ARTICLE 26
Transfert à l'Agence nationale de valorisation de la
recherche (ANVAR) de la gestion de certaines aides à la recherche et
à l'innovation
industrielles
Commentaire : l'ANVAR se voit confier
l'exécution de
dépenses, engagées auparavant par les services du
ministère de l'industrie, en plus de celles qu'elle assumait
déjà. Il s'agit de crédits consacrés,
respectivement, à la recherche industrielle et à l'innovation
dans leur ensemble, aux activités concernant plus
particulièrement les technologies pétrolières et
gazières, et, enfin à la diffusion des techniques. Les moyens
correspondants sont regroupés en un seul chapitre.
I. LA RAISON D'ÊTRE DU PRÉSENT ARTICLE
On peut s'étonner de la présentation, dans la première
partie du projet de loi de finances, de dispositions qui tendent,
essentiellement, à rationaliser le régime des aides à la
recherche et à l'innovation distribuées par les services du
ministère délégué à l'industrie.
Il appartiendrait, a priori, plutôt au rapporteur spécial de ces
crédits de commenter de telles mesures, et leurs conséquences sur
la nomenclature budgétaire concernée, de façon
détaillée.
Outre l'affichage de la mise en oeuvre des intentions du « plan
innovation » du gouvernement, tendant à faire de l'ANVAR un
« animateur de réseau » des aides à
l'innovation en faveur des PME-PMI, le présent article a cependant une
portée juridique. En effet, l'ANVAR devenant gestionnaire de dossiers
initialisés par les services du ministère de l'industrie, le
transfert des droits et obligations afférents à la distribution
des aides correspondantes nécessitait une mesure législative.
L'Agence se voit ainsi conférer le droit au remboursement des avances
consenties, qui ne seront plus versées au budget de l'Etat, et celui de
récupérer des subventions attribuées sous des conditions
qui ne seraient plus respectées. Elle exercera les prérogatives
relatives au contrôle de la bonne exécution de leurs obligations
par les bénéficiaires des aides octroyées.
II. UN DISPOSITIF OPPORTUN
A. LES MÉRITES DE L'ANVAR
1. Des missions orientées vers la facilitation de la croissance par la
recherche et l'innovation
Créée par la loi n° 67-7 du 3 janvier 1967,
l'Agence Nationale de Valorisation de la Recherche (ANVAR) est un
établissement public à caractère industriel et commercial
(EPIC) doté, en tant que tel, de l'autonomie financière.
L'agence a pour mission :
- de soutenir le développement industriel et la croissance par
l'innovation et de contribuer à la mise en valeur des résultats
de la recherche scientifique et technique, principalement auprès des PME
;
- de mobiliser les financements nécessaires à la croissance des
entreprises, en complément de ses propres moyens (auprès de
l'union européenne, des collectivités territoriales), notamment
par l'apport de son expertise (recherche de fonds propres, évaluation de
projets, mises en relation avec des partenaires).
2. Des moyens, qui ne se suffisent pas à eux-mêmes,
utilisés localement
Pour réaliser ces objectifs, l'ANVAR a distribué, en 2002,
4.227 aides d'un montant global de 300 millions d'euros.
L'établissement s'efforce d'utiliser ses moyens :
- de façon coordonnée, en tenant compte des autres interventions
qui vont dans le même sens (l'ANVAR facilite la participation des PME
françaises au sixième PCRD
169(
*
)
, les aide à trouver des
partenaires pour la réalisation de leurs projets, notamment dans le
cadre d'Eurêka
170(
*
)
,
participe aux réseaux thématiques nationaux de recherche...) ;
- au plus près du terrain, par l'intermédiaire de ses
25 délégations régionales ;
- en augmentant l'effet de levier de ses propres financements par la
mobilisation d'autres ressources (fonds d'investissements, bourses,
crédits européens, collectivités locales, etc.).
