « de l'excessive rigueur des conséquences que cela peut entraîner pour les comptables ».
3. Les dispositions du projet de loi
L'article 8 du projet de loi consacre le pouvoir que le juge des comptes s'est reconnu pour apprécier le comportement du comptable lorsqu'il lui inflige une amende, tant cette dernière revêt par essence un caractère personnel.
En conséquence, l'article 9 modifie le second alinéa de l'article L. 131-12 du code des juridictions financières pour supprimer la mention selon laquelle les amendes prononcées par le juge des comptes sont assimilées aux débets des comptables publics en ce qui concerne les modes de remise.
Dès lors, elles ne pourraient plus bénéficier des dispositions du décret n° 2008-228 du 5 mars 2008 qui précisent les modalités d'exercice du pouvoir de remise gracieuse reconnu au ministre chargé du budget à l'égard des débets prononcés à l'encontre des comptables.
Ce pouvoir de remise gracieuse en matière de débets serait maintenu au motif, invoqué par le parquet général de la Cour des comptes puis par le commissaire du Gouvernement du Conseil d'État dans l'affaire commune d'Estevelles, qu'« il apparaît peu opportun de toucher un aspect particulier, fût-il par certains aspects critiquables, d'un édifice jurisprudentiel fruit de deux siècles d'histoire des finances publiques et de la comptabilité publique sans repenser l'équilibre d'ensemble de l'organisation institutionnelle et du régime juridique de la responsabilité des comptables publics et des ordonnateurs . »
Lors de son audition par votre rapporteur, Mme Isabelle Gravière-Troadec, secrétaire générale adjointe de la Cour des comptes, a ainsi indiqué que la question de la suppression de ce pouvoir de remise gracieuse et celle, corrélative, de la compétence des juridictions financières pour juger les comptables et pas seulement leurs comptes seraient traitées dans le projet de réforme de la responsabilité des gestionnaires publics annoncé par le Président de la République et le Premier président de la Cour des comptes, sur lequel une concertation vient de s'engager.
En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel.
Elle a rejeté un amendement présenté par M. René Dosière et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche tendant à insérer un article additionnel après l'article 9 afin de supprimer le IX de l'article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963, c'est-à-dire la possibilité d'une remise gracieuse des débets prononcés à l'encontre des comptables publics.
Jugeant excessif le taux des remises gracieuses consenties en matière de débet et soulignant la nécessité de poursuivre la réflexion sur ce sujet, M. Eric Ciotti, rapporteur de la commission des lois, a estimé que la réforme globale annoncée, même s'il fallait s'attendre à ce qu'elle intervienne dans quelques mois plutôt que dans quelques semaines, serait l'occasion de se saisir du problème en toute transparence.
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, a ajouté que le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ferait des annonces à l'occasion de la loi de règlement, en juin.
M. Charles de Courson a pour sa part regretté que les mises en débet des comptables puissent toujours faire l'objet de remises gracieuses sans encadrement par la loi.
4. La position de votre commission des lois
Votre rapporteur s'interroge sur la conformité à l'article 6, §1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du pouvoir de remise gracieuse reconnu au ministre chargé du budget en matière de débets.
Il considère toutefois que la suppression de ce pouvoir implique de revoir les conditions dans lesquelles la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables peut être engagée. Elle devrait en effet avoir pour corollaire, à tout le moins, l'octroi aux juridictions financières du pouvoir de fixer le montant des sommes devant être laissées à la charge du comptable en tenant compte des circonstances dans lesquelles le débet est apparu, de ses conséquences pour les finances publiques et du comportement de l'intéressé.
Telles sont les raisons pour lesquelles la question des remises gracieuses des débets trouverait davantage sa place dans le cadre de la réforme en cours de préparation sur la responsabilité des gestionnaires publics.
Sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous soumet deux amendements de précision et vous propose d'adopter l'article 9 ainsi modifié .
Article 10 (chapitre Ier nouveau du titre IV du livre Ier de la première partie du code des juridictions financières) - Réorganisation des dispositions du code des juridictions financières communes aux activités juridictionnelles et administratives de la Cour des comptes
Cet article a pour objet de clarifier l'organisation interne du début du titre IV (« Procédure ») du livre I er (« La Cour des comptes ») de la première partie du code des juridictions financières, consacré à la procédure applicable devant la Cour des comptes, en regroupant dans un nouveau chapitre I er l'ensemble des dispositions communes aux activités juridictionnelles et administratives de la Cour des comptes.
Les dispositions spécifiquement consacrées à ses activités juridictionnelles figureraient, en application de l'article 11 du projet de loi, dans un second chapitre du même titre.
L'article L. 140-7 du code des juridictions financières serait abrogé (article 29 du projet de loi). Les dispositions de son premier alinéa seraient reprises à l'article L. 131-1 du code des juridictions financières (article 2 du projet de loi). Celles des autres alinéas seraient, soit reprises à l'article L. 142-1 du code des juridictions financières, soit supprimées dans la mesure où elles s'avèrent contraires à la nouvelle procédure de jugement des comptes (article 11 du projet de loi).
Le tableau ci-après rend compte de la renumérotation des articles opérée par le projet de loi en précisant leur objet.
Structure du nouveau chapitre 1
er
du titre
IV du livre 1
er
du code des juridictions
financières
Article actuel |
Objet |
Article nouveau |
Art. L. 140-1 |
Droit de la Cour des comptes de se faire communiquer tous documents, de quelque nature que ce soit, relatifs à la gestion des services et organismes soumis à son contrôle Sanctions pénales applicables en cas d'entrave à l'exercice des pouvoirs attribués aux magistrats, conseillers maîtres en service extraordinaire et rapporteurs de la Cour des comptes |
Art. L. 141-1 |
Art. L. 140-1-1 |
Possibilité, pour le procureur de la République, de transmettre au procureur général près la Cour des comptes, d'office ou à la demande de ce dernier, la copie de toute pièce d'une procédure judiciaire relative à des faits de nature à constituer des irrégularités dans les comptes ou dans la gestion de l'État, des établissements publics ou des organismes relevant de la compétence de la Cour des comptes |
Art. L. 141-2 |
Art. L. 140-2 |
Droit des magistrats, conseillers maîtres en service extraordinaire et rapporteurs de la Cour des comptes de demander aux commissaires aux comptes tous renseignements sur les sociétés qu'ils contrôlent |
Art. L. 141-3 |
Art. L. 140-3 |
Possibilité donnée à la Cour des comptes de recourir, pour des enquêtes de caractère technique, à l'assistance d'experts désignés par son premier président |
Art. L. 141-4 |
Art. L. 140-4 |
Suppression du secret professionnel des agents des services financiers ainsi que des commissaires aux comptes des organismes contrôlés à l'égard des magistrats, conseillers maîtres en service extraordinaire et rapporteurs de la Cour des comptes, à l'occasion des enquêtes que ceux-ci effectuent dans le cadre de leurs attributions Possibilité donnée aux magistrats de la Cour des comptes, conseillers maîtres en service extraordinaire et rapporteurs, pour les besoins des mêmes enquêtes, d'exercer directement le droit de communication que les agents des services financiers tiennent de la loi |
Art. L. 141-5 |
Art. L. 140-4-1 |
Accès des magistrats, conseillers maîtres en service extraordinaire et rapporteurs de la Cour des comptes aux factures, livres et registres pouvant se rapporter aux opérations de délégation de service public contrôlée par la Cour |
Art. L. 141-6 |
Art. L. 140-5 |
Obligation, pour la Cour des comptes, de prendre toutes dispositions pour garantir le secret de ses investigations |
Art. L. 141-7 |
Art. L. 140-6 |
Soumission des conseillers maîtres en service extraordinaire et des rapporteurs à l'obligation du secret professionnel des magistrats |
Art. L. 141-8 |
Article actuel |
Objet |
Article nouveau |
Art. L. 140-7 |
Obligation faite aux comptables de produire leurs comptes à la Cour des comptes dans des délais fixés par voie réglementaire Caractère écrit et contradictoire de la procédure Arrêts successivement provisoires et définitifs de la Cour des comptes Obligation faite à la Cour des comptes, lorsqu'elle statue en matière de gestion de fait et d'amende, de délibérer hors la présence du rapporteur et de rendre un arrêt en audience publique |
Abrogé (article 29 du projet de loi) |
Art. L. 140-8 |
Obligation faite à certaines catégories de personnes dont l'audition est jugée nécessaire de répondre à la convocation de la Cour des comptes |
Art. L. 141-9 |
Art. L. 140-9 |
Absence d'application aux mesures d'instruction, rapports et diverses communications de la Cour des comptes du titre I er de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal |
Art. L. 141-10 |
Sur proposition de sa commission des lois et avec l'avis favorable du gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de précision et de coordination, afin d'actualiser les références aux articles du code des juridictions financières ainsi déplacés dans divers textes de loi.
Votre commission vous soumet un amendement tendant à corriger des erreurs de référence figurant actuellement aux articles L. 140-4-1 et L. 140-6 du code des juridictions financières et vous propose d'adopter l'article 10 ainsi modifié .
Article 11 (chapitre II nouveau du titre IV du livre Ier de la première partie du code des juridictions financières) - Procédure juridictionnelle applicable devant la Cour des comptes
Cet article réforme et unifie la procédure de jugement des comptes et de condamnation à l'amende des comptables publics et des comptables de fait par la Cour des comptes, afin de la mettre en conformité avec les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
A cette fin, il crée un nouveau chapitre II, intitulé « Dispositions relatives aux activités juridictionnelles », au sein du titre IV (« Procédure ») du livre I er (« La Cour des comptes ») de la première partie du code des juridictions financières. Ce chapitre serait composé d'un unique article numéroté L. 142-1, distinguant les phases d'instruction, de poursuite et de jugement (I, II et III) et renvoyant à un décret en Conseil d'État le soin de préciser ses modalités d'application (IV).
1. La dissociation des phases d'instruction et de poursuite
La phase d'instruction resterait inchangée .
Le premier paragraphe (I) du texte proposé pour insérer un article L. 142-1 dans le code des juridictions financières n'évoque d'ailleurs que son aboutissement et non son commencement.
