EXAMEN DES ARTICLES
CHAPITRE PREMIER
DISPOSITIONS RELATIVES À LA COMPÉTENCE ET AUX POUVOIRS DE L'AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS
ARTICLE PREMIER - Champ de compétence de l'Autorité des marchés financiers
Commentaire : le présent article modifie le champ de compétences de l'Autorité des marchés financiers (AMF) en matière de règles de recevabilité et de déroulement des offres publiques d'acquisition, afin de prendre en compte la mise en place d'un droit européen harmonisé des offres publiques par la directive n° 2004/25/CE du 21 avril 2004.
I. LE VOTE DU SÉNAT
Le présent article propose de modifier l'article L. 433-1 du code monétaire et financier afin de détailler les nouvelles règles de compétence de l'AMF, suivant les critères énoncés par l'article 4 de la directive européenne 2004/25/CE du 21 avril 2004 relative aux offres publiques d'acquisition.
S'agissant des offres publiques, une double branche de contrôle serait mise en place :
- d'une part, les questions relatives à l'information qui doit être fournie au personnel de la société visée et les questions relevant du droit des sociétés sont réglées selon la législation de l'Etat membre dans lequel la société-cible a son siège social ( règles du pays d'origine ) ;
- d'autre part, les questions touchant à la contrepartie offerte en cas d'offre et les questions ayant trait à la procédure d'offre sont traitées selon la législation de l'autorité compétente désignée pour contrôler l'offre dont fait l'objet la société : cette désignation se fait selon les règles du marché , c'est-à-dire en fonction de son lieu de cotation, sous réserve des cas de cotations multiples ou simultanées ( cf. tableau ci-dessous).
Tableau récapitulatif des cas de compétence de l'AMF |
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En application de l'article 4 de la directive européenne |
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Lieu du siège social de la société cible |
Lieu de cotation de la société cible |
Type de marché |
Questions relatives à la procédure et à la contrepartie de l'offre |
Questions touchant à l'information des salariés et au droit des sociétés |
France |
France |
Réglementé |
Compétence automatique de l'AMF |
Compétence automatique de l'AMF |
Cotations multiples mais première admission sur un marché européen hors France |
Réglementé |
Compétence automatique de l'autorité de contrôle du pays où a eu lieu la première admission |
||
Admission simultanée sur plusieurs marchés européens |
Réglementé |
Compétence optionnelle de l'AMF, sur décision de la société (1) |
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Au sein de l'EEE mais hors de France |
Cotations multiples mais première admission en France |
Réglementé |
Compétence automatique de l'AMF |
Compétence automatique de l'autorité de contrôle du pays où la société a son siège social |
Admission simultanée sur plusieurs marchés européens |
Réglementé |
Compétence optionnelle de l'AMF, sur décision de la société (1) |
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Hypothèses non prévues par la directive mais inscrites dans le projet de loi |
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Lieu du siège social |
Lieu de cotation |
Type de marché |
Autorité de contrôle |
|
Hors de l'EEE |
France |
Réglementé |
Compétence possible de l'AMF mais limitée (2) |
|
France |
France |
Non réglementé |
Compétence possible de l'AMF, à la demande du gestionnaire, sur l'ensemble des questions |
(1) A compter du 20 mai 2006.
(2) Article 231-1 du règlement général de l'AMF : les règles afférentes à la garantie de cours, à l'offre publique obligatoire et au retrait obligatoire ne peuvent être appliquées aux offres publiques visant une société de droit étranger cotée en France.
Le Sénat a adopté, avec un avis favorable de sa commission des finances, un amendement du gouvernement, tendant à compléter l'article L. 433-1 du code monétaire et financier en prévoyant qu'une personne (physique ou morale) présumée préparer une offre publique peut être tenue de déclarer ses intentions à l'AMF , en particulier en cas de mouvement significatif sur des titres cotés. Cette information serait alors portée à la connaissance du public.
Les conséquences de cette déclaration d'intention devraient être précisées par le règlement général de l'AMF, en particulier le délai de forclusion pour le dépôt d'une offre ultérieure en cas démenti .
Toutefois, au cours des débats, en réponse à une question de votre rapporteur général, M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a indiqué qu'un délai de six mois lui paraissait être une « solution parfaitement équitable et justifiée » 4 ( * ) : ainsi un initiateur éventuel qui aurait nié son intérêt pour une cible devrait se voir opposer l'irrecevabilité de toute offre publique sur cette cible pendant une durée de six mois.
