AUDITION DE MME MICHÈLE ALLIOT-MARIE, MINISTRE DE LA DÉFENSE
Au cours d'une réunion tenue le mardi 25 octobre 2005, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission des finances a procédé à l'audition de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, sur la mission « Défense ».
M. Jean Arthuis, président , a remercié Mme Michèle Alliot-Marie, d'être venue présenter, devant la commission et les rapporteurs pour avis des autres commissions, les missions dont elle a la charge : les missions ministérielles « Défense » et « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », ainsi que les missions interministérielles « Sécurité » et « Recherche et enseignement supérieur ».
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la Défense , a précisé que pour la quatrième année consécutive les crédits du projet de loi de finances pour 2006 respectaient les objectifs de la loi n° 2003-73 du 27 janvier 2003 relative à la programmation militaire pour les années 2003 à 2008 (LPM). Elle a indiqué que les crédits de la mission « Défense » étaient présentés selon les règles prévues par la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), ce qui impliquait, à la fois, des objectifs de performance précis mesurant les résultats de l'action du ministère et un budget plus « transparent » et tourné vers la recherche de l'efficacité.
Elle a noté que la mission « Défense » était inscrite dans une logique globale d'objectifs et de résultats qui était naturelle au ministère, dont la première mission était d'assurer la protection du territoire national et la sécurité des citoyens. Elle a ajouté que cette mission tendait à accroître les performances du ministère dans le domaine économique. Elle a rappelé, à cet égard, que le ministère de la défense était le premier investisseur public de l'Etat, faisant travailler près de 10.000 entreprises, souvent des petites et moyennes entreprises ou industries, réparties sur l'ensemble du territoire, dont l'effectif total était de plus de 2 millions de salariés.
Mme Michèle Alliot-Marie a souligné que le ministère de la défense était également le premier « recruteur » de l'Etat, engageant chaque année 30 à 35.000 jeunes. Elle a précisé que les missions confiées à la défense concernaient à la fois l'emploi des jeunes, les entreprises, les usagers d'hôpitaux ou de la gendarmerie, les visiteurs de musées dont le ministère à la charge, mais aussi les chercheurs au sein de nombreux centres de recherche extérieurs.
Elle a observé que les crédits mis en oeuvre pour l'accomplissement des missions du ministère de la défense s'élèveraient, en 2006, à 47 milliards d'euros. Soulignant que la mise en oeuvre de la réforme budgétaire marquait la fin des comparaisons annuelles d'évolution des moyens, elle a toutefois rappelé que les crédits alloués à la mission « Défense » augmentaient de 3,4 % hors pensions, et de 2,2 % en incluant celles-ci, ce qui correspondait aux objectifs fixés par la LPM.
Mme Michèle Alliot-Marie a relevé que la LOLF permettait désormais au Parlement de disposer d'indicateurs d'efficience, de qualité des services et d'efficacité socio-économique pour mesurer les résultats obtenus par le ministère de la défense. Elle a noté que l'évolution de certains indicateurs mesurant la capacité de l'armée française à atteindre l'objectif « disposer d'une capacité extérieure », était suivie avec attention par les organismes internationaux tels que l'Organisation du traité de l'Atlantique-Nord (OTAN). Elle a souligné que les indicateurs de performance de la mission « Défense » témoignaient de son souci de permettre une lecture fiable et aisée des performances du ministère de la défense. Elle a cité, à titre d'exemple, l'indicateur relatif à l'évolution des devis permettant d'évaluer la progression de l'objectif « mettre à disposition des armées des équipements en maîtrisant le coût ».
Mme Michèle Alliot-Marie , rendant hommage à M. Alain Lambert qui était l'un des initiateurs de la LOLF, a estimé que la réforme budgétaire était une chance pour la gestion publique et pour la défense. Elle a indiqué que sa mise en oeuvre s'inscrivait dans la continuité de la stratégie ministérielle de réforme conduite depuis 2003.