Il prévoit la communication au représentant du ministère public près la Cour des comptes 57 ( * ) :
- des rapports d'examen des comptes à fin de jugement ;
- des rapports contenant des faits susceptibles de conduire à une condamnation à l'amende ;
- ainsi que des rapports contenant des faits présomptifs de gestion de fait.
Si la production annuelle des comptes des comptables publics et de leurs pièces justificatives déclenche la saisine de la Cour des comptes et le délai sexennal de la prescription extinctive de leur responsabilité pécuniaire et personnelle 58 ( * ) , leur vérification intervient dans le cadre de programmes définis par le Premier président de la Cour après avis du procureur général.
En pratique, les comptes d'un comptable public ne sont pas vérifiés chaque année mais suivant un rythme qui est généralement de trois ou quatre ans. Autant que faire se peut, la Cour des comptes essaie de coupler cette vérification des comptes du comptable avec l'examen de la gestion de l'ordonnateur.
L'instruction est confiée par une lettre de mission du Premier président à un magistrat du siège de la Cour, appelé « rapporteur », qui réalise un contrôle sur pièces et, le cas échéant, sur place. Ses pouvoirs d'investigation sont définis aux articles L. 140-1 et suivant du code des juridictions financières, qui deviendraient les articles L. 141-1 et suivants en application de l'article 10 du projet de loi. Des équipes de rapporteurs sont constituées lorsque l'importance de la tâche le justifie.
A l'issue de l'instruction, le rapporteur établit un rapport dans lequel il indique s'il a ou non relevé des irrégularités et formule des propositions en vue du jugement des comptes du comptable public. Il peut également préconiser une condamnation à l'amende si ce dernier a tardé à produire ses comptes. Enfin, s'il découvre des agissements qu'il estime constitutifs d'une gestion de fait, le magistrat peut proposer l'ouverture d'une instance en déclaration de gestion de fait.
Jusqu'à présent, le dépôt de ce rapport au greffe de la Cour entraînait la saisine de la formation de jugement. Destinataire du rapport, le ministère public était simplement chargé de rendre un avis, par voie de conclusions écrites, avant que celle-ci ne se prononce. S'il pouvait saisir la formation de jugement d'actes présumés constitutifs d'une gestion de fait, celle-ci pouvait donc également s'en saisir d'office.
Cette possibilité de saisine d'office pourrait être considérée comme attentatoire à l'impartialité du tribunal même si, d'une part, la Cour européenne des droits de l'homme ne s'est pas encore prononcée sur ce point, d'autre part, le Conseil d'État estime que l'acte par lequel le tribunal décide de se saisir de certains faits respecte le principe d'impartialité dès lors qu'il les fait apparaître « sans (...) donner à penser que les faits visés sont d'ores et déjà établis ou que leur caractère répréhensible au regard des règles ou principes à appliquer est d'ores et déjà reconnu 59 ( * ) . » Il n'en demeure pas moins qu'aux yeux du justiciable, l'exercice de sa faculté d'auto-saisine par une juridiction peut apparaître comme une forme de préjugement.
Aussi l'article 11 du projet de loi confie -t-il désormais au ministère public le monopole de l'engagement des poursuites devant la formation du siège . Selon les paragraphes II et III, du texte proposé pour l'article L. 142-1 du code des juridictions financières, il pourrait 60 ( * ) :
- soit rendre des conclusions tendant à la décharge du comptable public (à la différence du comptable public dont les comptes doivent obligatoirement être jugés, la personne soupçonnée avoir commis des actes constitutifs de gestion de fait n'a pas à être jugée si les soupçons s'avèrent en définitive infondés) ;
- soit « requérir l'instruction d'un élément susceptible de conduire à la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable ou présomptif de gestion de fait ».
2. La mise en place d'une procédure à juge unique pour prononcer la décharge du comptable public
La décharge d'un comptable public , qui constitue la conclusion de l'écrasante majorité des arrêts rendus par la Cour des comptes (98 %), ne serait plus prononcée par une formation collégiale mais par un juge unique .
Le deuxième paragraphe (II) du texte proposé par l'article 11 du projet de loi pour l'article L. 142-1 du code des juridictions financières prévoit une ordonnance du président de la formation de jugement ou d'un autre magistrat délégué à cette fin .
Il ajoute, dans l'hypothèse où aucune charge ne subsisterait à l'encontre du comptable au titre de ses gestions successives et où il aurait cessé ses fonctions, que quitus lui serait donné dans les mêmes conditions.
L'emploi de l'indicatif dans les textes de loi valant impératif, comme l'a récemment rappelé le Conseil constitutionnel 61 ( * ) , le magistrat du siège aurait compétence liée à l'égard des conclusions du ministère public .
La commission des lois de l'Assemblée nationale avait adopté un amendement tendant à lui permettre de refuser de rendre l'ordonnance de décharge, sans toutefois préciser les conséquences d'un tel refus sur la suite de la procédure.
Cet amendement fut retiré en séance publique après que M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, eut déclaré : « Aux termes de votre amendement, monsieur le rapporteur, lorsque le procureur demande la décharge du comptable, le juge n'est pas obligé de le suivre. Or le caractère très particulier de la procédure devant le juge financier ne le permet pas. En effet, si le président d'une chambre ne signait pas l'ordonnance de décharge, il ne pourrait de toute façon pas poursuivre et la décharge du comptable serait acquise malgré tout au terme du délai de prescription actuellement fixé à six ans. Vous avez dit vous-même que le ministère public n'a aucun lien avec le Gouvernement et qu'il est totalement indépendant. En outre, cette décharge peut être contestée par les voies de recours classiques 62 ( * ) . ».
Les députés ont également rejeté des amendements présentés par M. René Dosière et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche ayant pour objet :
- d'une part, de ne permettre au ministère public de conclure à la décharge du comptable public qu'avec l'accord du rapporteur. M. Eric Ciotti a estimé au nom de la commission des lois qu'« en liant magistrat rapporteur et ministère public, l'amendement proposé conduirait, à l'inverse, à une confusion entre les différentes étapes de la procédure juridictionnelle 63 ( * ) . » ;
- d'autre part, de permettre à une formation collégiale de la Cour des comptes d'imposer au ministère public d'établir un réquisitoire à charge à l'encontre d'un comptable public ou d'un présumé gestionnaire de fait.
Dans sa rédaction initiale, le projet de loi apportait une réponse ambiguë à cette question de la compétence liée du magistrat du siège à l'égard du représentant du ministère public .
Il prévoyait en effet la notification de l'ordonnance de décharge au comptable et à l'ordonnateur concernés et leur ouvrait la possibilité de former à son encontre une « opposition motivée ». En l'absence d'une telle opposition, dans un délai qui aurait été fixé par voie réglementaire, l'ordonnance serait devenue définitive. Dans le cas contraire, le magistrat ayant rendu l'ordonnance aurait été libre de la maintenir ou de la retirer. En cas de retrait, la responsabilité du comptable aurait été « jugée dans les conditions prévues au III ».
Cette formulation laissait place à deux interprétations.
Selon Mme Isabelle Gravière-Troadec, secrétaire générale adjointe de la Cour des comptes, très attachée au principe du monopole de l'engagement des poursuites conféré au ministère public, la responsabilité du comptable public n'aurait pu être jugée en formation collégiale que dans l'hypothèse où le représentant du ministère public, changeant d'avis, aurait décidé de prendre un réquisitoire à charge. A défaut, le cas échéant après une nouvelle instruction par le rapporteur, le magistrat du siège aurait été contraint de rendre l'ordonnance de décharge ou de laisser s'écouler le délai de la prescription extinctive de la responsabilité du comptable.
Selon votre rapporteur, le principe d'indépendance de la justice et l'emploi du verbe « juger » auraient dû impliquer, au contraire, le renvoi du dossier devant la formation collégiale de jugement qui aurait statué sur les comptes, au terme d'une procédure contradictoire et après une audience publique. Le ministère public n'aurait nullement été tenu de modifier ses conclusions tendant à la décharge du comptable public. Enfin, pour assurer le respect des stipulations de l'article 6, §1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le magistrat du siège ayant décidé de retirer son ordonnance de décharge n'aurait pas pu assister au délibéré de ses collègues.
En première lecture, sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du gouvernement, l'Assemblée nationale a supprimé ces dispositions au motif qu'elles compliquaient inutilement la procédure. M. Eric Ciotti, rapporteur, a jugé suffisantes les voies classiques de recours offertes à l'ordonnateur et au comptable, c'est-à-dire, en l'espèce, le pourvoi en cassation.
Le texte adopté par les députés soulève donc deux questions majeures , d'ailleurs sans doute plus de principe que pratiques : celle de la compétence liée du magistrat du siège à l'égard des conclusions du ministère public et celle des voies de recours offertes aux parties, c'est-à-dire au comptable et, surtout, à l'ordonnateur .
Pour les raisons indiquées dans l'exposé général, votre commission vous soumet un amendement tendant à réécrire le II du texte proposé pour l'article L. 142-1 du code des juridictions financières afin de prévoir la notification au comptable et à l'ordonnateur concernés du rapport du magistrat chargé de l'instruction ainsi que des conclusions du ministère public , et de leur permettre de saisir directement la formation collégiale de jugement dans un délai de deux mois à compter de cette notification ; à défaut, le comptable serait déchargé de sa gestion par arrêté du ministre dont il relève .
Un tel arrêté est actuellement prévu quand la mise en jeu de la responsabilité pécuniaire et personnelle du comptable ne peut plus être mise en jeu du fait de l'écoulement du délai de prescription ou encore lorsque le ministre constate l'existence de circonstances constitutives de la force majeure, par exemple un vol avec effraction.
3. La mise place d'une procédure contradictoire, publique et orale pour mettre en jeu, devant une formation collégiale, la responsabilité pécuniaire et personnelle d'un comptable ou statuer sur une gestion de fait
Le premier alinéa du III du texte proposé pour l'article L. 142-1 du code des juridictions financières permet au ministère public 64 ( * ) , lorsqu'il relève un élément susceptible de conduire à la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable ou présomptif de gestion de fait, soit dans le rapport du magistrat chargé de l'instruction, soit dans les informations dont il dispose par ailleurs 65 ( * ) , de « requérir l'instruction de cette charge ».
