Rapport n° 220 (2003-2004) de Mme Maryse BERGÉ-LAVIGNE , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 25 février 2004
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INTRODUCTION
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CONCLUSION
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EXAMEN EN COMMISSION
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PROJET DE LOI
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ANNEXE I -
RAPPORT DU PROCUREUR DU TRIBUNAL
AU CONSEIL DE SÉCURITÉ - OCTOBRE 2003
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ANNEXE II -
L'ACTUALITÉ DU TRIBUNAL EN 2004
N° 220
? SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2003-2004
Annexe au procès-verbal de la séance du 25 février 2004
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, autorisant l'approbation de l' accord entre le Gouvernement de la République française et l' Organisation des Nations unies concernant l' exécution des peines prononcées par le Tribunal pénal international pour le Rwanda ,
Par Mme Maryse BERGÉ-LAVIGNE,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : M. André Dulait, président ; MM. Robert Del Picchia, Jean-Marie Poirier, Guy Penne, Mme Danielle Bidard-Reydet, M. André Boyer, vice-présidents ; MM. Simon Loueckhote, Daniel Goulet, André Rouvière, Jean-Pierre Masseret, secrétaires ; MM. Jean-Yves Autexier, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Daniel Bernardet, Pierre Biarnès, Jacques Blanc, Didier Borotra, Didier Boulaud, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Ernest Cartigny, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Paul Dubrule, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Jean Faure, Philippe François, Jean François-Poncet, Philippe de Gaulle, Mme Jacqueline Gourault, MM. Christian de La Malène, René-Georges Laurin, Louis Le Pensec, Mme Hélène Luc, MM. Philippe Madrelle, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Louis Moinard, Jacques Peyrat, Xavier Pintat, Jean-Pierre Plancade, Bernard Plasait, Jean Puech, Yves Rispat, Roger Romani, Henri Torre, Xavier de Villepin, Serge Vinçon.
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 1149 , 1296 et T.A. 228
Sénat : 137 (2003-2004)
Traités et conventions. |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Il y a dix ans, le 6 avril 1994, l'avion dans lequel le Président rwandais de l'époque, Juvénal Habyarimana, revenait d'Arusha, en Tanzanie, où des négociations sur l'avenir politique de son pays étaient en cours, s'écrasait lors de son atterrissage à Kigali. La responsabilité de cet accident, vraisemblablement provoqué par un tir de missile, est toujours controversée, comme l'a souligné l'actualité récente.
Cette mort donnait le signal à des massacres de populations civiles originaires des deux principales ethnies du Rwanda, les Hutu et les Tutsi. Le souvenir des 500 000 à 800 000 victimes, principalement Tutsi, exécutées pour la plupart à la machette, pèse toujours sur la conscience internationale.
La création rapide du Tribunal pénal international pour le Rwanda par le Conseil de sécurité des Nations unies, par une résolution du 8 novembre 1994, visait à apporter, sur le plan judiciaire, une réponse adaptée à cette situation.
Après des débuts hésitants, le TPIR a progressé vers une meilleure efficacité.
La conclusion du présent accord souligne la détermination de la France à soutenir son action en organisant l'accueil sur son territoire, à titre volontaire, de personnes condamnées définitivement.
I. LA CRÉATION DU TRIBUNAL PÉNAL INTERNATIONAL POUR LE RWANDA : UNE RÉPONSE JUDICIAIRE RAPIDE APPORTÉE PAR L'ONU AU DRAME RWANDAIS DU PRINTEMPS 1994.
A. LE CONTEXTE DU DRAME RWANDAIS
Les accords d'Arusha, conclus à l'été 1993 entre les gouvernements rwandais, ougandais et le Front patriotique rwandais 1 ( * ) (FPR), et organisant la transition du Rwanda vers le multipartisme et la participation de l'opposition au gouvernement , sont appuyés par le déploiement de la mission d'assistance des Nations unies au Rwanda (Minuar). Cette mission, créée, à la demande des signataires des accords d'Arusha, par la résolution 872 du 5 octobre 1993 du Conseil de sécurité, vise à en superviser l'application et à soutenir le mise en place d'un gouvernement transitoire.