Elle a relevé que cette stratégie reposait sur la clarification des responsabilités des différents acteurs du ministère de la défense, rappelant que la délégation générale pour l'armement (DGA) avait été réformée dans cette perspective et que les pouvoirs d'arbitrage du chef d'état-major des armées avaient été accrus en 2005 afin de lui permettre de devenir le coordinateur des chefs d'état-major des armées, et non plus le « primus inter pares ».
Mme Michèle Alliot-Marie a noté que la stratégie de réforme ministérielle avait également pour objectif d'accroître l'efficacité du ministère en mutualisant certains services, tels que celui des archives, avec la création, en 2004, du service historique de la défense, et celui des infrastructures regroupant les différents services constructeurs dont disposait jusqu'à présent chacune des armées.
Elle a précisé que la modernisation de son ministère s'appuyait sur la mise en oeuvre de modes de gestion innovants, tels que la location de longue durée d'avions de transport, l'externalisation de certaines tâches et la signature de contrats de partenariats public-privé. Elle a souligné que, depuis 2002, les économies ainsi réalisées représentaient plus de 480 millions d'euros.
Enfin, à la demande de M. Jean Arthuis, président, Mme Michèle Alliot-Marie a souhaité rappeler devant la commission, les objectifs « lolfiens », c'est-à-dire conformes à l'esprit de la réforme budgétaire, qu'elle s'était fixées. Elle a constaté que le financement des surcoûts des opérations extérieures (OPEX) était prévu à hauteur de 250 millions d'euros par le projet de loi de finances pour 2006, soit près de la moitié du coût prévisionnel total des interventions extérieures de la France. Elle s'est engagée à achever la budgétisation des OPEX dans le projet de loi de finances initiale pour 2007.
Elle a déclaré que la résorption des reports de crédits, dont le montant total dépassait 2 milliards d'euros en 2005, était engagée. Elle a indiqué que l'importance des crédits reportés d'une année à l'autre était due au mode de financement des OPEX. Elle a précisé que le ministère de la défense devait assurer le préfinancement du surcoût des OPEX en gestion jusqu'à l'adoption de crédits supplémentaires en loi de finances rectificative. Elle a observé que les crédits ouverts en loi de finances rectificative, s'ils permettaient de lever les réserves mises sur les autres crédits du ministère, intervenaient cependant trop tardivement dans l'année pour permettre au ministère de consommer l'ensemble de ces crédits. Elle a noté que la pratique interdisant de dépenser plus que la dotation votée en loi de finances initiale par le Parlement, contribuait également à l'accroissement des crédits reportés à la gestion suivante.
Enfin, Mme Michèle Alliot-Marie a annoncé que l'externalisation de la gestion immobilière du ministère de la défense, qui avait été retardée en raison de la complexité de sa mise en oeuvre, serait effective avant la fin de l'année 2006.
Elle a estimé que la réalisation de la LPM et de la loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (LOPSI) permettait d'inscrire l'effort de défense de la France dans la continuité. Elle a observé que cet effort permettait au ministère de la défense d'assurer la sécurité des Français et d'accroître la capacité de la France à oeuvrer en faveur du règlement des conflits et du maintien de la paix, de développer des équipements nécessaires aux armées pour l'exercice de leur mission, tout en favorisant la recherche duale, et de contribuer à la croissance et à l'avenir de la France.
M. Jean Arthuis, président , a observé que les engagements pris par Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, s'inscrivaient dans la durée et n'auraient qu'assez peu d'effets en 2006. Il a toutefois salué la volonté du ministère d'améliorer progressivement la sincérité de son budget.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a souhaité obtenir des précisions sur les modalités de mise en oeuvre des financements innovants au sein du ministère de la défense, estimant que celui-ci était précurseur dans ce domaine. Il a rappelé que l'intérêt que suscitait le développement de financements non budgétaires devait être modéré par la nécessité de procéder à un examen rigoureux de leur efficacité.
