Article 44 quinquies
(nouveau)
Application de la présente loi à Mayotte
Objet : Cet article additionnel vise à autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires à l'application de la loi à Mayotte.
I - Le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale
Cet article additionnel, introduit à l'Assemblée nationale, vise à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnances les mesures d'adaptation législative nécessaires à l'application de la présente loi à Mayotte. Le délai prévu pour prendre cette ordonnance est de douze mois.
Le droit applicable à la collectivité territoriale de Mayotte est en effet régi par deux principes : celui de spécialité législative en vertu duquel les lois et règlements adoptés en métropole ne lui sont applicables qu'en vertu d'une disposition expresse et celui d'adaptation législative qui exige une prise en compte des spécificités locales dans la détermination des règles législatives et réglementaires qui lui sont applicables.
S'agissant du domaine sanitaire et social, il convient de rappeler que Mayotte dispose d'un code local de la santé publique, d'un code local de l'action sociale et d'un code local du travail et que les mesures d'adaptation nécessaires à la mise en oeuvre des lois et règlements dans ces domaines doivent être soumises pour avis au conseil général de cette collectivité.
C'est la raison pour laquelle, lorsqu'un projet de loi ne comporte pas initialement de dispositions relatives à Mayotte, il n'est pas possible de les introduire en cours de discussion, dans la mesure où la procédure de consultation du conseil général ne peut plus valablement être mise en oeuvre. L'extension à Mayotte d'un projet de loi qui ne prévoyait pas initialement de dispositions relatives à son application dans cette collectivité ne peut donc intervenir qu'en habilitant le Gouvernement à procéder ultérieurement et par ordonnances aux adaptations nécessaires.
II - La position de votre commission
Votre commission approuve, dans son principe, l'application à Mayotte du présent projet de loi et elle comprend que des adaptations importantes seront nécessaires pour sa mise en oeuvre dans cette collectivité, compte tenu notamment des écarts de développement de son système de protection sociale par rapport à la métropole.
Le droit actuellement applicable à Mayotte
dans le domaine du handicap
- les prestations versées aux personnes handicapées
Aux termes de l'article L. 542-1 du code de l'action sociale et des familles, les aides aux personnes handicapées relèvent de la compétence du conseil général de Mayotte.
Dans le cadre du règlement territorial d'action sociale, défini par la collectivité, la collectivité de Mayotte verse sur crédits d'Etat déconcentrés une allocation à l'attention des enfants handicapés, ainsi qu'une allocation tierce personne à destination des enfants comme des adultes.
La seule exception à la compétence du conseil général concerne l'allocation aux adultes handicapés. Une allocation locale destinée aux adultes handicapés était versée jusqu'en 2002, date à laquelle l'ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte a mis en place une allocation pour adulte handicapé, inspirée de l'AAH métropolitaine pour son mode d'attribution mais versée aux seules personnes handicapées ayant un taux d'incapacité d'au moins 80 %. Cette allocation est gérée par la caisse de sécurité sociale de Mayotte.
Il s'agissait d'une première étape pour rapprocher les prestations servies à Mayotte des prestations mises en place en métropole, mais le montant de cette AAH locale comme ses conditions d'attribution sont différentes compte tenu des réalités locales. La mise en place de cette allocation s'inscrit dans un mouvement de transposition progressive des règles applicables en matière d'assurance maladie, d'assurance vieillesse, mais aussi de l'organisation et de l'équipement sanitaires.
- l'organisation institutionnelle en matière de prise en charge des personnes handicapées
La loi du 30 juin 1975 d'orientation en faveur des personnes handicapées et la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale n'ont pas, à ce jour, été étendues à Mayotte. Il n'existe donc dans la collectivité départementale ni COTOREP, ni CDES. Il n'y a pas non plus de procédure de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé. Par ailleurs, aucun établissement médico-social destiné à accueillir des enfants ou des adultes handicapés, aucun CAT et aucun atelier protégé n'a encore vu le jour. Il convient d'ailleurs de remarquer, qu'aux termes de l'article L. 542-1 du code de l'action sociale et des familles, l'admission dans les centres d'aide par le travail relève de la compétence du conseil général de Mayotte et non de l'État.
La création d'une direction départementale des affaires sanitaires et sociales, placée sous la responsabilité du représentant de l'État dans la collectivité, est prévue mais n'est pas encore réalisée. Une cellule Handicap a cependant été mise en place en 2003 auprès de ce dernier. Elle a pour mission de gérer les demandes des personnes handicapées et de leur famille.
Grâce à elle, un système d'aide à domicile et un dispositif d'accueil familial ont été créés. Il est enfin envisagé de développer l'accueil de jour qui paraît être la solution la plus adaptée aux réalités sociologiques mahoraises.
Votre commission s'étonne toutefois qu'aucune transposition des dispositions de la présente loi ne soit prévue pour les autres territoires d'outre-mer soumis au principe de spécialité législative. Compte tenu de l'obligation de respecter les spécificités de la répartition des compétences entre l'État et les autorités locales et de l'obligation corrélative de soumettre à ces autorités locales les projets de loi avant leur dépôt, il n'est désormais plus possible d'effectuer cette transposition directement dans le présent projet de loi. Votre commission estime donc que l'habilitation prévue par le présent article pour Mayotte pourrait utilement s'étendre à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française, aux îles Wallis-et-Futuna et aux Terres australes et antarctiques françaises.
Votre commission constate aussi que la procédure d'habilitation prévue par le présent article ne répond pas un certain nombre d'exigences à caractère constitutionnel : ainsi, elle ne mentionne pas expressément la soumission des mesures d'adaptation prises par ordonnances aux institutions locales compétentes, ni les délais dans lesquels le projet de loi de ratification de ces ordonnances sera déposé devant le Parlement. Elle vous proposera donc de rect ifier cet article dans ce sens .
Votre commission craint également que compte tenu de la nécessité de recueillir l'avis de l'ensemble des autorités locales concernées, le délai de douze mois prévu par le présent article pour prendre cette ordonnance ne soit trop court. Elle constate d'ailleurs que le délai ordinairement prévu pour l'édiction des ordonnances concernant les territoires d'outre-mer est de dix-huit mois. Elle vous propose donc également d' allonger le délai prévu par cet article, afin de l'aligner sur le délai de dix-huit mois généralement prévu dans ce domaine.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.