EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mardi 21 octobre 2003, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de M. Paul Loridant, rapporteur spécial, sur les crédits des compte spéciaux du trésor pour 2004 et les articles 50 à 56 rattachés.
M. Paul Loridant, rapporteur spécial , a souhaité tout d'abord faire le point sur l'avenir des comptes spéciaux du Trésor, constatant que le rapport budgétaire qui leur était consacré présentait le caractère d'une « nécrologie », quatre comptes étant amenés à disparaître en 2004. Il a expliqué la suppression progressive de nombreux comptes spéciaux du Trésor par un fonctionnement actuel peu satisfaisant, beaucoup de comptes de commerce masquant par exemple des services de l'Etat incapables de se transformer, pour des raisons d'équilibre budgétaire, en établissements publics. Il a observé, en ce qui concernait les comptes d'affectation spéciale, que nombre d'entre eux enregistraient des reports importants ayant pu aller jusqu'à une année de crédits. Il a rappelé qu'un compte spécial du Trésor, et plus particulièrement un compte d'affectation spéciale, ne pouvait, en règle générale, constituer un bon support budgétaire pour effectuer des investissements publics, la combinaison des procédures d'engagement des autorisations de programme et de la règle relative aux comptes d'affectation spéciale, qui disposait que les dépenses engagées ou ordonnancées ne pouvaient excéder les ressources constatées, conduisant le gestionnaire du compte à attendre de disposer des recettes nécessaires pour pouvoir engager son opération d'investissement. Il a indiqué que ces modalités conduisaient mécaniquement à des reports importants. Il a noté que la majeure partie des comptes d'affectation spéciale finançait pourtant de l'investissement, comme le fonds national de développement pour le sport (FNDS). Il s'est d'ailleurs interrogé sur les raisons ayant pu conduire à doter ce fonds pour 2004 de crédits en hausse de 13,57 % malgré des reports de 2002 à 2003 de 150 millions d'euros.
M. Paul Loridant, rapporteur spécial , a conclu que les dysfonctionnements observés sur les comptes d'affectation spéciale conduisaient logiquement à la rebudgétisation progressive de certains d'entre eux, comme, pour 2004, le fonds national de développement pour les adductions d'eau et le fonds national de développement de la vie associative. Il a estimé que beaucoup de comptes spéciaux du Trésor allaient disparaître avec l'entrée en application de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), son article 21 prévoyant que les recettes des comptes d'affectation spéciale devaient être « par nature en relation directe avec les dépenses concernées ». Il a jugé que le fonds national de développement du sport, financé par un prélèvement sur la Française des jeux, et le fonds de provisionnement des charges de retraite, financé par l'UMTS (Universal Mobile Telecommunications System) étaient, en vertu de cette disposition, condamnés.
En outre, il a précisé que l'article 21 précité de la LOLF prévoyait également que les recettes des comptes d'affectation spéciale ne pourraient plus être complétées par des versements du budget général que dans la limite de 10 % des crédits initiaux de chaque compte, contre 20 % aujourd'hui. Il a jugé en conséquence que le compte 902-15 d'emploi des taxes parafiscales affectées au financement des organismes du service public de la radiodiffusion sonore et de la télévision, dont 16 % des ressources étaient constituées par un versement du budget général, pourrait voir son fonctionnement remis en cause.
Il a expliqué que l'application de l'article 20 de la LOLF, qui précisait que chacun des comptes spéciaux dotés de crédits constituait une mission, conduisait à exclure certains comptes qui n'auraient pas la « taille critique » ou qui ne pourraient définir un champ d'activité suffisamment large ou cohérent pour constituer une mission, citant l'exemple du compte d'affectation spéciale 902-32 de soutien à la presse et à l'expression radiophonique, qu'il a qualifié de « compte fricassée du ministère de la culture ». Il a enfin estimé que l'avenir du compte n° 902-25 « fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien (FIATA) », lié à celui du budget annexe de l'aviation civile dont la disparition serait annoncée d'ici 2006, n'était pas assuré.
Il a, dès lors, considéré que la physionomie des comptes spéciaux du Trésor après 2006 se limiterait aux trois comptes créés de droit par la LOLF - un compte d'affectation spéciale retraçant les opérations de nature patrimoniale liées à la gestion des participations financières de l'Etat, un compte des pensions et avantages accessoires à partir duquel seraient payées les pensions des agents publics et les charges de compensation aux régimes de retraite et un compte de la dette et de la trésorerie de l'Etat.