Il s'est interrogé sur la mise en oeuvre par le ministère de la défense d'un « service national adapté », destiné à l'insertion sociale et professionnelle des jeunes peu qualifiés. Il a rappelé que le financement de ce projet ne relevait pas des crédits de la mission « Défense ».
Mme Michèle Alliot-Marie a indiqué que le recours à un mode de financement innovant tendait à fournir aux armées les équipements nécessaires à l'exercice de leur mission pour lesquels aucun financement budgétaire n'était prévu. Elle a relevé que la signature d'un contrat de location à longue durée de matériels de transport aérien répondait aux besoins des armées dans l'attente des livraisons de l'avion A 400 M, garantissait la disponibilité de la flotte, et était moins onéreux qu'une location au cas par cas.
M. Jean Arthuis, président , a estimé que cet exemple de financement innovant était probant, dans la mesure où il permettait de réaliser des économies tout en répondant plus efficacement aux besoins des armées.
Mme Michèle Alliot-Marie a insisté sur le coût que représentait le maintien en condition opérationnelle de matériels déjà anciens. Elle a noté que l'entretien des nouveaux matériels plus sophistiqués serait encore plus élevé. Elle a déclaré que le ministère de la défense étudiait la possibilité d'acheter non plus des matériels, onéreux à entretenir, mais des heures de disponibilité garanties. Elle a observé que la prochaine loi de programmation militaire débutant en 2009 devrait prendre en compte cet enjeu. Elle a indiqué que si les industriels risquaient d'accroître leurs coûts afin de s'adapter à cette évolution, des économies substantielles seraient réalisées sur la durée de la période de programmation grâce à la réduction de crédits nécessaires au maintien en condition opérationnelle. Elle a souhaité que le Parlement soit pleinement associé à la réflexion sur cette importante modification de la politique d'équipement du ministère de la défense.
Mme Michèle Alliot-Marie a précisé que l'externalisation de la formation des pilotes d'hélicoptère était prometteuse et qu'elle permettrait de réaliser leur formation initiale à moindre coût, sur des hélicoptères banalisés, tout en préservant les hélicoptères militaires dont le nombre d'heures de vol était déjà significatif.
Elle a noté que la mise en oeuvre des financements innovants se heurtait parfois à des obstacles, comme cela avait été le cas pour les frégates multimissions (FREMM) et l'externalisation des logements des gendarmes. Elle a rappelé que le financement budgétaire des FREMM allait coûter un milliard d'euros de plus que le projet de financement innovant.
Mme Michèle Alliot-Marie a indiqué que le projet « défense, deuxième chance », proche du service militaire adapté mis en oeuvre dans les départements d'outre-mer, devait concerner, chaque année, près de 20.000 jeunes dont l'échec scolaire, professionnel ou social, était décelé lors de la journée d'appel et de préparation à la défense (JAPD). Elle a ajouté que ces jeunes pourraient être accueillis, sur la base du volontariat, dans des structures spécifiques pour une durée d'un an renouvelable une fois afin de bénéficier d'une remise à niveau scolaire et comportementale, assortie d'un apprentissage professionnel. Elle a annoncé que les bénéficiaires de ce dispositif se voyaient attribuer une allocation de 300 euros mensuels, dont la moitié était capitalisée afin de leur être versée à l'issue de leur contrat et de favoriser ainsi leur réinsertion.
Mme Michèle Alliot-Marie a rappelé que les locaux accueillant ces jeunes étaient soit d'anciens bâtiments du ministère de la défense, devenus inutiles depuis la fin de la conscription, soit des locaux mis à disposition par les collectivités territoriales, soit dans le cas du premier centre ouvert à Montry, un ancien centre régional d'éducation physique et sportive (CREPS). Elle a précisé que le financement de ce programme de réinsertion était assuré par les crédits du ministère de la cohésion sociale et par une contribution de l'Union européenne et des collectivités territoriales volontaires. Elle a donné l'assurance que le ministère de la défense apportait un soutien logistique à cette action en fournissant du personnel d'encadrement, l'objectif étant de permettre à des militaires à la retraite, distingués pour leur capacité pédagogique, de signer un contrat complémentaire afin de gérer les centres d'accueil, en collaboration avec le personnel de l'éducation nationale et quelques officiers en activité.