3. Des actions diversifiées et efficaces
Les modes d'intervention de l'ANVAR se sont diversifiés puisque
celle-ci, à côté de ses avances remboursables, accorde
aussi des aides en fonds propres aux jeunes entreprises sous la forme de bons
de souscription d'actions (BSA).
Priorité ayant été donnée à la
création d'entreprises (environ 40 % des aides), l'agence est la
cheville ouvrière de l'organisation du concours national de
création d'entreprises de technologies innovantes et développe
des partenariats avec les incubateurs et les fonds d'amorçage. Elle
facilite le financement des activités des PME éligibles par les
FCPI (Fonds commun de placement dans l'innovation).
L'ANVAR multiplie ainsi les partenariats et les conventions (y compris avec des
universités et des collectivités locales).
Ses capacités, renforcées, d'expertises sont susceptibles d'aider
à la réalisation de projets dans leurs différentes phases
et dans les secteurs les plus variés.
Répartition sectorielle 2002 en nombre d'aides accordées
L'efficacité de l'agence est avérée, comme en
témoignent :
- le nombre, de plus en plus important, d'actions qui lui sont
déléguées par des tiers (études de projets, aides
au recrutement...), pour un montant de 56 millions d'euros en 2002
(37,7 millions d'euros au 31 juillet 2003) ;
- le maintien de son soutien à la naissance de jeunes entreprises
innovantes lorsque, comme en 2001 et 2002, les autres financements publics ne
parviennent pas à compenser le désengagement des investisseurs
privés spécialisés en capital risque (-50 % en 2001,
- 20 % au premier semestre 2002).
B. UNE CONCENTRATION DE MOYENS BIENVENUE MAIS INCOMPLÈTE
1. Un regroupement utile de crédits
Sont regroupés au sein du chapitre 66-02 «
Recherche
industrielle innovation et compétitivité des
entreprises
» du budget du ministère de l'économie,
des finances et de l'industrie, outre les crédits habituels de l'ANVAR
(actions en faveur de l'innovation et subventions d'équipement),
d'autres moyens, dont la gestion est désormais confiée
également à l'agence.
Il s'agit de dépenses, figurant dans trois nouveaux articles de ce
chapitre, qui concernent :
- la compétitivité des entreprises (article 30) ;
- la diffusion des techniques (article 40) ;
- la recherche sur les technologies pétrolières et
gazières (article 50).
Ces créations d'articles nouveaux s'effectuent par transfert de
crédits en provenance de lignes budgétaires anciennes qui se
trouvent donc supprimées.
CORRESPONDANCE DES NOMENCLATURES 2003 ET 2004 |
|
Ligne
budgétaire d'origine
|
Chapitre 66-02* - recherche industrielle innovation et compétitivité des entreprises (loi de finances (2004) |
Chapitre 66-01 article 80 : développement de la recherche industrielle et innovation |
article 30 * : fonds de compétitivité des entreprises |
Chapitre 64-92 (développement régional des PMI) article 20 : Diffusion des techniques - Recherche. |
article 40 : Diffusion des techniques - Recherche |
Chapitre
62-92 (actions dans les domaines de l'énergie et des matières
premières)
|
article 50 : Réseau de recherche sur les technologies pétrolières et gazières |
* libellés modifiés |
|
Le
regroupement de crédits ainsi opéré est opportun dans la
mesure où :
- il améliore la lisibilité du budget du ministère de
l'Economie, des finances et de l'industrie en ce qui concerne les
crédits de l'industrie ;
- il confie la gestion des crédits correspondants à un organisme
efficace, proche du terrain ;
- il traduit ainsi les intentions exprimées par le gouvernement dans le
« plan innovation », d'une part, dans « l'Acte II
de la décentralisation », d'autre part.
