Rapport n° 196 (2004-2005) de M. Adrien GOUTEYRON , fait au nom de la commission des finances, déposé le 16 février 2005
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AVANT-PROPOS
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I. LA MODERNISATION DES RELATIONS
FRANCO-MONÉGASQUES
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II. LES DISPOSITIONS TECHNIQUES DE L'AVENANT
À LA CONVENTION
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A. L'HISTORIQUE DE L'AVENANT À LA
CONVENTION
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B. LE DISPOSITIF DE L'AVENANT
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1. Les limites posées à la
déduction des rémunérations des dirigeants par les
sociétés soumises à l'impôt monégasque sur
les bénéfices
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2. L'imposition des résidents
français de Monaco à l'ISF
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3. L'amélioration du traitement fiscal des
relations économiques entre des sociétés
dépendantes établies en France, d'une part, et à Monaco,
d'autre part
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1. Les limites posées à la
déduction des rémunérations des dirigeants par les
sociétés soumises à l'impôt monégasque sur
les bénéfices
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C. L'ÉCHANGE DE LETTRES
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D. L'IMPACT DE LA CONVENTION SUR LES
RÉSIDENTS FRANÇAIS DE MONACO
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A. L'HISTORIQUE DE L'AVENANT À LA
CONVENTION
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I. LA MODERNISATION DES RELATIONS
FRANCO-MONÉGASQUES
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EXAMEN EN COMMISSION
N° 196
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2004-2005
Annexe au procès-verbal de la séance du 16 février 2005 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, autorisant l'approbation de l' avenant à la convention fiscale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Son Altesse Sérénissime le Prince de Monaco , signée à Paris le 18 mai 1963 et modifiée par l'avenant du 25 juin 1969 (ensemble un échange de lettres),
Par M. Adrien GOUTEYRON,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis, président ; MM. Claude Belot, Marc Massion, Denis Badré, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Yann Gaillard, Jean-Pierre Masseret, Joël Bourdin, vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Michel Moreigne, François Trucy, secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Jacques Baudot, Mme Marie-France Beaufils, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Mme Nicole Bricq, MM.Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Jean-Claude Frécon, Yves Fréville, Paul Girod, Adrien Gouteyron, Claude Haut, Jean-Jacques Jegou, Roger Karoutchi, Alain Lambert, Gérard Longuet, Roland du Luart, François Marc, Michel Mercier, Gérard Miquel, Henri de Raincourt, Michel Sergent, Henri Torre, Bernard Vera.
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 1437, 1878 et T.A. 356
Sénat : 84 (2004-2005)
Traités et conventions. |
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
Le présent projet de loi soumis à votre examen a pour objet d'autoriser l'approbation de l'avenant à la convention fiscale entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de son Altesse Sérénissime le Prince de Monaco, signée à Paris le 18 mai 1963 et modifiée par l'avenant du 25 juin 1969.
La signature de l'avenant, signé à Monaco le 26 mai 2003, s'inscrit dans un cadre plus large de modernisation des relations bilatérales et de renforcement de la souveraineté de la Principauté, qui s'est traduit par la signature, le 24 octobre 2002, d'un traité destiné à adapter et à confirmer les rapports d'amitié et de coopération entre la République française et la Principauté de Monaco. Ce traité a vocation à remplacer le traité du 17 juillet 1918.
L'avenant faisant l'objet du présent projet de loi constitue une des modalités d'application du traité précité qui prévoit, en son article 6, que « la République française et la Principauté de Monaco concluent des conventions particulières dans les domaines d'intérêt commun ».
I. LA MODERNISATION DES RELATIONS FRANCO-MONÉGASQUES
La négociation du nouveau traité destiné à adapter et à confirmer les rapports d'amitié et de coopération entre la République française et la Principauté de Monaco s'est déroulée de 1998 à 2002. Elle a répondu à une demande déjà ancienne des autorités monégasques de voir mieux reconnus les éléments de leur souveraineté sur le plan politique.
Elle s'est accompagnée de la négociation d'accords spécifiques qui a abouti à l'avenant à la convention fiscale faisant l'objet du présent projet de loi. Celle-ci était rendue nécessaire par l'intégration économique et financière entre la France et Monaco.
