2. Des contentieux successifs empêchent une évolution satisfaisante des statuts de la structure juridique gérant le parc naturel régional de Camargue
A partir de 2000, et pour assurer l'avenir institutionnel du parc, le ministère chargé de l'environnement préconise l'instauration d'un groupement d'intérêt public (GIP) mais cette initiative, pourtant acceptée par la majorité des membres de la Fondation, est battue en brèche par deux annulations contentieuses successives.
A la suite de négociations conduites par l'Etat -préfet et DIREN- avec l'ensemble des parties prenantes, qui avaient donné leur accord à une solution de transition, il était proposé de dissoudre la Fondation et d'attribuer la gestion du parc à un GIP, composé des mêmes membres que ceux de la Fondation. Le GIP a été créé par un arrêté préfectoral du 27 décembre 2001 approuvant la convention constitutive et installé le 2 mars 2002, avec transfert du personnel et du budget de la Fondation. Mais celle-ci n'a pas été dissoute et le décret lui confiant la gestion du parc n'a pas été modifié. Votre rapporteur ne peut que souligner, pour le déplorer, la complexité d'une situation juridique où coexistent deux structures sur le même objet et ayant le même champ de compétences.
De plus, le tribunal administratif de Marseille, par jugement en date du 21 janvier 2003, annule l'arrêté du 21 décembre 2001, comme émanant d'une autorité incompétente 12 ( * ) .
Anticipant sur cette annulation, un arrêté interministériel des ministres chargés de l'environnement et du budget approuvait, par arrêté en date du 14 janvier 2003, la convention constitutive du GIP, qui confirmait le transfert des personnels et du budget ; ceci alors même que la Fondation subsistait et que, dans le même temps, son conseil d'administration était restauré dans une composition conforme aux statuts de 1979 !
De plus, l'arrêté interministériel du 14 janvier 2003 a fait également l'objet d'un recours contentieux et le Conseil d'Etat l'annule, par une décision du 23 janvier 2004. Outre un argument tiré du parallélisme des formes, il relève que le fait de confier la gestion du parc à un nouvel organisme s'apparente à une création, soumise alors aux dispositions de l'article 46 de la loi du 2 février 1995 qui impose la structure du syndicat mixte pour gérer un parc naturel régional, créé après la date d'entrée en vigueur de la loi.
Les incertitudes juridiques les plus lourdes pèsent sur la mise en place du syndicat mixte gérant le PNR de Camargue
- Afin de se conformer à la décision du Conseil d'Etat, le GIP est mis en liquidation et un décret n° 2004-1188 du 9 novembre 2004 prend acte de la modification de la charte approuvée par la région visant à transférer la gestion du PNR de Camargue à un syndicat mixte qui est créé par arrêté préfectoral du 1 er décembre 2004.
Les deux structures -Fondation et syndicat mixte- coexistent de fait, la première sans moyens et dans des formes, dont il faut bien reconnaître que la régularité n'est pas assurée et la seconde dotée de tous les moyens budgétaires et en personnel pour gérer le PNR. Néanmoins, cette coexistence engendre des difficultés quotidiennes de fonctionnement qui ne peuvent perdurer.
Ainsi, les locaux utilisés par le PNR 13 ( * ) sont la propriété de la Fondation et, en l'absence de convention entre celle-ci et le syndicat mixte sur la mise à disposition de ces biens, ce dernier peut être considéré comme « occupant sans titre » et ne peut assumer leur entretien ou leur mise en sécurité.
- En outre, deux recours ont été intentés en décembre 2004, d'une part contre l'arrêté préfectoral de création du syndicat mixte, devant le tribunal administratif de Marseille et, d'autre part, contre le décret modificatif de transfert de gestion du parc au syndicat mixte, devant le Conseil d'Etat.
Dans sa décision du 19 février 2007, ce dernier annule le décret attaqué, considérant que le changement d'organisme gestionnaire du parc nécessitait la révision de la charte dans son intégralité car il ne s'agissait pas d'une simple modification. Cette révision, conformément à la réglementation en vigueur, aurait dû être assurée par l'organisme gestionnaire du parc, en l'occurrence la Fondation -ce qui n'a pas été le cas- et respecter la procédure de consultation de l'ensemble des collectivités territoriales concernées préalablement à la délibération du conseil régional approuvant la charte révisée.
S'agissant du recours contre l'arrêté de création du syndicat mixte, l'instance est encore pendante devant le tribunal administratif de Marseille mais il y a de très fortes craintes que ce dernier prononce son annulation.
Depuis février 2007, le syndicat mixte « expédie les affaires courantes » et le trésorier-payeur général a accepté, dans l'attente d'une situation juridique plus claire, de payer les dépenses de fonctionnement et les salaires jusqu'en décembre 2007.
Au-delà, les plus graves menaces pèsent sur l'existence même du PNR de Camargue.
En cas d'annulation de l'arrêté créant le syndicat mixte, celui-ci devra être mis en liquidation, ce qui entraînerait le licenciement du personnel employé par le parc. 37 salariés sont concernés qui étaient antérieurement salariés de la Fondation, puis repris par le GIP et enfin le syndicat mixte. Ce coût social n'est pas acceptable, d'autant plus que, dans ces conditions juridiques difficiles, le personnel est très attaché au maintien du parc et à son bon fonctionnement.
Il convient également de rappeler que le décret n° 98-97 du 18 février 1998 renouvelait le classement du parc naturel régional jusqu'au 20 février 2008. Au-delà de cette échéance, si aucune procédure de révision n'est mise en oeuvre dans les conditions de droit commun, le parc perdra son label de parc national régional. Or, l'imbroglio juridique qui vient d'être décrit auquel s'ajoutent des conflits de personnes, sur fond d'oppositions politiques et les délais incompressibles d'une procédure de révision laisse très peu d'espoir d'y parvenir.
Alors même, que compte tenu des enjeux de préservation et de valorisation des espaces naturels de Camargue, de la renommée du parc au niveau international et des enjeux sociaux qu'il porte, il importe de tout faire pour ne pas en arriver là.
* 12 L'article 1 er du décret du 6 mai 1995 relatif aux GIP constitués dans le domaine de l'environnement dispose que ceux-ci « sont créés par arrêté interministériel approuvant une convention collective ».
* 13 Equipements d'accueil du public, siège du Parc, musée Camarguais...