ARTICLE 52

Octroi de la garantie de l'Etat à la Caisse régionale du Crédit agricole de la Corse dans le cadre du traitement des dossiers de surendettement des agriculteurs corses

Commentaire : le présent article vise à accorder la garantie de l'Etat à la Caisse régionale du Crédit agricole (CRCA) de Corse sur les échéanciers en principal et les intérêts résultant des plans de remboursement que la CRCA de Corse s'est engagée à conclure avec les exploitants agricoles de Corse surendettés, dans le cadre d'un protocole d'accord signé le 29 janvier 2004 entre l'Etat, la CRCA de Corse et les représentants des agriculteurs de Corse.

I. LA QUESTION DU SURENDETTEMENT DES AGRICULTEURS DE CORSE

Ainsi que votre rapporteur général l'a déjà souligné dans son commentaire de l'article 70 quater du projet de loi de finances pour 2005 82 ( * ) relatif à prise en charge partielle par l'Etat des intérêts dus par les exploitants agricoles de Corse en activité au 1 er janvier 1994, au titre des échéances allant de 2002 à 2010 des prêts professionnels bancaires obtenus depuis le 1 er janvier 1994 au titre de leur activité agricole pour les besoins de leur exploitation, deux rapports conjoints confidentiels, établis par l'inspection générale des finances, l'inspection générale de l'administration et l'inspection générale de l'agriculture, publiés fin 2003, portent spécifiquement sur « le désendettement des agriculteurs en Corse », pour l'un, « les mesures dites « Balladur-Juppé » relatives au désendettement des agriculteurs corses », pour l'autre .

Ces deux rapports ont été fournis, à sa demande, à votre commission des finances, dans le courant de l'année 2004. L'essentiel des éléments chiffrés contenus dans le commentaire du présent article provient de ces deux rapports d'inspection.

D'après les informations contenues dans les deux rapports d'inspection précités, sur 2.600 exploitants agricoles de Corse, environ un millier était, en 2003, en retard de paiement pour un montant global de l'ordre de 300 millions d'euros , montant qui se décompose en :

- une dette bancaire de l'ordre de 180 millions d'euros à la charge de la caisse régionale du Crédit agricole (CRCA) ;

- une dette sociale de l'ordre de 100 millions d'euros auprès de la Mutualité sociale agricole (MSA) ;

- une dette relative à la consommation d'eau, à hauteur de 10 millions d'euros, auprès de l'Office d'équipement hydraulique de la Corse (OEHC).

A. LE MONTANT ACTUEL DE LA DETTE BANCAIRE DES AGRICULTEURS DE CORSE

La dette bancaire globale des agriculteurs de Corse était évaluée en 2003 à un encours de 183.336.043 euros, constitué de 126,5 millions d'euros de capital restant dû (CRD) et de 56,7 millions d'euros d'intérêts normaux et d'intérêt de retard dus. En outre, cette dette bancaire globale concernait 1.857 agriculteurs.

Structure en capital de l'endettement bancaire des agriculteurs de Corse au 31 octobre 2003

(en euros)

Dette par exploitation

Nombre d'exploitants

CRD

Encours total

% du nombre

% du CRD

Compte débiteur

105

0

327.000

5,65 %

0 %

CRD < 7.600

394

1.329.942

1.896.135

21,22 %

1,05 %

7.600 < CRD < 23.000

468

6.680.360

10.149.922

25,2 %

5,28 %

23.000 <CRD < 46.000

300

9.745.058

14.822.272

16,16 %

7,7 %

46.000 < CRD < 76.000

180

10.760.709

16.484.218

9,69 %

8,5 %

76.000 < CRD < 150.000

204

21.888.023

33.562.335

10,99 %

17,29 %

CRD > 150.000

206

76.190.496

106.094.161

11,09 %

60,18 %

Total

1.857

126.594.588

183.336.043

100 %

100 %

Source : rapport d'inspection sur le désendettement des agriculteurs en Corse, établi conjointement par l'inspection générale de l'administration, l'inspection générale de l'agriculture et l'inspection générale des finances - 2003

D'après les informations contenues dans les rapports d'inspection précités, les agriculteurs dont le montant de CRD était supérieur à 150.000 euros en 2003 représentaient 60,2 % du CRD total. Tous les agriculteurs n'étaient toutefois pas en retard de paiement et certains avaient un retard de paiement inférieur à trois mois.