A. LE NOUVEAU TRAITÉ DU 24 OCTOBRE 2002
1. La « communauté de destin » franco-monégasque
Le traité du 17 juillet 1918 avait défini les termes d'une sorte de « souveraineté encadrée » de la Principauté de Monaco, sur laquelle la France, selon son préambule exerçait une « amitié protectrice ».
Le préambule du nouveau traité évoque, lui, entre la France et Monaco les « relations étroites et privilégiées qui sont le reflet de leur amitié traditionnelle, telles qu'elles sont issues de l'Histoire et telles qu'elles s'inscrivent dans leur communauté de destin ».
L'article premier du traité du 24 octobre 2002 renforce la souveraineté de la Principauté. Il dispose que : « la République française assure à la Principauté de Monaco la défense de son indépendance et de sa souveraineté et garantit l'intégrité du territoire monégasque dans les mêmes conditions que le sien ».
2. La concertation bilatérale
Le traité du 17 juillet 1918 apportait une limitation substantielle à la souveraineté monégasque en prévoyant que celle-ci devrait être en parfaite conformité avec les intérêts politiques, militaires, navals et économiques de la France.
Désormais, c'est de concertation bilatérale qu'il est question à l'article 2 du nouveau traité. La Principauté de Monaco doit s'assurer par une concertation appropriée et régulière que ses relations internationales sont conduites sur les questions fondamentales en convergence avec celles de la République française.
De manière naturellement asymétrique, l'article 2 prévoit que la France se concerte avec la Principauté de Monaco en vue de prendre en compte les intérêts fondamentaux de celle-ci.
3. La fin de l'agrément en cas de modification de l'ordre successoral
Le traité du 17 juillet 1918, en abordant la question de l'ordre successoral de Monaco, visait à éviter le risque, évidemment problématique à cette période, de voir un prince allemand monter sur le trône de la Principauté.
Le contexte historique ayant profondément changé, le traité du 24 octobre 2002 prévoit une simple information de la France en cas de modification de l'ordre successoral à Monaco.
B. L'INTÉGRATION ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE ENTRE LA FRANCE ET MONACO
Depuis 1945, il existe une très large intégration financière entre Monaco et la France. Cette intégration est totale en matière monétaire (Monaco utilisait le franc, et utilise désormais l'euro depuis la convention monétaire du 26 décembre 2001).
Elle est forte en matière bancaire : les banques monégasques sont ainsi soumises au droit bancaire français, agréées par le CECEI et contrôlées par la Commission bancaire, sauf en matière de blanchiment, domaine qui relève d'une autorité monégasque (le SICCFIN).
En outre, les autorités monégasques participent à l'élaboration de la réglementation financière française. Par ailleurs, en matière fiscale et douanière, les fonctions sont remplies par des fonctionnaires français en détachement.
Néanmoins, le rôle de places financières telles que celle de Monaco, qui font figure de « paradis fiscaux », a été critiqué par de nombreux organismes internationaux, dans le cadre du renforcement de la lutte contre le blanchiment des capitaux.
Certains rapports ont ainsi mis en évidence dans un passé récent un certain nombre d'insuffisances et souvent un écart important entre le droit et la pratique monégasque, en particulier dans les domaines où Monaco a développé un droit et des autorités de contrôle spécifiques (lutte contre le blanchiment (SICCFIN) et activités financières sur titres).
La convention monétaire relative à l'introduction de l'euro à Monaco, conclue le 26 décembre 2001, a néanmoins marqué une étape importante dans le rapprochement du droit interne de la Principauté avec le droit européen, en ce qui concerne notamment la lutte contre le blanchiment et de fiscalité de l'épargne sont fondamentaux.
Concernant le volet fiduciaire de l'accord, la Principauté s'est engagée à collaborer étroitement avec la Communauté européenne pour lutter contre la contrefaçon et à réprimer et sanctionner toute contrefaçon éventuelle de billets et de pièces libellés en euro.
Concernant le volet bancaire et financier de la convention, l'intégration monétaire complète de Monaco à la zone euro, et notamment l'accès direct de ses établissements de crédit aux systèmes de paiement de l'Union européenne, ont rendu indispensable la mise en conformité du droit monégasque avec de nombreuses dispositions communautaires.
Un accord de coopération entre le SICCFIN et la Commission bancaire a été conclu en 2003 en vue notamment d'organiser un échange d'informations et des contrôles coordonnés au sein des établissements monégasques.