Pour terminer sa présentation des crédits, M. Paul Loridant, rapporteur spécial , a souhaité évoquer deux comptes d'affectation spéciale d'importance inégale, le premier étant le compte 902-24 d'affectation du produit des cessions de titres, parts et droits de société. Il s'est félicité de la création de l'agence des participations de l'Etat, dont il a indiqué avoir rencontré le directeur général le 20 mai 2003 en compagnie du Président et du rapporteur général de la commission. Il a estimé que cette agence devrait améliorer la gestion des participations publiques, ce qui profiterait à la fois à l'Etat, dont le patrimoine serait sans doute mieux valorisé, et aux entreprises, qui bénéficieraient d'un suivi plus performant. Il a salué également la publication d'un rapport sur l'Etat actionnaire, un « jaune » désormais, de bien meilleure facture que l'an passé, auquel la commission n'était pas étrangère, comme elle n'était pas étrangère aux travaux en cours sur les « comptes combinés » des 40 entités les plus significatives contrôlées par l'Etat. Il a formulé néanmoins deux remarques sur le plan budgétaire, s'interrogeant sur la cohérence de la réintégration des dotations à Réseau Ferré de France (800 millions d'euros au titre du désendettement et 675 millions d'euros au titre de la régénération des lignes) au sein du budget général, dans le fascicule des transports, et sur l'opportunité d'inscrire les recettes issues de cessions d'éléments du patrimoine immobilier de l'Etat en recettes non fiscales sur la ligne 211 du budget général, pour 500 millions d'euros. Il a observé que les cessions de patrimoine de l'Etat, plutôt qu'être traitées sur le plan budgétaire en recettes courantes, auraient pu être compensées par un désendettement à due concurrence ou par des dotations en capital à des entreprises publiques.
Il a évoqué un second compte, le fonds national pour le développement des adductions d'eau qu'il avait contrôlé dans le courant de l'année 2003 avec M. Joël Bourdin, rapporteur spécial des crédits de l'agriculture, estimant que la rebudgétisation du fonds était justifiée, que la distribution des crédits dans les départements devait se faire sur des critères actualisés et indiscutables, que l'utilisation des crédits devait être mieux évaluée et que la décentralisation des crédits vers les conseils généraux prévue dans le projet de loi sur l'eau s'imposait réellement.
Par ailleurs, M. Paul Loridant, rapporteur spécial , a présenté les articles rattachés. Il a indiqué que les articles 50, 51, 54, 55 et 56 étaient des articles de récapitulation de crédits. Il a proposé d'adopter l'article 52, modifiant la nomenclature des dépenses du compte d'affectation spéciale n° 902-24 « compte d'affectation des produits de cessions de titres, parts et droits de sociétés » pour permettre de verser des dotations en capital à des fondations de recherche reconnues d'utilité publique, et il a proposé de réserver l'article 53, modifiant la nomenclature des dépenses du compte d'affectation spéciale n° 902-25 « fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien » (FIATA) pour permettre de verser des dotations aux collectivités locales d'outre-mer au titre de la continuité territoriale. Il a souligné que cette disposition constituait une construction budgétaire complexe, juridiquement incertaine et économiquement contestable, souhaitant que les débats en séance publique à l'Assemblée nationale puissent éclairer la commission.
Un large débat s'est ensuite engagé.
M. Jean Arthuis, président , a souhaité qu'un débat puisse avoir lieu sur l'intégration des recettes de cession de patrimoine aux recettes fiscales courantes.
M. François Trucy s'est interrogé sur la rebudgétisation du fonds national de développement pour les adductions d'eau et sur ses conséquences budgétaires pour les collectivités locales.
M. Jean-Philippe Lachenaud a indiqué qu'il était opposé à la suppression de l'article 53 relatif à la dotation de continuité territoriale du fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien. Il a rappelé que les reports sur le fonds national de développement pour les adductions d'eau avaient souvent été provoqués par les retards de paiement de l'Etat.
En réponse, M. Paul Loridant, rapporteur spécial , a fait observer que l'article 53 n'était pas conforme aux engagements pris à l'occasion des débats sur la loi d'orientation pour l'outre-mer. Il s'est déclaré en accord avec le constat du retard pris chaque année par l'Etat quant au financement des dossiers d'adduction d'eau. Il a expliqué, pour cette raison, sa préférence pour une décentralisation du fonds national pour le développement des adductions d'eau.
M. Jean Arthuis, président, a indiqué que grâce à la décentralisation, il n'y aurait plus qu'une ligne de crédits dans le budget des conseils généraux pour le financement de la politique de l'eau.
M. Michel Moreigne a souhaité que soient préservés les conventions et les contrats en cours avec le fonds national pour le développement des adductions d'eau.
En réponse, M. Paul Loridant, rapporteur spécial , a admis qu'il faudrait veiller au suivi des contrats de plan jusqu'à leur réalisation.
A l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter le budget des comptes spéciaux du Trésor pour 2004 ainsi que les articles de récapitulation 50, 51, 54, 55 et 56 dans la rédaction qui résultera du vote du Sénat en première partie. Elle a par ailleurs décidé d'adopter sans modification l'article 52 et de réserver sa position sur l'article 53 rattaché.
Réunie le jeudi 20 novembre 2003, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a confirmé l' adoption des articles 50, 51, 52, 54, 55 et 56 rattachés aux comptes spéciaux du Trésor , et modifiés par l'Assemblée nationale pour coordination par rapport aux votes émis sur les différents articles, et elle a adopté l'article 53 rattaché aux comptes spéciaux du Trésor , précédemment réservé.