Les exploitants agricoles « à jour » ou en retard de moins de trois mois représentaient donc 18 % du CRD global et 12,4 % de l'encours global. Ils représentaient néanmoins près de 40 % du nombre d'agriculteurs endettés auprès de la caisse régionale du Crédit agricole.

Enfin, l'encours moyen des 933 agriculteurs « en retard » de paiement, dont le CRD était inférieur à 150.000 euros, s'élevait, en 2003, à 65.000 euros alors que celui des 182 agriculteurs dont le CRD était supérieur à 150.000 euros s'élevait à 547.000 euros.

Synthèse par groupe

 

Nombre

CRD

Encours

% nombre

% CRD

À jour ou retard < 3 mois

742

22.853.754

22.853.754

40 %

18 %

En retard et inférieur à 150.000 euros de CRD

933

34.155.488

60.993.278

50,2 %

27 %

En retard et supérieur à 150.000 euros de CRD

182

69.585.346

99.489.011

9,8 %

55 %

Total

1.857

126.594.588

183.336.403

100 %

100 %

Source : rapport d'inspection sur le désendettement des agriculteurs en Corse, établi conjointement par l'inspection générale de l'administration, l'inspection générale de l'agriculture et l'inspection générale des finances - 2003

B. LES MESURES SUCCESSIVES DE DÉSENDETTEMENT BANCAIRE MISES EN oeUVRE

La mise en oeuvre de l'ensemble des mesures de désendettement des agriculteurs de Corse (désendettement bancaire, social et vis-à-vis de l'office d'équipement hydraulique de Corse) a été placée sous la responsabilité de la commission régionale de conciliation (CRC) mise en place au cours de l'année 2000 et présidée par le Trésorier payeur général de région .

1. Les mécanismes de constitution de la dette

D'après les informations contenues dans les rapports d'inspection précités, il existe plusieurs phénomènes à l'origine de la croissance exponentielle de la dette des agriculteurs de Corse, malgré les différentes mesures de désendettement qui ont pu être mises en oeuvre.

La raison principale de cette croissance de la dette tient à l'absence de paiement des échéances de prêt aux dates normales par les agriculteurs . Cette absence de paiement a des origines multiples : exploitations agricoles incapables de dégager une trésorerie suffisante pour faire face aux échéances, surestimation des plans d'exploitation prévisionnels, aléas climatiques, évolution du marché. En outre, ponctuellement, certains emprunts dits agricoles ont pu servir à des finalités non agricoles (immobilier, placements financiers, etc.). Mécaniquement, le non remboursement d'une échéance a un effet inflationniste sur la dette puisque les échéances non payées génèrent de nouveaux intérêts ainsi que des pénalités de retard. Cette croissance est d'autant plus forte que les prêts initiaux, compte tenu des taux en vigueur dans les années 1985-1995, étaient élevés.

Enfin, il faut concéder que la mise en oeuvre ou l'annonce de plans de désendettement à des périodicités régulières a pu faire naître le sentiment chez certains exploitants qu'il n'était pas indispensable de rembourser directement les prêts contractés et que l'Etat se substituerait en cas de besoin .

2. Les principales mesures historiques de désendettement bancaire

On compte, au jour d'aujourd'hui, treize plans successifs de désendettement mis en oeuvre au profit des agriculteurs installés en Corse. La combinaison des principaux mécanismes de désendettement bancaire sur une durée longue a pu conduire à un encours actuel de la dette sur certains dossiers représentant plus de quatre fois le montant des prêts initiaux contractés . En outre, l'examen individuel de certains dossiers montre un enchevêtrement de prêts qui rend difficile la compréhension de la situation actuelle de certains agriculteurs.