Par ailleurs, Monaco s'est mis en situation d'appliquer les dispositions réglementaires françaises en matière de contrôle des chèques pour la prévention du blanchiment et du financement du terrorisme. Une telle évolution était nécessaire du fait de la participation des établissements de crédit monégasques au système électronique d'échange d'images-chèques français.
Le dispositif de lutte contre le blanchiment et le financement de Monaco a fait l'objet d'une évaluation par le FMI au titre de ses travaux sur les centres offshore et d'une évaluation par Moneyval (groupe régional de type GAFI rattaché au Conseil de l'Europe). Ces deux évaluations ont souligné que la législation monégasque était globalement conforme aux normes internationales.
Ils ont néanmoins souligné la nécessité de renforcer le dispositif pénal notamment en ce qui concerne la lutte contre le financement du terrorisme, la confiscation des produits du crime et l'extension du champ des infractions sous-jacentes au délit de blanchiment. Ils ont également recommandé la nécessité d'une réflexion sur l'adéquation des moyens de SICCFIN au regard de ses missions.
II. LES DISPOSITIONS TECHNIQUES DE L'AVENANT À LA CONVENTION
A. L'HISTORIQUE DE L'AVENANT À LA CONVENTION
La France et Monaco sont liés en matière d'impôt sur le revenu et d'impôt sur les sociétés par la convention du 18 mai 1963, modifiée par l'avenant du 25 juin 1969, dont le but principal est de lutter contre l'évasion fiscale.
L'évolution de la fiscalité française et la nécessité de renforcer la coopération bilatérale afin d'éliminer certains abus ont amené la France à demander en octobre 2000 à Monaco de modifier la convention de 1963 par avenant. Une première phase des négociations a permis de signer le 18 octobre 2001 un relevé de conclusions qui fixait le cadre du nouvel avenant et d'un échange de lettres. Puis les négociations ont repris pour régler les détails des dispositions des deux textes. Ceux-ci ont été signés le 26 mai 2003 à Monaco.
Le texte se présente sous la forme d'un avenant modifiant cinq articles de la convention et d'un échange de lettres interprétatives concernant six articles.
Il concerne principalement trois points :
- assujettir les résidents français de Monaco à l'impôt de solidarité sur la fortune ;
- modifier les règles de calcul du partage de la TVA entre la France et Monaco de manière plus conforme à la réalité économique ;
- mettre en cohérence les règles d'assiette de l'impôt sur les bénéfices monégasques avec les dispositions françaises correspondantes.
B. LE DISPOSITIF DE L'AVENANT
1. Les limites posées à la déduction des rémunérations des dirigeants par les sociétés soumises à l'impôt monégasque sur les bénéfices
L'article premier de l'avenant renforce les limites fixées par l'article 3 de la convention à la déduction des rémunérations des dirigeants et des cadres les mieux rémunérés par les sociétés soumises à l'impôt monégasque sur les bénéfices.
Il est prévu qu'un barème arrête les montants des rémunérations déductibles en fonction du chiffre d'affaires réalisé par l'entreprise et du salaire plafond servant de base au calcul des cotisations de sécurité sociale.
Le dispositif vise ainsi à lutter contre certaines pratiques de réduction abusive du bénéfice d'entreprises monégasques qui verseraient des salaires sans lien avec un travail effectif à des personnes non soumises à l'impôt sur le revenu.
L'avenant renforce l'obligation incombant à l'entreprise de démontrer que les rémunérations sont la contrepartie d'un travail effectif. Il réduit le champ d'application du barème aux entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à un seuil qui sera ramené progressivement d'ici 2005 à 7 millions d'euros de ventes ou 3,5 millions d'euros de prestations de services. Les étapes de cette réforme sont précisées par l'échange de lettres qui prévoit également que les plafonds de déduction seront arrêtés chaque année par ordonnance souveraine après concertation avec la partie française.
Des informations régulières sur le rendement de l'impôt monégasque sur les bénéfices seront fournies par les autorités monégasques et un bilan du nouveau dispositif sera effectué courant 2005.
2. L'imposition des résidents français de Monaco à l'ISF
L'article 2 de l'avenant prévoit l'imposition à l'impôt de solidarité sur la fortune des Français installés à Monaco à compter du 1 er janvier 1989, date de la création de cet impôt, du moins sous cette forme, en France.