Votre commission vous soumet un amendement rédactionnel ayant pour objet de prévoir plutôt que, dans cette hypothèse, le ministère public « saisit la formation de jugement ».
L'expression employée par le projet de loi pourrait en effet laisser penser que l'instruction débute à compter de l'engagement des poursuites et que le magistrat ayant établi le rapport sur la base duquel le ministère public s'est fondé pour engager des poursuites peut assister au délibéré de la formation de jugement.
Or tel n'est pas le cas : le travail du rapporteur préalable à l'intervention du ministère public fait partie de l'instruction et sa participation au délibéré serait sans doute jugée contraire à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Les quatre alinéas suivants du III du texte proposé pour l'article L. 142-1 du code des juridictions financières fixent les principales caractéristiques de la procédure .
Elle devrait être contradictoire , selon un principe qui était déjà énoncé à l'article L. 140-7 du code des juridictions financières. Sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du gouvernement, l'Assemblée nationale a précisé que le comptable et l'ordonnateur devaient avoir accès, à leur demande, au dossier.
Ces dispositions tirent la conséquence de la décision Martinie c/ France rendue le 12 avril 2006 par la Cour européenne des droits de l'homme, qui a jugé contraire aux exigences du procès équitable l'absence de communication aux parties du rapport du magistrat chargé de l'instruction et des conclusions du ministère public. Jusqu'à présent, la jurisprudence du Conseil d'État s'y opposait au motif que le rapporteur et le représentant du ministère public participaient à la fonction de juger, lors même qu'ils étaient exclus du délibéré, en remplissant le rôle d'auxiliaires et de conseillers des juges 66 ( * ) .
Jusqu'à présent, toujours en vertu de l'article L. 140-7 du code des juridictions financières, la procédure était en principe écrite et l'audience n'était pas publique sauf en matière de gestion de fait et d'amende. L'audience publique était l'occasion pour les parties d'exercer leur droit à être entendues par la juridiction 67 ( * ) . Le principe du huis clos visait à protéger la réputation des parties 68 ( * ) . Désormais, une plus grande part serait faite à l'oralité et les débats devraient avoir lieu en audience publique . Toutefois, le président de la formation de jugement pourrait décider, à titre exceptionnel et après avis du ministère public, de tenir ou de poursuivre l'audience hors la présence du public si la sauvegarde de l'ordre public ou le respect de l'intimité des personnes ou de secrets protégés par la loi l'exigeait.
Si elles tirent également la conséquence de la décision précitée Martinie c/ France, par laquelle la Cour européenne des droits de l'homme a exigé que la publicité de l'audience soit érigée en principe, ces dispositions mettent en oeuvre la possibilité ouverte par l'article 6, §1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales d'apporter des restrictions à ce principe « dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice . »
Enfin, la Cour devrait statuer par un arrêt rendu en formation collégiale . Le délibéré des juges demeurerait secret . Le magistrat chargé de l'instruction et le ministère public ne pourraient y assister .
Jusqu'à présent, le Conseil d'État estimait que la participation du rapporteur au délibéré n'entachait pas la procédure d'un manquement au principe d'impartialité dès lors qu'il n'avait pas exercé ses pouvoirs d'investigation 69 ( * ) . Toutefois, la loi du 21 décembre 2001 avait déjà prévu l'exclusion du rapporteur et du ministère public du délibéré lorsque la Cour des comptes statue en matière de gestion de fait et d'amende.
Votre commission vous soumet un amendement rédactionnel tendant à préciser que l'interdiction d'assister au délibéré concerne le représentant du ministère public.
4. La suppression de la règle du double arrêt, provisoire puis définitif
Cette nouvelle procédure juridictionnelle entraînerait l'abandon de la pratique du double arrêt, provisoire puis définitif, observée par la Cour des comptes pratiquement depuis sa création 70 ( * ) et consacrée à l'article L. 140-7 du code des juridictions financières.
Selon la jurisprudence du Conseil d'État, cette règle du double arrêt permet de garantir le respect du contradictoire, sans remettre en cause l'unicité de la procédure, puisqu'elle a pour objet, « d'une part d'identifier et de limiter les points du litige, d'autre part, de permettre au comptable d'apporter à la Cour des comptes des explications ou des justifications 71 ( * ) ».
Elle présente toutefois le double inconvénient d'allonger la procédure, alors que la France a été récemment condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme pour sa longueur excessive, et de la complexifier, un même arrêt contenant souvent à la fois des dispositions provisoires et des dispositions définitives.
La généralisation de la publicité des débats permettant d'assurer le respect du contradictoire, le maintien de la règle du double arrêt ne se justifie plus.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 11 ainsi modifié .
Article 12 (art. L. 212-15 du code des juridictions financières) - Coordination avec la généralisation de l'audience publique devant les chambres régionales des comptes
Cet article modifie l'article L. 212-15 du code des juridictions financières, relatif au recours à la visioconférence devant les chambres régionales des comptes ultramarines, afin de tirer la conséquence de la généralisation de l'audience publique prévue par l'article 21 du projet de loi.
Pour assurer une mutualisation des moyens, les chambres régionales des comptes des régions de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Guyane ont le même président, les mêmes assesseurs et le ou les mêmes commissaires du Gouvernement 72 ( * ) . Elles sont également le même siège, qu'un décret en Conseil d'État a fixé à Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe.
La chambre régionale des comptes de La Réunion a quant à elle le même siège et le même effectif que la nouvelle chambre territoriale des comptes de Mayotte créée par la loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer.
La loi ordinaire n° 2007-224 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer a autorisé le recours à la visioconférence lorsque l'un des magistrats ou l'une des personnes entendues par l'une de ces juridictions financières se trouve dans l'impossibilité de se rendre à son siège.
Conformément aux procédures en vigueur, le troisième alinéa de l'article L. 212-15 ne fait actuellement référence, en matière juridictionnelle, qu'aux audiences publiques organisées, à la demande de l'intéressé, en cas de gestion de fait (article L. 231-3) ou d'amende (article L. 231-12).
Dans la mesure où le projet de loi généralise l'audience publique à l'ensemble des procédures juridictionnelles, la visioconférence pourra désormais être admise pour toute personne « avisée d'une audience publique » par une chambre régionale des comptes ultramarine .
Sur proposition de M. Eric Ciotti, l'Assemblée nationale a adopté un amendement corrigeant une erreur de référence 73 ( * ) .
Votre commission vous propose d'adopter l'article 12 sans modification .
Article 13 (art. L. 222-6 du code des juridictions financières) - Coordination avec la suppression de la règle du double jugement devant les chambres régionales des comptes
Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture, modifie le premier alinéa de l'article L. 222-6 du code des juridictions financières, aux termes duquel « nul ne peut être nommé président d'une chambre régionale des comptes, vice-président de la chambre régionale des comptes d'Île-de-France ou magistrat dans une chambre régionale des comptes s'il a été déclaré comptable de fait à titre définitif et s'il ne lui a pas été donné quitus », afin de supprimer les mots « à titre définitif » par coordination avec la suppression de la règle du double jugement prévue à l'article 21 du projet de loi.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 13 sans modification .
Article 14 (art. L. 231-1 du code des juridictions financières) - Délais de production des comptes des comptables publics devant les chambres régionales des comptes
Cet article modifie l'article L. 231-1 du code des juridictions financières, aux termes duquel les comptables sont tenus de produire leurs comptes devant la chambre régionale des comptes dans les délais prescrits par les règlements :
- d'une part, pour prévoir que les comptables concernés sont ceux « qui relèvent de la juridiction d'une chambre régionale des comptes » ;
- d'autre part, pour exiger que les délais de production des comptes soient fixés par décret en Conseil d'État.
Si l'article R. 231-2, c'est-à-dire une disposition prévue par décret en Conseil d'État, dispose que les comptes doivent être produits annuellement devant la chambre régionale des comptes, le décret n° 85-372 du 27 mars 1985, qui fixe au 31 décembre de l'exercice suivant la date limite de production des comptes des collectivités territoriales, des établissements publics locaux et des établissements publics spécialisés (hôpitaux, offices publics...), est un décret simple.
L'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel, présenté par sa commission des lois.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 14 sans modification .
Article 15 (art. L. 231-2 du code des juridictions financières) - Coordinations avec la suppression de la règle du double jugement devant les chambres régionales des comptes
Cet article modifie l'article L. 231-2 du code des juridictions financières, relatif au périmètre de compétences des chambres régionales des comptes, aux fins de coordination.
Il est actuellement prévu que : « Sous réserve des dispositions des articles L. 211-2 et L. 231-6, la chambre régionale des comptes statue en premier ressort, à titre provisoire ou définitif, sur les comptes des comptables publics des collectivités territoriales et leurs établissements publics situés dans son ressort . »
L'article L. 211-2 du code des juridictions financières prévoit l'apurement administratif, par les comptables supérieurs du Trésor, des comptes :
- des communes dont la population n'excède pas 3.500 habitants et dont le montant des recettes ordinaires figurant au dernier compte administratif est inférieur à 750.000 euros, ainsi que ceux de leurs établissements publics ;
- des établissements publics de coopération intercommunale regroupant une population inférieure à 3.500 habitants ;
- des associations syndicales autorisées et des associations de remembrement.
L'article L. 231-6 du même code prévoit que l'apurement et le contrôle des crédits mis à la disposition du Conseil de Paris pour son fonctionnement sont assurés par une commission de vérification, désignée par le Conseil de Paris en son sein de manière à assurer la représentation de chaque groupe politique. Il n'est plus appliqué depuis que l'article 37 de la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité a soumis les comptes de la ville de Paris au droit commun en abrogeant l'article L. 2512-20 du code général des collectivités territoriales, qui organisait cette procédure spécifique de vérification. En conséquence, l'article 29 du projet de loi prévoit son abrogation.
Dans sa rédaction initiale, l'article 15 du projet de loi se contentait de supprimer les mots « à titre provisoire ou définitif » figurant actuellement à l'article L. 231-2 du code des juridictions financières, par coordination avec la suppression de la règle du double jugement prévue à l'article 21.
Sur proposition de M. Eric Ciotti, l'Assemblée nationale a également supprimé la référence à l'article L. 231-6 du code des juridictions financières.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 15 sans modification .