? Conçue dès 1989 par une circulaire du 24 juillet 1989, cosignée par les ministres chargés de l'agriculture et du budget, et mise en oeuvre entre 1991 et 1994, la mesure dite « Nallet » est la dernière mesure de désendettement direct de grande envergure à destination des agriculteurs de Corse . Elle a consisté dans la prise en charge du paiement, intégral ou partiel, de certaines échéances de prêts. Cette mesure, bien que d'un coût budgétaire élevé, de l'ordre de 67,3 millions d'euros d'après un rapport de la Cour des comptes de septembre 1996 sur « les aides financières aux agriculteurs de Corse en difficulté », n'a eu qu'un impact limité en terme de désendettement et a concerné 1.060 dossiers au total.

Les raisons de l'échec de cette mesure de désendettement tiennent :

- d'une part, à son mode d'action, c'est-à-dire la prise en charge d'échéances qui incluent une part de capital et une part d'intérêts : cette mesure aurait eu un effet plus important si elle avait permis un abattement sur le capital restant dû au lieu de prendre en charge des échéances ;

- d'autre part, à l'attitude des agriculteurs bénéficiaires de la mesure et à celle du Crédit agricole : la mise en place de la mesure « Nallet » prévoyait un dispositif de nouveaux prêts pour encourager la restructuration et le développement ainsi que des subventions d'accompagnement. Mais, dans la pratique, les échéances des nouveaux prêts sont venues se substituer à celles prises en charge dans le cadre du plan de désendettement.

? En conséquence, pour faire face à de nouveaux impayés, la caisse régionale du Crédit agricole a mis en place, en 1993, des systèmes de prêts de « sauvegarde » et de consolidation visant notamment à consolider les échéances impayées de 1993 et 1994, pour un montant de l'ordre de 35 millions d'euros et un public concerné de 600 exploitations. Concrètement, un nouveau prêt était proposé à l'agriculteur, prêt qui intégrait à la fois des échéances impayées et éventuellement un apport de trésorerie. Ce mécanisme a également permis à la banque d'annuler des créances douteuses et de réafficher des nouveaux prêts qui intégraient, dans le nouveau capital, des intérêts et éventuellement des pénalités provenant des échéances impayées antérieures.

? Les mesures dites « Balladur-Juppé » ont eu pour but de consolider les dettes des agriculteurs à jour de paiement de leurs créances en globalisant des prêts d'origine diverses - prêts bonifiés, prêts de sauvegarde, prêts d'acquisition - qui résultaient de créances dont certaines pouvaient être très anciennes.

La procédure, mise en oeuvre en 1994-1995, consistait à fractionner la dette bancaire en deux parties, la première sous forme d'un prêt bonifié à 6,5 % couvrant la période 1994-2002, la seconde, dont la charge était différée pour entrer en paiement au 28 février 2003, capitalisait les intérêts cumulés pendant la période différé au taux de 7,3 %, sur treize à vingt ans. L'obtention des deux prêts était conditionnée à des règles d'éligibilité et de contrôle fixées dans une circulaire datée du 26 octobre 1994.

D'après les informations fournies à votre rapporteur général, la dette initiale de la procédure « Balladur-Juppé » représentait environ 15 millions d'euros .

L'originalité du montage associé à ces prêts a permis d'entraîner un coût limité pour l'Etat puisqu'il se cantonnait à la prise en charge de la bonification d'intérêts sur la première période et conduisait à avoir un niveau d'échéance à peu près constant sur toute la durée du prêt.

Ce montage présente toutefois deux inconvénients majeurs : d'une part, le différé de remboursement porte lui-même intérêts ce qui, au final, alourdit la charge de la dette pour l'agriculteur, d'autre part, le nouveau prêt étale sur une durée de 13 à 20 ans des remboursements sur des matériels éventuellement obsolètes depuis longtemps et incorpore des intérêts et frais issus de consolidations antérieures.

Le remboursement du premier prêt à 6,5 % s'est achevé en 2003. En outre, au moment de mettre en paiement le remboursement du second prêt à 7,3 %, il est apparu que la charge était difficile à supporter car la capitalisation des intérêts du prêt sur neuf ans (soit les sept ans initialement proposés, prorogés de deux ans) aurait entraîné une augmentation brutale des remboursements.