Cette imposition est effective à compter du 1 er janvier 2002. Elle concerne environ 200 contribuables, pour une base taxable de l'ordre de 800 millions d'euros. Des échéanciers de paiement sur plusieurs années (jusqu'à cinq ans) seront prévus, en fonction de chaque cas particulier, sans intérêt ni majoration pour ces redevables. Des instructions devraient être données dans ce sens aux services fiscaux territoriaux.
L'article 4 de l'avenant modifie l'article 20 de la convention relatif à l'échange de renseignements sur demande, afin de permettre cet échange en matière d'impôt sur la fortune.
De même, l'article 5 modifie l'article 21 de la convention relatif à l'échange automatique de renseignements, afin de prévoir la fourniture automatique par les autorités monégasques d'information concernant les droits réels immobiliers et en matière d'impôt sur la fortune.
3. L'amélioration du traitement fiscal des relations économiques entre des sociétés dépendantes établies en France, d'une part, et à Monaco, d'autre part
L'article 3 de l'avenant rapproche le traitement fiscal des relations économiques entre des sociétés dépendantes établies en France, d'une part, et à Monaco, d'autre part, du droit commun français. Les paiements des commissions et des redevances entre elles pourront désormais être admis en déduction des bénéfices de la partie versante. La preuve qu'ils ne dissimulent pas une réalisation ou un transfert de profits devra être fournie. Cet alignement sur le droit interne français correspond à une demande réelle de la part des entreprises françaises détenant des filiales dans la Principauté et y effectuant des opérations réelles.
C. L'ÉCHANGE DE LETTRES
1. Une répartition des ressources de TVA plus favorable à la France
L'échange de lettres du 26 mai 2003 réaffirme le principe de l'unicité du territoire fiscal français et monégasque en matière de TVA. La réaffirmation de ce principe était rendu nécessaire par un jugement de la Cour de révision de Monaco considérant que la succursale monégasque d'une société étrangère ayant également une succursale française devait être imposée à la TVA sur le seul fondement de la législation monégasque. Afin que cette décision ne fasse pas jurisprudence, les deux gouvernements ont décidé en 1998 de transcrire par un échange de lettres la doctrine constante selon laquelle les deux Etats ont un territoire unique au regard de cet impôt.
Les règles forfaitaires de détermination du compte de partage TVA fixées par les échanges de lettres des 18 mai 1963 et 6 août 1971 ont par ailleurs été modifiées, de manière plus conforme à la réalité économique, et de manière plus favorable à la France.
Le nouveau dispositif est plus favorable aux intérêts français dans la mesure où le reversement effectué par la France au bénéfice du Trésor monégasque résulte d'une base fixée pour 2001 à 108.238.802 euros 1 ( * ) et indexée en fonction du taux d'évolution des recouvrements nets annuels de TVA et d'accises de la France (pondéré à 5/6) et de Monaco (pour 1/6). Les versements sont effectués en trois fractions égales de septembre à la fin de l'année. Les deux gouvernements ont prévu de se concerter en 2005 afin d'examiner le fonctionnement de cette nouvelle formule de partage.
2. Le bénéfice reconnu des résidents français de Monaco à certaines réductions d'impôt
L'échange de lettres prévoit expressément que l'imposition des personnes résidentes de Monaco « dans les mêmes conditions que si elles avaient leur domicile ou leur résidence en France » leur permet de bénéficier de réductions d'impôts, comme l'emploi d'un salarié à domicile ou les frais de garde de jeunes enfants dans une crèche ou chez une assistante maternelle.
D. L'IMPACT DE LA CONVENTION SUR LES RÉSIDENTS FRANÇAIS DE MONACO
Entre 1984 et 2002, la communauté française résidant à Monaco a accusé une décroissance de 38 %, de 15.222 à 9.454 immatriculés. Le mécanisme de la convention fiscale n'est sans doute pas étranger à cette décroissance. De ce point de vue, l'assujettissement de certains redevables à l'ISF pourrait conforter la tendance.
Néanmoins, le principe de l'assujettissement des résidents français établis à Monaco depuis 1989 ne fait que poursuivre la logique initiale de la convention de 1963, qui vise à considérer les citoyens français résidents à Monaco comme des contribuables français classiques. De ce point de vue, on peut se féliciter que leur droit à réduction d'impôt, au titre de l'emploi d'un salarié à domicile ou des frais de garde de jeunes enfants dans une crèche ou chez une assistante maternelle soit clairement affirmé.