Article 16 (art. L. 231-3 du code des juridictions financières) - Jugement des comptes des comptables de fait par les chambres régionales des comptes
Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture, apporte des modifications formelles et de coordination à l'article L. 231-3 du code des juridictions financières, relatif au jugement des comptes des comptables de fait par les chambres régionales des comptes.
Les modifications formelles concernent le premier alinéa, aux termes duquel : « La chambre régionale des comptes juge, dans les mêmes formes et sous les mêmes sanctions, les comptes que lui rendent les personnes qu'elle a déclarées comptables de fait d'une collectivité ou d'un établissement public relevant de sa compétence ». Elles consistent, d'une part, à alléger sa rédaction, en prévoyant que : « La chambre régionale des comptes juge les comptes que lui rendent les personnes qu'elle a déclarées comptables de fait », d'autre part, à y faire figurer la mention selon laquelle la chambre régionale des comptes « n'a pas juridiction sur les ordonnateurs, sauf ceux qu'elle a déclarés comptables de fait ». Cette mention est actuellement prévue à l'article L. 231-5 du code des juridictions financières, dont l'article 29 du projet de loi prévoit l'abrogation.
Les coordinations consistent :
- à réécrire le deuxième alinéa, en supprimant la mention selon laquelle « les dispositions définitives des jugements portant sur des gestions de fait sont délibérées après l'audition, à leur demande, des personnes déclarées comptables de fait », compte tenu de l'unification de la procédure de jugement des comptes prévue à l'article 21 du projet de loi, pour prévoir à sa place que « les personnes que la chambre régionale des comptes a déclarées comptables de fait sont tenues de lui produire leurs comptes dans le délai qu'elle impartit » ;
- à modifier le troisième alinéa, relatif à la prescription de l'action en déclaration de gestion de fait, pour supprimer la mention selon laquelle la chambre régionale des comptes peut se saisir d'office d'actes constitutifs de gestion de fait, dès lors que la saisine de la chambre nécessitera désormais un réquisitoire préalable du ministère public.
La rédaction proposée constitue le décalque de celle retenue par l'article 3 du projet de loi pour l'article L. 131-2 du code des juridictions financières.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 16 sans modification .
Article 16 bis (nouveau) (art. L. 231-4 du code des juridictions financières, art. L. 1612-19-1 du code général des collectivités territoriales, art. L. 421-21 du code de la construction et de l'habitation) - Suppression de la compétence reconnue à l'assemblée délibérante d'une collectivité territoriale pour statuer sur l'utilité publique de dépenses ayant donné lieu à gestion de fait
Cet article a pour objet de supprimer la compétence de l'assemblée délibérante d'une collectivité territoriale pour apprécier l'utilité publique de dépenses mises à la charge de cette collectivité et ayant donné lieu à gestion de fait.
De création prétorienne, la reconnaissance de l'utilité publique de dépenses ayant donné lieu à gestion de fait a pour objet de suppléer rétroactivement au défaut d'ouverture préalable de crédits .
Ce pouvoir n'appartient actuellement qu'à l'autorité budgétaire de la personne publique (Parlement pour l'État 74 ( * ) , assemblée délibérante pour une collectivité territoriale, organe délibérant pour un établissement public) ayant supporté ces dépenses , qui l'exerce sous le contrôle du juge administratif .
Concrètement, lorsqu'elle constate une gestion de fait, la juridiction financière demande au comptable de fait de produire les comptes de cette gestion afin qu'elle puisse les juger, à l'instar de ceux d'un comptable public. Lorsque ces comptes ont été produits, le juge demande à l'autorité budgétaire concernée de statuer sur l'utilité publique des dépenses qui y figurent.
En règle générale, le juge des comptes est lié par la décision de l'autorité budgétaire : à l'instar des comptables publics, il n'a pas à apprécier sa légalité 75 ( * ) ; en particulier, il n'a pas à se prononcer sur le point de savoir si des dépenses dont l'utilité publique a été reconnue par l'assemblée délibérante d'une collectivité territoriale présentaient bien un intérêt local 76 ( * ) . Une telle appréciation relève de la compétence des juridictions administratives, si elles sont saisies, qui exercent alors un contrôle normal 77 ( * ) .
Certes, le juge des comptes peut et même doit refuser d'allouer des dépenses dont l'utilité publique a été reconnue par l'assemblée délibérante de la collectivité territoriale lorsqu'elles ont donné lieu à une condamnation pénale définitive du comptable de fait 78 ( * ) . A l'inverse, il peut et doit également allouer lui-même des dépenses dont l'utilité publique n'a pas été reconnue lorsque les dépenses étaient obligatoires ou conditionnaient la perception des recettes 79 ( * ) . Toutefois, ces cas ne sont pas les plus fréquents.
Enfin, une fois la décision de l'autorité budgétaire rendue, la juridiction financière demeure compétente pour statuer, au vu des justifications qui lui sont produites, sur la réalité et la régularité des dépenses alléguées . Après avoir fixé la ligne de compte, elle peut constituer le comptable de fait en débet et le condamner à l'amende.
A cet égard, la pratique suivie par la Cour des comptes pour les gestions de fait concernant des deniers de l'État diffère de celles observées par les chambres régionales des comptes pour les gestions de fait concernant les deniers des collectivités territoriales : alors que le Parlement n'est jamais saisi de dépenses dont la Cour sait qu'elle devra les rejeter faute de justificatifs suffisants, les assemblées délibérantes des collectivités territoriales sont quant à elles invitées à statuer sur l'ensemble des dépenses alléguées par les comptables de fait, la chambre régionale des comptes appréciant ensuite leur réalité et leur régularité.
Pour éviter un blocage de la procédure juridictionnelle en matière de gestion de fait, la loi n° 2001-1248 du 21 décembre 2001 relative aux chambres régionales des comptes et à la Cour des comptes a inséré un article L. 1612-19-1 dans le code général des collectivités territoriales, aux termes duquel l'assemblée délibérante d'une collectivité territoriale doit se prononcer sur le caractère d'utilité publique des dépenses ayant donné lieu à une déclaration en gestion de fait au cours de la plus proche séance suivant la transmission de la demande adressée par la chambre régionale des comptes au comptable de fait et à l'ordonnateur. Passé ce délai, la juridiction financière peut statuer sur les dépenses de la gestion de fait dont elle apprécie les justifications présentées.
Force est de constater que ces règles sont à la fois complexes et obscures puisqu'elles résultent, pour l'essentiel, de la jurisprudence de la Cour des comptes et du Conseil d'État .
L'amendement adopté à l'unanimité par l'Assemblée nationale , sur proposition de M. Charles de Courson et avec les avis favorables du gouvernement et de la commission des lois, a pour objet de répondre à deux difficultés réelles .
En premier lieu, la reconnaissance de l'utilité publique des dépenses d'une collectivité territoriale ayant donné lieu à gestion de fait est parfois tributaire des alternances politiques.
En second lieu, les délibérations des assemblées locales peuvent donner lieu à un long contentieux devant les juridictions administratives, pendant la durée duquel le juge financier ne peut se prononcer. Les risques de condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme pour durée excessive de la procédure sont donc réels.
Pour autant, la solution retenue par les députés ne va pas de soi .
Elle consiste à rétablir l'article L. 231-4 du code des juridictions financières, actuellement abrogé, afin de donner compétence à la chambre régionale des comptes pour juger les comptes d'une personne qu'elle a déclarée comptable de fait, compte tenu des observations éventuelles qui pourraient être formulées par l'assemblée délibérante de la collectivité territoriale concernée.
Les personnes déclarées comptables de fait devraient ainsi rendre en deux exemplaires leurs comptes et les pièces justificatives à la chambre régionale des comptes qui transmettrait un exemplaire à l'ordonnateur de la collectivité concernée. L'ordonnateur en informerait l'organe délibérant qui ferait connaître ses observations éventuelles à la chambre régionale des comptes dans le délai de trois mois, en joignant le compte rendu de ses débats. A l'expiration de ce délai, la juridiction financière pourrait juger les comptes des personnes déclarées comptables de fait.
Rien, dans le texte adopté par les députés, ne garantit que la juridiction financière se contenterait, comme elle en a aujourd'hui l'obligation, de vérifier la réalité des dépenses alléguées, sans se faire juge de leur légalité voire, lorsque la question porte sur le point de savoir si elles présentaient un intérêt local, de leur opportunité.
L'article L. 1612-19-1 du code général des collectivités territoriales serait abrogé et la référence qui y est actuellement faite à l'article L. 421-21 du code de la construction et de l'habitation serait supprimée.
Pour les raisons indiquées dans l'exposé général, votre commission vous soumet un amendement de suppression de l'article 16 bis .
Article 17 (art. L. 231-9 du code des juridictions financières) - Droit de réformation par la chambre régionale des comptes des décisions d'apurement administratif prises par les comptables supérieurs du Trésor
Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture, prévoit que la chambre régionale des comptes ne peut exercer son droit de réformation des comptes faisant l'objet d'un apurement administratif par les comptables supérieurs du Trésor que sur réquisition du ministère public.
Il s'agit, aux termes de l'article L. 211-2 du code des juridictions financières, des comptes des communes dont la population n'excède pas 3.500 habitants et dont le montant des recettes ordinaires figurant au dernier compte administratif est inférieur à 750.000 euros, ainsi que ceux de leurs établissements publics, des comptes des établissements publics de coopération intercommunale regroupant une population inférieure à 3.500 habitants, ainsi que des comptes des associations syndicales autorisées et des associations de remembrement.
A l'issue de leur travail de vérification des comptes, les comptables supérieurs du Trésor ne peuvent prendre que des arrêtés de décharge. La chambre régionale des comptes détient en effet une compétence exclusive pour prononcer une éventuelle mise en débet du comptable public et lui infliger une amende 80 ( * ) . Aussi les décisions d'apurement prises par le comptable supérieur du Trésor doivent-elles lui être transmises, assorties le cas échéant de toute observation pouvant entraîner la mise en débet du comptable.
Aux termes de l'article L. 231-8 du code des juridictions financières, les arrêtés des comptables supérieurs du Trésor emportent décharge définitive du comptable, sous réserve des recours éventuels et du droit d'évocation de la chambre régionale des comptes.
