EXPOSÉ GÉNÉRAL
Mesdames, Messieurs,
Le Sénat est appelé à examiner en première lecture les conclusions de votre commission des lois sur la proposition de loi n° 464 (2004-2005), sur le statut et la destination des cendres des personnes dont le corps a fait l'objet d'une crémation, et sur la proposition de loi n° 375 (2005-2006), relative à la législation funéraire, présentées par notre collègue M. Jean-Pierre Sueur -la première étant cosignée par plusieurs de ses collègues membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés- et inscrites à l'ordre du jour de la séance mensuelle réservée en application du troisième alinéa de l'article 48 de la Constitution.
Ces deux propositions de loi sont, sans conteste, le fruit de l'engagement personnel et de la réflexion ancienne de notre collègue, qui fut le promoteur de la loi n° 93-23 du 8 janvier 1993 relative à la législation dans le domaine funéraire, alors qu'il était secrétaire d'Etat aux collectivités locales, et présenta en 2003 une première proposition de loi n° 161 (2002-2003) relative aux opérations funéraires, à la protection des familles à la suite d'un décès et à l'habilitation des opérateurs funéraires, dont les dispositions sont devenues caduques en application du deuxième alinéa de l'article 28 de notre Règlement.
La plus récente, qui a l'objet le plus large, constitue également la traduction législative des recommandations de la mission d'information sur le bilan et les perspectives de la législation funéraire, confiée par votre commission des lois à notre collègue et à votre rapporteur au mois d'octobre 2005. Adoptées le 31 mai 2006 par votre commission 1 ( * ) , ces recommandations ont souligné la nécessité de réformer la législation funéraire pour assurer la sérénité des vivants et le respect des défunts, en améliorant les conditions d'exercice de la profession d'opérateur funéraire, en sécurisant et en simplifiant les démarches des familles, en donnant un statut aux cendres des personnes décédées dont le corps a donné lieu à crémation et en prévoyant leur destination, enfin, en faisant évoluer la conception et la gestion des cimetières.
Aussi votre commission des lois a-t-elle décidé de reprendre l'essentiel des dispositions de la proposition de loi n° 375 (2005-2006) dans les conclusions qui vous sont soumises, ces dispositions répondant par ailleurs aux objectifs de la proposition de loi n° 464 (2004-2005).
I. LE CONSTAT : UNE RÉFORME DE LA LÉGISLATION FUNÉRAIRE ATTENDUE
Si le bilan de la législation funéraire s'avère positif, des aménagements n'en demeurent pas moins nécessaires.
A. UN BILAN POSITIF
La loi n° 93-23 du 8 janvier 1993 relative à la législation dans le domaine funéraire a incontestablement permis la modernisation du service extérieur des pompes funèbres. Les mutations du secteur funéraire ont cependant conduit à des modifications récentes mais limitées et, pour certaines, controversées de la législation.
1. Un service extérieur des pompes funèbres rénové par la loi du 8 janvier 1993
La loi du 8 janvier 1993 a mis fin au monopole communal en matière d'organisation des obsèques. S'il a été ouvert à la concurrence , le service extérieur des pompes funèbres n'en est pas moins demeuré une mission de service public . Ses contours ont été redéfinis 2 ( * ) et une habilitation a été exigée de l'ensemble des opérateurs.
En revanche, les communes ont conservé leur compétence exclusive en matière de création et d'extension des cimetières -le préfet du département étant toutefois compétent pour les cimetières situés à moins de 35 mètres des habitations dans les communes urbaines et à l'intérieur des périmètres d'agglomération- et acquis un monopole pour la création et la gestion des crématoriums .
La protection des familles endeuillées a été améliorée et le contrôle des pouvoirs publics sur les opérateurs funéraires renforcé.
Enfin, un Conseil national des opérations funéraires a été créé, afin d'assurer une large concertation avant toute décision des pouvoirs publics.
* 1 « Sérénité des vivants et respect des défunts - bilan et perspectives de la législation funéraire » : rapport n° 372 (Sénat, 2005-2006) de MM. Jean-Pierre Sueur et Jean-René Lecerf au nom de la mission d'information de la commission des lois du Sénat sur le bilan et les perspectives de la législation funéraire.
* 2 Aux termes de l'article L. 2223-19 du code général des collectivités territoriales, relèvent du service extérieur des pompes funèbres : le transport des corps avant et après mise en bière ; l'organisation des obsèques ; les soins de conservation ; la fourniture des housses, des cercueils et de leurs accessoires intérieurs et extérieurs ainsi que des urnes cinéraires ; la fourniture des tentures extérieures des maisons mortuaires ; la gestion et l'utilisation des chambres funéraires, qui ont pour objet de recevoir, avant l'inhumation ou la crémation, le corps des personnes décédées ; la fourniture des corbillards et des voitures de deuil ; la fourniture de personnel et des objets et prestations nécessaires aux obsèques, inhumations, exhumations et crémations, à l'exception des plaques funéraires, emblèmes religieux, fleurs, travaux divers d'imprimerie et de la marbrerie funéraire. L'ordonnance du 28 juillet 2005 a supprimé de cette liste la fourniture des tentures extérieures des maisons mortuaires pour tenir compte du fait que cette pratique était tombée en désuétude.