Selon les réponses fournies à votre rapporteur, l'avenant n'a pas pour objet de « pénaliser » les Français par rapport aux nationaux des autres Etats membres de la Communauté européenne dans la Principauté. Sur ce point, il est indiqué, à titre d'exemple, que l'Italie traite ses ressortissants qui transfèrent leur résidence dans un Etat à fiscalité privilégiée comme s'ils restaient fiscalement domiciliés sur son territoire, sauf s'ils prouvent leur installation effective et durable à l'étranger.
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 16 février 2005 sous la présidence de M. Jean Arthuis, président , la commission des finances a procédé à l' examen du rapport de M. Adrien Gouteyron sur le projet de loi n° 84 (2004-2005) autorisant l'approbation de l'avenant à la convention fiscale entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de son altesse sérénissime le prince de Monaco , signée à Paris le 18 mai 1963 et modifiée par l'avenant du 25 juin 1969.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur , a indiqué au préalable que les huit projets de loi soumis à la commission avaient tous pour but, en application de l'article 53 de la Constitution, d'autoriser l'approbation de conventions fiscales signées par le gouvernement français. Il a noté que quatre de ces projets de loi proposaient d'autoriser l'approbation de conventions fiscales nouvelles, permettant ainsi de compléter un réseau de conventions bilatérales déjà dense. Il a précisé que ces accords, selon la formule consacrée, visaient à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et qu'il s'agissait de :
- l'accord signé avec la République d'Albanie le 24 décembre 2002, qui avait fait l'objet d'une approbation du Parlement albanais en mai 2003 ;
- l'accord signé avec la République d'Azerbaïdjan le 20 décembre 2001 et ratifié par le Parlement azerbaïdjanais le 19 février 2002 ;
- l'accord signé avec la République de Croatie le 19 juin 2003 ;
- et enfin, l'accord avec la République Tchèque, signé le 28 avril 2003, approuvé par le Parlement tchèque en mars 2004.
Il a observé que trois autres projets de loi proposaient, par ailleurs, l'approbation d'avenants, le premier à l'entente fiscale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Québec en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, le deuxième à la convention fiscale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de son altesse sérénissime le prince de Monaco, signée à Paris le 18 mai 1963 et modifiée par l'avenant du 25 juin 1969, et le troisième enfin, très spécifique, rendu nécessaire par la fusion entre Air France et KLM, avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume des Pays-Bas tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune.
Il a indiqué, enfin, qu'un projet de loi autorisait l'approbation d'une convention fiscale multilatérale, en l'occurrence la convention concernant l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale, élaborée conjointement par le Conseil de l'Europe et l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
M. Adrien Gouteyron, rapporteur , a présenté succinctement les conventions fiscales nouvelles faisant l'objet des quatre premiers projets de loi, ainsi que le projet de loi relatif à l'avenant à l'entente fiscale France-Québec, précisant que ces textes appelaient peu de commentaires sur un plan technique. Il a souligné que les conventions conclues avec l'Albanie, l'Azerbaïdjan, la Croatie et la République Tchèque s'inspiraient très largement du modèle de la convention OCDE et comportaient les aménagements habituellement conclus par la France, des précisions ayant été introduites concernant les revenus mobiliers, les plus-values de cession de parts, d'actions ou autres droits dans des sociétés à prépondérance immobilière, la non-discrimination afin que les conventions ne fassent pas obstacle à l'application de la législation fiscale en la matière. Il a fait remarquer, en outre, que les textes des conventions conclues avec l'Albanie et la Croatie étaient assez proches des conventions fiscales conclues par la France avec les autres pays de la région, tels que la Macédoine ou la Slovénie. Il a montré que si la convention avec l'Albanie venait combler un réel vide juridique, puisqu'aucune convention fiscale n'avait jamais été conclue avec ce pays, les autres venaient tirer les conséquences de la disparition de la Tchécoslovaquie, de l'URSS et de la Yougoslavie, l'Azerbaïdjan, la Croatie et la République Tchèque ayant marqué, en effet, leur préférence pour une nouvelle convention fiscale, en quelque sorte « au goût du jour », plutôt que pour le maintien des conventions établies par des Etats aujourd'hui disparus.