Les attributions de ses 2 500 membres (Casques bleus et observateurs militaires) sont multiples, et touchent principalement au maintien de la sécurité dans la capitale, au contrôle du cessez-le-feu, et à l'assistance aux opérations de déminage et de démobilisation des combattants.
La disparition soudaine du président Habyarimana rend caduque l'amorce de la réconciliation nationale entre le pouvoir en place, émanant de la majorité Hutu, et le FPR, dirigé par un militaire (il a fait ses études à l'Académie militaire de West Point, aux Etats-Unis), Paul Kagamé.
Dans l'urgence, la Belgique s'unit à la France pour mettre en oeuvre l'opération Amaryllis , du 9 au 17 avril 1994, destinée à évacuer leurs ressortissants du Rwanda après la mort d'Habyarimana. Puis, le 21 avril, le Conseil de sécurité, par sa résolution 912, réduit de 2 500 à 270 les effectifs de la MINUAR. Le pays est donc abandonné à lui-même durant trois mois . C'est en effet le 22 juin 1994 après les terribles massacres que le Conseil de sécurité autorise, sur demande française, une intervention armée pour protéger la population civile et assurer la distribution de l'aide humanitaire. L'opération Turquoise, menée par les militaires français, se déroule du 22 juin au 22 septembre 1994.
Les 5 500 membres de la MINUAR II, dont les buts sont étendus à la protection des populations 2 ( * ) , sont déployés à partir du 10 août 1994 ; le retrait de ses derniers éléments intervient le 8 mars 1996. L'ampleur des massacres perpétrés d'avril à juillet 1994 , leur caractère, semble-t-il, organisé, ainsi que la présence, en nombre, de femmes et d'enfants parmi les victimes, conduisent le Haut Commissaire des Nations unies pour les Droits de l'homme , M. Ayala-Lasso, de nationalité équatorienne, à évoquer un « génocide » lors d'une mission à Kigali, les 11 et 12 mai 1994 .
B. LA CRÉATION RAPIDE DU TPIR S'EST ACCOMPAGNÉE D'UN MANQUE INITIAL DE MOYENS ET D'EFFICACITÉ
Le climat de culpabilité suscité par ce qui est apparu, a posteriori, comme une carence de l'ONU ajouté à la création récente -1993- du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY), qui constituait un précédent, se sont conjugués pour conduire le Conseil de sécurité à créer, dès le 8 novembre 1994, le Tribunal pénal international pour le Rwanda.
Son statut lui confère une compétence pour : « juger les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire du Rwanda, et les citoyens rwandais présumés responsables de telles violations commises sur le territoire d'Etats voisins entre le 1 er janvier et le 31 décembre 1994 ».
Ce tribunal est localisé à Arusha, en Tanzanie, pays voisin du Rwanda, non impliqué dans les événements de 1994. Mais la difficulté de sa tâche, notamment en raison de la vulnérabilité des témoins à d'éventuelles représailles, ainsi que de l'hostilité du Rwanda à l'action du TPIR (ce pays s'est opposé à la création du Tribunal), s'est trouvée encore accrue par la diversité des nationalités et des cultures juridiques de ses membres, qui regroupent 80 personnes d'origines différentes.
Ainsi, par exemple, les locaux du Tribunal n'ont été achevés qu'en 1998. La première tâche des juges a été d'adopter le Règlement de procédure et de preuve, qui instaure trois organes : les trois chambres de première instance et la Chambre d'appel, le bureau du procureur, chargé des enquêtes et des poursuites, et le Greffe, chargé de fournir l'appui général judiciaire et administratif aux Chambres et au Procureur.
II. LA FRANCE RENFORCE, AVEC LA CONCLUSION DE CET ACCORD, SON ACTION DE SOUTIEN AU TPIR
Dès la création du tribunal, la France lui a apporté des appuis concrets.
