B. LA LENTE DIFFUSION D'UNE CULTURE DE L'ÉVALUATION
Votre rapporteur spécial insiste, depuis plusieurs années, sur la nécessité de développer dans le domaine culturel tous les usages tendant à encourager une certaine rationalisation des choix budgétaires. Parallèlement au développement de la comptabilité analytique, qui doit rester un objectif essentiel pour les établissements publics, il va faire le point des efforts, laborieux mais réels, tendant à la mise au point de batterie d'indicateurs de résultats.
1. La généralisation des pratiques de contractualisation
Conformément aux orientations des CIRE du 12 octobre 2000 et du 15 novembre 2001, le ministère de la culture et de la communication s'attache à généraliser le recours à la contractualisation, que ce soit par le moyen de contrats d'objectifs et de moyens tel que celui qui doit être finalisé avec le musée du Louvre (2002-2005) avant la fin de l'année 2002, ou par celui de Plans stratégiques pluriannuels comme celui passé avec le Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Lyon (CNSMDL) pour la période 2002-2004, ou par celui des « contrats de développement » comme il en a été signé avec le Centre national de la danse (2000-2003) .
Le contrat d'objectif et de moyens du Musée du Louvre est un bon exemple de la nouvelle méthode de gestion. Des objectifs précis ont été proposés dont l'atteinte est évaluée grâce à une batterie d'indicateurs définis en liaison étroite avec les tutelles. L'objectif majeur est l'accroissement du taux d'ouverture des salles grâce au transfert progressif d'un volant d'emplois de surveillance vacants sur le budget du ministère (71 emplois en 2003). Le Louvre étant autorisé à organiser ses concours en liaison avec le service du personnel, le pourvoi devrait être accéléré. Le taux d'ouverture devrait ainsi approcher les 90% à l'horizon 2005.
Par ailleurs, à la définition des règles d'utilisation des excédents de gestion, à la fois prudentielles et équilibrées, font écho des clauses de sauvegarde précises dans la mesure où différents éléments sont susceptibles d'influer sur l'exécution du contrat, affectant l'équilibre de ses recettes et de ses dépenses.
Le musée du Louvre a montré son intérêt pour cette démarche de modernisation du dialogue avec les tutelles dès le début. Cette démarche de contractualisation répondait en outre aux exigences de son décret statutaire qui impose un « cahier des charges » conclu avec le ministère chargé de la culture et le ministère chargé du budget (deux cahiers des charges avaient précédemment été approuvés, l'un pour 1994-1996, l'autre pour 1997-1999).
Tableau : caractéristiques des contrats d'objectifs et de moyens
Caractéristiques de la contractualisation |
OBJECTIFS ET MODALITES |
Démarche de négociation et d'élaboration |
A partir d'un plan stratégique ou d'un état des lieux / orientations, les établissements publics définissent en lien avec la tutelle un projet de contrat ou de convention d'objectifs et de moyens contenant notamment : - une réflexion sur les missions de l'établissement ; -des perspectives financières affinées ; - la définition d'objectifs précis culturels et/ou financiers et de leviers d'action pour y parvenir ; -les résultats attendus par types d'activités et services ; -la détermination d'indicateurs de performance et / ou de gestion (efficacité / qualité de service / efficience) et de leurs cibles respectives ; -le cas échéant, les moyens en crédits et en emplois accordés par le ministère. |
Objectifs de la contractualisation |
- Au-delà de la définition des missions confiées à l'EP, clarifier conjointement les objectifs qui lui sont assignés ; - Stabiliser les relations avec les EP dans un cadre pluriannuel en leur donnant une meilleure visibilité sur leurs moyens de développement ; - Moderniser et faciliter le rôle de la tutelle. |
Incitation des parties |
- Le caractère incitatif du contrat est essentiel : au-delà d'une meilleure visibilité sur l'avenir et d'une plus grande lisibilité des relations État / EP, le contrat définit un cadre dans lequel les engagements des parties doivent pouvoir se traduire par des contreparties pour chacune d'entre elles (par exemple la définition a priori de règles d'affectation des éventuels excédents de gestion générés durant l'exécution du contrat pour le contrat d'objectifs et de moyens du musée du Louvre). |
Autorités contractantes |
Ministère chargé de la culture / Ministère chargé du budget / Établissement concerné |
Champ couvert par le contrat |
Ensemble des activités de l'établissement : Moyens en fonctionnement / en personnel / et le cas échéant en investissement. |
Quantification des objectifs |
Indicateurs de résultats et de gestion définis par référence avec le passé et projection triennale pour l'avenir |
Évaluation |
Oui |
L'ensemble des services et départements de l'établissement ont donc été associés à une réflexion interne approfondie et un premier document avait été présenté au conseil d'administration du 30 juin 2000. Compte tenu de l'importance des travaux à mener pour finaliser la démarche et de la réticence première de la direction du budget, le projet de contrat n'a mûri que progressivement par itérations successives.