C'est pourquoi, la commission régionale de conciliation (CRC), instituée en 2000, chargée de résoudre le problème général de la dette agricole de Corse, a obtenu que l'Etat, la caisse régionale du Crédit agricole (CRCA) et la collectivité territoriale de Corse (CTC) prennent en charge par le biais d'une convention tripartite signée le 21 mars 2002, la bonification de ce prêt en assurant une prise en charge de taux d'intérêt pouvant aller jusqu'à 5,8 points afin d'entraîner une baisse de mensualités de 40 % environ.

La dépense totale engendrée par cette bonification, mentionnée par la convention, est de 9,6 millions d'euros sur cinq ans, partagée à part égale entre l'Etat, la CTC et la CRCA, soit un tiers de cette somme, 3,2 millions d'euros, à la charge de chaque entité signataire de la convention, soit 610.000 euros par an .

D'après les informations recueillies par votre rapporteur général, sur un total de 281 dossiers de demandes dont la CRC a été saisie, 260 dossiers ont été retenus parmi lesquels 233 dossiers ont finalement été acceptés et ont fait l'objet d'une proposition par la CRC aux exploitants agricoles concernés .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Bien que participant du même objectif de désendettement des agriculteurs de Corse, les dispositions du présent article doivent être différenciées de celles de l'article 70 quater du projet de loi de finances pour 2005 précité qui donnent une base législative à la prise en charge partielle par l'Etat , pour les échéances allant de 2002 à 2010, des intérêts dus par les exploitants agricoles de Corse au titre des prêts professionnels bancaires obtenus depuis le 1 er janvier 1994 pour les besoins de leur exploitation . Cette possibilité de prise en charge partielle résultait en effet du contenu de la convention tripartite du 21 mars 2002 signée entre l'Etat, la collectivité territoriale de Corse et la CRCA de Corse, prévoyant une procédure de bonification applicable aux prêts à 7,3 %, dits « Balladur-Juppé », dans le but d'alléger la charge des intérêts dus par les agriculteurs au titre de ces prêts bancaires, l'objectif étant d'abaisser le taux de ces prêts de 7,3 % à un taux de 1,5 à 2 %.

Le présent article permet, quant à lui, de donner une base législative à l'octroi de la garantie de l'Etat pour les créances résiduelles de la procédure d'abandon de créances par la Caisse régionale du Crédit agricole de Corse organisée par un protocole d'accord en date du 29 janvier 2004, signé entre la CRCA de Corse, les représentants de l'Etat en Corse et les représentants des exploitants agricoles installés en Corse . Ce protocole d'accord vise les agriculteurs surendettés et permet un traitement, au cas par cas, de leur niveau d'endettement et de leur capacité de remboursement.

A. LE PROTOCOLE D'ACCORD DU 29 JANVIER 2004 ENTRE L'ETAT, LA CRCA DE CORSE ET LES REPRÉSENTANTS DES AGRICULTEURS DE CORSE

La signature de la convention du 29 janvier 2004 entre l'Etat, le Crédit agricole SA et la CRCA de Corse sur les nouveaux échéanciers en principal et intérêts résultant des plans de remboursement que la CRCA de Corse s'est engagée à conclure avec les exploitants agricoles surendettés installés en Corse, dans le cadre d'un protocole d'accord, également en date du 29 janvier 2004, émane des conclusions du rapport d'inspection conjoint précité sur le désendettement des agriculteurs en Corse datant de la fin 2003 .

1. L'objet du protocole

Le protocole du 29 janvier 2004 se fixe pour but « d'apporter des solutions pérennes à la situation de surendettement bancaire des exploitants agricoles corses qui perdure depuis plus de trente années au détriment du développement de l'agriculture et de contribuer au rétablissement d'une nouvelle et confiante relation bancaire entre les agriculteurs insulaires et le Crédit agricole. En conséquence, elles décident d'unir leurs efforts pour aboutir à cet objectif, selon les conditions du protocole, dans un délai maximum de un an » . Il prévoit que la CRCA de Corse et les exploitants agricoles endettés éligibles rechercheront une solution amiable, au cas par cas , avec référence à la capacité de remboursement et à la situation financière et patrimoniale de l'emprunteur.

2. Les bénéficiaires du protocole

Sont éligibles au protocole :

- tous les exploitants agricoles, en activité ou non, en retard de paiement des dettes contractées vis-à-vis de la CRCA de Corse ;

- les exploitants agricoles à jour au 1 er janvier 2004 dont le capital restant dû résulte d'une ou plusieurs consolidations et / ou de prêts de sauvegarde et qui ne bénéficient pas de la bonification « Balladur - Juppé ».

