II. LA SITUATION FINANCIÈRE DE LA BRANCHE TEND À SE DÉGRADER
Marquée par une évolution soutenue des recettes et des dépenses ces dernières années, la situation financière de la branche, traditionnellement excédentaire, risque de se tendre dans les années à venir même si l'objectif d'équilibre devrait être atteint.
En effet, alors que l'évolution des recettes risque désormais d'être moins favorable, la progression des dépenses devrait rester dynamique.
A. UNE ÉVOLUTION DES RECETTES DÉSORMAIS MOINS FAVORABLE
Les recettes de la branche AT-MP du régime général continuent de progresser à un rythme soutenu, en dépit de la très légère baisse du taux de cotisation et alors même que les cotisations constituent l'essentiel des ressources de la branche.
Le rythme de progression des produits devrait toutefois ralentir en 2002 et 2003.
Produits de la branche AT-MP (CNAMTS)
(en droits constatés et en millions d'euros)
2000 |
2001 |
% |
2002 |
% |
2003 |
% |
|
PRODUITS TOTAUX |
7.528,8 |
7.990,6 |
6,1 |
8.349,3 |
4,5 |
8.793,5 |
5,3 |
PRODUITS DE GESTION TECHNIQUE |
7.517,2 |
7.959,4 |
5,9 |
8.341,6 |
4,8 |
8.785,7 |
5,3 |
Agrégat Cotisations effectives |
6.365,8 |
6.592,5 |
3,6 |
6.863,0 |
4,1 |
7.239,8 |
5,5 |
Cotisations sociales |
6.213,4 |
6.633,4 |
6,8 |
6.726,1 |
1,4 |
7.039,1 |
4,7 |
Cotisations des actifs salariés (part patronale) |
6.189,0 |
6.608,6 |
6,8 |
6.700,2 |
1,4 |
7.011,9 |
4,7 |
Majorations et pénalités |
24,4 |
24,8 |
1,7 |
26,0 |
4,8 |
27,2 |
4,7 |
Reprises nettes de provisions (créances sur cotisations) |
- 13,6 |
- 187,5 |
- 33,8 |
- 82,0 |
67,0 |
||
Pertes sur créances irrécouvrables (sur cotisations) |
- 67,5 |
- 77,9 |
15,4 |
- 57,8 |
-25,7 |
- 47,6 |
- 17,8 |
Cotisations prises en charge par l'Etat |
233,5 |
224,4 |
- 3,9 |
228,5 |
1,8 |
181,3 |
- 20,7 |
Transferts entre organismes de sécurité sociale |
835,9 |
1.037,1 |
24,1 |
1.1304 |
9,0 |
1.207,3 |
6 8 |
Compensations intégrales |
0,0 |
0,1 |
- |
0,1 |
0,0 |
0,1 |
0,0 |
Cotisations prises en charge par le FOREC |
835,3 |
1.06,2 |
24,1 |
1.129,5 |
9,0 |
1.206,3 |
6 8 |
Transferts divers |
0,6 |
0,9 |
38,0 |
0,9 |
0,0 |
0,9 |
0,0 |
Divers produits techniques |
315,5 |
329,9 |
4,6 |
348,2 |
5,6 |
338,6 |
- 2,8 |
Recours contre tiers |
273,2 |
260,0 |
- 4,9 |
265,2 |
2,0 |
270,5 |
2,0 |
Autres produits techniques |
1,6 |
4,1 |
161,3 |
4,2 |
1,7 |
4,3 |
1,5 |
Produits versés par une entité publique autre que l'Etat |
4,0 |
5,2 |
30,4 |
5,2 |
0,0 |
5,2 |
0,0 |
Produits financiers |
34,1 |
56,9 |
66,7 |
70,0 |
23,0 |
55,0 |
- 21,4 |
Produits exceptionnels |
2,5 |
3,7 |
43,3 |
3,7 |
0,0 |
3,7 |
0,0 |
PRODUITS DE GESTION COURANTE |
11,6 |
31,1 |
168,8 |
7,7 |
- 75,3 |
7,8 |
1,4 |
Source : Direction de la sécurité sociale
1. Un rythme de progression des produits plus modéré en 2002 et 2003
En 2001, les produits de la branche, en forte progression de 6,1 %, ont largement bénéficié de la forte croissance de la masse salariale.
Cette progression résulte principalement de l'augmentation de 3,6 % des cotisations effectives agrégées (à 6,6 milliards d'euros, elles représentaient 82,5 % des produits) et de l'augmentation de 24,1 % des cotisations prises en charge par le FOREC (à 1 milliard d'euros, elles représentaient 13 % des produits).
Les cotisations effectives agrégées auraient même progressé plus fortement encore de 6,4 % (à 6,8 milliards d'euros), malgré la légère baisse du taux de cotisation employeur à la branche (2,193 % en 2001, contre 2,2% en 2000), si elles n'avaient été diminuées en 2001 par le provisionnement exceptionnel (pour 179 millions d'euros) de la créance FOREC 2000 (qui représentait les allégements de charges qui n'avaient pas été compensés par l'Etat en 2000).
Ce rythme de progression des produits devrait être toutefois plus modéré en 2002 et 2003, même s'il devait rester soutenu.
Le ralentissement de la croissance de la masse salariale pèsera en effet sur les rentrées de cotisations. Le taux de cotisation employeur ne devrait d'ailleurs pas baisser en 2003, pour la première fois depuis de nombreuses années.
Les cotisations effectives agrégées devraient ainsi continuer à progresser plus modérément à un rythme de progression voisin de celui de la masse salariale (+ 3,7 % en 2002 et + 4,1 % en 2003) : + 1,3 % en 2002 (par rapport à 2001 rehaussé du provisionnement exceptionnel de la créance FOREC 2000) et + 4,2 % en 2003 (si on retire de leur montant en 2003 le remboursement exceptionnel par la CADES de la moitié de la créance FOREC 2000).
