EXAMEN DES ARTICLES
Article premier
Création
d'un accord-cadre entre la CNAMTS et
le Centre national des professions de
santé (CNPS)
Cet article institue un accord-cadre regroupant les dispositions communes aux différentes professions.
Le I de cet article crée, au chapitre II du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale, un article L. 162-1-11 qui met en place un nouveau type d'accord entre les organismes d'assurance maladie et les professions de santé exerçant en ville.
Le premier alinéa de ce nouvel article précise qu'il s'agit d'un « accord-cadre » conclu entre la CNAMTS, au moins une autre caisse nationale d'assurance maladie et le Centre national des professions de santé (CNPS). Les professions concernées sont les médecins généralistes et spécialistes, les chirurgiens-dentistes, les sages-femmes et les auxiliaires médicaux (orthophonistes, orthopédistes et pédicures-podologues), les infirmiers, les masseurs-kinésithérapeutes, les biologistes et les transporteurs sanitaires.
Le deuxième alinéa prévoit que cet accord-cadre ne sera applicable à une profession donnée que si au moins une organisation syndicale représentative de cette profession y a adhéré. Il s'agit donc d'un dispositif contractuel complémentaire aux conventions spécifiques à chaque profession.
Le troisième alinéa précise la durée et le contenu de l'accord-cadre. Ce dernier est conclu pour une durée maximale de cinq ans. Il a d'abord pour vocation de fixer des dispositions transversales, « communes à l'ensemble des professions » et qui entrent dans le champ des conventions actuelles. La seconde phrase de l'alinéa donne à titre indicatif des exemples de mesures pouvant figurer dans l'accord-cadre :
- les obligations respectives des caisses et des professionnels de santé exerçant en ville, c'est-à-dire le cadre général des relations entre caisses et professionnels ;
- des mesures que les partenaires conventionnels jugent appropriées pour garantir la qualité des soins dispensés et une meilleure coordination des soins, ou pour promouvoir des actions de santé publique.
Le II de cet article modifie l'article L. 162-15 concernant les conditions d'application des conventions, de leurs annexes et avenants, compte tenu de la création de l'article L. 162-1-11.
L'accord-cadre connaîtra les mêmes conditions d'application que les conventions professionnelles. Il sera donc soumis à l'approbation des ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale, de l'agriculture, de l'économie et du budget. Comme les conventions, il sera soumis à l'adhésion individuelle des professionnels de santé. Chaque professionnel aura la possibilité d'y adhérer ou non.
En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a adopté au II de cet article deux amendements présentés par le Gouvernement : le premier précise que la transmission des accords conventionnels par la CNAMTS est faite au nom de l'ensemble des signataires ; le second prévoit que, lorsqu'il s'oppose à l'approbation d'un accord, le Gouvernement doit le notifier à l'ensemble des signataires, et non aux seules caisses signataires comme le stipulait le texte initial.
On notera que, si l'accord-cadre institué par le présent article est censé fixer « les dispositions communes à l'ensemble des professions » , son contenu n'est toutefois pas clairement défini.
De même, l'article mentionne explicitement le Centre national des professions de santé, ce qui confère ainsi et de manière assez surprenante un rôle quasi institutionnel à cette organisation constituée sous la forme d'une association loi 1901.
L'objectif politique est limpide : il s'agit d'obtenir ainsi le soutien du CNPS à cette réforme. Le résultat est pour le moins décevant si l'on en juge par les dernières déclarations du Dr Reignault, Président du CNPS, dans le Quotidien du médecin du 5 février, où il explique comment le Gouvernement s'est trompé en voulant engager une réforme de fond des soins de ville alors que la première attente des professionnels portait sur leurs honoraires.
Art. 2
Contenu des conventions professionnelles
Cet article traite du contenu des conventions professionnelles. Celles-ci devront définir le niveau des tarifs ainsi que les engagements collectifs et individuels des professionnels en matière d'organisation des soins, de respect des bonnes pratiques, d'évolution des pratiques ou de l'activité. Elles pourront mettre en place un fonds de modernisation.
