2. La réforme de la fiscalité directe locale
Le vieillissement important de l'assiette des impôts directs locaux a des effets pervers importants, que ce soit sur la répartition de la charge fiscale entre les contribuables ou sur la prise en charge des impositions locales par l'Etat. Or, il apparaît essentiel de ne pas traiter l'un de ces inconvénients en accroissant l'autre, comme cela a trop souvent été le cas au cours des dernières années, et, en particulier, au cours de la précédente législature. La réforme de la fiscalité directe locale apparaît donc plus que jamais nécessaire.
Plusieurs décisions relatives à la fiscalité directe locale ont été annoncées au cours de l'année 2004 par le Président de la République :
- le 6 janvier 2004, il annonçait, dans un discours devant les « forces vives de la Nation », une exonération de taxe professionnelle pour les nouveaux investissements des entreprises pour une durée de 18 mois et la suppression de la taxe professionnelle, qui serait remplacée par « un nouveau dispositif qui ne pénalise pas l'industrie et prenne mieux en compte la diversité des activités économiques » ;
- le 21 octobre, il annonçait, lors d'un déplacement à Murat (Cantal), une réforme de la taxe foncière sur les propriétés non-bâties, avec pour objectif, son élimination progressive pour les exploitants agricoles.
Dans les deux cas, des garanties ont rapidement été apportées par le gouvernement quant à la préservation de l'autonomie fiscale des collectivités territoriales concernées par ces annonces. Ainsi, s'agissant de la récente annonce de la réforme de la taxe foncière sur les propriétés non-bâties, le Premier ministre a annoncé, devant le congrès de l'Association des maires de France, que la taxe sur le foncier non-bâti ne serait supprimée qu'une fois qu'il disposerait d'un meilleur système.
Votre rapporteur spécial souligne l'importance qu'il y a à préserver des ressources fiscales localisées, modulables, et dont l'évolution est indépendante de la politique menée par l'Etat. Le transfert de parts d'impôts d'Etat aux collectivités territoriales en contrepartie des transferts de compétences, opéré par le projet de loi de finances pour 2005, constitue à l'évidence une piste d'avenir. On peut en effet imaginer que les collectivités territoriales puissent par exemple partager un jour des impôts portant sur le revenu des personnes physiques. Votre rapporteur spécial ne croit pas pour autant qu'il soit réaliste ou souhaitable de considérer que cette nouvelle modalité de financement puisse se substituer intégralement à la fiscalité directe locale actuelle, pour trois raisons :
- d'abord, parce que les impôts partagés présentent généralement le défaut d'être assez sensibles à la conjoncture, mais aussi aux politiques conduites par l'Etat. C'est, à l'évidence, le cas pour la taxe intérieure sur les consommation des produits pétroliers (TIPP), dont l'assiette dépend de manière importante des politiques conduites par l'Etat en matière de sécurité routière ou de maîtrise de la consommation d'énergie ;
- ensuite, parce qu'il sera difficile de trouver des ressources fiscales équivalentes à celles tirées actuellement de la fiscalité directe locale par le biais des impôts partagés avec l'Etat ;
- enfin et surtout, parce qu'il est indispensable de maintenir un lien fort entre l'activité économique locale et les ressources des collectivités territoriales, compte tenu de l'action de ces dernières pour faciliter le développement des activités économiques. On rappellera en effet que si les collectivités territoriales ne représentent qu'environ 10 % de la dette totale des administrations publiques, elles contribuent en revanche à plus des deux tiers de la formation brute de capital fixe (FCBF) des administrations publiques.
Il est donc indispensable que les nouvelles bases d'imposition des collectivités territoriales soient localisées et permettent d'assurer des ressources aux collectivités territoriales qui prennent en compte les capacités contributives des redevables et disposent également d'une assiette à la fois stable et dynamique, qui n'appelle pas une substitution importante de l'Etat aux contribuables locaux. Le défi à relever reste donc entier, et appelle l'ensemble des acteurs à poursuivre une réflexion difficile engagée avec l'étude de la réforme de la taxe professionnelle.