M. Yves Fréville, rapporteur spécial de la mission « Défense », s'est félicité du respect des objectifs de la LPM et du montant des économies réalisées par le ministère de la défense grâce à une gestion efficace des dépenses publiques depuis 2002. Il a souhaité savoir si la résorption des 2,8 milliards d'euros de crédits reportés se traduirait par un montant de dépenses militaires supérieur à la dotation votée en loi de finances initiale jusqu'en 2007.
Mme Michèle Alliot-Marie a confirmé que jusqu'à la résorption complète des crédits reportés, le ministère de la défense serait autorisé à dépasser l'autorisation budgétaire du Parlement.
M. Yves Fréville, rapporteur spécial de la mission « Défense », a rappelé que le budget de la mission « Défense » était l'un des plus importants budgets d'équipement de l'Etat et qu'il était le seul à disposer d'un programme dédié à l'investissement. Il s'est demandé comment étaient rendus les arbitrages permettant la répartition des crédits entre le maintien en condition opérationnelle et l'acquisition de nouveaux matériels. Il a souligné que la LPM pour les années 2003 à 2008 semblait avoir sous évalué les besoins du maintien en condition opérationnelle. Il a estimé qu'il existait un problème « de soudure » entre la livraison des nouveaux matériels et la fin de vie des équipements existants, problème qui démontrait toute l'importance du maintien en condition opérationnelle. Il a souhaité savoir si le ministère se trouvait d'ores et déjà confronté au dilemme d'avoir à choisir entre l'entretien de matériels vieillissants et l'acquisition de nouveaux équipements.
M. Yves Fréville, rapporteur spécial de la mission « Défense », s'est réjoui de l'importante augmentation des crédits consacrés aux études amont.
Il s'est demandé si les retards sur les calendriers prévisionnels de livraison de certains équipements tels que les hélicoptères Tigre et NH 90 ou les chars Leclerc avaient des causes essentiellement financières ou si la qualité des prestations des industries de l'armement devait être mise en cause.
Enfin, il a souhaité savoir où en était le rapprochement industriel de DCN SA et de la société Thalès et quelles étaient les perspectives de GIAT-Industries.
M. François Trucy, rapporteur spécial de la mission « Défense » , a voulu connaître l'appréciation de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, sur le rattachement des crédits de la gendarmerie nationale à la mission interministérielle « Sécurité ». Il a souhaité obtenir des précisions sur les nouvelles modalités de formation des gendarmes, et notamment sur les coopérations prévues avec les armées dans ce domaine. Il s'est demandé si la gestion du logement des gendarmes, des dépenses d'informatique et de système de communication de la gendarmerie relevaient toujours de la mission « Défense ». Il s'est inquiété de la façon dont la compatibilité des équipements informatiques et de communication de la gendarmerie était assurée, tant avec les forces de la police nationale qu'avec les armées.
M. François Trucy, rapporteur spécial de la mission « Défense », s'est interrogé sur les perspectives d'évolution de la réserve militaire et a demandé si des mesures spécifiques étaient prévues afin d'en renforcer l'attractivité.
Estimant que l'action sociale du ministère de la défense devait être adaptée aux besoins d'une armée professionnelle, il a souhaité savoir quels étaient les projets du ministère dans ce domaine.
M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial de la mission « Sécurité », s'est demandé si des audits étaient prévus afin d'évaluer et d'améliorer les performances du ministère de la défense. Il a souhaité obtenir des précisions sur les projets conduits par l'agence européenne de défense (AED). Enfin, il a voulu connaître l'état de réalisation de la LOPSI et s'est interrogé sur la nécessité d'adapter ses objectifs, notamment en termes de création d'emploi, à la montée de l'insécurité.