Cet amendement inspiré du « takeover panel » britannique est opportun dans la mesure où il permettra d'atténuer les conséquences néfastes des rumeurs d'OPA sur le fonctionnement des marchés, comme de renforcer la prévention des délits d'initié et des manipulations de cours.
L'AMF dispose déjà de la faculté de demander des précisions à un offrant potentiel, mais ses moyens se trouveront par cette disposition renforcés et consacrés par la loi, ce qui est préférable en cas de recours.
II. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
A l'initiative de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté avec un avis favorable du gouvernement, 11 amendements rédactionnels, dont 5 d'entre eux tendent à substituer à l'expression « les Etats membres », « les Etats membres de la communauté européenne ».
La commission des finances de l'Assemblée nationale avait également proposé un amendement tendant à préciser que le règlement de l'AMF fixe les conditions dans lesquelles l'AMF pourrait demander à l'initiateur éventuel d'une offre publique de déclarer ses intentions. Cet amendement a été retiré après que M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, se fut engagé à demander à l'AMF, d'une part d'indiquer au législateur les cas sur lesquels elle pourrait fonder une jurisprudence, et d'autre part de transmettre au législateur les décisions qu'elle pourrait prendre à ce sujet.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre rapporteur général approuve la rédaction proposée par l'Assemblée nationale.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 2 - Pouvoirs de l'Autorité des marchés financiers
Commentaire : le présent article définit le prix équitable en cas d'offre obligatoire, autorise l'Autorité des marchés financiers à fixer les cas de dérogation à l'obligation de déposer un projet d'offre publique, et élargit le champ de compétence de ladite autorité en matière de contrôle des entreprises relatif au dépôt des offres.
I. LE VOTE DU SÉNAT
Le présent article propose :
- d'une part, de transposer, s'agissant du prix des offres publiques obligatoires, l'article 5 de la directive 2004/25/CE du 21 avril 2004 relative aux offres publiques d'acquisition ;
- d'autre part, de poursuivre la transposition de l'article 4 de ladite directive concernant les nouvelles règles de compétence des autorités de contrôle et la création d'une double branche de contrôle 5 ( * ) .
A. L'AMÉNAGEMENT DES COMPÉTENCES DE L'AMF
Le présent article propose deux aménagements :
- d'une part, il inscrit dans la loi la compétence déjà reconnue à l'Autorité des marchés financiers (AMF) 6 ( * ) de pouvoir accorder une dérogation à l'obligation de déposer un projet d'offre publique ;
- d'autre part, il opère une coordination avec les nouvelles règles de compétences de l'AMF en matière d'offres publiques. Ainsi s'agissant du dépôt d'une offre publique obligatoire ou de la mise en oeuvre de la garantie de cours, deux questions qui relèvent du droit des sociétés 7 ( * ) , l'AMF sera dorénavant compétente pour les sociétés dont le siège social est en France et dont les titres sont cotés sur un marché réglementé d'un Etat membre de la communauté européenne ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace Economique Européen.
Le Sénat a adopté ces dispositions sans modification.
B. L'ENCADREMENT DU PRIX DE L'OFFRE PUBLIQUE OBLIGATOIRE
La principale novation du présent article est de proposer, dans le droit fil des travaux préparatoires de la loi de décembre 1993 qui introduisait la procédure de retrait obligatoire (« squeeze-out ») en droit français, un encadrement législatif du prix de l'offre publique obligatoire.
L'article 5 de la directive du 21 avril 2004 pose le principe que le prix d'une offre publique obligatoire doit correspondre au « prix équitable » c'est-à-dire « le prix le plus élevé payé pour les mêmes titres par l'offrant, ou par des personnes agissant de concert avec lui, pendant une période déterminée par les Etats membres de six mois minimum à douze mois maximum. »
Le projet de loi initial définissait le prix équitable comme le prix « au moins équivalent au prix le plus élevé payé par l'auteur de l'offre, agissant seul ou de concert au sens des dispositions de l'article L. 233-10 du code de commerce, sur une période définie par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers ».
A l'initiative de sa commission des finances, le Sénat a modifié et précisé cette définition dans un sens plus conforme au droit communautaire.
D'une part, il a fixé la période de référence à 12 mois .
D'autre part, il a modifié la définition du prix équitable. Cette modification conduit à ne plus déterminer un prix-plancher, source de contestation, mais un principe, auquel des dérogations peuvent être portées selon des critères préalablement déterminés.
