2. Un « prix équitable » plus conforme à la définition communautaire
La définition du prix équitable, en cas d'offre publique obligatoire, et les pouvoirs dont dispose l'AMF pour en demander la modification, en se fondant en particulier sur l' « analyse multicritères » en cas de dysfonctionnements du marché, requièrent une interprétation précise de la directive.
Votre rapporteur général tend à privilégier une lecture plus proche des dispositions communautaires, qui font du prix équitable le prix le plus élevé payé par l'offrant, et vous propose à cet égard deux amendements à l'article 2 du présent projet de loi, tendant, d'une part, à prévoir que le prix proposé doit être « équivalent » au prix le plus élevé payé par l'offrant , et non un prix minimum « au moins équivalent », et, d'autre part, à insérer dans la loi, plutôt que dans le règlement général de l'AMF, une période de douze mois constituant la référence pour la détermination de ce prix équitable.
3. Un nouveau seuil pour les offres publiques de retrait obligatoire
L'article 5 du présent projet de loi, relatif au régime spécifique de retrait obligatoire faisant suite à une OPA, opte pour le seuil de 95 % du capital ou des droits de vote, qui correspond à la première des deux options ouvertes par le deuxième paragraphe de l'article 15 de la directive, et au seuil actuel 30 ( * ) de la mise en oeuvre d'une offre publique de retrait obligatoire en complément d'une offre publique de retrait. Votre rapporteur général estime que notre pays serait fondé à exercer plutôt la seconde option , qui correspond à un seuil représentant 90 % du capital assorti des droits de vote de la cible et 90 % des droits de vote faisant l'objet de l'offre, qui représentent le « flottant ».
Cette solution, qui se traduirait par un seuil le plus souvent compris entre 90 % et 95 % 31 ( * ) , selon la participation initialement détenue par l'offrant, serait en effet plus pragmatique en ce qu'elle tiendrait compte de la liquidité de la société cible et accorderait une prime à l'offrant qui initierait l'opération « les mains vides », et permettrait de se rapprocher du seuil appliqué par d'autres Etats membres, tels que le Royaume-Uni et la Belgique.
4. Allier le gouvernement d'entreprise et la liberté statutaire
Votre rapporteur général partage enfin l'approche présentée dans le rapport du groupe de travail précité et transcrite aux articles 10 à 19 du présent projet de loi, s'agissant des options ouvertes sur les articles 9 et 11 de la directive. La transposition « défensive » des dispositions de l'article 9, c'est-à-dire le principe de l'approbation ou de la confirmation préalable par l'assemblée générale, en cours d'offre, des mesures de défense envisagées par la société cible, permet en effet de promouvoir le rôle des actionnaires , qui en tant que détenteurs du capital « supportant le risque ultime de la société » 32 ( * ) , doivent pouvoir apprécier l'intérêt d'une opération exerçant des conséquences sur leurs droits patrimoniaux, indépendamment des intérêts des dirigeants. La levée de l'option afférente à la réserve de réciprocité permet néanmoins d'établir une égalité des conditions entre l'offrant et la société cible , de telle sorte que cette dernière n'ait pas, en quelque sorte, à supporter les conséquences éventuellement négatives de sa vertu.
Votre rapporteur général vous propose néanmoins certains amendements rédactionnels, ainsi que la fixation par voie réglementaire, conformément au droit actuel, de délais plus courts pour la convocation de l'assemblée générale , qui en pratique ne peut que rarement être réunie pour se prononcer en période d'offre.
Concernant les dispositions optionnelles de l'article 11 de la directive, relatives à la suspension ou à l'inopposabilité, en période d'offre, des restrictions statutaires ou conventionnelles au transfert de titres et à l'exercice des droits de vote, votre rapporteur général adhère au principe de liberté des sociétés promu par le présent projet de loi, et à la consécration législative de certaines suspensions d'ores et déjà appliquées par l'AMF. La liberté statutaire et conventionnelle, principe fondamental de notre droit des sociétés, doit prévaloir, d'autant qu'elle est aujourd'hui assortie d'une transparence en amont des pactes d'actionnaires.
Toutefois, votre rapporteur général considère que les sociétés qui choisiraient à titre individuel l'option d'adhérer totalement aux dispositions de la directive doivent pouvoir se prévaloir du principe de réciprocité , et écarter les contraintes de l'article 11 de la directive si elles sont attaquées par des initiateurs qui n'adhèreraient pas aux mêmes « règles du jeu ».
* 30 Prévu par le II de l'actuel article L. 433-4 du code monétaire et financier.
* 31 Un seuil supérieur à 95 % serait requis dès lors que la participation originelle de l'initiateur serait supérieure à 50 % du capital et des droits de vote, hypothèse peu fréquente.
* 32 Selon l'expression utilisée par le groupe de haut niveau d'experts en droit des sociétés, précité.