En conséquence, l'article L. 231-9 du même code fait obligation au comptable supérieur du Trésor d'adresser à la chambre régionale des comptes tous les arrêtés de décharge qu'il a pris, et dispose que la juridiction financière peut exercer son droit d'évocation et de réformation sur ces arrêtés dans le délai de six mois à dater de leur notification au comptable.
La modification proposée par l'article 17 du projet de loi consiste à prévoir que le droit de réformation de la juridiction financière s'exerce sur réquisition du ministère public. Il s'agit une nouvelle fois de mieux distinguer, au sein des juridictions financières, les fonctions de poursuite des fonctions de jugement.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 17 sans modification .
Article 18 (art. L. 231-10 du code des juridictions financières) - Condamnation des comptables à l'amende par les chambres régionales des comptes
Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture, modifie l'article L. 231-10 du code des juridictions financières, aux termes duquel la chambre régionale des comptes peut condamner les comptables à l'amende pour retard dans la production de leurs comptes et dans les réponses aux injonctions qui ont été formulées à leur encontre dans les mêmes conditions que la Cour des comptes, afin de tirer les conséquences des réformées opérées par les articles 4 à 9 du projet de loi.
Par analogie avec le texte proposé par l'article 4 du projet de loi pour l'article L. 131-6 du code des juridictions financières, le 1° précise ainsi que peuvent être condamnés à l'amende aussi bien les comptables publics que les personnes déclarées comptables de fait par la chambre régionale des comptes. Cette précision figure actuellement à l'article R. 231-32 du code des juridictions financières.
Le 2° met fin à la possibilité reconnue à la chambre régionale des comptes de condamner à l'amende un comptable pour retard dans les réponses apportées aux injonctions qui lui ont été adressées, par coordination avec la suppression des jugements provisoires induite par la réforme des procédures juridictionnelles prévues à l'article 21 du projet de loi.
Il supprime également une référence inutile à l'article L. 131-6 du code des juridictions financières, qui donne à la Cour des comptes le pouvoir d'infliger des amendes aux comptables mais ne traite pas des conditions dans lesquelles ce pouvoir doit être exercé.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 18 sans modification .
Article 19 (chapitre Ier du titre IV de la première partie du livre II du code des juridictions financières) - Réorganisation du chapitre Ier du titre IV de la première partie du livre II du code des juridictions financières
Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture, réorganise le chapitre I er (« Règles générales de procédure ») du titre IV (« Procédure ») de la première partie (« Les chambres régionales des comptes ») du livre II (« Les chambres régionales et territoriales des comptes ») du code des juridictions financières, pour tirer la conséquence de la création de deux nouveaux chapitres II et III, par les articles 21 et 22 du projet de loi, respectivement consacrés aux activités juridictionnelles des chambres régionales des comptes et à leur activité d'examen de la gestion des collectivités territoriales et de leurs établissements publics.
Le chapitre I er du titre IV de la première partie du livre II du code des juridictions financières serait désormais consacré aux seules règles générales de procédure communes aux activités juridictionnelles et administratives des chambres régionales des comptes, le chapitre II à leurs activités juridictionnelles, le chapitre III à l'examen de la gestion, le chapitre IV au contrôle budgétaire, et le chapitre V aux voies de recours.
Le chapitre I er regroupe actuellement les articles L. 241-1 à L. 241-15. A l'avenir, il ne comprendrait plus que les articles L. 241-1 à L. 241-9, étant précisé, d'une part, que les articles L. 241-12, L. 241-13 et L. 241-15 deviendraient respectivement les articles L. 241-7, L. 241-8 et L. 241-9, d'autre part, que le second alinéa de l'article L. 241-13 serait supprimé (article 20 du projet de loi).
Enfin, les articles L. 241-7 à L. 241-11 et l'article L. 241-14, qui concernent spécifiquement la procédure d'examen de la gestion des collectivités territoriales, figureraient au nouveau chapitre III (article 22 du projet de loi).
Les modifications proposées sont retracées dans le tableau ci-après.
Structure du nouveau chapitre 1
er
du titre
IV de la première partie du livre II
du code des juridictions
financières
Article actuel |
Objet |
Article nouveau |
Art. L. 241-1 |
Droit de la chambre régionale des comptes de se faire communiquer tous documents, de quelque nature que ce soit, relatifs à la gestion des services et organismes soumis à son contrôle Sanctions pénales applicables en cas d'entrave à l'exercice des pouvoirs attribués aux magistrats et rapporteurs de la chambre régionale des comptes |
Art. L. 241-1 |
Art. L. 241-2 |
Pouvoirs d'investigation des magistrats et des rapporteurs de la chambre régionale des comptes |
Art. L. 241-2 |
Art. L. 241-2-1 |
Possibilité, pour le procureur de la République, de transmettre au commissaire du Gouvernement d'une chambre régionale des comptes, d'office ou à la demande de ce dernier, la copie de toute pièce d'une procédure judiciaire relative à des faits de nature à constituer des irrégularités dans les comptes ou dans la gestion des collectivités ou organismes relevant de la compétence de cette chambre |
Art. L. 241-2-1 |
Art. L. 241-3 |
Possibilité donnée à la chambre régionale des comptes de recourir, pour des enquêtes de caractère technique, à l'assistance d'experts désignés par son président |
Art. L. 241-3 |
Art. L. 241-4 |
Obligation faite à certaines catégories de personnes dont l'audition est jugée nécessaire de répondre à la convocation de la chambre régionale des comptes |
Art. L. 241-4 |
Art. L. 241-5 |
Obligation, pour la chambre régionale des comptes, de prendre toutes dispositions pour garantir le secret de ses investigations |
Art. L. 241-5 |
Art. L. 241-6 |
Soumission au secret professionnel des documents d'instruction et des communications provisoires de la chambre régionale des comptes Conduite avec l'ordonnateur dont la gestion est contrôlée de l'instruction par la chambre régionale des comptes dans le cadre de la préparation du rapport provisoire et confidentiel |
Art. L. 241-6 |
Art. L. 241-12 |
Droit des parties de se faire assister ou représenter par un avocat. Droit de l'ordonnateur ou du dirigeant qui était en fonctions au cours d'un exercice examiné à se faire assister ou représenter par la personne de son choix, désignée à sa demande par le président de la chambre régionale des comptes, les honoraires de l'avocat demeurant à la charge de la collectivité territoriale ou de l'établissement public concerné dans la limite d'un plafond fixé par décret |
Art. L. 241-7 |
Article actuel |
Objet |
Article nouveau |
Art. L. 241-13 |
Principes du caractère contradictoire et de la
collégialité des jugements, avis, propositions, rapports
d'instruction et observations de la chambre régionale des
comptes
|
Art. L. 241-8
|
Art. L. 241-15 |
Fixation par décret en Conseil d'État des règles relatives à la procédure devant les chambres régionales des comptes et à la communication de leurs observations aux collectivités, établissements, sociétés, groupements et organismes concernés |
Art. L. 241-9 |
Votre commission vous propose d'adopter l'article 19 sans modification .
Article 20 (art. L. 241-13 du code des juridictions financières) - Suppression des règles spécifiques aux procédures juridictionnelles applicables devant les chambres régionales des comptes en matière d'amende et de gestion de fait
Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture, supprime le second alinéa de l'article L. 241-13 du code des juridictions financières 81 ( * ) , qui fait obligation à la chambre régionale des comptes, lorsqu'elle statue en matière de gestion de fait et d'amende, de délibérer hors la présence du rapporteur et de rendre son jugement en audience publique.
Il s'agit d'une mesure de coordination avec l'unification des procédures de jugement des comptes des comptables publics et des gestionnaires de fait par les chambres régionales des comptes, prévue à l'article 21 du projet de loi, et la généralisation du principe de l'audience publique.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 20 sans modification .
Article 21 (chapitre II du titre IV de la première partie du livre II du code des juridictions financières) - Procédure de jugement des comptes des comptables publics et des comptables de fait par les chambres régionales des comptes
Cet article réforme et unifie la procédure de jugement des comptes et de condamnation à l'amende des comptables publics et des comptables de fait par les chambres régionales des comptes.
Sur le plan formel, le chapitre II du titre IV de la première partie du livre II du code des juridictions financières ne serait plus consacré au contrôle budgétaire mais aux activités juridictionnelles des chambres régionales des comptes et comprendrait un unique article numéroté L. 242-1. L'article 23 du projet de loi prévoit en conséquence la transformation du chapitre II actuel en un chapitre IV et la renumérotation des articles qu'il comprend.
Sur le fond, la procédure retenue pour le jugement des comptes des comptables publics et des comptables de fait par les chambres régionales des comptes constitue le décalque de celle prévue par l'article 11 du projet de loi, relatif aux activités juridictionnelles de la Cour des comptes.
La seule différence tient au fait que le texte proposé l'article L. 242-1 du code des juridictions financières ne prévoit pas que la chambre régionale des comptes statue par un jugement rendu en formation collégiale lorsque des charges ont été retenues par le ministère public à l'encontre du comptable public ou du gestionnaire de fait présumé, alors que le texte proposé pour l'article L. 142-1 spécifie que la Cour des comptes doit statuer par un arrêt rendu en formation collégiale. Une telle mention serait en effet superfétatoire car le premier alinéa de l'article L. 241-13 du code des juridictions financières, qui deviendrait l'article L. 241-8, pose déjà le principe de la collégialité des jugements, avis, propositions, rapports d'instruction et observations de la chambre régionale des comptes.
Votre commission vous soumet trois amendements de coordination et vous propose d'adopter l'article 21 ainsi modifié .
Article 22 (chapitre III du titre IV de la première partie du livre II du code des juridictions financières) - Regroupement des dispositions relatives à l'examen de la gestion par les chambres régionales des comptes
Cet article regroupe, dans le chapitre III du titre IV de la première partie du livre II du code des juridictions financières, les dispositions relatives à l'examen de la gestion par les chambres régionales des comptes.
Ces dispositions, codifiées aux articles L. 241-7 à L. 241-11 ainsi qu'à l'article L. 241-14, figurent actuellement dans le chapitre premier du même titre, relatif aux règles générales de procédure, tandis que le chapitre III traite des voies de recours.