Les coopératives ne sont pas concernées et doivent faire l'objet d'un examen particulier, de même que les exploitants agricoles à jour au 1 er janvier 2004 dont le capital restant dû n'a fait l'objet d'aucune consolidation ou sauvegarde .

Sont exclues du dispositif les personnes qui ne peuvent pas être considérées comme exploitant agricole, celles qui n'ont pas conclu de protocole d'accord avec la CRCA et toutes celles pour lesquelles un contentieux judiciaire à caractère civil est en cours. D'autres cas d'exclusion sont prévus par le protocole. L'article 5 du protocole prévoit notamment que ne sont pas concernés par cette mesure « les exploitants agricoles à jour, éligibles à la bonification des prêts « Balladur-Juppé » dont l'instruction des dossiers est en cours, qui bénéficient déjà de mesures de désendettement similaires. Les exploitants qui le souhaitent pourront toutefois renoncer au bénéfice de la mesure d'allègement des prêts « Balladur-Juppé et saisir la Commission d'examen du surendettement des agriculteurs corses ».

3. Les modalités de calcul du montant de la créance

Le montant de la créance pourra être calculé sur la base de trois méthodes, le protocole prévoyant que doivent être privilégiées :

- pour les exploitants dont le capital restant dû au 1 er janvier 2004 est inférieur à 150.000 euros , la méthode dite « de l'abattement ». Faute de pouvoir reconstituer dans des délais raisonnables le montant du capital dû antérieurement à la consolidation « Balladur », le montant d'origine des prêts de consolidation « Balladur » sera retenu. La créance effective sera réduite par un abattement allant de 25 % à 45 % de ce montant, selon le nombre de consolidations effectuées et la situation de l'exploitation ;

- pour les exploitants dont le capital restant dû au 1 er janvier 2004 est supérieur à 150.000 euros , la méthode dite « de la reconstitution du capital », qui est la plus rigoureuse, au plan technique. Cette méthode prévoit que le montant de la créance sera celui de la dette contractée au moment de la souscription du prêt réel (somme des échéances : capital et intérêts normaux prévus et figurant dans le tableau d'amortissement du contrat initial), sans tenir compte des prêts de consolidation, de sauvegarde ou « Balladur ». Il sera soustrait de ce montant les sommes remboursées par l'exploitant et / ou par l'État à travers les mesures d'allégement du capital. Le protocole précise également les autres règles qui président au calcul de la nouvelle créance due à la CRCA de Corse.

Ainsi, l'article 3 du protocole précité du 29 janvier 2004 précise que « la situation patrimoniale de l'emprunteur hors résidence principale, les revenus en relation directe avec l'exploitation, l'existence de patrimoine productif de revenus hors exploitation, ainsi que la valeur des garanties hypothécaires attachées à ce patrimoine seront pris en compte avant la détermination de tout abattement sur le CRD ».

Pour des raisons d'équité, il sera également vérifié que les agriculteurs en retard de paiement ne bénéficient pas d'un traitement plus favorable que les agriculteurs à jour qui bénéficient de la bonification des prêts « Balladur ».

L'abandon de créances n'est acquis que si l'échéancier de paiement est respecté jusqu'à son terme . Parallèlement, la CRCA de Corse devra reprendre « une relation bancaire avec le débiteur conforme aux pratiques usuelles bancaires générales ». L'article 8 du protocole du 29 janvier 2004 précise que « dans le cas où le remboursement des échéances ne serait pas honoré par l'exploitant agricole et après deux défaillances consécutives, ou une défaillance en cas de remboursement par annuité majorée d'un délai supplémentaire de six mois, l'exploitant agricole sera déchu de facto du bénéfice des mesures de désendettement qui lui auront été appliquées, chaque partie se retrouvant dans la situation antérieure, avec les droits et obligations qui en découlent ».

