IV. DES INFLEXIONS NÉCESSAIRES

A. LA MISSION « DÉFENSE » EST DEVENUE LE BUDGET D'INVESTISSEMENT PRINCIPAL DE L'ETAT

1. Des dépenses d'équipement à très long terme

La mission « Défense » est le troisième poste de dépense de l'Etat 6 ( * ) , avec 36,285 milliards d'euros en crédits de paiement (pensions incluses), dont 10,346 milliards d'euros inscrits au titre 5 (dépenses d'investissement), soit 28,5 % des crédits de paiement de la présente mission, et 78,4 % des crédits de paiement du titre 5 du budget général de l'Etat pour 2007 (bien que la notion d'investissement retenue par la LOLF est plus restrictive que celle utilisée antérieurement, et que 4,6 milliards d'euros ont ainsi été exclus des dépenses d'investissement).

De plus, les dépenses d'investissement de la mission « Défense » concernent des équipements à très longue durée de maturation (de la conception à la mise en service), puis à durée de vie pouvant être prolongée au-delà de 30 ans, et dont l'obsolescence et l'usure nécessitent d'importants investissements de remise à niveau (implantation de nouveaux systèmes d'armes sur une plate-forme existante) et posant, enfin, des problèmes de démantèlement longs, complexes et coûteux en fin de vie, en particulier pour les équipements à composante nucléaire, tels les sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE). La vie d'un équipement militaire peut donc s'étaler sur un demi-siècle ! De plus, cette durée peut être allongée en cas de difficultés budgétaires par un étalement temporel des programmes, générateur de coûts mal évalués (coût des intérêts intercalaires, pertes d'économies d'échelle, etc.).

2. ... dont la gestion partagée nécessite des procédures d'arbitrage

Les différentes composantes de la dépense d'investissement ont été réparties entre plusieurs programmes et plusieurs titres. C'est ainsi que les dépenses de construction des équipements militaires (programme 146) ont été clairement séparées des dépenses d'infrastructure. A quelques aménagements près, concernant l'accueil, le stockage ou la conservation de matériels nucléaires, les dépenses d'infrastructures ont été inscrites au programme 212 « Soutien de la politique de la défense » et sont placées sous l'autorité unique de gestion du responsable de ce programme, le secrétaire général pour l'administration (SGA) alors qu'elles relevaient auparavant de chaque armée

L'unification de la politique immobilière du ministère en la matière vise à donner une vision précise de l'emploi des infrastructures, à faire évoluer les intervenants du secteur, notamment les services de chaque armée, à améliorer la connaissance du patrimoine, la qualité de l'entretien et le dynamisme de la gestion du parc.

En 2006, la connaissance des besoins réels était encore perfectible, ce qui a suscité la prudence des chefs d'état-major, mais la souplesse interne de gestion s'est révélée plus grande que lorsqu'ils étaient eux-mêmes gouverneurs de crédits. Le bilan d'exécution s'est amélioré et le nouveau système de fongibilité, mis en place par la LOLF, a permis de déplacer en cours d'exécution 225 millions d'euros en autorisations d'engagement et 115 millions d'euros en crédits de paiement entre les différentes armées, afin de les utiliser en meilleure adéquation avec les besoins.

Toutefois, selon les informations recueillies par vos rapporteurs spéciaux, la corrélation entre la réalisation d'un programme d'armement et le besoin d'infrastructures associé reste à améliorer (par exemple, les hangars du char Leclerc). La création d'un comité de coordination de la fonction immobilière rassemblant les services du SGA et les états-majors a pour ce faire était mis en place. C'est dans ce cadre que le chef d'état-major des armées (CEMA) présente ses priorités au SGA.

D'une manière générale, la scission des différentes composantes de l'investissement entre plusieurs programmes de la mission « Défense » consacre la primauté du CEMA sur les chefs d'état-major des trois armées et, plus largement, la primauté de l'opérationnel dans l'organisation des armées.

Le CEMA est responsable du programme 178, coresponsable avec le délégué général pour l'armement (DGA) du programme 146, et il est associé à la définition des priorités, au sein des actions qui le concernent, des programmes 212 et 144. Il dispose donc d'une vision globale des décisions d'investissement Il est susceptible de proposer, en cours de gestion, des arbitrages entre programmes dans le cadre des instances de copilotage du programme 146. Vos rapporteurs spéciaux ont constaté que de grands progrès ont été réalisés en ce domaine en matière de prise de décision et de contrôle de gestion. Les instances de copilotage du programme « équipement des forces » sont les suivantes :

- le comité de direction du programme 146 réunit trimestriellementle CEMA et le DGA. L'approche capacitaire et l'approche de gestion des programmes sont alors confrontées pour rendre les arbitrages nécessaires entre les grands programmes d'armement ;

- le comité de pilotage, co-présidé par un représentant du CEMA et un représentant du DGA se réunit tous les mois en présence des responsables de BOP pour assurer la gestion courante de la mise en oeuvre du programme 146.et les arbitrages financiers entre BOP

Du fait de la montée en puissance du rôle de ces deux comités, le conseil des systèmes de forces s'est recentré sur l'appréciation des problèmes capacitaires et non sur la conduite même du programme.

De façon générale, vos rapporteurs spéciaux ont constaté que la gestion des crédits d'équipement était rendue complexe par la confusion entre les anciennes et les nouvelles procédures financières. La coexistence entre la LPM (obéissant aux anciennes règles) et la LOLF complique aussi bien la tâche des gestionnaires que le contrôle parlementaire

* 6 Le premier poste de dépenses est la mission « Enseignement scolaire », avec 59,56 milliards d'euros de crédits de paiement, le second poste est la mission « Engagements financiers de l'Etat », avec 40,86 milliards d'euros en crédits de paiement.

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