Le premier paragraphe (I) modifie ainsi l'intitulé du chapitre III afin de faire référence aux « dispositions relatives à l'examen de la gestion ». Sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du gouvernement, l'Assemblée nationale a substitué cet intitulé à celui retenu par le projet de loi initial (« dispositions relatives aux activités administratives ») qui était imprécis et inexact.
Le deuxième paragraphe (II) prévoit le regroupement dans ce chapitre III des actuels articles L. 241-7 à L. 241-11, qui deviendraient les articles L. 243-1 à L. 243-5, et de l'article L. 241-14, qui deviendrait l'article L. 243-6.
Le tableau ci-après retrace ces modifications.
Structure du nouveau chapitre III du titre IV de la
première partie du livre II
du code des juridictions
financières
Article actuel |
Objet |
Article nouveau |
Art. L. 241-7 |
Obligation, avant la présentation d'observations sur la gestion d'une collectivité territoriale ou d'un établissement public local, d'un entretien préalable entre le magistrat rapporteur ou le président de la chambre et l'ordonnateur de la collectivité territoriale ou de l'établissement public concernés, ainsi que l'ordonnateur qui était en fonctions au cours de l'exercice examiné |
Art. L. 243-1 |
Art. L. 241-8 |
Possibilité d'un entretien préalable, lorsque la chambre régionale des comptes examine la gestion de certaines personnes morales, entre le magistrat rapporteur ou le président de la chambre et un dirigeant de la personne morale contrôlée, mandaté à cet effet par celle-ci |
Art. L. 243-2 |
Art. L. 241-9 |
Octroi au dirigeant ou à l'ordonnateur concerné, y compris, le cas échéant, celui qui était en fonctions au cours de l'exercice examiné, d'un délai de deux mois pour remettre une réponse écrite aux observations provisoires formulées par la chambre régionale des comptes, au-delà duquel les observations peuvent être arrêtées définitivement |
Art. L. 243-3 |
Art. L. 241-10 |
Communication à l'autorité territoriale concernée, aux représentants des établissements, sociétés, groupements et organismes concernés ainsi qu'au représentant de l'État des observations de la chambre régionale des comptes formulées à la suite de vérifications demandées par le représentant de l'État ou de l'autorité territoriale |
Art. L. 243-4 |
Art. L. 241-11 |
Règles d'établissement et de publicité des observations définitives de la chambre régionale des comptes |
Art. L. 243-5 |
Art. L. 241-14 |
Obligation faite à la chambre régionale des comptes d'entendre, à leur demande, les dirigeants des personnes morales contrôlées, et toute autre personne nominativement ou explicitement mise en cause, avant d'arrêter définitivement ses observations définitives |
Art. L. 243-6 |
Le troisième paragraphe (III), inséré par l'Assemblée nationale en première lecture, modifie l'article L. 241-14 du code des juridictions financières pour tirer la conséquence de cette renumérotation dans une référence qui y figure.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 22 sans modification .
Articles 23 et 24 (chapitres IV et V nouveau du titre IV de la première partie du livre II du code des juridictions financières) - Déplacement des dispositions relatives au contrôle budgétaire exercé par les chambres régionales des comptes et aux voies de recours contre leurs décisions
L' article 23 déplace au chapitre IV du titre IV de la première partie du livre II du code des juridictions financières les dispositions relatives au contrôle budgétaire exercé par les chambres régionales des comptes (premier paragraphe). En conséquence les articles qu'il comprend, numérotés L. 242-1 et L. 242-2 deviendraient les articles L. 244-1 et L. 244-2 (deuxième paragraphe). L'Assemblée nationale a ajouté un troisième paragraphe pour tirer les conséquences de cette renumérotation dans les références aux articles concernés qui figurent dans divers textes de loi.
L' article 24 transforme l'actuel chapitre III du titre IV de la première partie du livre II du code des juridictions financières, relatif aux voies de recors contre les décisions des chambres régionales des comptes, en un chapitre V nouveau (premier paragraphe).
En conséquence les articles qu'il comprend, numérotés L. 243-1 à L. 243-4 deviendraient les articles L. 245-1 et L. 245-4 (deuxième paragraphe). L'Assemblée nationale a ajouté un troisième paragraphe pour tirer les conséquences de cette renumérotation dans les références aux articles concernés qui figurent dans divers textes de loi.
Les modifications proposées par ces deux articles du projet de loi constituent la conséquence de la création des chapitres II et III distinguant les activités juridictionnelles des chambres régionales des comptes et leurs compétences en matière d'examen de la gestion des collectivités territoriales et de leurs établissements publics.
Votre commission vous propose d'adopter les articles 23 et 24 sans modification .
Articles 25, 26 et 27 (art. L. 243-1, L. 243-2 et L. 243-3 du code des juridictions financières) - Coordinations
L' article 25 du projet de loi modifie, aux fins de coordination, l'article L. 243-1 du code des juridictions financières qui permet au comptable, à la collectivité locale ou à l'établissement public, au commissaire du Gouvernement près la chambre régionale des comptes et au procureur général près la Cour des comptes de faire appel devant la Cour des comptes de tout jugement prononcé à titre définitif par la chambre régionale des comptes.
Dans sa rédaction initiale, il prévoyait uniquement de tirer la conséquence de la suppression des jugements provisoires des chambres régionales des comptes et de la création d'une possibilité de décharge d'un comptable par une ordonnance rendue à juge unique, prévues à l'article 21 du projet de loi. Sur proposition de sa commission des lois, l'Assemblée nationale a également prévu la substitution de l'expression « représentant du ministère public » à celle de « commissaire du gouvernement ».
Il est assez rarement fait appel des jugements des chambres régionales des comptes, puisqu'au cours des trois dernières années, le nombre de jugements contentieux prononcés par les chambres régionales et territoriales des comptes a été compris entre 398 et 530, tandis que la Cour des comptes a rendu entre 28 et 56 arrêts d'appel par an.
Adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture, l' article 26 du projet de loi modifie, également aux fins de coordination avec la suppression des jugements provisoires des chambres régionales des comptes et la création d'une possibilité de décharge d'un comptable par ordonnance rendue à juge unique, l'article L. 243-2 du code des juridictions financières, aux termes duquel : « un jugement prononcé à titre définitif peut être révisé par la chambre régionale des comptes qui l'a rendu, soit à la demande du comptable appuyée des justifications recouvrées depuis le jugement, soit d'office ou sur réquisition du ministère public, pour cause d'erreur, omission, faux ou double emploi ». La modification proposée consiste à faire référence à une décision juridictionnelle plutôt qu'à un jugement prononcé à titre définitif.
Également adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture, l' article 27 du projet de loi modifie l'article L. 243-3 du code des juridictions financières, selon lequel les règles relatives à l'appel et à la révision des jugements des chambres régionales des comptes sont fixées par décret en Conseil d'État, pour substituer les termes de « décisions juridictionnelles » à celui de « jugements ». Il tire la conséquence de la création d'une possibilité de décharge d'un comptable par ordonnance rendue à juge unique. Les articles L. 243-1, L. 243-2 et L. 243-3 du code des juridictions financières deviendraient respectivement les articles L. 245-1, L. 245-2 et L. 245-3, en vertu de l'article 24 du projet de loi
Votre commission vous propose d'adopter les articles 25, 26 et 27 sans modification .
Article 28 (art. L. 254-4 et L. 256-1 du code des juridictions financières) - Coordinations concernant les chambres territoriales des comptes
Cet article modifie les références figurant aux articles L. 254-4 et L. 256-1 du code des juridictions financières, relatifs aux procédures applicables devant les chambres territoriales des comptes de Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy et Saint-Martin, pour tirer la conséquences de la renumérotation de nombreux articles du même code opérée par le projet de loi.
Ainsi, l'article L. 254-4 du code des juridictions financières prévoit l'application dans ces collectivités d'outre-mer des articles L. 241-1 à L. 241-15, relatifs aux règles générales de procédure devant les chambres régionales des comptes.
Tirant la conséquence de la restructuration du titre IV de la première partie du livre II du code des juridictions financières, prévues par les articles 19, 21, 22, 23 et 24 du projet de loi, les modifications proposées au premier paragraphe (I) consistent à rendre applicables :
- les articles L. 241-1 à L. 241-9, relatifs aux règles générales de procédure et formant le chapitre I er du titre IV ;
- ainsi que, sur proposition de la commission des lois de l'Assemblée nationale, les articles L. 243-1 à L. 243-6, relatifs à l'examen de la gestion et formant le chapitre III du titre IV.
En revanche, les dispositions relatives aux activités juridictionnelles des chambres régionales des comptes, qui figureraient désormais au chapitre II de ce même titre IV et dans un nouvel article L. 242-1 du code des juridictions financières, ne leur seraient pas applicables. Cette extension devrait intervenir, moyennant certaines adaptations, par le biais de l'ordonnance prévue à l'article 30 du projet de loi. Cette ordonnance devrait être prise dans les six mois suivant la publication de la loi, dont l'entrée en vigueur est différée au 1 er janvier 2009 par l'article 31 du projet de loi, ce qui devrait permettre d'éviter tout vide juridique.
Le troisième alinéa de l'article L. 256-1 du code des juridictions financières permet aux personnes qui ne peuvent matériellement se rendre à l'audience de la chambre territoriale des comptes, en vue d'une audition, de présenter leurs observations, reliées en direct à la salle d'audience par un moyen de communication audiovisuelle. Cette audition est actuellement prévue avant un jugement portant sur une gestion de fait (article L. 231-3 du code des juridictions financières), une condamnation à l'amende (article L. 231-12 du code des juridictions financières) ou des observations définitives sur la gestion d'une collectivité territoriale, d'un établissement public ou d'un organisme contrôlé par la chambre territoriale des comptes (article L. 241-14 du code des juridictions financières).
La modification proposée par le second paragraphe (II) consiste à ne plus faire référence qu'au nouvel article L. 243-6 du code des juridictions financières, fruit de la renumérotation de l'article L. 241-14 opérée par l'article 22 du projet de loi. Les références aux articles L. 231-3 et L. 231-12 seraient logiquement supprimées car le premier ne traiterait plus de la condamnation à l'amende des comptables (article 16 du projet de loi) et le second serait abrogé (article 29 du projet de loi). En revanche, il ne serait pas fait référence au nouvel article L. 242-1(introduit par l'article 21 du projet de loi) qui pose le principe d'une audience publique avant tout jugement des comptes ou toute condamnation à l'amende. Sans doute le gouvernement et les députés ont-ils pensé que cette référence pourrait être introduite elle aussi par le biais de l'ordonnance prévue à l'article 30 du projet de loi.