Ainsi au lieu de prévoir que le prix soit « au moins équivalent » au prix le plus élevé payé par l'offrant au cours de la période de douze mois, le Sénat a adopté avec un avis de sagesse du gouvernement un amendement proposant que le prix soit « équivalent » audit prix.
Par ailleurs, il a adopté un second amendement prévoyant que le règlement général de l'AMF précise les « circonstances » et les « critères » du pouvoir de modification du prix équitable par l'AMF dans le cadre de l'analyse multi-critères. Ces deux termes, qui se substituent aux mots « conditions » et « modalités » paraissent davantage appropriés et proches des prescriptions de la directive, qui précise que « dans certaines circonstances » le prix, tel qu'il résulte de l'application de la définition du prix équitable, peut être modifié à la hausse ou à la baisse.
II. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Outre deux amendements rédactionnels, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements relatifs à la définition du prix équitable ainsi qu'un amendement modifiant un dispositif adopté par la loi du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie.
A. LE CHOIX DU RETOUR À LA DÉFINITION D'UN PRIX PLANCHER S'AGISSANT DU PRIX ÉQUITABLE
L'Assemblée nationale a adopté, avec un avis de sagesse du gouvernement, deux amendements identiques de la commission des finances et de notre collègue député Philippe Auberger, tendant à revenir à la définition initiale du prix équitable , c'est-à-dire la définition d'un prix plancher, afin que « les actionnaires puissent obtenir le prix le plus attractif possible » selon notre collègue député Hervé Novelli, rapporteur au nom de la commission des finances.
Elle a également adopté, avec un avis favorable du gouvernement, un amendement de la commission des finances tendant à permettre à l'initiateur de l'offre publique de demander à l'AMF d'autoriser la modification du prix, en fonction des critères fixés par le règlement général de l'AMF. Cet amendement précise la rédaction initiale.
B. LA MODIFICATION DE L'ARTICLE 34 DE LA LOI DU 26 JUILLET 2005 RELATIVE À LA CONFIANCE ET À LA MODERNISATION DE L'ÉCONOMIE
A l'initiative de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté, avec un avis favorable du gouvernement, un amendement tendant à modifier l'article 34 de la loi du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation prévoyant un nouveau cas de dépôt obligatoire d'une offre publique sur une société fille, lorsqu'une offre publique est lancée sur la société mère française : ce dépôt ne serait plus seulement obligatoire lorsque la société fille est cotée en France mais aussi lorsque qu'elle est cotée sur un marché réglementé européen ou sur un marché réglementé étranger.
L'amendement adopté vise à uniformiser la rédaction du dispositif dont les conditions de mise en oeuvre sont successivement cumulatives puis alternatives. En effet, dans la première partie de l'article, il est précisé :
- que la société mère sur laquelle est lancée l'offre publique doit détenir plus d'un tiers du capital ou des droits de vote de la société fille ;
- et que la société fille doit constituer un actif essentiel de la société mère.
Dans la seconde partie de l'article, il est indiqué que si les conditions ci-dessus énoncées sont remplies, il doit être prouvé que :
- « un projet d'offre publique irrévocable et loyale est ou sera déposé sur l'ensemble du capital de la société contrôlée ;
ou qui constitue un actif essentiel ».
Dans cette dernière phrase, les conditions ne sont plus cumulatives mais alternatives.
Dans un souci d'harmonisation, l'amendement adopté par l'Assemblée nationale propose donc que les conditions soient alternatives dans les deux parties du texte.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
A. LE CHOIX D'UNE DÉFINITION SIMPLE ET CLAIRE DU PRIX ÉQUITABLE
Comme il a déjà eu l'occasion de le souligner dans son premier rapport de première lecture 8 ( * ) , votre rapporteur général estime, dans un souci de clarté et de meilleure conformité aux dispositions communautaires, que la définition du prix des offres publiques obligatoires devrait être plus précise . Ainsi au lieu de prévoir que le prix soit « au moins équivalent », il est proposé que le prix soit « équivalent » au prix le plus élevé payé par l'offrant au cours de la période de douze mois précédant l'offre. Cette modification permettrait de mieux se conformer à l'esprit et la lettre de l'article 5 de la directive, selon lequel le prix d'une offre publique obligatoire est, par principe, le prix le plus élevé payé par l'offrant au cours d'une période donnée, ce principe pouvant connaître des dérogations en cas de disfonctionnement du marché . Dans cette dernière hypothèse, l'approche multicritères prendrait toute son importance.