Mais en tenant compte en 2001 du provisionnement exceptionnel (pour 179 millions d'euros) de la créance FOREC 2000, et en 2003 du remboursement exceptionnel par la CADES (pour 90 millions d'euros) de la moitié de la créance FOREC 2000, les cotisations effectives agrégées augmenteraient plus vivement de 4,1 % en 2002 et de 5,5 % en 2003.
Les cotisations prises en charge par le FOREC continueraient, elles aussi, à progresser encore plus vivement de 9 % en 2002 et de 6,8 % en 2003. Elles atteindraient 1,1 milliard d'euros en 2002 et 1,2 milliard d'euros en 2003.
Au total, les produits de la branche AT-MP du régime général devraient donc atteindre 8,3 milliards d'euros en 2002 et 8,8 milliards d'euros en 2003. Ils continueraient donc à progresser globalement de façon soutenue de 4,5 % en 2002 et de 5,3 % en 2003, contre 6,1 % en 2001.
On observera toutefois que, sur la base d'un traitement comptable différent et avant l'imputation du remboursement par la CADES d'une partie de la créance FOREC, la Commission des comptes de la sécurité sociale tablait sur une progression beaucoup plus modérée des produits : + 2,3 % en 2002 et + 4 % en 2003
2. La place prépondérante des cotisations
Les recettes de la branche présentent la particularité d'être très majoritairement assises sur les cotisations employeurs.
Les cotisations représentaient ainsi 95,5 % du total des produits de la branche en 2001, qu'il s'agisse des cotisations effectivement prises en charge par les employeurs (79,7 % du total), par l'Etat (2,8 % du total) ou par le FOREC (13,0 % du total).
On rappellera que pour l'ensemble du régime général les cotisations sociales (prises en charge par les cotisants, l'Etat et le FOREC) ne représentaient que 52 % des produits.
C'est donc cette part prépondérante des cotisations sociales qui a permis le dynamisme des recettes de la branche constaté ces dernières années, lié à la forte progression de la masse salariale, alors même que le taux net moyen de cotisation diminuait légèrement (après avoir fortement baissé sur le long terme 30 ( * ) ).
Evolution du taux net moyen de cotisation
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2,282 |
2,267 |
2,262 |
2,262 |
2,210 |
2,200 |
2,193 |
2,185 |
Source : CNAMTS - Direction des risques professionnels
Cette part prépondérante appelle cependant deux observations.
D'une part, le taux de cotisation constitue la seule véritable variable d'ajustement de l'équilibre de la branche. Il n'est donc pas évident que la baisse tendancielle de ce taux puisse se prolonger en cas de dégradation durable de l'activité économique limitant la progression de la masse salariale.
D'autre part, la Cour des comptes a souligné, dans son rapport public particulier précité, la grande complexité du système de tarification actuel dont la gestion mobilise des effectifs importants au sein des caisses pour aboutir in fine à des écarts de taux parfois faibles et à une individualisation très limitée de ces derniers.
Les principes de tarification Le système de tarification est fondé sur un triple principe : - une prise en charge par le seul employeur, - un souci de prévention, le montant de la cotisation étant fixé selon le degré du risque dans chaque entreprise, - un principe de mutualisation, intrinsèquement lié à la nature assurentielle de notre système de sécurité sociale. Le calcul du taux de cotisation En application de ces principes, le taux de cotisation est actualisé chaque année et déterminé pour chaque entreprise selon la nature de son activité et selon ses effectifs. Le taux net , qui est en fait le taux exigible, est la somme d'un taux brut et de trois majorations spécifiques. Le taux brut est le rapport entre la valeur du risque (apprécié en fonction des prestations versées) et la masse salariale versée au cours des trois dernières années. Selon la taille de l'entreprise, ce taux brut est : - celui calculé pour l'ensemble de l'activité dont relève l'établissement : c'est le taux collectif pour les entreprises de moins de 10 salariés ; - celui calculé à partir du report des dépenses au compte de l'employeur : c'est le taux réel pour les entreprises de 200 salariés et plus ; - pour les entreprises dont les effectifs sont situés entre 10 et 199 salariés, la tarification est dite mixte, le calcul se faisant en partie selon le taux collectif et en partie selon le taux réel, la part de ce dernier augmentant avec les effectifs. Au taux brut sont ajoutées trois majorations forfaitaires identiques pour toutes les entreprises et activités, pour tenir compte : - des accidents de trajet (M1) ; - des charges générales, des dépenses de prévention et de rééducation professionnelle (M2) ; - de la compensation entre régimes et des dépenses qu'il n'est pas possible d'affecter à un employeur, inscrites au compte spécial « maladies professionnelles » (M3). Le rôle de la branche La commission des AT-MP est chargée de fixer, avant le 31 janvier, les éléments de calcul des cotisations, conformément aux conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale déterminées par les lois de financement. Ce sont alors les caisses régionales d'assurance maladie qui, à partir des informations collectées régionalement et des éléments fixés par la commission, déterminent le taux de cotisation de chaque entreprise. Les caisses disposent en outre d'une possibilité d'appliquer soit des cotisations supplémentaires, soit des ristournes pour inciter les entreprises à mieux encadrer les risques professionnels. |
Votre commission partage largement l'analyse de la Cour. Elle considère qu'une simplification du mécanisme de tarification devrait constituer l'un des objectifs de la convention d'objectifs et de gestion que prévoit l'article 38 du présent projet de loi.
* 30 Il était ainsi de 3,932 % en 1970.