Rappelons que la chambre territoriale des comptes de Mayotte, celle de Saint-Pierre-et-Miquelon et celles de Saint-Barthélemy et Saint-Martin ont respectivement le même président, les mêmes assesseurs, le ou les mêmes commissaires du Gouvernement et le même siège que les chambres régionales des comptes de La Réunion (Mayotte), d'Île-de-France (Saint-Pierre-et-Miquelon) et la Guadeloupe (Saint-Barthélemy et Saint-Martin). Les chambres territoriales des comptes de la Nouvelle Calédonie et de la Polynésie française ont une existence propre et des moyens autonomes. Enfin, les îles Wallis et Futuna relèvent directement de la juridiction de la Cour des comptes.
Votre commission n'est absolument pas convaincue de la nécessité de recourir à une ordonnance pour étendre aux chambres territoriales des comptes, moyennant des adaptations, les dispositions du projet de loi réformant les procédures juridictionnelles applicables devant les chambres régionales des comptes. Les règles en vigueur dans ces collectivités constituent, à peu de choses près, le décalque de celles prévues dans les régions métropolitaines et ultramarines. L'extension des dispositions proposées aux collectivités d'outre-mer ne nécessite donc pas de nombreuses adaptations. Et, puisqu'elles n'ont rien de spécifique, la consultation des assemblées délibérantes locales n'est pas requise. Quant aux dispositions du projet de loi relatives à la Cour des comptes, il n'est pas nécessaire de prévoir spécifiquement leur application dans les collectivités d'outre-mer car il s'agit de dispositions dites de « souveraineté », donc directement applicables sur l'ensemble du territoire de la République.
Dès lors, votre commission vous soumet un amendement de réécriture globale de l'article 28 ayant pour objet de procéder à l'extension de l'ensemble des dispositions du projet de loi aux chambres territoriales des comptes, en tenant compte des autres amendements qui vous ont été présentés.
Elle vous propose d'adopter l'article 28 ainsi modifié .
Article 29 (art. L. 131-3, L. 140-7, L. 231-5, L. 231-6 et L. 231-12 du code des juridictions financières) - Abrogations
Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture, prévoit l'abrogation de plusieurs articles du code des juridictions financières :
- l'article L. 131-13, qui permet à la personne concernée de demander à être entendue par la Cour des comptes avant une éventuelle condamnation à l'amende, car le principe de la publicité de l'audience serait désormais posé à l'article L. 142-1 (article 11 du projet de loi) ;
- l'article L. 140-7, qui définit les caractères généraux de la procédure applicable devant la Cour des comptes, car ils seraient désormais énoncés à l'article L. 142-1 (article 11 du projet de loi) ;
- l'article L. 231-5, qui concerne la compétence des chambres régionales des comptes à l'égard des comptables de fait, car ces dispositions figureraient à l'article L. 231-3 (article 16 du projet de loi) ;
- l'article L. 231-6, qui prévoit une procédure spécifique d'apurement des crédits du Conseil de Paris, car la questure de la ville de Paris a été supprimée par la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité ;
- l'article L. 231-12, qui permet à la personne concernée de demander à être entendue par la chambre régionale des comptes avant une éventuelle condamnation à l'amende, car le principe de la publicité de l'audience serait désormais posé à l'article L. 242-1 (article 21 du projet de loi).
Votre commission vous propose d'adopter l'article 29 sans modification .
Article 29 bis (nouveau) (art. 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 de finances pour 1963) - Coordinations à l'article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963, relatif à la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables
Cet article, inséré par l'Assemblée nationale en première lecture sur proposition de sa commission des lois et après un avis favorable du gouvernement, modifie le paragraphe XI de l'article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 de finances pour 1963 aux fins de coordination avec les dispositions de l'article 8 du projet de loi relatives à la condamnation à l'amende des comptables de fait.
Il s'agit de prévoir que les poursuites engagées sur le fondement de l'article 433-12 du code pénal ne privent les juridictions financières de la possibilité d'infliger une amende pour gestion de fait que si elles concernent « les mêmes opérations » que celles qui ont entraîné la déclaration de gestion de fait.
Dans le rapport qu'il a établi au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale, M. Eric Ciotti relève à juste titre que « Les dispositions relatives à la comptabilité de l'État et au régime de responsabilité pécuniaire des agents des services publics faisant partie du domaine partagé des lois de finances (article 34 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001relative aux lois de finances), cette coordination peut donc être réalisée dans le présent projet de loi bien qu'il n'ait pas le caractère d'une loi de finances . »
Bien d'autres dispositions du projet de loi nécessitent de modifier, par coordination, l'article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 de finances pour 1963. Votre commission vous soumet un amendement ayant pour objet d'y procéder.
Par coordination avec la suppression de l'obligation faite aux héritiers d'un comptable décédé de produire ses comptes à sa place, cet amendement prévoit également que la responsabilité personnelle et pécuniaire du défunt ne peut être mise en jeu, si le décès est survenu avant le jugement des comptes, qu'à hauteur du montant des garanties qu'il était tenu de constituer et, le cas échéant, des sommes pour lesquelles il était assuré .
En effet, bien souvent, le jugement des comptes intervient plusieurs années après le règlement de la succession et, en cas de débet, les héritiers peuvent se trouver mis en demeure de verser des sommes parfois très élevées. Sans doute peuvent-ils solliciter et, le plus souvent, obtenir une remise gracieuse du ministre du budget. Toutefois, ils n'en ont pas l'assurance. L'amendement qui vous est proposé prévoit donc un plafonnement des sommes devant être versées par les héritiers et leur financement par les garanties constituées par le défunt, le solde étant pris en charge sur le budget de l'organisme public concerné.
Cet amendement tend également à prévoir qu' il appartient au ministre chargé du budget et non au ministre de l'économie et des finances de mettre en jeu la responsabilité pécuniaire d'un comptable public .
Enfin, dans l'attente de la réforme annoncée des règles relatives à la responsabilité des gestionnaire publics, il tend à préciser, conformément à une pratique constante suivie par les ministres du budget successifs, que les comptables de fait peuvent, à l'instar des comptables publics, obtenir la remise gracieuse des sommes laissées à leur charge par le juge des comptes.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 29 bis ainsi modifié .
Article additionnel après l'article 29 bis (art. L. 131-2, L. 231-3, L. 253-4, L. 262-33 et L. 272-35 du code des juridictions financières, art. 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963) - Réduction à cinq ans du délai de prescription de l'action en responsabilité contre les comptables publics et les comptables de fait
Pour les raisons indiquées dans l'exposé général, votre commission vous soumet un amendement réduisant à cinq ans les délais de prescription des actions tendant à engager la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics et des gestionnaires de fait.
Tel est l'objet de l'article additionnel qu'elle vous propose d'insérer après l'article 29 bis .
Article 30 - Habilitation du gouvernement à étendre par ordonnance les dispositions du projet de loi aux collectivités d'outre-mer
Cet article habilite le gouvernement à prendre par ordonnance, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, les mesures d'extension et d'adaptation des dispositions du projet de loi aux chambres territoriales des comptes de Mayotte, de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie française, de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.
L'ordonnance devrait être prise dans les six mois suivant la publication de la loi. Un projet de loi de ratification devrait être déposé sur le bureau de l'une des deux assemblées dans les trois mois suivant la publication de l'ordonnance : le projet de loi initial prévoyait un délai de six mois que l'Assemblée nationale a réduit de moitié sur proposition de M. René Dosière et de sa commission des lois.
Les députés ont également adopté un amendement rédactionnel présenté par leur commission des lois.
Par coordination avec l'amendement de réécriture globale de l'article 28 du projet de loi, destiné à procéder directement à l'extension et à l'adaptation des mesures proposées aux chambres territoriales des comptes, votre commission vous soumet un amendement de suppression de l'article 30.
Article 31 - Dispositions transitoires
Cet article précise les modalités d'application de la loi dans le temps.
Il reporte au 1 er janvier 2009 l'entrée en vigueur des dispositions du projet de loi, à l'exception :
- du 1° de l'article 7 qui supprime la possibilité reconnue aux juridictions financières de condamner à l'amende pour retard dans la production des comptes les héritiers d'un comptable public décédé,
- et de l'article 30 qui habilite le gouvernement à étendre par ordonnance les dispositions du projet de loi aux collectivités d'outre-mer.
Il prévoit en outre que les procédures actuelles resteront applicables à l'ensemble des instances ayant donné lieu à un arrêt ou à un jugement provisoire avant le 1 er janvier 2009.
L'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel.
Votre commission vous soumet un amendement de coordination avec la suppression de l'article 30 et vous propose d'adopter l'article 31 ainsi modifié .
Intitulé du projet de loi
Le texte déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale s'intitulait « projet de loi portant modification de dispositions relatives à la Cour des comptes et aux chambres régionales des comptes ».
Sur proposition de M. Eric Ciotti, les députés ont souhaité simplifier cet intitulé en retenant la formulation suivante : « projet de loi relatif à la Cour des comptes et aux chambres régionales des comptes ».
Votre commission souscrit bien volontiers à cette modification.
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Sous le bénéfice de ces observations et des amendements qu'elle vous soumet, votre commission a adopté le projet de loi relatif à la Cour des comptes et aux chambres régionales des comptes.
* 23 L'appellation « commissaire du gouvernement » subsisterait dans les différents articles du code des juridictions financières relatifs à la Cour de discipline budgétaire et financière, que le projet de loi ne prévoit pas de réformer.
* 24 Articles L. 112-2 et R. 112-2 du code des juridictions financières.
* 25 Aux termes de l'article L. 121-1 du code des juridictions financières, le procureur général est nommé par décret pris en Conseil des ministres.
* 26 Article R. 112-10 du code des juridictions financières.
