2. L'amélioration de la gestion du patrimoine successoral
Le projet de loi tente de remédier au phénomène trop souvent constaté de dépérissement des biens successoraux, qu'il intervienne en raison d'une option tardive de l'héritier, d'une gestion difficile de l'indivision ou de l'incompétence des héritiers.
a) La protection de l'héritier contre les risques d'acceptation tacite de la succession
Trop d'entreprises disparaissent du fait que les héritiers préfèrent laisser dépérir la succession plutôt que de prendre le risque, en assurant la gestion courante d'une entreprise, d'être tenus pour héritiers acceptant purement et simplement, ce qui les expose à devoir payer l'intégralité du passif. Le projet de loi vise à les protéger contre les risques d'acceptation tacite de la succession en leur permettant d'effectuer l'ensemble des actes nécessaires à la conservation et à l'administration provisoire de la succession et, sur autorisation du juge, de prendre toute mesure dans l'intérêt de la succession.
L'Assemblée nationale a ajouté à cette liste le renouvellement des baux qui, à défaut, donneraient lieu au paiement d'une indemnité, ainsi que la mise en oeuvre de décisions d'administration ou de disposition engagées par le défunt et nécessaires au bon fonctionnement de l'entreprise ( article 785 du code civil - article 1 er du projet de loi ).
b) Le recours aux mandats pour gérer la succession
Afin de faciliter la gestion du patrimoine transmis, le projet de loi développe le recours au mandat. A côté du mandat conventionnel, application classique du droit commun, il met en place deux mécanismes nouveaux, le mandat à effet posthume et le mandat successoral sur désignation judiciaire.
? Le mandat à effet posthume permettra au défunt de désigner de son vivant un mandataire avec la mission d'administrer tout ou partie du patrimoine transmis si les héritiers, en raison de leur âge, de leur handicap ou de la consistance particulière de la succession, ne peuvent le faire eux-mêmes.
L'Assemblée nationale a prévu que le mandat devrait identifier les héritiers bénéficiaires, que le mandataire pourrait être une personne morale et que sa rémunération éventuelle ne pourrait porter atteinte aux droits réservataires des héritiers ( article 812-2 du code civil - article 1 er du projet de loi) .
Elle a également prévu que l'obligation pour le mandataire de rendre des comptes serait annuelle (et non uniquement en fin de mandat), la résolution judiciaire du mandat pouvant être demandée à défaut ( article 812-8 du code civil - article 1 er du projet de loi ).
Ce mandat devrait être particulièrement utile dans le cadre de la gestion d'une entreprise. Il sera subordonné à l'existence d'un intérêt sérieux et légitime . L'Assemblée nationale a prévu que cet intérêt devrait être apprécié au regard de la personne de l'héritier ou du patrimoine successoral ( article 812-1 du code civil - article 1 er du projet de loi ).
Le projet de loi prévoit que la durée du mandat devrait être au maximum de deux ans , un mandat à durée indéterminée étant toutefois possible dans des hypothèses particulières ( articles 812 à 812-8 du code civil - article 1 er du projet de loi ). L'Assemblée nationale a prévu une possibilité de prorogation judiciaire.
Elle a également prévu :
- la possibilité pour le mandant et le mandataire de renoncer au mandat après notification à l'autre partie préalablement à son exécution ( article 812-1 du code civil - article 1 er du projet de loi ) ;
- que les actes réalisés par le mandataire sont sans effet sur l'option héréditaire ( article 812-1-1 du code civil - article 1 er du projet de loi ) ;
- et que, tant qu'aucun héritier n'a accepté la succession, le mandataire ne peut effectuer que des actes conservatoires ( article 812-1-2 du code civil - article 1 er du projet de loi ) ;
? Le projet de loi prévoit la possibilité de demander la désignation d'un mandataire en justice , qui interviendra en cas de mésentente entre héritiers, de carence ou de faute de l'un d'eux dans l'administration de la succession ( articles 813-1 à 814-1 du code civil - article 1 er du projet de loi ).
L'Assemblée nationale a prévu que cette personne qualifiée pourrait être une personne morale et supprimé la possibilité offerte au juge de désigner comme mandataire successoral le notaire commis pour préparer les opérations de partage, en arguant d'un risque de conflit d'intérêts.
Elle a également prévu la possibilité de proroger la mission du mandataire si la durée initiale n'est pas suffisante, ainsi que d'y mettre fin avant son terme si elle est intégralement exécutée ( article 813-9 du code civil - article 1 er du projet de loi ).
? Le projet de loi rappelle ensuite que les héritiers peuvent d'un commun accord confier l'administration de la succession à l'un d'entre eux ou à un tiers ( article 813 du code civil - article 1 er du projet de loi ). L'Assemblée nationale a prévu une désignation par le juge quand au moins un héritier a accepté à concurrence de l'actif net.
? En outre, le projet de loi étend les pouvoirs de l'exécuteur testamentaire* conformément à la jurisprudence ( articles 1025 à 1034 du code civil - article 16 du projet de loi ).