M. Jacques Baudot, rapporteur spécial de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » , a rappelé que les anciens combattants étaient au nombre de 1,417 million et que les assujettis au régime de pensions des anciens combattants représentaient 2,4 millions de personnes. Il a indiqué que la question de la revalorisation des pensions se posait, tant pour les anciens combattants que pour les conjoints survivants, précisant qu'une augmentation d'un point des retraites des anciens combattants coûtait 18 millions d'euros par an.
M. Charles Guéné, rapporteur spécial pour avis de la mission « Sécurité civile » au nom de la commission des lois, a souhaité savoir comment était prise en compte la montée de la menace terroriste.
M. Jean Arthuis, président , a demandé à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, si les modalités de « copilotage » de missions interministérielles dont elle avait la charge étaient définies.
Mme Michèle Alliot-Marie a indiqué que la direction partagée des missions interministérielles « Sécurité » et « Recherche et enseignement supérieur » ne posait aucune difficulté et qu'elle serait donc présente avec les autres ministres concernés lors de l'examen des crédits de ces missions devant le Parlement.
Elle a observé que la LPM était déjà largement formalisée lorsqu'elle avait pris ses fonctions et qu'elle n'avait pu, en conséquence, obtenir l'augmentation des crédits de maintien en condition opérationnelle qu'elle estimait nécessaire. Elle a relevé la pertinence de l'analyse de M. Yves Fréville, rapporteur spécial, sur la difficulté qu'il y avait à privilégier le maintien en condition opérationnelle au détriment des nouvelles acquisitions, ces deux postes budgétaires entrant en concurrence tout en étant complémentaires.
Mme Michèle Alliot-Marie a constaté que la révision annuelle des référentiels de la LPM avait permis de dégager des marges de manoeuvre réduites permettant de maintenir un niveau relativement suffisant de crédits alloués au maintien en condition opérationnelle des équipements des armées et d'améliorer, ainsi, leur disponibilité. Elle a ajouté que, depuis 2002, les taux de disponibilité et d'activité des équipements des armées avaient augmenté. Elle a indiqué que l'indisponibilité des appareils de l'armée de l'air avait été ramenée de dix jours à un jour, que le taux de disponibilité globale des bâtiments de la marine nationale avait progressé de 10 %. Elle a remarqué que les taux de disponibilité des équipements de l'armée de terre restaient très variables en raison de la diversité du degré d'obsolescence des matériels et de leur surutilisation, au regard de leur potentiel, dans le cadre des OPEX. Elle a souligné que les équipements utilisés en OPEX avaient un taux de disponibilité de 92 %, ce qui était considérable étant donné le nombre d'OPEX auxquelles participait la France.
Elle a considéré que les retards de livraison des hélicoptères Tigre et NH 90 et des chars Leclerc tenaient plus à des problèmes industriels et techniques qu'à des problèmes financiers. Elle a déploré cette situation, regrettable, tant pour le bon fonctionnement des armées que pour le développement des exportations françaises. Elle a affirmé que le ministère de la défense veillait avec la plus grande attention, à éviter tout nouveau dérapage en soumettant les sociétés concernées à un suivi quasi-journalier.
Mme Michèle Alliot-Marie a estimé que la restructuration de GIAT-Industries était désormais sur la bonne voie. Elle a précisé que le ministère de la défense avait tenu ses engagements en termes d'apports de crédits, d'implantation des unités de production sur le territoire et de gestion sociale des personnels. Elle a regretté que tous les partenaires engagés dans la restructuration de cette entreprise n'aient pas honoré aussi scrupuleusement leurs obligations. Elle a souhaité que soit définie une politique de développement novatrice et ambitieuse pour GIAT-Industries, première étape indispensable à la mise en oeuvre de partenariats européens.
