Article 11
(art. L. 214-12-1 du code de l'éducation,
art.
L. 940-3 nouveau du code du travail)
Politique d'accueil, d'information
et de conseil à l'orientation
dans le domaine de la formation
professionnelle
Cet article a pour objet de confier à la région un rôle de coordination des actions en faveur de l'accueil, de l'information et de l'orientation des jeunes et des adultes dans le domaine de la formation professionnelle.
1. Le droit en vigueur
L'article premier de l'ordonnance n° 82-273 du 26 mars 1982 relative aux mesures destinées à assurer aux jeunes de seize à dix-huit ans une qualification professionnelle et à faciliter leur insertion sociale dispose que l'Etat, les collectivités locales, les établissements publics, les établissements d'enseignement, les associations, les organisations professionnelles, syndicales et familiales ainsi que les entreprises doivent concourir à cette obligation nationale par la mise en oeuvre :
- d'actions d'accueil, d'information et d'orientation ayant pour objet, notamment, d'informer les jeunes sur les possibilités d'entrée en formation et de proposer à leur choix un processus d'insertion sociale et de qualification professionnelle ;
- d'actions d'orientation approfondie ayant pour objet « d'aider ceux des jeunes dont l'orientation présente des difficultés particulières à choisir les voies les plus appropriées pour leur permettre d'acquérir une qualification professionnelle et d'assurer ainsi leur insertion sociale » ;
- d'actions de formation alternée ayant pour objet l'acquisition d'une qualification, la préparation à un emploi et l'insertion sociale.
L'article L. 311-9 du code du travail prévoit que les collectivités territoriales peuvent concourir au service public du placement en passant convention avec l'ANPE. Par ce conventionnement, l'agence peut déléguer un certain nombre de ses services et mettre ses moyens matériels et humains à disposition de la collectivité locale qui le demande conformément à sa charte de partenariat et à la convention cadre conclue avec l'Association des maires de France en date du 17 septembre 1997.
Dans son rapport sur « les acteurs de la formation professionnelle », établi en 1999, M. Gérard Lindeperg soulignait toutefois que : « L'accueil et l'orientation constituent le champ le moins organisé de la relation partenariale État-région, et qui a vu se développer sur son territoire autant d'initiatives mal coordonnées (...) Ce foisonnement, qui peut paraître parfois anarchique, traduit l'absence d'une véritable politique publique d'information et d'orientation professionnelle des actifs 13 ( * ) . »
Il relevait que seuls l'ANPE et les centres d'information et d'orientation (CIO) dépendant du ministère de l'éducation nationale constituaient véritablement chacun un réseau national disposant de points d'implantation maillant le territoire mais qu'ils restaient centrés sur des publics spécifiques :
- les demandeurs d'emploi, pour l'ANPE ;
- les jeunes scolarisés, pour les centres d'information et d'orientation eu égard au fait qu'en dépit d'une compétence pour l'ensemble des publics, 14 % seulement des personnes reçues dans ces centres étaient des adultes.
M. Gérard Lindeperg écrivait ainsi : « Le constat qui s'impose est celui de la juxtaposition de services d'information et d'orientation sectorisés, segmentés sur des publics ciblés et captifs, sans cohérence d'ensemble ni véritable complémentarité ou mise en réseau des services rendus aux personnes et aux entreprises . »
Pour y remédier, des initiatives ont été prises par certaines régions, généralement en concertation avec l'Etat, pour mettre en synergie les acteurs et assurer un déploiement harmonieux de ces structures sur le territoire (Pays de Loire, Poitou-Charentes, Franche-Comté).
En dépit de ces quelques tentatives, la confusion prévaut et l'usager a beaucoup de difficulté à se diriger dans un véritable maquis de structures qui se chevauchent :
- les structures territoriales d'information et d'orientation du service public de l'emploi (Agence locale pour l'emploi, services d'orientation professionnelle de l'AFPA, structures d'information et d'orientation pilotées par les services régionaux des droits des femmes) ;
- les quelque 309 missions locales et 325 permanences d'accueil, d'information et d'orientation (PAIO) constituées entre l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics, des organisations professionnelles et syndicales et, le cas échéant, des associations sous la forme d'associations ou de groupements d'intérêt public, en application de l'article 7 de la loi n° 89-905 du 19 décembre 1989 favorisant le retour à l'emploi et la lutte contre l'exclusion professionnelle.