Cette approche a le mérite de la simplicité, puisqu'elle réduit le risque de contestation du prix des offres obligatoires, et de la clarté, dans la mesure où elle établit une règle simple pour les investisseurs. Par ailleurs, si elle introduit une certaine rigidité dans la détermination d'une offre publique obligatoire, cette rigidité disparaît lorsque des disfonctionnements du marché existent. A ce titre, le règlement général de l'AMF devrait, selon le présent article préciser les « circonstances » et les « critères » permettant à l'autorité de marché de modifier le prix équitable. Il convient de rappeler que la directive donne des exemples précis de circonstances dans lesquelles la modification du prix est possible 9 ( * ) .
B. UN AMENAGEMENT DE L'ARTICLE 34 DE LA LOI DU 26 JUILLET 2005 À PARFAIRE
La rédaction actuelle du IV de l'article L. 433-3 du code monétaire et financier est empreinte d'une ambiguïté. En effet, comme le souligne le vote de l'amendement à l'Assemblée nationale, les conditions d'application du dispositif sont successivement cumulatives puis alternatives.
L'Assemblée nationale a opté en faveur de conditions alternatives, ce qui a pour conséquence une extension du champ du dispositif. Votre rapporteur général estime cependant que le choix de conditions cumulatives se justifie davantage :
- en premier lieu, il remarque que l'exposé des motifs de l'article 13 10 ( * ) du projet de loi pour la confiance et la modernisation retenait des conditions cumulatives puisqu'il ne faisait qu'étendre un dispositif existant : « Le droit français prévoit que lorsqu'une personne vient à prendre le contrôle d'une société mère française ou étrangère qui détient plus du tiers du capital ou des droits de vote d'une société fille dont les actions sont cotées en France , elle doit déposer une offre publique visant la société fille lorsque la société fille constitue une part essentielle des actifs de la société mère . L'article 13 vise également à étendre cette disposition aux sociétés filles cotées sur un marché réglementé de l'Espace économique européen ou sur un marché réglementé étranger lorsque la société mère est une société française. » ;
- en deuxième lieu, le dispositif préexistant à l'article 34 de la loi du 26 juillet 2005 (article 234-3 du règlement général de l'AMF) était fondé sur de deux conditions cumulatives : la détention d'un tiers au moins du capital ou des droits de vote et le fait de constituer un actif essentiel de la société détentrice ;
- en troisième lieu, votre rapporteur général rappelle que ce dispositif a un double objectif. Il permet d'une part aux actionnaires de la société dont le contrôle est pris indirectement d'être désintéressés dans les mêmes conditions que les actionnaires de la société-cible, et d'autre part, de mieux apprécier la valorisation de la société objet de l'offre qui possède avec ses filiales une forte proximité économique. A ce titre, la condition relative à la constitution d'un actif essentiel permet d'apprécier qualitativement cette proximité et de justifier le dépôt d'une offre publique obligatoire. Dès lors, ne prendre en compte que la part de détention de capital ou de droits de vote de la société mère dans la société fille (hypothèse ouverte en cas de conditions alternatives) sans avoir d'appréciation qualitative des relations entre ces deux groupes apparaît critiquable.
Compte tenu de ces remarques, votre rapporteur général vous propose de rendre cumulatives les conditions de mise en oeuvre du dispositif.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié
ARTICLE 4 - Définition de l'action de concert
Commentaire : le présent article définit la notion d'action de concert en cas d'offre publique d'acquisition, conformément aux dispositions de la directive 2004/25/CE du 21 avril 2004 concernant les offres publiques d'acquisition.
I. LE VOTE DU SÉNAT
Le présent article tend à transposer la définition de l'action de concert en cas d'offre publique d'acquisition posée par l'article 2 de la directive européenne du 21 avril 2004 concernant les offres publiques d'acquisition (OPA).
Il propose ainsi de compléter l'article L. 233-10 du code de commerce par un nouvel alinéa qui reprendrait les deux hypothèses visées par la directive : constituerait une action de concert dans le cadre d'une OPA, un accord conclu entre des personnes et l'auteur de l'offre publique en vue d'obtenir le contrôle de la société visée par l'offre, ou un accord conclu entre des personnes et la société cible afin de faire échouer l'offre.