4. La création d'une commission d'examen du surendettement des agriculteurs corses

Enfin, il est créé une commission d'examen du surendettement des agriculteurs corses (CESAC), qui a pour mission d'établir une médiation au cas où la CRCA de Corse et l'exploitant ne parviendraient pas à un accord ou au cas où ils s'accorderaient sur l'impossibilité pour l'exploitant de s'acquitter de sa dette, même réaménagée. La CESAC pourra alors décider de l'intervention financière de l'État et, éventuellement, de la collectivité territoriale de Corse (par exemple sous forme de bonification) si elle considère que l'exploitation « a toujours une réalité économique et financière », ou orienter l'exploitant vers un « plan de reconversion » dans le cas contraire.

B. L'OCTROI DE LA GARANTIE DE L'ETAT À LA CRCA DE CORSE DANS LE CADRE DU TRAITEMENT DES DOSSIERS DE SURENDETTEMENT DES AGRICULTEURS DE CORSE

L'exposé des motifs du présent article précise que, par la convention en date du 29 janvier 2004, signée entre l'Etat, le Crédit agricole SA et la Caisse régionale du Crédit agricole de Corse , le gouvernement s'est engagé à présenter une disposition visant à demander au Parlement l'approbation de l'octroi de la garantie de l'Etat pour les créances résiduelles de la procédure d'abandon de créances par la CRCA de Corse organisée par un protocole d'accord intervenu également le 29 janvier 2004 entre les représentants de l'Etat en Corse, la CRCA de Corse et les représentants des agriculteurs de Corse.

D'après les dispositions de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), l'octroi de la garantie de l'Etat relève du domaine exclusif des lois de finances.

En effet, l'article 34 de la LOLF dispose que, dans sa seconde partie, la loi de finances de l'année autorise l'octroi des garanties de l'Etat et fixe leur régime d'une part, autorise l'Etat à prendre en charge les dettes de tiers, à constituer tout autre engagement correspondant à une reconnaissance unilatérale de dette, et fixe le régime de cette prise en charge ou de cet engagement, d'autre part.

Dès lors, le présent article permet, dans le respect des dispositions de l'article 34 précité de la LOLF, d'accorder la garantie de l'Etat « à la Caisse régionale du Crédit agricole de la Corse, dans les conditions prévues dans la convention en date du 29 janvier 2004 intervenue entre l'Etat, Crédit agricole SA et la Caisse régionale du Crédit agricole de la Corse, sur les nouveaux échéanciers en principal et intérêt résultant des plans de remboursement que la Caisse régionale du Crédit agricole de la Corse s'est engagée à conclure avec les exploitants agricoles installés en Corse surendettés, dans le cadre du protocole en date du 29 janvier 2004 ».

III. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté le présent article sans modification.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Ainsi que le souligne, dans sa conclusion, le rapport d'inspection conjoint précité de 2003 sur le désendettement des agriculteurs en Corse, « les méthodes proposées paraissent de nature à ouvrir la voie à une discussion objective entre l'agriculteur et la banque pour réexaminer la dette à partir de la créance initiale. Les réductions de créance pouvant être consenties par la banque paraissent à ce stade suffisamment attractives pour que les agriculteurs qui le souhaitent véritablement saisissent l'opportunité de se désendetter afin d'ouvrir la voie à une relance et à un développement durable de l'agriculture en Corse ». Votre rapporteur général partage cette analyse.

Il tient toutefois à souligner qu'il n'a pu avoir accès au contenu de la convention signée le 29 janvier 2004 entre l'Etat, le Crédit agricole SA et la CRCA de Corse par laquelle l'Etat s'engage à présenter au Parlement une disposition visant à demander l'approbation de l'octroi de sa garantie pour les créances résiduelles de la procédure d'abandon de créances des exploitants surendettés par la CRCA de Corse .

En outre il regrette, à ce stade, de n'avoir pu disposer des éléments lui permettant d'apprécier l'étendue financière des engagements souscrits par l'Etat au titre de la garantie octroyée à la CRCA de Corse .

Ne disposant pas de tous les éléments d'information nécessaires pour valider l'octroi de la garantie de l'Etat à la CRCA de Corse dans le cadre du traitement des dossiers de surendettement des agriculteurs corses, votre commission des finances souhaite supprimer le présent article.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

* 82 Rapport général n° 74, tome III, 2004-2005.

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