Les activités du musée ont été réparties en trois axes - le public, le patrimoine et les fonctions supports - auxquels correspondent des objectifs généraux - assurer la qualité de l'accueil, conserver et étudier le patrimoine et conduire les missions à caractère administratif et financier - qui ont été déclinés en objectifs stratégiques, dont l'atteinte sera appréciée grâce à la définition d'indicateurs chiffrés (par exemple « maintenir la fréquentation du musée à un haut niveau », la cible de 6 millions de visiteurs étant visée ; « améliorer l'accueil du public à la pyramide », différents taux de satisfaction étant mesurés ou encore « développer la coopération avec les musées de région »).
L'une des innovations majeures du contrat - qui en constitue par ailleurs l'un des leviers - consiste dans le transfert de la totalité des emplois de fonctionnaires titulaires affectés au musée du Louvre et imputés jusqu'à présent sur le budget du ministère de la culture et de la communication . Ce transfert se fera en 2003, une période transitoire étant instaurée en 2002 en cours de laquelle la préparation de la paie des agents sera effectuée par le service du personnel du musée.
Le principe avait été acté dès 2002 avec la direction du budget en raison des avantages que ce transfert pouvait avoir :
- meilleure lisibilité du budget et opération vérité sur ce que coûte le Louvre (approche en coûts complets) ;
- progrès en termes d'autonomie et corrélativement de responsabilisation des gestionnaires des EP dans la logique de la loi organique du 1er août 2001 ;
- large déconcentration de la gestion des personnels du musée ;
- organisation d'une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences propres au musée et en liaison avec celle du ministère ;
- possibilité d'organiser directement le recrutement de la plupart de ses propres personnels, notamment les agents de surveillance, en fonction de ses contraintes et de son propre calendrier.
La même démarche est en cours avec d'autres établissements, citons notamment : la Bibliothèque nationale de France (BNF), l'Établissement public du parc et de la grande halle de la Villette (EPPGHV), ainsi que le Centre des monuments nationaux (CMN)
Le tableaux ci-dessus témoignent de la nécessité d'une approche consolidée au niveau des établissements publics.
Par ailleurs, des groupes de travail ont été constitués avec les établissements publics sur différentes problématiques (modernisation des statuts, modalités de contrôle financier, gestion des ressources humaines, contractualisation) et ont commencé à se réunir début octobre. La volonté est d'aboutir à un plan d'action global permettant de moderniser la tutelle et de renforcer responsabilisation et autonomie des gestionnaires dans le sillage de la loi organique du 1er août 2001.
Enfin , il faut noter que le nouveau Gouvernement souhaite pouvoir transformer le musée d'Orsay et le musée Guimet (aujourd'hui services à compétence nationale) en établissements publics dans le cadre de la réforme de l'organisation des musées nationaux et de la réunion des musées nationaux (RMN).