* 27 Aux termes de l'article R. 212-4 du code des juridictions financières, un arrêté du Premier ministre, pris après avis du Premier président de la Cour des comptes et du procureur général près la Cour des comptes, fixe, pour chaque chambre, l'effectif des magistrats qui la composent et le nombre des commissaires du Gouvernement. Aux termes de l'article R. 224-4 du même code, les conseillers des chambres régionales des comptes doivent avoir au moins atteint le grade de premier conseiller pour pouvoir être délégués dans les fonctions de commissaire du Gouvernement.
* 28 Article L. 212-1 du code des juridictions financières.
* 29 Articles R. 112-9 et R. 212-5 du code des juridictions financières.
* 30 Cette catégorie de comptables a été créée par un décret n° 2005-1429 du 18 novembre 2005. Les agents concernés vont progressivement assumer une partie des compétences de la paierie générale du Trésor et de l'agence centrale comptable du Trésor, supprimées au 31 décembre 2007.
* 31 La Cour tient sa compétence à leur égard d'un décret n° 77-1017 du 1 er septembre 1977.
* 32 A titre d'exemples, lorsqu'un chercheur encaisse sur son compte en banque personnel le produit d'analyses ou d'études faites par le laboratoire universitaire où il travaille, il est comptable de fait de deniers de l'université ; lorsqu'un agent communal perçoit des redevances dans un camping municipal sans avoir été nommé régisseur de recettes, lorsqu'un maire encaisse lui-même une taxe qui aurait dû être versée au receveur municipal, ils sont comptables de fait des deniers de la commune.
* 33 La gestion de fait peut consister à délivrer un mandat fictif, pour une dépense qui n'a pas été faite ou pour une dépense autre que celle qui a été faite. Il y a également gestion de fait en cas d'octroi d'une subvention à une association dont l'administration se réserve l'usage de tout ou partie des fonds.
* 34 Dans un arrêt du 11 juillet 1985, M. Frogier, ancien gestionnaire du magasin d'approvisionnement des travaux publics du territoire de la Polynésie française, elle a ainsi condamné un comptable de fait à l'amende pour retard dans la production de ses comptes.
* 35 L'article L. 131-11 du code des juridictions financières permet en outre à la Cour des comptes d'infliger des amendes pour gestion de fait aux personnes qu'elle a déclarées comptables de fait.
* 36 Articles D. 131-27 et D. 131-28 du code des juridictions financières.
* 37 Articles D. 131-29 et D. 131-31 du code des juridictions financières.
* 38 Pour les comptes des établissements et organismes culturels et d'enseignement à l'étranger, il s'agit du trésorier-payeur général pour l'étranger.
* 39 Lorsqu'un compte a déjà été arrêté, le droit d'évocation ne peut s'exercer que pendant un an à dater de la décision définitive rendue par le comptable supérieur.
* 40 La désignation des commis d'office, généralement des comptables publics qui exercent cette activité complémentaire sur la base du volontariat, en sus de leurs fonctions, se heurtait, d'une part, à l'hétérogénéité des modalités de nomination des agents commis d'office et, d'autre part, à des contentieux de plus en plus nombreux relatifs à leur rétribution. Deux décrets n° 2007-1276 du 27 août 2007 relatif aux comptables commis d'office pour la reddition des comptes des comptables publics et assimilés et n° 2007-1277 du 27 août 2007 relatif à la rétribution des comptables commis d'office pour la reddition des comptes des comptables publics et assimilés ont été publiés pour remédier à ces difficultés.
* 41 Cour des comptes, 27 juin 1900, Fabrique de Ploërmel.
* 42 Conseil d'État, 16 novembre 1998, SARL Deltana et Perrin.
* 43 Conseil d'État, 27 juillet 2005, M. Balkany. En l'espèce, le requérant avait été condamné par le juge des comptes à une amende de 300.000 francs pour gestion de fait alors qu'il avait déjà été condamné à 200.000 francs d'amende par le juge pénal pour prise illégale d'intérêt.
* 44 Cour des comptes, quatrième chambre, 27 janvier 2000, M. Bez ancien président de l'association sportive « les Girondins de Bordeaux ».
* 45 Cour européenne des droits de l'homme, 30 juillet 1998, Oliveira c. Suisse.
* 46 Cour des comptes, 25 septembre 1996, MM. Nucci, Chalier et Trillaud et Association carrefour du développement.
* 47 Cour des comptes, 4 mai 1995, Médecin et autres, Association Nice communication.
* 48 Les modalités de détermination du montant du cautionnement sont définies, pour les différentes catégories de comptables, par trois décrets n° 2006-1183 du 26 septembre 2006, n° 2006-814 du 7 juillet 2006 et n° 77-497 du 10 mai 1977. Le montant est calculé, pour chaque catégorie, en appliquant un coefficient au montant du traitement indiciaire. A partir de cette base de calcul, le montant du cautionnement à constituer par catégorie de comptable est fixé par arrêté (arrêté du 26 septembre 2006 et arrêté du 7 septembre 2007). Le cautionnement dont le montant est le plus élevé est celui du receveur général des finances, soit 818.000 euros.
* 49 Le ministre de l'éducation nationale, par exemple, pour les comptables des établissements publics locaux d'enseignement.
* 50 Un arrêté du 5 mars 2008 prévoit que tout projet de remise gracieuse d'un débet prononcé par la Cour des comptes ou par les chambres régionales et territoriales des comptes est soumis à l'avis de la Cour des comptes dès lors que le montant en principal de la remise gracieuse est supérieur à 10.000 euros (le seuil de déclenchement de l'obligation de consulter le Conseil d'État était de 100.000 euros). S'agissant des remises gracieuses des mises en débet prononcées par le ministre du budget ou par le ministre de tutelle des comptables et des régisseurs, l'avis de la Cour des comptes est requis au-delà du seuil de 200.000 euros (ce seuil était de 300.00 euros lorsque l'avis du Conseil d'État était sollicité).
* 51 Réponse à la question écrite n° 9297, publiée au Journal officiel du 12 février 2008, page 1185.
* 52 Pour ADP, il s'agissait de paiements (22 millions d'euros) effectués au profit de la compagnie Air France au vu d'une convention jugée caduque. Pour le CNASEA, il s'agissait de paiements (près de 8 millions d'euros) effectués dans l'attente de la mise en place du service public de l'équarrissage, sur instruction ministérielle.
* 53 Conseil d'État, 12 juillet 1907, ministre des finances c/ Nicolle. Conseil d'État, Assemblée, 23 juin 1989, ministre des finances c/ Vèque.
* 54 « La modernisation de la responsabilité des comptables publics » - revue française de droit administratif - 2007 - page 442.
* 55 Revue française de droit administratif - mai-juin 2007 - page 450.
* 56 Conseil d'État, 27 octobre 2000, Mme Desvignes.
* 57 Le texte initial du projet de loi prévoyait la communication de ces documents au procureur général près la Cour des comptes mais la commission des lois de l'Assemblée nationale a préféré faire référence, de manière générique, au représentant du ministère public.
* 58 IV de l'article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 de finances pour 1963.
* 59 Conseil d'État, 20 octobre 2000, Société Habib Bank Limited.
* 60 Le texte initial du projet de loi mentionnait le procureur général près la Cour des comptes mais la commission des lois de l'Assemblée nationale a préféré faire référence, de manière générique, au ministère public.
* 61 Décision n° 2007-561 DC du 17 janvier 2008 sur la loi ratifiant l'ordonnance du 12 mars 2007 relative au code du travail
* 62 Journal officiel des débats de l'Assemblée nationale, première séance du 10 avril 2008.
* 63 Ibid.
* 64 Sur proposition de sa commission des lois, l'Assemblée nationale a substitué cette expression générique à la mention du procureur général près la Cour des comptes.
* 65 A titre d'exemple, l'article L. 140-1-1 du code des juridictions financières, qui deviendrait l'article L. 141-2, prévoit que le procureur de la République peut transmettre au procureur général près la Cour des comptes, d'office ou à la demande de ce dernier, la copie de toute pièce d'une procédure judiciaire relative à des faits de nature à constituer des irrégularités dans les comptes ou dans la gestion de l'État, des établissements publics ou des organismes relevant de la compétence de la Cour des comptes.
* 66 Conseil d'État 14 décembre 2001, Société Réflexions, Médiations, Ripostes. Conseil d'État, 27 juillet 2005, Balkany.
* 67 Dans une décision du 27 octobre 2000, Mme Michaux-Chevry et Madinecouty, le Conseil d'État a affirmé que le juge des comptes « (...) doit soit avertir le requérant de la date de la séance à laquelle son recours sera examiné soit l'inviter à l'avance à lui faire connaître s'il a l'intention de présenter des explications verbales pour qu'en cas de réponse affirmative de sa part, elle l'avertisse ultérieurement de la date de la séance. »
* 68 Cour des comptes, 11 mars 1993, 29 avril 1993, M. Carignon et autres.
* 69 Conseil d'État, 27 juillet 2005, Balkany.
* 70 Cette règle fut en effet instaurée par l'arrêté des consuls du 29 frimaire de l'an IX.
* 71 Conseil d'État 14 décembre 2001, Société Réflexions, Médiations, Ripostes.
* 72 Article L. 212-12 du code des juridictions financières.
* 73 L'article 22 du projet de loi prévoit la renumérotation de l'article L. 241-14 du code des juridictions financières, auquel le texte proposé pour l'article L. 212-15 fait référence, en un article L. 243-6.
* 74 Dans des arrêts rendus le 21 novembre 1990 et le 20 octobre 1993, la Cour des comptes a ainsi estimé « qu'il appartient au Parlement de statuer, en la forme constitutionnellement requise pour le vote de la loi de finances sur l'utilité publique des dépenses du compte ». En pratique, cette reconnaissance intervient dans le cadre de la loi de règlement.
* 75 Conseil d'État, 30 juillet 2003, Marty.
* 76 Cour des comptes, 7 octobre 1993, commune de Salon-de-provence.
* 77 Conseil d'État, 15 avril 1996, ville de Nice.
* 78 Conseil d'État, 27 juillet 2005, Balkany.
* 79 Cour des comptes, 1 er mars 1990, Pellenc et A..., commune Caromb.
* 80 Articles L. 231-7 et L. 231-10 du code des juridictions financières.
* 81 En vertu de l'article 19 du projet de loi, l'article L. 241-13 deviendrait l'article L. 241-8.