Dans ce nouveau cadre, il est prévu que les modifications tarifaires feront désormais l'objet d'une appréciation globale, incluant l'ensemble des professions, ainsi que les modifications de nomenclature envisagées par les partenaires conventionnels.
Cet article crée donc deux nouveaux articles du code de la sécurité sociale fixant le contenu commun des conventions professionnelles des différentes professions de santé.
Le I de cet article crée un article nouveau L. 162-14-1 qui détermine la durée, désormais fixée par la loi à cinq ans, et le contenu des conventions.
Chaque convention définira le niveau des tarifs (1°), les engagements collectifs et individuels des professionnels en matière d'organisation des soins, de respect des bonnes pratiques, d'évolution des pratiques ou de l'activité (2°) et pourra, le cas échéant, mettre en place un fonds de modernisation de la profession considérée (3°).
Le II de cet article crée un article L. 162-14-2 prévoyant que les tarifs seront fixés dans le cadre d'avenants à chaque convention.
Ces avenants comporteront en annexe les modifications de nomenclature envisagées par les partenaires conventionnels et dont devront tenir compte les ministres lorsqu'ils mettent en oeuvre des modifications de celle-ci, « sauf en cas d'urgence ou d'impérieuse nécessité de santé publique » .
Les ministres devront motiver leurs décisions en matière de nomenclature des actes lorsqu'elles s'écartent des propositions faites sur le sujet par les partenaires conventionnels.
Le présent article a pour conséquence de mettre fin, pour les professionnels de santé ayant signé une convention, à l'application du mécanisme des lettres-clés flottantes.
Le système issu de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, aujourd'hui en vigueur, prévoit en effet que, pour chaque profession, les caisses et les syndicats médicaux déterminent dans l'annexe à la convention, un objectif de dépenses, les tarifs et les mesures propres à faire respecter l'objectif. Ces moyens sont, premièrement la fixation des tarifs des honoraires et deuxièmement « les mesures de toute nature propres à garantir le respect de l'objectif fixé » : la réduction du volume des actes non justifiés au plan médical (maîtrise médicalisée) et la possibilité de modifier dans la limite de 20 % la cotation des actes (« lettres-clés »).
Pour les professionnels ayant signé une convention, ce système est supprimé et remplacé par le nouveau dispositif proposé au présent article.
En revanche, comme on le verra à l'article 5, pour les professions non signataires d'une convention, le mécanisme pervers des lettres-clés flottantes, institué par le Gouvernement dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 et auquel le Sénat s'est déjà opposé à de nombreuses reprises, est maintenu.
Art.
3
Réforme des accords de bon usage des soins
et des contrats de
bonne pratique
Cet article vise, selon le Gouvernement, à donner une nouvelle dynamique à des dispositifs incitatifs créés par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 : les accords de bon usage des soins sont élargis à l'ensemble des professions ; il est prévu qu'ils peuvent donner lieu, comme les contrats de bonne pratique, à des rémunérations forfaitaires.
Le I de cet article modifie l'article L. 162-12-17 du code de la sécurité sociale concernant les accords de bon usage des soins afin d'élargir ces derniers, qui étaient réservés aux médecins principaux prescripteurs, à l'ensemble des professionnels de santé exerçant en ville (1° et 2° du I).
Les accords de bon usage des soins ont été créés par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000. Il existe deux types d'accords de « bon usage de soins » à destination des médecins généralistes et spécialistes : un contrat national conclu entre la CNAMTS et les syndicats de médecins et un contrat régional signé entre les unions régionales de caisses d'assurance maladie (URCAM) et les représentants désignés par les syndicats signataires des conventions nationales. Même à défaut de convention, les médecins peuvent conclure à l'échelon national et à l'échelon régional des accords.
En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a adopté au 2° du I de cet article un amendement rédactionnel présenté par M. Claude Evin, rapporteur.
