II. L'ACCÉLÉRATION DÉCISIVE DE LA RÉFORME DE L'ETAT ENGAGÉE PAR LE GOUVERNEMENT ACTUEL
Afin d'infléchir la hausse des dépenses de fonction publique, si certains ajustements étaient réalisables sans attendre, une réforme de la logique budgétaire s'imposait pour parvenir à une diminution durable et substantielle de la dépense publique. Elle doit permettre de soutenir et d'accompagner la réforme de l'Etat, dont le « pilotage » a, par ailleurs, fait l'objet d'une rationalisation.
Les trois nouvelles structures
interministérielles chargées de la réforme de l'Etat
créées par le décret du 21 février
2003
• La
DGMPSE
(
délégation à la modernisation des
structures de l'Etat
) ; cette délégation a repris
la plus grande part des attributions de la
DIRE
(délégation interministérielle à la
réforme de l'Etat), qu'elle remplace :
- la « DIRE
1 » : mission « service à l'usager et
management public » ;
- la « DIRE
2 » : mission « fonctionnement, organisation et
déconcentration de l'Etat » ;
- la « DIRE
4 » : mission « administrations régaliennes,
économiques et financières » ;
- la
« DIRE 5 » : mission « administrations
sociales, culturelles, scientifiques et techniques ».
• La
DUSA
(
délégation aux usagers et aux simplifications
administratives
) : cette délégation a repris les
missions de la
COSA
(commission pour les simplifications
administratives), hormis le pôle chargé de veiller à
l'harmonisation, la normalisation et la simplification des formulaires
électroniques et des téléprocédures, mission qui
échoit à l'ADAE. La DUSA coordonne la politique de simplification
du droit, des procédures et des formalités administratives et
concourt à la clarté et l'intelligibilité du langage
administratif. Elle est associée aux travaux menés pour
améliorer la qualité de la réglementation. Enfin, le
délégué est rapporteur général du Conseil
d'orientation de la simplification administrative (COSA).
Pour l'accomplissement de ses missions, la DUSA établit, en concertation avec l'ensemble des ministères, des projets de loi habilitant le gouvernement à simplifier le droit par ordonnances (la première loi votée est celle n° 2003-591 du 2 juillet 2003), promeut les actions de qualité des services rendus aux usagers en mutualisant les expériences de terrain (élaboration d'une charte générique de la qualité dite « Charte Marianne ») et en primant les administrations les plus performantes en matière de qualité de service (remise de « Trophées »), veille à l'harmonisation, à la normalisation et à la simplification des formulaires sous forme papier ou électronique en s'efforçant de simplifier le langage et les procédures, et encourage l'adoption d'un langage administratif accessible en appuyant l'action du Comité de simplification du langage administratif (COSLA) .
• L'
ADAE
(
agence pour le
développement de l'administration électronique
) ;
cette agence est née de la fusion de trois services
interministériels :
- l'ATICA (agence pour les technologies de
l'information et de la communication) créée par un décret
du 22 août 2001, qui succédait elle-même à la MTIC
(mission interministérielle de soutien technique pour le
développement des technologies de l'information et de la communication
dans l'administration), créée par un décret du 27
août 1998 ; auparavant, le commissariat à la réforme
de l'Etat exerçait, de façon indifférenciée, cette
compétence ;
- la « DIRE 3 » : mission
« utilisation des technologies de l'information et de la communication par
l'administration » de la DIRE ;
- le pôle en charge des
formulaires électroniques et des téléprocédures au
sein de la COSA.
A. L'IMMINENCE DE LA PLEINE APPLICATION DE LA LOI ORGANIQUE DU 1ER AOÛT 2001 RELATIVE AUX LOIS DE FINANCES
Notre collègue président de la commission des finances, Jean Arthuis, dans un récent rapport d'information 82 ( * ) portant sur le mise en oeuvre de la LOLF, a souligné l'étendue de sa portée : « Elle appelle à une véritable révolution culturelle, tant au sein de l'administration qu'au sein du Parlement lui-même ».
1. Une nouvelle logique d'objectifs et de résultats
La loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) s'appliquera pleinement dès la préparation du budget pour 2006 .
La LOLF renverse la perspective qui prévalait en matière de dépense publique : à une logique de moyens succède une logique de résultat.
Les crédits seront désormais présentés par programmes regroupés au sein de missions . Au sein de chaque programme, les crédits seront fongibles , c'est à dire qu'ils pourront être redéployés entre les lignes budgétaires qui le composent : « La présentation des crédits par titre est indicative » (article 7 de la LOLF). Il s'agira cependant d'une fongibilité asymétrique : les gestionnaires ne pourront pas abonder les crédits de dépenses de personnels (alors que ces derniers pourront être redéployés pour d'autres dépenses).
Concernant l'emploi public, à cette limitation s'ajoutera celle d'un plafond du nombre d'emplois 83 ( * ) par ministère. Il s'agira d'emplois réels, et non plus d'emplois budgétaires théoriques.