S'agissant plus particulièrement de la République Tchèque, M. Adrien Gouteyron, rapporteur , a indiqué que les autorités tchèques avaient souhaité obtenir un rééquilibrage du texte de 1973, qui leur apparaissait exagérément favorable aux intérêts français. Il a noté, néanmoins, que, selon le ministère des affaires étrangères, certaines nouvelles stipulations étaient plus favorables aux investissements français que celles contenues dans le traité précédent, citant par exemple la suppression de la retenue à la source, prévue par l'article 10 en ce qui concernait les dividendes provenant de participations supérieures à 25 %, qui aurait pour effet de ne plus conduire la France à imputer sur l'impôt sur les sociétés l'impôt prélevé à ce titre par la République tchèque, comme tel était le cas auparavant dans le cadre de la convention franco-tchécoslovaque.
En ce qui concernait l'avenant signé, à Paris, le 3 septembre 2002, à l'entente fiscale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Québec en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, datant du 1er septembre 1987, M. Adrien Gouteyron, rapporteur , a fait remarquer, au préalable, la particularité de cet accord, qui était le seul accord fiscal conclu par la France avec une subdivision politique d'un Etat, la convention fiscale franco-canadienne tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée le 2 mai 1975, stipulant en effet, dans son article 29, que « la France et les provinces du Canada pourront conclure des ententes portant sur toute législation fiscale relevant de la compétence provinciale, pour autant que ces ententes ne soient pas contraires aux dispositions de la présente Convention ». La convention fiscale franco-canadienne ayant fait l'objet d'un avenant, en date du 30 novembre 1995, il a indiqué que l'avenant à l'entente fiscale entre la France et le Québec reprenait, dans un souci d'harmonisation, les modifications apportées à la convention franco-canadienne.
Il a noté que ces modifications étaient multiples, conformes pour l'essentiel au modèle de l'OCDE, la principale d'entre elles consistant à étendre les impôts couverts par l'entente fiscale, en ce qui concernait la France, à la taxe sur les salaires, à l'impôt de solidarité sur la fortune et, pour l'application de certains articles, aux droits de mutation à titre gratuit, ce dernier ajout permettant de prévoir un dispositif d'élimination de la double imposition des successions, suite à la suppression, par le Canada et ses provinces, des droits de mutation à titre gratuit et de leur remplacement par une taxation sur les plus-values latentes au jour du décès.
Présentant l'avenant à la convention fiscale du 18 mai 1963 avec Monaco, il a montré que le texte s'inscrivait dans un cadre plus large de modernisation des relations entre la France et la Principauté, un nouveau traité d'amitié et de coopération ayant été en effet signé le 24 octobre 2002 à la demande des autorités monégasques. En ce qui concernait le dispositif, il a précisé que l'article premier de l'avenant visait à corriger les évolutions anormales dans la déduction des rémunérations des dirigeants de l'assiette de l'impôt monégasque sur les bénéfices, l'article 2 permettant d'assujettir à l'impôt de solidarité sur la fortune les résidents français installés à Monaco depuis 1989. Il a fait observer que cette imposition s'appliquait depuis le 1 er janvier 2002 et concernait environ deux cents contribuables, soit une base taxable de plus de 800 millions d'euros. Il a donc considéré que, s'agissant des personnes physiques, l'avenant poursuivait la logique initiale, visant à assimiler les citoyens français résidant à Monaco à des contribuables français classiques, ceci expliquant peut-être la décroissance du nombre de Français résidant à Monaco, revenus de 15.222 à 9.454 immatriculés de 1984 à 2002.