Mme Michèle Alliot-Marie a jugé que la transformation de DCN en société anonyme était une pleine réussite. Elle a considéré que le rapprochement de DCN-SA avec la société Thalès constituait un projet industriel solide, préfigurant le développement d'une industrie de l'armement naval européenne. Elle a estimé que la consolidation des industries d'armement au niveau européen était indispensable pour faire face à la concurrence des pays de l'Asie du sud-est, et a indiqué que la collaboration entre Thalès et DCN-SA devrait être précisée prochainement.
Elle a assuré que les crédits relatifs à la formation, à la logistique, au logement, aux systèmes informatiques et aux systèmes de communication de la gendarmerie nationale étaient inscrits au sein de la mission « Défense ». Elle a indiqué qu'elle veillait à la compatibilité des équipements de la gendarmerie avec ceux de la police nationale d'une part, et des armées, d'autre part.
Elle a rappelé qu'elle portait une attention particulière à la « remilitarisation » de la gendarmerie nationale, à travers la réouverture des grandes écoles militaires destinées aux officiers de gendarmerie, et la participation d'escadrons de gendarmes aux OPEX, notamment en Côte d'Ivoire. Elle a précisé qu'elle souhaitait que tous les officiers de gendarmerie aient pris part à une OPEX à l'horizon 2010.
Mme Michèle Alliot-Marie a estimé que la gendarmerie nationale avait vocation, dans les OPEX, à gérer les situations de fin de crise et à canaliser les foules. Elle a souligné l'importance symbolique pour les populations concernées du « passage de l'uniforme kaki » de l'armée de terre à l'uniforme bleu « de la gendarmerie ». Elle s'est déclarée réticente quant aux projets de spécialisation d'unités de l'armée de terre dans la gestion des situations de fin de conflits qui relevaient de la compétence de la gendarmerie nationale.
Elle a observé que la réserve militaire constituait un soutien indispensable à l'armée active en comblant certaines de ses lacunes. Elle a souhaité renforcer son attractivité en créant de véritables « filières d'emplois réservistes », en reculant la limite d'âge des réservistes, en offrant aux volontaires de participer aux OPEX et en développant une nouvelle forme de « réserve opérationnelle citoyenne ». Elle a précisé que cette dernière permettrait aux réservistes qui le souhaitaient d'intervenir, aux côtés des « forces d'active » pour mettre en place le soutien à la reconstruction du pays concerné. Elle a considéré que les chefs d'entreprise réservistes pourraient être intéressés par les perspectives économiques qui leur échappaient aujourd'hui largement, tout en contribuant ainsi à renforcer l'image de la France.
Mme Michèle Alliot-Marie a observé que le recrutement de personnels civils s'améliorait et que la gestion de cette catégorie de personnels pouvait évoluer, en accord avec les syndicats, afin de mettre en place un système de formation permanente directement lié aux perspectives de promotion interne. Elle a souligné que cette évolution permettrait de combler les besoins en personnels techniques qualifiés des armées.
Elle a noté que le service de santé des armées bénéficierait, en 2006, de la création de 20 postes supplémentaires et, qu'à la fin de la période de programmation actuelle, les effets de la suppression de la conscription ne seraient plus perceptibles.
Mme Michèle Alliot-Marie a indiqué que le projet de loi de finances pour 2006 prévoyait une augmentation des crédits destinés à l'amélioration de la situation des personnels militaires et civils. Elle a précisé que la construction de nouvelles crèches était indispensable. De plus, elle a observé que, pour répondre aux attentes des personnels, l'extension du bénéfice de certaines prestations sociales aux signataires d'un pacte civil de solidarité (PACS) pouvait être accordée, à condition que le PACS ait été signé trois ans auparavant.
Elle a annoncé que deux audits étaient prévus sur des crédits du ministère de la défense : l'un sur la gestion des centres payeurs des armées et l'autre sur le délai de traitement des pensions militaires des armées.