A. LA FRANCE A APPORTÉ SON SOUTIEN AU FONCTIONNEMENT DU TPIR DÈS SA CRÉATION
Dans le domaine de l'ordonnancement juridique interne, la France a adopté la loi du 22 mai 1996 qui organise les modalités de dessaisissement éventuel des juridictions françaises au profit du TPIR, ainsi que sa coopération judiciaire avec cette instance. Le Gouvernement français assiste ainsi le TPIR dans sa recherche d'éléments de preuve, tant au cours des enquêtes que dans le cadre des procès. Cette coopération s'est traduite par l'organisation d'auditions, notamment de membres des forces armées françaises au profit du tribunal : des officiers ont ainsi été entendus sur les massacres dans la région de Kibuye, et sur le rôle des autorités administratives locales. Un officier et un sous-officier ont été entendus sur le massacre de Bisserero, et sur le rôle des autorités administratives locales.
En vertu de l'article 28 du Statut du TPIR, la France peut être amenée à répondre aux demandes d'assistance du TPIR , notamment dans les quatre domaines suivants : identification et recherche de témoins sur le territoire national, réunion de témoignages et production de preuves, expédition de documents, arrestation et transfert de personnes. La France a, en conséquence, répondu à une dizaine de demandes de localisation de personnes, et ainsi permit leur audition par le Tribunal comme témoins. Deux personnes inculpées par le Tribunal pénal international pour le Rwanda ont été arrêtées sur le territoire français et transférées à Arusha : MM. Jean-de-Dieu Kamuhanda et François-Xavier Nzuwomeneye, respectivement ancien ministre de la culture et de l'enseignement supérieur, et ancien officier du régime Habyarimana.
En plus de ces obligations légales, la France a apporté un soutien matériel au fonctionnement du TPIR : 1 million d'euros ont été ainsi affectés, en 1999, à l'équipement audiovisuel de deux des trois salles d'audiences. Des experts légistes ont été envoyés pour aider à l'établissement des rapports d'expertise, et un projet de formation du personnel de sécurité du Tribunal est en cours.
B. L'ACCORD SUR L'ACCUEIL EN FRANCE DE CONDAMNÉS PAR LE TPIR RENFORCE CE SOUTIEN
Les 13 articles du présent accord organisent cet accueil, sur le modèle de celui conclu entre la France et le TPIY, ratifié en 2002 par le Parlement français. La date récente de conclusion du présent accord, le 14 mars 2003, s'explique par le caractère évolutif de l'approche française en ce domaine. Initialement, la France a privilégié la perspective d'une détention des futurs condamnés dans les pays africains ayant conclu un accord d'exécution des peines avec le TPIR. A ce jour, ces pays sont les suivants : Bénin, Mali et Zwaziland . Seul, pour l'instant, le Mali accueille effectivement des condamnés, au nombre de six. La France a donc envisagé l'octroi d'une assistance financière pour faciliter les conditions matérielles de cet accueil.
Mais l'activité du TPIR a mis en lumière le fait que bon nombre d'accusés avaient en Europe, et en particulier en Belgique et en France, des attaches familiales. Il a alors été décidé de privilégier leur maintien en Europe, au terme de leur procès, en acceptant des condamnés sur le territoire français.
Tel est l'objet du présent accord, découlant de l'article 26 du statut du TPIY, qui dispose que : « Les peines d'emprisonnement sont exécutées au Rwanda ou dans un Etat désigné par le Tribunal international pour le Rwanda sur la liste des Etats qui ont fait savoir au Conseil de sécurité qu'ils étaient disposés à recevoir des condamnés. Elles sont exécutées conformément aux lois en vigueur de l'Etat intéressé, sous la supervision du tribunal. »
L'accord prévoit donc une coopération volontaire. L'accueil de condamnés n'est pas, en effet, une obligation, mais une faculté ouverte à tout Etat, qui doit en informer le Conseil de sécurité conformément à l'article 26.