Le 3° du I précise que ces accords peuvent donner lieu à des rémunérations forfaitaires.
Le II de cet article modifie l'article L. 162-12-18, qui définit les contrats de bonnes pratiques.
Le 1° du II permet aux professionnels de bénéficier d'un complément forfaitaire de rémunération en contrepartie du respect des engagements pris dans le cadre du contrat de bonnes pratiques. Il étend également le contrat de bonnes pratiques aux transporteurs sanitaires.
Le 2° étend l'évaluation de la pratique du professionnel aux références opposables et aux recommandations de bonne pratique.
Le 3° supprime la référence aux actions de formation continue dans la mesure où le projet de loi relatif aux droits de malades, en attente d'adoption définitive par le Parlement, institue un dispositif de formation médicale continue obligatoire pour l'ensemble des professionnels de santé exerçant en ville.
Les 4° et 5° modifient la rédaction des sixième, septième et huitième alinéas afin de tenir compte du fait que le contrat de bonnes pratiques pourra concerner des professionnels non habilités à prescrire.
Le 6° supprime l'engagement facultatif pouvant figurer dans un contrat de bonnes pratiques de « favoriser, par une participation à des réseaux de soins, une meilleure coordination des soins ou permettre des regroupements professionnels » . Cet engagement figure désormais de manière obligatoire dans les contrats individuels de santé publique créés à l'article 4 de la proposition de loi.
Le 7° est une disposition de cohérence tenant compte de l'entrée dans le dispositif prévu au 1° des transporteurs sanitaires.
Le III habilite l'Etat à proposer à l'adhésion individuelle des professionnels de santé des accords de bon usage des soins ou des contrats de bonne pratique lorsque les partenaires conventionnels ne l'ont pas fait ou en l'absence de convention nationale.
Art.
4
Création des contrats de santé publique
Cet article crée des contrats de santé publique, complémentaires aux dispositions de l'accord-cadre ou de la convention professionnelle, qui permettront aux professionnels y adhérant de percevoir des rémunérations forfaitaires en contrepartie des engagements qu'ils prendront en matière d'actions de prévention ou d'amélioration de la coordination et de la permanence des soins.
Cet article crée, dans le code de la sécurité sociale, un article L. 162-12-20 instituant le contrat de santé publique.
Le premier alinéa de l'article L. 162-12-20 précise, d'une part, quels seront les professionnels de santé concernés -il s'agit de tous les professionnels de santé exerçant en ville pouvant signer une convention (à l'exception des transporteurs sanitaires)- et, d'autre part, la nature individuelle de ces contrats. Ces contrats seront définis par les conventions des professions concernées ; les professionnels adhérant à ces contrats pourront percevoir des rémunérations forfaitaires.
Le deuxième alinéa précise le contenu général de ces contrats : les contrats fixent les engagements des professionnels concernés et précisent les modalités d'actualisation de la rémunération forfaitaire qui leur est associée.
Le troisième alinéa énumère les éléments obligatoires que devront comporter ces contrats s'agissant des engagements des professionnels : il s'agit de la participation soit à des actions destinées à renforcer la permanence et la coordination des soins, notamment à des réseaux de soins, soit à des actions de prévention.
Art.
5
Suppression de la régulation unilatérale par les caisses
Cet article tire les conséquences des modifications précédentes en supprimant le pouvoir unilatéral des caisses de prendre des mesures pour les professions placées sous une convention.
Le système des lettres-clés flottantes reste cependant applicable aux professions qui n'ont pas signé de convention.
Le I de cet article modifie l'article L. 162-15-2 du code de la sécurité sociale relatif à l'objectif de dépenses déléguées et aux annexes fixant pour chacune des professions l'objectif de dépenses et les moyens de l'atteindre.