M. Jean Arthuis, président , s'est demandé si ces audits permettraient de réaliser des économies substantielles.
Mme Michèle Alliot-Marie a estimé que d'importantes économies pourraient être dégagées grâce à la réforme des centres payeurs, à condition que certaines règles et procédures comptables soient assouplies. Elle a souligné, que pour les OPEX, l'achat de matériels sur place reviendrait moins cher que son envoi depuis la France s'il était autorisé, et que le rapatriement obligatoire de tous les équipements utilisés en OPEX représentait ainsi souvent un coût supérieur à la valeur de ces derniers.
Elle a annoncé que l'Agence européenne de défense (AED) disposait désormais de locaux, de personnels et de son propre budget. Elle a déclaré que les premiers dossiers de l'agence portaient sur le domaine spatial, les drones et les avions ravitailleurs. Elle a insisté sur la nécessité de doter l'agence européenne d'armement d'un réel projet de développement, celui-ci étant toutefois conditionné à la participation financière effective de tous les partenaires concernés.
S'agissant de la LOPSI, Mme Michèle Alliot-Marie a regretté que sa réalisation n'ait pas été encadrée par des objectifs annuels. Elle a affirmé qu'un effort particulier serait fait en 2006 afin de garantir la pleine exécution de cette loi grâce à l'attribution de 200 millions d'euros supplémentaires pour les équipements et la création de 2.000 postes de gendarmes. Elle a considéré que les créations de postes prévues par la LOPSI correspondaient au besoin de renforcer la sécurité nationale dans un contexte de montée des menaces terroristes.
Mme Michèle Alliot-Marie a estimé qu'une revalorisation des pensions des anciens combattants n'aurait de sens que si elle s'élevait à deux points, ce qui représentait 40 millions d'euros. Rappelant que les crédits figurant dans la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » étaient très contraints, elle a indiqué qu'il semblait difficile de trouver de nouvelles marges de manoeuvre.
Enfin, elle a rappelé que la lutte contre le terrorisme était une préoccupation majeure du ministère de la défense qui mobilisait pour cela tous ses services de renseignement. Elle a souligné que la marine nationale exerçait une activité importante de surveillance des côtes, et que l'armée de l'air était en niveau d'alerte rouge, c'est-à-dire qu'elle pouvait garantir le décollage d'un avion d'intervention deux minutes après en avoir reçu l'ordre afin de réaliser l'interception nécessaire dans un laps de temps n'excédant pas dix minutes. Elle a rappelé, de plus, que l'armée et la gendarmerie nationale participaient très activement au plan Vigipirate.
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial de la mission « Recherche et enseignement supérieur », a souhaité obtenir des précisions sur la mise en oeuvre du projet « Sécoia » visant à l'élimination des obus chimiques de la première guerre mondiale, collectés notamment dans le nord de la France.
Mme Michèle Alliot-Marie a précisé que les difficultés ayant retardé la mise en oeuvre de ce projet avaient été analysées, la société Thalès ayant fourni les efforts nécessaires.
M. Gérard Longuet a souhaité savoir combien de personnels du ministère de la défense encadreraient les 20.000 jeunes bénéficiant du projet « défense deuxième chance ».
Mme Michèle Alliot-Marie a indiqué que le centre de Montry disposait de cinq personnels militaires en activité. Elle a précisé que 10.000 encadrants devraient participer à la mise en oeuvre du projet d'insertion des jeunes en difficulté et que seuls quelques dizaines d'officiers seraient mobilisées.
M. Jean Arthuis, président , revenant sur la problématique de la sous-traitance, a souhaité attirer l'attention de Mme Michèle Alliot-Marie sur le risque que les marchés passés par son ministère favorisent, de fait, des sous-traitants privilégiant l'« outsourcing » hors des frontières. Il a souhaité savoir si le ministère pouvait évaluer l'impact de son activité économique sur la localisation des emplois en France.
Mme Michèle Alliot-Marie s'est déclarée favorable à la mise en oeuvre d'une inspection ou d'une enquête sur ce sujet essentiel pour le développement de la France et très complexe.
M. Jean Arthuis, président , a vivement remercié Mme Michèle Alliot-Marie pour la clarté et la précision de son intervention.