Cet accord traduit le soutien français à l'action du Tribunal, et à celle du pays hôte du tribunal, la Tanzanie, en partageant avec lui la charge que représente l'incarcération des personnes condamnées par le TPIR.
En plus des trois Etats africains ayant déjà conclu un accord du même type avec le TPIR, plusieurs Etats européens, dont la Belgique et l'Italie, sont en discussion avec le tribunal pour en faire de même. La France est donc le premier Etat non africain à avoir signé un accord de ce type avec le TPIR .
L'initiative de cet accord revient au Tribunal : sa présidente, lors d'une visite en France en mai 2000, avait évoqué l'éventuelle conclusion d'un accord d'exécution des peines, calqué sur celui qui venait alors d'être signé avec le TPIY.
L'article premier du texte définit les but et champ d'application de l'accord, qui « régit les questions relatives à toutes les demandes adressées à l'Etat requis aux fins de l'exécution des peines prononcées par le Tribunal ».
L'article 2 précise que le consentement de la France est requis au cas par cas, pour l'exécution d'une peine sur son territoire national, à la suite de consultations avec le tribunal portant sur un condamné déterminé. Un éventuel refus n'a pas à être motivé.
L'article 3 organise la supervision, par le Tribunal, des conditions d'emprisonnement, et notamment des mesures consécutives à la législation de l'Etat requis conduisant à modifier les conditions ou la durée d'emprisonnement des condamnés.
L'article 4 précise que le condamné est, avant son transfert en France, informé des dispositions de l'accord, et l'article 5 rappelle que le condamné ne peut être à nouveau jugé en France pour des faits déjà examinés par le TPIR.
L'article 6 prévoit la possibilité d'inspections inopinées effectuées par le Comité international de la Croix-Rouge.
Les articles 7 à 10 organisent les différents cas de cessation de la peine.
La France applique aux prisonniers les dispositions de son droit interne en matière carcérale, y compris les dispositions ayant pour effet de modifier la durée de la peine. Cependant, le TPIR peut, à tout moment, mettre fin à l'exécution d'une peine et décider le transfert sous la garde d'un autre Etat ou du tribunal. Ce peut être le cas lorsqu'un désaccord existe entre le tribunal et l'Etat d'accueil sur l'application d'une mesure de nature à modifier les conditions ou la durée de la détention ou d'une mesure de grâce ou de commutation de peine envisagée par l'Etat requis.
Dans cette dernière hypothèse, le président du tribunal ne peut refuser une mesure de grâce décidée par l'autorité compétente en France ; il ne se prononce donc pas sur la mesure elle-même. Sa seule possibilité de ne pas accepter la grâce est de retirer le prisonnier du territoire de cet Etat : la mesure de grâce devient alors « sans objet ». La plénitude du pouvoir de l'autorité compétente française -en l'occurrence, le Président de la République- est donc ainsi respectée.
L'accord prévoit que les autorités françaises prennent en charge les frais encourus dans le cadre de l'exécution de la peine, en revanche les frais de voyage entre le siège du tribunal et la France sont à la charge du TPIR ( article 11 ).
L'accord peut être dénoncé par l'une ou l'autre des Parties, avec un préavis de deux mois, mais il ne peut être mis fin à l'accord avant que toutes les peines auxquelles il s'applique soient purgées ou cessent d'être exécutoires ( article 13 ).
Cet accord a été négocié et rédigé en français, qui est l'une des deux langues de travail du TPIR, avec l'anglais.
C. L'ACTUALITÉ RÉCENTE DU TPIR A ÉTÉ MARQUÉE PAR UNE RÉORGANISATION DÉCIDÉE PAR L'ONU, ET PAR UNE ACTIVITÉ SOUTENUE DU TRIBUNAL
Le Conseil de sécurité a décidé, le 15 septembre 2003, de confier le poste de procureur, non plus à Mme Carla Del Ponte, qui a été invitée à se consacrer exclusivement à son poste de procureur de TPIY, mais M. Hassan Babacar Jallow, de nationalité gambienne.