Il a ajouté que l'avenant était, par ailleurs, complété par un échange de lettres, qui contenait des dispositions, très attendues par la France, en matière de partage des recettes de taxe sur la valeur ajoutée. Il a expliqué que la convention fiscale du 18 mai 1963 prévoyait, en effet, un partage du produit total des perceptions opérées sur le territoire des deux Etats dans un sens peu favorable à la France, d'où la nécessité d'un rééquilibrage.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur , a indiqué en ce qui concernait l'avenant à la convention fiscale avec les Pays-Bas du 7 avril 2004 que celui-ci tendait à prendre en compte l'accord intervenu entre Air France et KLM, les négociations sur la fusion entre les deux compagnies aériennes nationales, afin de constituer le premier opérateur européen ayant, en effet, inclus un volet fiscal. Il a précisé que le Gouvernement néerlandais tenait à obtenir la garantie que les opérations de restructuration auxquelles donnerait lieu la constitution d'un groupe combiné ne remettraient pas en cause leur droit d'imposer les résultats actuels et futurs de KLM, même si cette société devait être absorbée, à terme, par Air France. Il a expliqué que la France avait accepté, dès lors, de modifier les règles conventionnelles en ce sens et que tel était précisément l'objet de l'avenant précité, qui ne modifiait pas la convention elle-même, mais insérait dans le protocole annexé une stipulation destinée à régler le cas particulier du rapprochement Air France - KLM. Il a montré que le paragraphe 1 de l'avenant posait ainsi le principe du droit exclusif des Pays-Bas d'imposer les revenus, gains en capital et fortune rattachables à l'activité de transport aérien de l'actuelle société KLM, quel que soit le lieu où se trouvait le siège de direction effective de celle-ci.
Enfin, en ce qui concernait la convention concernant l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale, ouverte à la signature des Etats membres du Conseil de l'Europe et des pays membres de l'OCDE, signée par la France le 17 septembre 2003, M. Adrien Gouteyron, rapporteur , a signalé que ce nouvel instrument juridique et fiscal était utile du point de vue français pour trois raisons majeures. Il a noté premièrement que la convention compléterait le réseau de conventions fiscales bilatérales conclues par la France, permettant par exemple d'élargir l'échange de renseignements à d'autres impôts que ceux couverts par les conventions fiscales ou les directives européennes, impôts locaux, droits d'enregistrement, contributions indirectes, TVA et taxes diverses perçues au profit de l'Etat, et d'uniformiser la pratique des pays signataires en matière d'échange de renseignements. Il a fait valoir, deuxièmement, que cette convention organisait l'assistance au recouvrement, rarement visée par les conventions fiscales bilatérales, la convention prévoyant que l'Etat requis devait procéder au recouvrement de la créance fiscale de l'Etat requérant de la même manière que s'il recouvrait ses propres créances, permettant ainsi de lutter contre l'organisation par les contribuables de leur insolvabilité dans l'Etat qui avait établi les impositions. Il a montré, troisièmement, que la convention, en proposant un ensemble de règles en vue de la notification de documents à l'étranger, venait « mettre de l'ordre » dans une pratique administrative internationale aux frontières mal définies. Il a ajouté que onze pays, y compris la France, avaient à ce jour signé la convention qui constituait un complément utile aux conventions bilatérales.
A l'issue de cette présentation, M. Adrien Gouteyron, rapporteur , a proposé de demander au Sénat d'adopter les huit projets de loi précités.
Un débat s'est alors engagé.
M. Jean Arthuis, président , a remercié le rapporteur pour la qualité de sa présentation et la précision de sa description des enjeux liés à la fusion entre Air France et KLM et ses conséquences sur la convention fiscale avec les Pays-Bas.
M. Philippe Marini, rapporteur général , s'est félicité de l'existence d'un accord direct entre la France et le Québec. Il s'est interrogé, par ailleurs, sur la compatibilité avec le droit communautaire de l'avenant à la convention fiscale entre la France et les Pays-Bas concernant KLM, l'imposition des bénéfices devant, en principe, être établie dans le pays du siège de l'entreprise.
M. Jean Arthuis, président , a souligné que cet accord visait à répondre à une préoccupation politique du Gouvernement des Pays-Bas, mais que sa portée pratique était vraisemblablement plus limitée.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur , a confirmé cette analyse, donnant lecture de l'exposé des motifs du projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre la France et les Pays-Bas, indiquant qu'afin de tenir compte de la difficulté pratique à déterminer les bénéfices et gains en capital concernés, le texte renvoyait à une consultation ultérieure des parties pour la fixation des modalités de mise en oeuvre du principe de répartition du droit d'imposer prévu en cas de disparition ou de transfert de l'essentiel de l'activité de KLM.
A l'issue de cet échange, la commission a décidé de demander au Sénat d'adopter les huit projets de loi précités, dont le présent projet de loi .
* 1 126 millions d'euros en 1999.