- les structures territoriales du ministère de la jeunesse et des sports (centres d'information de la jeunesse) ;
- les structures d'information et d'orientation créées par les universités ;
- les structures d'information et d'orientation de l'éducation nationale (CIO, antennes de l'ONISEP et certains GRETA) ;
- les structures d'information des chambres consulaires, notamment sur l'apprentissage ;
- les structures d'information des OPCA, notamment ceux gérant les fonds de l'alternance et le congé individuel de formation, auxquels peuvent se surajouter des lieux spécifiques d'information spécialisée mis en place par des organisations professionnelles ;
- les centres interinstitutionnels de bilan de compétences ;
- les centres d'animation de ressources et d'information sur la formation (CARIF) qui, pour certains, ont développé des lieux d'information ouverts au grand public ;
- les structures développées par des acteurs locaux, qu'il s'agisse des maisons d'information sur la formation (MIF), des structures locales d'information (SLIF) ou encore des espaces ruraux emploi-formation (EREF) ;
- enfin, conséquence de la décentralisation de la formation professionnelle continue des jeunes, certains conseils régionaux ont mis en place leurs propres réseaux d'information et d'orientation (Picardie, Midi-Pyrénées, Languedoc-Roussillon, par exemple).
L'absence de coordination, les contradictions d'intérêts, la complexité des dispositifs, des mesures, des financements, entraînent un enchevêtrement des compétences qui provoque des dérives concurrentielles. Il en résulte une grande confusion qui pénalise aussi bien les utilisateurs que les financeurs.
2. Le dispositif proposé par le projet de loi
? Le premier paragraphe (I) du présent article tend à insérer un article L. 214-12-1 dans le code de l'éducation, afin de confier à la région la coordination des actions en faveur de l'accueil, de l'information et de l'orientation des jeunes et des adultes , en vue de leur insertion professionnelle et sociale.
Il est toutefois ajouté que cette compétence serait mise en oeuvre sous réserve des missions exercées par l'Etat, les établissements publics et les établissements d'enseignement à l'usage des élèves et étudiants.
La coordination des actions en faveur de l'accueil, de l'information et de l'orientation des jeunes et des adultes serait principalement assurée au moyen de conventions .
Il est précisé que les conventions entre la région, d'une part, les autres collectivités territoriales et les organismes chargés de l'accueil, de l'information et de l'orientation, d'autre part, auraient notamment pour objet de déterminer les conditions :
- d'installation et de fonctionnement des missions locales pour l'insertion professionnelle et sociale des jeunes ;
- de fonctionnement des permanences d'accueil, d'information et d'orientation ouvertes aux jeunes de seize à vingt-cinq ans ;
- d'organisation et d'animation du réseau des missions locales et des permanences d'accueil, d'information et d'orientation dans la région.
La région pourrait également conclure des conventions avec l'Etat afin d'harmoniser l'exercice de leurs compétences respectives.
Votre commission des Lois vous soumet un amendement ayant pour objet d'éviter le cloisonnement des interventions des régions et de l'Etat.
? Le deuxième paragraphe (II) a pour objet d'abroger les articles 2 et 4 de l'ordonnance n° 82-273 du 26 mars 1982 relative aux mesures destinées à assurer aux jeunes de seize à dix-huit ans une qualification professionnelle et à faciliter leur insertion.
L'article 2 dispose en effet que les actions d'accueil, d'information et d'orientation, d'orientation approfondie, de formation alternée s'adressent aux jeunes de seize à dix-huit ans qui, ne se trouvant pas en cours de scolarité, ne sont liés ni par un contrat d'apprentissage, ni par un contrat de travail.
Il n'est pas souhaitable de restreindre ainsi le champ de ces missions.
L'article 4 prévoit quant à lui la signature de conventions entre l'Etat et les collectivités locales, les établissements publics d'information et d'orientation, les établissements et organismes de formation et les associations afin de déterminer les conditions de l'installation du fonctionnement de missions locales et de permanence d'accueil, d'information et d'orientation ainsi que les limites dans lesquelles l'Etat participe à la couverture des dépenses d'installation et de fonctionnement afférentes à leurs actions.
Compte tenu de la compétence dévolue à la région, il n'y a plus lieu de maintenir cette disposition.
? Le troisième paragraphe (III) du présent article a pour objet d'insérer un article L. 940-3 dans le nouveau chapitre Ier que l'article 5 du présent projet de loi tend à créer dans le titre IV du livre IX du code du travail, consacré à la contribution de la région à la formation professionnelle continue dans le cadre de l'éducation permanente.
Cet article disposerait que « L'accueil, l'information et l'orientation des jeunes et des adultes en vue de leur insertion professionnelle et sociale sont régis par l'article L. 214-12-1 du code de l'éducation » dont il prévoit la reproduction dans le code du travail.
Par coordination avec la solution retenue à l'article 5, votre commission des Lois vous soumet un amendement tendant à prévoir l'insertion d'un article L. 943-3 dans le code du travail.
Elle vous propose d'adopter l'article 11 ainsi modifié .
* 13 Les acteurs de la formation professionnelle : pour une nouvelle donne - rapport au Premier ministre de M. Gérard Lindeperg, député de la Loire - septembre 1999 - pages 55 et suivantes.