2. Préparer sérieusement les autres réformes de grande ampleur
Cette position de principe, votre commission l'a également retenue pour les autres sujets d'ampleur qui préoccupent tant les professionnels que les associations de consommateurs, parmi lesquels elle a retenu trois exemples.
Il en est ainsi de la réforme de l'urbanisme commercial, complément indispensable à celle des relations commerciales pour favoriser, par le renforcement de la concurrence entre les enseignes, la baisse des prix des produits de grande consommation. La législation sur l'équipement commercial (7 ( * )) est aujourd'hui contestée quant à ses effets réels sur le nombre de mètres carrés autorisés chaque année, l'équilibre entre les différentes formes de commerce ou le respect de la cohérence architecturale, paysagère, environnementale et urbaine du pays. De plus, un avis motivé a été rendu à l'encontre de la France en décembre 2006 par la Commission européenne, qui estime cette législation contraire au principe de liberté d'établissement et de prestation de services ainsi qu'à la directive « Services » (8 ( * )). Dès juin 2005, une proposition de loi de notre collègue Alain Fouché, adoptée par le Sénat, avait eu le mérite d'ouvrir ce débat difficile, sans pour autant susciter un consensus. Ce débat a été poursuivi par la commission de modernisation de l'urbanisme commercial installée par M. Renaud Dutreil le 25 octobre 2006, qui a formulé en février 2007 une liste de propositions de réforme. Depuis, tant la Commission Attali que le Conseil de la concurrence, dans un avis du 11 octobre 2007, l'ont eux-mêmes alimenté de manière radicale puisqu'ils ont tout deux recommandé la suppression de la législation actuelle. Plusieurs options sont ainsi en présence et les dernières préconisations, en raison même du changement profond qu'elles induisent, doivent être analysées de manière extrêmement attentive afin que le futur débat au Parlement permette de bâtir un cadre rénové qui s'inscrive dans la durée.
C'est aussi le cas de la dépénalisation du droit des affaires. Le code de commerce comme le code de la consommation comportant un nombre significatif de sanctions pénales, ils sont au premier chef concernés par les projets du président de la République visant à adapter à la gravité des faits et à l'ampleur des préjudices subis la réparation des comportements illégaux des acteurs économiques. Mais au-delà de la proportionnalité, voire de la question de principe, c'est davantage encore au regard de l'efficacité de la sanction que doit être abordée cette question dans les domaines commercial et consumériste. Les spécialistes s'accordent à reconnaître que, dans bien des affaires, la pénalisation du litige ne permet pas de répondre correctement au préjudice subi, ne serait-ce qu'en raison du rythme du droit pénal, si déconnecté de celui de la vie des affaires. A l'inverse, la sanction civile, dont la rapidité peut en outre être accélérée par procédure du référé, s'avère souvent très adaptée pour donner effectivement à la victime de comportements abusifs, qu'ils soient d'ordre strictement dans les relations commerciales ou qu'ils relèvent du droit de la consommation, la réparation qu'elle attend. C'est à l'aune de ces observations que doit travailler le groupe de réflexion sur la dépénalisation du droit des affaires, présidé par M. Jean-Marie Coulon, premier président honoraire de la Cour d'appel de Paris, dont les conclusions et recommandations devraient être rendues publiques d'ici quelques semaines, au début de l'année 2008.
Il en est enfin de même pour l'action collective des consommateurs en justice. Prenant appui sur l'efficacité de ce mécanisme judiciaire, appelé « class action » aux Etats-Unis, pour contraindre les industriels, prestataires de services et distributeurs à mieux tenir compte des intérêts de la clientèle, quelles que soient les caractéristiques des clients, les associations de consommateurs réclament depuis longtemps sa transposition dans le droit français de la consommation (9 ( * )). Si ce moyen d'action collective a d'incontestables avantages, chacun connaît aussi, comme le confirment les informations venues d'outre-Atlantique, les dérives, voire les incohérences au regard de l'équité, qu'il est susceptible de générer, et les conséquences économiques désastreuses qui les accompagnent. Son adaptation à la situation française doit donc être pesée au trébuchet afin d'éviter qu'une initiative légitime et généreuse ne soit assortie de tant d'effets pervers qu'elle en devienne contestable. C'est la raison pour laquelle la réflexion, depuis la proposition de loi n° 3055 (XII ème législature) visant à instaurer les recours collectifs de consommateurs déposée par M. Luc Chatel, alors député de la Haute-Marne, n'a cessé de s'approfondir (10 ( * )). Grpâce à ce travail de longue haleine, elle est aujourd'hui sur le point d'aboutir. Ainsi, lors de son audition devant votre commission, le secrétaire d'Etat chargé de la consommation et du tourisme a très clairement affirmé que le dispositif figurerait dans le prochain projet de loi de modernisation de la vie économique.
* (7) Loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 d'orientation du commerce et de l'artisanat, dite Royer, et loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat, dite Raffarin.
* (8) Directive n° 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur.
* (9) Celui-ci ne connaît aujourd'hui qu'un dispositif très encadré, demeuré confidentiel, issu de la loi n° 92-60 du 18 janvier 1992 renforçant la protection des consommateurs : l'action en représentation conjointe.
* (10) Depuis le rapport sur l'action de groupe publié le 16 décembre 2005 par le groupe de travail présidé par MM. Guillaume Cerruti, directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, et Marc Guillaume, directeur des affaires civiles et du Sceau, jusqu'aux préconisations en la matière de la Commission pour la libération de la croissance française présidée par M. Jacques Attali.