Présenté, en conseil des ministres, le 11 décembre 2002,
le « Plan Innovation », commun aux ministères
délégués respectivement à l'industrie, et à
la recherche et aux nouvelles technologies, prévoyait en effet une
« mise en cohérence sur le plan local » des aides
à l'innovation, sous l'égide de l'ANVAR, en faveur des
collectivités.
Dans chaque région pourraient être mis en place une instance
régionale d'orientation et un fonds de l'innovation, dont les aides
seraient instruites et gérées par l'ANVAR pour le compte des
collectivités intéressées.
Le fait que l'agence demeure un établissement
national
rendrait
cohérent l'ensemble de ces pratiques en assurant la diffusion des
meilleures d'entre elles sur tout le territoire.
Le présent article amorce la réalisation des objectifs de ce plan.
Il est prévu que le nouveau contrat pluriannuel entre l'Etat et l'ANVAR,
qui entrera en vigueur en 2004, tienne compte des nouvelles missions ainsi
confiées à l'agence.
Ce développement, avec l'aide de l'ANVAR, des interventions des
régions en faveur de l'innovation s'inscrit dans la perspective ouverte
par « l'Acte II » de la décentralisation et par le
projet de loi relatif aux responsabilités locales.
Le rôle des régions en matière de coordination des
interventions économiques locales doit être renforcé et
certains des moyens financiers que l'Etat y consacre leur être
transférés, notamment dans le cadre des contrats de plan.
Les actions de l'Etat seront, en conséquence, davantage
déconcentrées. Le transfert à l'ANVAR et à ses
délégations régionales de la responsabilité de
l'exécution des dépenses décrites plus haut,
effectuées auparavant par les services des grandes directions du
ministère de l'industrie, correspond à cette logique.
Le regroupement, au profit des délégations de l'ANVAR, de moyens
auparavant mis en oeuvre par deux directions du ministère de
l'industrie
171(
*
)
et la
fusion en cours de ces dernières constituent indéniablement des
mesures qui vont dans le bon sens.
2. Une réforme cependant partielle
Une certaine dispersion des interventions des services
déconcentrés de l'Etat en faveur du développement
industriel des régions, à travers l'innovation et la recherche,
n'en demeurera pas moins.
La Cour des comptes vient du reste de dresser un bilan mitigé de la
déconcentration de certains services de l'Etat, dénonçant
l'insuffisance de coopération interministérielle entre les
services au niveau local, et l'absence de mise en commun des moyens entre les
services.
Qu'en sera-t-il en ce qui concerne le soutien à l'innovation et à
la recherche au niveau régional ?
Tous les crédits concernés, loin s'en faut, n'ont pas
été transférés à l'ANVAR, notamment ceux des
chapitres suivants des agrégats de l'industrie :
- chapitre 44-80 article 10 : actions d'accompagnement de la politique de
l'innovation ;
- chapitre 64-92 article 10 : actions de développement industriel
régional en faveur des PMI (hors diffusion) ;
- chapitre 64-96 article 30 : reconversion des zones minières ;
- article 40 : industrialisation de la Lorraine.
Aux côtés des délégations de l'ANVAR, continueront,
en outre, à oeuvrer en même temps :
- les DRIRE (directions régionales de l'industrie, de la recherche et de
l'environnement), pour le développement industriel et technologique des
PMI
172(
*
)
;
- les directions régionales de la recherche et de la technologie ;
- d'innombrables organismes de transferts de technologie.
Le regroupement de crédits, au profit de l'ANVAR, opéré
par le présent article recueille l'approbation de votre commission des
finances. Il mérite d'autant plus d'être agréé qu'il
accompagne d'autres réformes en cours (fusion de la DIGITIP et de la
DARPMI) ou annoncées (transfert aux régions d'une partie des
moyens des DRIRE) qui tendent à une rationalisation du soutien de l'Etat
au développement industriel. Il reste cependant beaucoup à faire,
dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi organique du
1
er
août 2001 relative aux lois de finances, pour
parachever cette entreprise.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article sans modification.