Le Sénat a adopté cet article sans modification.
II. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
A l'initiative de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté avec un avis favorable du gouvernement, un amendement tendant à isoler la définition proposée par le présent article au sein d'un article spécifique du code de commerce.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Pour des raisons de clarté, votre rapporteur général approuve la rédaction proposée par l'Assemblée nationale.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 5 - Aménagement du régime du retrait obligatoire
Commentaire : le présent article vise à transposer et adapter, conformément à la directive européenne du 21 avril 2004, le régime de retrait obligatoire consécutif à une offre publique.
I. LE VOTE DU SÉNAT
Le présent article propose de compléter l'article L. 433-4 du code monétaire et financier par un nouvel alinéa afin de transposer spécifiquement le dispositif de retrait obligatoire suite à une offre publique .
Le retrait obligatoire pourrait ainsi être demandé par les actionnaires majoritaires détenant plus de 95 % du capital ou des droits de vote dans un délai de trois mois suivant la clôture d'une offre publique .
Contrairement à la procédure de droit commun, le retrait obligatoire suite à une offre publique ne comporterait pas la phase d'offre publique de retrait, ce qui est un facteur de simplification du droit des offres.
L'indemnisation par titre serait égale « au prix proposé lors de la dernière offre ou, le cas échéant, au résultat d'une évaluation multicritères », qui est actuellement systématique en matière de retrait obligatoire .
Le prix de la dernière offre correspond aux présomptions de la directive concernant le « prix juste » des titres des actionnaires dont il est demandé le retrait. Ainsi l'article 15 de la directive du 21 avril 2005 fixe deux cas de présomptions de prix juste :
- d'une part, le prix imposé par l'actionnaire majoritaire dans le cadre d'un retrait obligatoire suivant une offre volontaire serait présumé juste si l'offrant a acquis, par acceptation de ladite offre, « des titres représentant au moins 90 % du capital assorti de droits de vote faisant l'objet de l'offre ». Le caractère juste du prix serait ainsi validé par le marché, qui a estimé l'offre volontaire précédant le retrait obligatoire suffisamment satisfaisante pour permettre à l'offrant d'acquérir 90 % des droits de vote restant ;
- d'autre part, le prix imposé par l'actionnaire majoritaire dans le cadre d'un retrait obligatoire suivant une offre obligatoire serait juste si le prix correspond au prix de cette dernière offre, qui, selon l'article 5 de la directive est égal au prix équitable ( i.e le prix le plus élevé du titre au cours des douze derniers mois).
Lorsque ces présomptions sont contestées ou ne correspondent pas aux situations en cause, le montant de l'indemnisation serait fixé par l'évaluation multicritères.
A l'initiative de sa commission des finances, le Sénat a adopté un amendement autorisant, dans le cadre de la procédure de retrait obligatoire suite à une offre publique, une indemnisation des actionnaires en titres, tout en prévoyant qu'un règlement en numéraire soit systématiquement proposé à titre d'option.
II. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
A l'initiative de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté, avec l'avis favorable du gouvernement, un amendement tendant à compléter le dispositif adopté au Sénat concernant l'indemnisation potentielle en titres des détenteurs en cas de retrait obligatoire suite à une offre publique. Il prévoit ainsi une indemnisation systématique en numéraire -dont le montant serait consigné- lorsque les détenteurs de titres ne sont pas identifiés.
L'Assemblée nationale a également adopté, avec un avis favorable du gouvernement, un amendement de la commission des finances tendant à élargir le champ du retrait obligatoire aux titres donnant ou pouvant donner accès au capital.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre rapporteur général approuve la rédaction proposée par l'Assemblée nationale, qui, d'une part complète le dispositif adopté par le Sénat s'agissant de l'indemnisation potentielle en titres, et d'autre part, prend davantage en compte la diversité des titres détenus par les actionnaires.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
* 4 Séance du 20 octobre 2005, compte rendu intégral, Sénat.
* 5 Cf. commentaire de l'article 1 er du présent projet de loi.
* 6 Articles 234-6 à 234-8 du règlement général de l'AMF.
* 7 Cf. commentaire de l'article 1 er .
* 8 Rapport n° 20 (2005-2006).
* 9 Manipulation des cours, survenue d'évènements exceptionnels, sauvetage d'une entreprise en détresse...
* 10 Préfigurant l'article 34 de la loi du 26 juillet 2005.