Les implications du passage à une logique de résultat se trouvent résumées dans le dernier paragraphe du I de l'article 7 de la LOLF : « Un programme 84 ( * ) regroupe les crédits destinés à mettre en oeuvre une action ou un ensemble cohérent d'actions relevant d'un même ministère et auquel sont associés des objectifs précis, définis en fonction de finalités d'intérêt général, ainsi que des résultats attendus et faisant l'objet d'une évaluation » .
Ainsi, lors de la présentation des lois de finances, les ministères gestionnaires produiront en annexe un projet annuel de performance (PAP) pour chaque programme. Ce projet annuel comprendra « la présentation des actions, des coûts associés, des objectifs poursuivis, des résultats obtenus et attendus pour les années à venir mesurés au moyen d'indicateurs précis dont le choix est justifié » (article 51 de la LOLF). Au projet de loi de règlement sera joint un « rapport annuel de performance » (RAP) qui permettra de confronter les résultats aux objectifs (article 54 de la LOLF).
L'article 66 de la loi organique prévoit qu'à titre indicatif, les crédits du budget pour 2005 devront être présentés selon les nouveaux principes en annexe du projet de loi de finances. Ainsi, les crédits du budget pour 2005 ont été regroupés en missions, programmes et actions , dont la nomenclature, rendue publique par le gouvernement le 16 juin 2004, était le fruit d'une concertation étroite avec les assemblées parlementaires.
Par ailleurs, des projets d'objectifs et d'indicateurs de performance ont été élaborés par les différents ministères en vue de finaliser pour 2006 les projets annuels de performance (PAP) se rapportant au différents programmes.
En cohérence avec ces enjeux, certaines dispositions de la LOLF, déjà entrées en vigueur, renforcent l'information et les pouvoirs du Parlement.
Enumération des dispositions de la LOLF déjà en vigueur
- règles relatives aux annulations de crédits (article 14) ;
- application du principe de sincérité (article 32) ;
- affectation à des tiers de recettes de l'Etat (article 36) ;
- délais de dépôt des « jaunes » (2 ème alinéa de l'article 39) et des réponses aux questionnaires parlementaires (article 49) ;
- rapports joints aux projets de loi de finances (articles 50 et 53), permettant ainsi une meilleure information du Parlement notamment grâce à la publication du programme pluriannuel des finances publiques et à l'occasion du « débat consolidé » sur l'évolution des prélèvements obligatoires (article 52) ;
- dispositions élargissant les pouvoirs de contrôle des commissions des finances (articles 57, 58 à l'exception du 4° et du 5°, 59, 60) ;
- la procédure d'examen du projet de loi de finances et du projet de loi de règlement (article 41), dont l'examen pour l'année N doit désormais précéder celui de la LFI pour l'année N+2, ce que les commentateurs appellent le « chaînage vertueux »
- dépôt par le gouvernement, au cours du dernier trimestre de la session ordinaire, d'un rapport sur l'évolution de l'économie nationale et sur les orientations des finances publiques, pouvant servir de base à un débat d'orientation budgétaire dans chaque assemblée (article 48, à l'exception du 4°).
2. La déclinaison de la réforme au niveau déconcentré
A partir de l'exercice 2000, dans un nombre croissant de préfectures, une globalisation des moyens (incluant les rémunérations des personnels) a été instaurée dont les effets paraissent largement positifs.
Dans la perspective de la LOLF, les expériences de globalisation des crédits se sont multipliées ces dernières années, notamment pour 2004, avec la mise en place des chapitres « en 39 » (globalisation des titres III et IV), des chapitres « en 59 » (globalisation des titres III, IV, V et VI), et des chapitres « en 69 » (globalisation des titres IV et V).
Pour 2006, les préfets devront élaborer, en amont, des « budgets opérationnels de programme » ( BOP ) constituant la déclinaison de chaque programme au niveau territorial. La fongibilité des crédits existant au sein d'un même programme permettra d'autoriser, au niveau déconcentré, les redéploiements entre lignes de crédits s'y rapportant.
Toutefois, en raison de l'étanchéité qui existera entre les programmes , la gestion interministérielle à l'échelon territorial aurait pu s'en trouver complexifiée. Aussi, dans son rapport public particulier précité de novembre 2003 « La déconcentration des administrations et la réforme de l'Etat », la Cour des comptes a-t-elle préconisé la mise en place de « programmes interministériels territoriaux » (cf. infra les programme des interventions territoriales de l'Etat).
* 82 Rapport d'information n° 388 (2002-2003) « Mise en oeuvre de la LOLF : un outil au service de la réforme de l'Etat ».
* 83 Un des enjeux du recensement intégral des emplois financés par le budget de l'Etat est la prise en compte des professeurs de l'enseignement privé.
* 84 Les programmes seront ainsi eux-mêmes subdivisés en actions qui permettront une évaluation fine du coût des politiques.