ARTICLE 2 - Tableau de financement de l'année 2006
Commentaire : le présent article, qui est le pendant de l'article d'équilibre figurant en loi de finances initiale, a pour objet l'approbation du tableau de financement retraçant le montant des ressources et des charges de trésorerie concourant à la réalisation de l'équilibre financier de l'État.
En vertu du 8° de l'article 34 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, le Parlement est appelé à approuver un tableau de financement retraçant le montant prévisionnel des ressources et des charges de trésorerie concourant à la réalisation de l'équilibre financier de l'État. La loi de règlement intervient conformément au II de l'article 37 de la même loi pour arrêter leur montant définitif ex post par, au même titre que le résultat budgétaire et le résultat de comptabilité générale.
Corrélativement en application du 9° de l'article 34 de la LOLF, le Parlement autorise le plafond de la variation nette de la dette négociable de l'État d'une durée supérieure à un an.
Sur le fond, le présent article permet d'analyser l'évolution de l'équilibre financier de l'État entre celui prévu en septembre 2005 lors du dépôt de la loi de finances initiale et celui arrêté au 31 décembre 2006.
La maîtrise des finances publiques, l'affectation des recettes de cessions d'actifs au désendettement, ainsi que la gestion optimisée de la trésorerie de l'État et des correspondants du Trésor ont permis une réduction en euros courants de la dette négociable de l'État de 0,76 milliard d'euros .
S'agit-il, pour autant d'une « modification en profondeur de l'équilibre financier de l'État », pour reprendre l'expression de l'exposé des motifs ?
Certes, conformément à « l'engagement national de désendettement » pris par le dernier gouvernement de la précédente législature, les besoins de financement ont été réduits de 17,6 milliards d'euros (principalement grâce à une réduction du déficit budgétaire en gestion et en trésorerie de l'ordre de 11,5 milliards d'euros) à 35,4 milliards d'euros.
Mais il faut tenir compte des effets , manifestement plus optiques que structurels, de l'optimisation des de la trésorerie de l'État au moyen :
- d'une réduction du programme de financement à moyen et long terme de l'État de 14,4 milliards d'euros ;
- d'une baisse de l'encours des bons du Trésor à taux fixe et à intérêt précompté (BTF) de 29,1 milliards d'euros ;
- d'une baisse de l'encaisse de précaution détenue sur le compte unique du Trésor de 25,9 milliards d'euros .
La Cour des comptes porte, globalement, un jugement sévère sur ce tableau qui, selon elle, est « établi sans référentiel comptable approprié et sans raccordement avec les systèmes d'information budgétaire et comptable. Sa cohérence avec les résultats de la comptabilité budgétaire et de la comptabilité générale n'est, en l'état, pas assurée ».
La juridiction financière ne ménage pas ses critiques techniques ponctuelles :
1°) les confusions entre ressources et charges budgétaires n'ont pas disparu : ainsi, les pertes et profits sur rachats d'emprunt sont considérées par elle comme des recettes et des dépenses de nature budgétaire résultant de l'exécution d'opérations de trésorerie, au sens de l'article 29 de la LOLF, alors qu'ils n'en ont pas moins été comptabilisés en 2006 comme des charges et des ressources de trésorerie 21 ( * ) ;
2°) le provisionnement budgétaire à concurrence de 2,1 milliards d'euros en 2006 des charges d'indexation sur emprunts indexés (OAT et BTAN) appellerait également une clarification. La Cour des comptes estime que « tout provisionnement budgétaire devrait être en principe désormais exclu ». Mais ainsi qu'elle le relève, elle-même, la question est complexe, car il convient effectivement d' éviter une sous-estimation de la charge annuelle de la dette durant la vie de l'emprunt indexé et le constat corrélatif d'une charge budgétaire massive l'année du remboursement .
La Cour des comptes attire également l'attention sur des questions de méthode :
1°) l'absence de référentiel de comptabilisation , à défaut duquel certaines opérations sont enregistrées dans la comptabilité générale de l'État, sans que leur identification en tant que ressources et charges de trésorerie soit donc possible dans les comptes. Cela faciliterait d'éventuelles omissions, comme celle de l'emprunt contracté par l'État en novembre 2006 auprès du Crédit foncier de France pour faire face au surcroît de charges au titre des primes d'épargne logement. Dès lors que cette avance « avait toutes les caractéristiques d'un emprunt à court terme, son montant aurait dû apparaître dans le tableau de financement en tant que ressource de trésorerie ». Symétriquement, auraient dû figurer au titre des dépenses de l'exercice 2006 les 715 millions d'euros de primes d'épargne logement versées par l'État aux établissements de crédit, via le Crédit foncier de France 22 ( * ) ;
2°) les modalités d'établissement du tableau de financement n'est pas non plus exempt de critiques dans la mesure où il est effectué sur la base des données de gestion de l'Agence France Trésor et non à partir des comptes : ainsi, le « déficit budgétaire en gestion » obtenu par solde des autres postes, dont la concordance avec le résultat effectivement comptabilisé de l'exécution budgétaire en gestion n'a pu être « complètement expliquée et justifiée », selon la Cour des comptes. Celle-ci note également que la rubrique intitulée « inverse de la variation du compte du Trésor », amalgame des éléments hétérogènes tels le compte à la Banque de France, les placements de trésorerie à très court terme ou encore les primes et les décotes à l'émission, mais aussi des éléments de nature budgétaire (les profits et pertes sur rachats, les charges d'indexation).
Sous ces réserves techniques, le tableau de financement en exécution pour 2006 n'en traduit pas moins l'amélioration substantielle des conditions de réalisation de l'équilibre financier par rapport à celles figurant dans le tableau de financement prévisionnel associé à la loi de finances initiale .
Lors de son examen par l'Assemblée nationale, le présent article a fait l'objet de deux amendements rédactionnels.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
* 21 Selon la Cour des comptes, l'assimilation au régime des primes et décotes à l'émission des emprunts, invoquée par l'administration, n'est, en l'espèce, conforme ni au texte de la LOLF, ni à la différence de nature entre les deux types d'opérations.
* 22 Pour la Cour des comptes, cette « double omission, d'une ressource de trésorerie et de la charge budgétaire qu'elle a financée, recouvre une autre anomalie : la contraction de deux opérations conjointes, mais en réalité distinctes, ayant donné lieu à des mouvements de caisse de même montant mais de sens contraire. En l'espèce, l'emprunt - c'est-à-dire l'encaissement - de 715 millions d'euros a permis le paiement - c'est-à-dire le décaissement - d'un montant équivalent de dépenses sous la forme de primes d'épargne logement. L'absence de mouvements de caisse n'a été qu'apparente, du fait de la contraction des deux opérations. Celles-ci doivent être distinguées en comptabilité budgétaire et en comptabilité des ressources et des charges de trésorerie, comme elles auraient dû l'être en comptabilité générale ».