Par ailleurs, le Conseil de sécurité a fixé au TPIR la date butoir de 2008 pour la fin de ses travaux.
Ces deux décisions visent à accroître le nombre de responsables africains au sein du TPIR, qui pâtit d'une image mitigée sur ce continent, pour des raisons multiples, et à accélérer les travaux du Tribunal en lui fixant une « durée de vie » limitée.
Le Tribunal a acquitté, le 26 février dernier, deux anciens cadres du régime Habyanimana, un ministre et un préfet, faute de « preuve solide et crédible de leur responsabilité dans les massacres ». L'appel du parquet a conduit au maintien en détention des deux prévenus. Le Tribunal a ensuite entrepris l'examen de la culpabilité de quatre anciens officiers rwandais. Par ailleurs, un ancien officier de l'armée rwandaise recherché par le TPIR a été arrêté aux Pays-Bas le 25 février.
Il semble que l'institution d'Arusha ait atteint un rythme soutenu de travail, conformément aux souhaits du Conseil de sécurité de ne pas voir s'éterniser cette juridiction, ce qui serait contreproductif pour le processus de réconciliation nationale souhaitée pour le Rwanda.
CONCLUSION
Cet accord manifeste le soutien actif et permanent de la France à l'action du TPIR. Premier pays européen à accepter de prendre en charge sur son sol l'incarcération de personnes condamnées à titre définitif par le Tribunal.
La France renouvelle ainsi, de façon à la fois concrète et symbolique, son appui à la justice pénale internationale, qui est partie prenante de la possibilité de réconciliation nationale au sein de pays dont l'unité a été gravement mise en péril par des actes dont il convient, tout d'abord, de désigner clairement les coupables.
EXAMEN EN COMMISSION
La commission a examiné le présent rapport lors de sa réunion du 25 février 2004.
A l'issue de l'exposé du rapporteur, M. Xavier de Villepin a estimé que l'action de soutien de la France au Tribunal était positive, mais que les informations données sur son activité semblaient contradictoires, et que son efficacité avait été initialement sujette à caution. Il a également souhaité savoir comment le Rwanda coopérait à l'action du tribunal.
Mme Maryse Bergé-Lavigne, rapporteur, a reconnu que l'activité du tribunal avait été critiquée, à plusieurs reprises, depuis sa création, mais a rappelé que les mêmes critiques étaient portées à l'encontre de l'activité du Tribunal international pour la Yougoslavie (TPIY), situé à La Haye. Elle a estimé que ces deux institutions avaient souffert des mêmes difficultés : corps judiciaire issu de continents différents et de traditions juridiques diverses, longueur de l'élaboration préalable du règlement interne du tribunal avant de pouvoir procéder aux activités proprement judiciaires. Elle a évoqué la perception assez peu favorable de l'activité du TPIR sur le continent africain, notamment par le Rwanda. Elle a cependant estimé que des progrès importants avaient été effectués, ces dernières années, par le tribunal, et que le renforcement du personnel d'origine africaine en son sein était notamment de nature à le faire mieux accepter.
M. André Dulait, président, a estimé que ces tribunaux ad hoc souffraient, en effet, de difficultés de fonctionnement, et que la future action de la Cour pénale internationale serait, seule, de nature à permettre une meilleure efficacité de la justice internationale.
Puis, suivant les recommandations du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi.
