D. LES LIMITES DE LA NOTION DE FONGIBILITÉ DES CRÉDITS
1. Une mission peu propice à la fongibilité des crédits
La présente mission est peu propice à la fongibilité des crédits , dans la mesure où, comme cela a été indiqué ci-avant, l'Etat n'a aucun pouvoir de décision pour 75 % des crédits .
On rappelle que l'Etat n'a un pouvoir de décision que dans le cas :
- de l'action 01 « Soutien aux projets des communes et groupements de communes » du programme 119, c'est-à-dire de la DGE des communes et de la DDR, le préfet décidant de l'attribution des subventions (566 millions d'euros) ;
- les deux premières actions du programme 122 « Concours spécifiques et administration », intitulées « Aides exceptionnelles aux collectivités territoriales » et « Administration des relations avec les collectivités territoriales » (5 millions d'euros au total, hors abondement à titre non reconductible traditionnellement réalisé chaque année, de l'ordre de 130 millions d'euros).
Dans tous les autres cas, l'Etat n'a aucun pouvoir de décision, la répartition des dotations entre collectivités territoriales découlant mécaniquement de l'application de la loi.
Cela empêche de facto toute fongibilité.
2. Selon le gouvernement, la fongibilité des crédits ne videra pas de son sens les règles d'indexation de la DGE des communes et de la DDR
On peut s'interroger sur les conséquences de la fongibilité des crédits sur la DGE des communes et des EPCI et sur la DDR.
Interrogé à cet égard par votre rapporteur spécial, le gouvernement estimait à l'automne 2005 que la fongibilité pourrait permettre « une souplesse de gestion entre les dotations destinées aux mêmes catégories de collectivités territoriales (par exemple entre la DGE des communes et la dotation de développement rural au sein du BOP 1 du programme « concours financiers aux communes et groupements de communes ») ». En pratique, cela signifiait qu'un préfet de département, constatant que la DDR est peu consommée (le taux de consommation de cette dotation est de l'ordre de seulement 80 % chaque année), pourrait décider d'utiliser certains crédits, inscrits en loi de finances comme concernant la DDR, pour financer la DGE des communes.
Comme votre rapporteur spécial l'indiquait alors, « cette plus grande souplesse devrait, globalement, accroître les dotations allouées aux collectivités territoriales. Cependant, il conviendra de s'assurer que cette nouvelle faculté allouée aux préfets ne vide pas de son sens la détermination de l'évolution de la DGE des communes et de la DDR par la loi de finances. Un préfet ne devra pas utiliser la fongibilité des crédits pour décider, par exemple, de n'attribuer que de la DGE ».
Dans une réponse au questionnaire budgétaire pour 2007, le gouvernement se montrait rassurant à cet égard, soulignant que les règles d'emploi de chacune des dotations devaient faire l'objet d'une information devant une commission locale d'élus, et que « les premières remontées d'information prouv[ai]ent que l'usage de la fongibilité rest[ait] limité aux crédits qui [auraient] risqu[é] de ne pouvoir être consommés d'ici la fin de l'année ».
A nouveau interrogé par votre rapporteur spécial, le gouvernement lui a transmis des informations plus détaillées. Si la fongibilité asymétrique a bien permis, en 2006, d'augmenter la DGE en réduisant la DDR, les sommes en jeu restent limitées (7,25 millions d'euros ont été transférés de la DDR vers la DGE, et 2,37 millions d'euros de la DGE vers la DDR), comme l'indique l'encadré ci-après.
La fongibilité des crédits entre DGE des communes et DDR : extraits de la réponse du gouvernement « Les remontées d'information des préfectures pour l'exercice 2006 montrent que l'usage de la fongibilité entre la DGE des communes et la DDR est effectivement resté limité aux crédits qui risquaient de ne pouvoir être consommés avant la fin de l'année. « S'agissant des autorisations d'engagement (AE), alors que les crédits ouverts en LFI 2006 s'élevaient à 459,02 millions d'euros pour la DGE des communes et 124,33 millions d'euros pour la DDR, 2,37 millions d'euros d'AE de la DGE ont été consommés localement au titre de la DDR (soit 0,51 % de l'enveloppe nationale de la DGE) et 7,25 millions d'euros d'AE de la DDR ont été reversés sur la DGE des communes (soit 5,83 % de l'enveloppe nationale de la DDR). « 13 départements ont pratiqué la fongibilité des AE de la DGE vers la DDR et 47 départements ont prélevé des AE de la DDR pour les engager au titre de la DGE des communes. « En ce qui concerne les crédits de paiement (CP), conformément à la charte de gestion du programme 119, ils sont délégués indistinctement aux préfectures qui peuvent les utiliser sur la DGE des communes comme sur la DDR. « Sur ce point, alors qu'en 2005, la consommation des CP de la DGE des communes et de la DDR s'élevait à 96,29 % des crédits délégués (99,62 % pour la DGE et 72,96 % pour la DDR), en 2006, 99.52 % des CP délégués au titre de ces deux dotations ont été mandatés, soit un total de 497,42 millions d'euros. « Ainsi, conformément aux objectifs de la LOLF, accordant davantage de flexibilité au gestionnaire de crédits, la fongibilité entre ces deux dotations a permis une consommation des crédits de la DGE des communes et de la DDR plus performante. « Il convient enfin de signaler que la faculté de choix des préfets reste limitée. En effet, les règles d'emploi de chacune des dotations doivent faire l'objet d'une information devant les deux commissions locales d'élus. De plus, s'agissant de la commission d'élus de la DDR, celle-ci doit émettre un avis sur chaque proposition de subvention ; elle est donc en mesure d'apprécier la pertinence de la réduction ou de l'augmentation éventuelle de l'enveloppe globale accordée à cette dotation. » Source : réponse au questionnaire budgétaire pour 2008 |