Le 1° réécrit le premier alinéa du I de l'article 162-15-2 : le pouvoir unilatéral des caisses en matière de fixation de l'objectif des dépenses et des tarifs et/ou de lettres-clés n'est prévu qu'en l'absence de convention. Par conséquent, le système des annexes aux conventions disparaît et la notion d'objectif de dépenses ne s'applique plus qu'aux professions non conventionnées.
Le 2°, qui supprime le dernier alinéa du I, est une disposition de cohérence avec la suppression des annexes.
Le 3° prévoit que le suivi deux fois par an des dépenses par la CNAMTS ne se fera qu'en l'absence de convention et non de manière systématique comme c'est le cas aujourd'hui.
Le 4°, qui supprime le deuxième alinéa du II, est une disposition de cohérence avec la suppression des annexes.
Le 5° modifie en conséquence les dispositions concernant l'annexe modificative que les parties conventionnelles doivent aujourd'hui mettre en place lorsqu'elles constatent que l'évolution des dépenses n'est pas compatible avec le respect de l'objectif fixé dans l'année.
Le 6°, qui supprime le quatrième alinéa du II, est l'abrogation du pouvoir du ministre de fixer les tarifs au cas où les annexes ne l'auraient pas fait.
Le 7° est un nouveau décompte d'alinéas tenant compte des modifications du II de l'article L. 162-15-3.
Le II de cet article modifie l'article L. 162-15-3 portant sur les relations entre les caisses d'assurance maladie et l'Etat au travers des rapports d'équilibre.
Les 1°, 3°, 4°, 5° et 6° modifient l'article L. 162-15-3 en conséquence de la suppression des annexes et des annexes modificatives.
Les 2° modifie les dispositions concernant les rapports d'équilibre. La CNAMTS doit aujourd'hui -en théorie parce qu'elle ne le fait plus- élaborer deux rapports intermédiaires à transmettre aux ministres compétents et au Parlement les 15 juillet et 15 novembre. Désormais, il n'y aura qu'un seul rapport le 15 juillet.
Le 7° prévoit qu'en l'absence de convention, les tarifs en vigueur au 31 décembre de l'année précédente sont prorogés jusqu'à l'entrée en vigueur des mesures nouvelles fixées par les caisses.
Le III de cet article modifie l'article L. 162-5-9 définissant le règlement conventionnel minimal (RCM).
Le règlement conventionnel minimal est étendu à l'ensemble des professionnels de santé exerçant en ville alors qu'auparavant il ne concernait que les médecins généralistes et spécialistes. En outre, il voit son champ de compétences élargi. Il aura désormais le même champ que les conventions nationales.
Art.
6
Dispositions diverses
Cet article tire, dans les textes qui leur sont applicables, les conséquences rédactionnelles de l'extension du dispositif commun aux transporteurs sanitaires privés. Il comporte une disposition transitoire afin que les partenaires conventionnels assurent la mise en conformité des conventions en vigueur avec les nouvelles dispositions législatives avant le 31 décembre 2002. Il valide enfin tous les actes pris en application de la convention nationale des masseurs-kinésithérapeutes, de ses annexes et avenants.
Le I de cet article est une disposition de cohérence. La disposition selon laquelle le règlement conventionnel minimal peut prévoir que les caisses prennent en charge une partie de la cotisation vieillesse n'est plus réservée aux seuls médecins (généralistes et spécialistes) dans la mesure où le règlement conventionnel minimal a été étendu à l'ensemble des professionnels de santé par l'article 5.
Le II tire, dans les textes qui leur sont applicables, les conséquences rédactionnelles de l'extension du dispositif commun aux transporteurs sanitaires privés.
Le III prévoit que les conventions en vigueur à la date de la publication de la loi, y compris les conventions dont la date d'échéance se situe en 2002 et qui font l'objet d'un renouvellement tacite, sont réputées conformes aux dispositions de la présente loi jusqu'au 31 décembre 2002.
Le IV valide, en raison de contentieux les menaçant, tous les actes pris en application de la convention nationale des masseurs-kinésithérapeutes, de ses annexes et de ses avenants.