PROJET DE LOI
(Texte proposé par le Gouvernement)
Article unique
Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et l'Organisation des Nations unies concernant l'exécution des peines prononcées par le Tribunal pénal international pour le Rwanda, signé à Arusha le 14 mars 2003, et dont le texte est annexé à la présente loi. 3 ( * )
ANNEXE I -
RAPPORT DU
PROCUREUR DU TRIBUNAL
AU CONSEIL DE SÉCURITÉ - OCTOBRE
2003
ANNEXE II -
L'ACTUALITÉ
DU TRIBUNAL EN 2004
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| Janvier | Février | Mars | Avril | Mai | Juin | Juillet | Août | Septembre | Octobre | Novembre | 16 MARS . Près de 40% des quelque 76'000 détenus rwandais accusés de participation au génocide de 1994 ont avoué leurs crimes avant la date butoir du 15 mars 2004, et devraient par conséquent bénéficier de remises de peine, indique à l'Agence France-Presse le procureur général du Rwanda, Jean de Dieu Mucyo . Selon les lois rwandaises régissant la justice en matière de génocide, les personnes qui avouent et demandent pardon peuvent bénéficier d'importantes remises de peine. En 2003, cette mesure avait permis de libérer plus de 22'000 détenus. Depuis le lancement de la procédure d'aveux en 1998, quelque 60'000 prisonniers ont confessé leurs crimes . "Environ 30'000 prisonniers ont avoué depuis les dernières libérations de détenus", qui avaient eu lieu fin janvier 2003, a-t-il déclaré, précisant qu'il s'agissait d'un chiffre provisoire. "Ce chiffre comprend "les aveux des détenus de la première catégorie, qui ne peuvent être libérés". La "première catégorie" regroupe les "planificateurs" du génocide, les "tueurs de grand renom" et les "violeurs". 27 FEVRIER . La principale association de rescapés du génocide rwandais en 1994, Ibuka , dénonce les acquittements de l'ancien ministre rwandais des Transports et communications, André Ntagerura et de l'ex-préfet de Cyangugu (sud-ouest), Emmanuel Bagambiki , qui étaient accusés de génocide et de crimes contre l'humanité, prononcés par le TPIR, estimant qu'avec ce jugement, la juridiction "niait l'existence du génocide". "Acquitter les planificateurs du génocide, c'est nier l'existence du génocide des Tutsis au Rwanda", affirme Ibuka dans un communiqué. L'association demande au gouvernement rwandais de "faire tout ce qui est en son pouvoir pour que cette mesure [l'acquittement] soit revue". Officiellement, Ibuka est une association indépendante. Toutefois les observateurs estiment qu'elle exprime souvent le point de vue du gouvernement rwandais. 25 FEVRIER . Le Tribunal acquitte l'ancien ministre rwandais des Transports et communications, André Ntagerura , et l'ancien préfet de Cyangugu (sud-ouest), Emmanuel Bagambiki , accusés de génocide et crimes contre l'humanité. L'ancien commandant du camp militaire de Karambo, dans la province de Cyangugu, le lieutenant Samuel Imanishimwe , qui comparaissait sous les mêmes chefs d'accusation, est condamné à 27 ans de prison. Les magistrats du Tribunal ont estimé que l'accusation "n'a pas apporté de preuve solide ou crédible que M. Ntagerura avait supervisé les massacres à Cyangugu", selon l'énoncé du jugement. De même, ils ont jugé que l'ancien préfet Bagambiki "ne peut être tenu responsable au plan criminel", faute de "preuve suffisamment solide" contre lui. En revanche, le lieutenant Imanishimwe a été reconnu "responsable d'avoir ordonné le massacre, la torture et l'emprisonnement de nombreux civils au camp de Karambo". Le procureur avait requis la prison à vie contre les trois accusés. C'est la deuxième fois que le Tribunal prononce un verdict d'acquittement. Il avait déjà acquitté en 2001 Ignace Bagirishema, l'ancien maire de Mabanza, dans la province de Kibuye (nord-ouest). 19 FEVRIER. Le Rwanda va libérer les prisonniers accusés de participation au génocide de 1994 ayant avoué leur crime et ayant passé en détention préventive plus de temps que la peine encourue, annonce le procureur général, Jean de Dieu Mucyo. "Plusieurs dizaines de milliers" de prisonniers seraient concernés. Une fois remis en liberté provisoire, les détenus devront probablement passer un ou deux mois dans les "camps de solidarité" - camps qui, selon les autorités rwandaises, servent à "rééduquer" les anciens combattants et les ex-prisonniers, et à les informer sur les changements intervenus au Rwanda depuis 1994. 22 JANVIER. L'ancien ministre rwandais de l'enseignement supérieur, Jean de Dieu Kamuhanda, 51 ans, condamné à la prison à vie par le Tribunal. Il a été reconnu coupable de "génocide" et "extermination comme crime contre l'humanité". Ministre pendant le génocide de 1994, il était accusé d'avoir personnellement dirigé des attaques perpétrées contre des civils à Gikomero, dans le centre du Rwanda. Arrêté en France en 1999, il est le troisième membre du "gouvernement du génocide" à être jugé par le Tribunal. 21 JANVIER. L'ancien ministre rwandais des Affaires étrangères, Jérôme Bicamumpaka, a déclaré "aucun Tutsi ne doit survivre", au début du génocide en avril 1994, affirme un témoin devant le Tribunal. "Aucun Tutsi ne doit survivre dans la préfecture de Ruhengeri. Ils doivent tous être exterminés", aurait lancé Jérôme Bicamumpaka, lors d'une réunion dans les locaux de la préfecture, "entre le 19 et le 25 avril 1994", à l'occasion de la prise de fonction du nouveau préfet, Basile Nsabumugisha. Le ministre aurait expliqué que le mandat du nouveau préfet consistait notamment à veiller à l'exécution d'un plan spécifiant que "tout Tutsi encore en vie devait être tué et que toute personne qui cachait chez elle un Tutsi avait l'obligation de le tuer". Jérôme Bicamumpaka et les anciens ministres de la Santé, Casimir Bizimungu, du Commerce, Justin Mugenzi, et de la Fonction publique, Prosper Mugiraneza, répondent de six chefs d'accusation de génocide et de crimes contre l'humanité portant sur des massacres de Tutsis en divers endroits du Rwanda entre avril et juin 1994. Ils plaident non coupables. 21 JANVIER. Le général canadien Roméo Dallaire déclare que les rebelles de l'époque, aujourd'hui au pouvoir, avaient planifié "un pays dominé par les Tutsi" lors de leur lutte armée contre le gouvernement contrôlé par l'ethnie Hutu. Le FPR, souligne-t-il, "n'avait pas nécessairement parmi ses priorités le bien-être des populations de l'intérieur mais un plan longtemps élaboré qui aboutirait à un pays dominé par les Tutsi". Le général Dallaire avait déjà remarqué "l'intransigeance politique" du FPR au début de 1994, lors de l'échec de la mise en oeuvre des accords de paix conclus à Arusha (Tanzanie) en août 1993. 20 JANVIER. Le général canadien Roméo Dallaire, qui dirigeait la Mission des Nations unies au Rwanda (Minuar) pendant le génocide en 1994 "charge" le principal accusé du procès, le colonel Théoneste Bagosora, ancien directeur de cabinet du ministre de la Défense et présenté par l'accusation comme "le cerveau du génocide". Selon lui, le colonel Bagosora, au début du génocide, donnait l'impression de "planifier" les massacres. Il ajoute que le colonel Bagosora était impliqué dans l'entraînement des miliciens, principaux bras armés du génocide rwandais.
Le colonel Bagosora comparaît dans le procès "des
militaires" avec l'ancien responsable des opérations militaires à
l'état-major de l'armée, le général de brigade
Gratien Kabiligi, l'ancien commandant de la région militaire de Gisenyi
(ouest du Rwanda), le lieutenant-colonel Anatole Nsengiyumva, et
l'ex-commandant du bataillon para-commando de Kigali, le major Aloys
Ntabakuze.
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Source : TPIR
* 1 Composé de Tutsi exilés en Ouganda
* 2 Résolution 918 du Conseil de sécurité du 17 mai 1994
* 3 Voir le texte annexé au document Sénat n° 137 (2003-2004)