III. LA PROPOSITION DE LOI : LA REPRISE DU PROJET DE FONDATION POUR LES ETUDES COMPARATIVES DU RAPPORT LYON-CAEN
Cette proposition de loi s'inspire fortement du rapport Lyon-Caen, même si quelques modifications ont été apportées, afin notamment de l'ouvrir aux assemblées parlementaires.
Elle prévoit une Fondation dont le statut est aménagé par rapport au régime juridique des fondations reconnues d'utilité publique, d'où la nécessité de recourir à une loi.
A. LA RÉUNION INÉDITE DES DEUX PÔLES RECHERCHE ET COOPÉRATION TECHNIQUE INTERNATIONALE
La Fondation pour les études comparatives vise donc à réunir les deux domaines distincts :
- le domaine de la recherche, de la documentation et de la formation qui relève en fait d'un Institut de droit comparé ;
- le domaine de la coopération internationale (expertise et assistance) qui peut être analysé comme un transfert ou échange des compétences techniques entre praticiens.
Ces deux catégories obéissent à des principes d'action très différents et sont soumises à des contraintes différentes.
Il s'agit de l'apport majeur d'une telle Fondation et c'est ce qui fait son originalité, tant en France qu'à l'étranger.
Ceci doit en effet permettre une plus grande efficience. En effet, l'assistance d'un réseau documentaire de qualité est nécessaire pour aider à l'élaboration de la loi à l'étranger. De plus, des recherches pourraient être menées à l'occasion de programmes de coopération technique.
En matière de coopération technique notamment, la Fondation n'aurait pas vocation à se substituer aux organismes existants mais jouerait le rôle d'un centre de ressources , orientant vers le centre compétent et réalisant elle-même les programmes en leur absence.
L'apport de la Fondation consisterait à organiser des programmes associant universitaires, fonctionnaires de différentes administrations et autres experts.
En effet, les experts recherchés par les grands programmes multilatéraux ne doivent plus être seulement les plus qualifiés dans leur propre système juridique, mais doivent pouvoir travailler en association avec des experts de différents pays (notamment dans le cadre des programmes communautaires).
Ils doivent également avoir une intelligence du fonctionnement des institutions leur permettant d'analyser le contexte dans lequel leur action s'inscrit, ce qui implique une plus grande transversalité des équipes, qui devraient réunir des savoirs non seulement juridiques, mais aussi économiques et sociologiques.
B. UNE STRUCTURE ORIGINALE
1. Une structure privée dénommée « fondation »...
Le rapport Badinter concluait donc en appelant à un changement de dimension grâce à la création d'une Fondation .
Il estimait qu'« étant donné l'importance du développement du droit comparé pour la place de la France dans le monde et dans l'Union européenne, pour le développement de son économie, pour la sauvegarde de la cohérence de son système juridique, cette mobilisation [devait] d'abord être le fait de l'Etat » .
Cependant, relevant que l'essor du droit comparé serait également très utile pour le secteur privé, il lui paraissait légitime que le secteur privé participe également au financement de cette politique de développement du droit comparé.
Il considérait donc que la structure la plus efficace serait celle d'une fondation, puisqu'elle permettrait de réaliser l'association indispensable en la matière du public et du privé, et de garantir la pérennité des financements.
Le rapport du professeur Lyon-Caen concluait également en ce sens, en estimant nécessaire la création d'une institution dotée de la personnalité morale afin de combler le « déficit d'identité » des études comparatives, qui ne constituent pas une discipline au sens traditionnel du terme et s'insèrent difficilement dans les structures universitaire et de recherche.
Le rapport Lyon-Caen écartait l'idée d'une forme commerciale, estimant que, même si l'on pouvait espérer qu'une partie non négligeable des ressources de l'institution proviendrait de ses prestations (formations, coopération internationale, diffusion de l'information), la Fondation devait d'abord assurer des services dans l'intérêt général et non être un bureau d'études ou une entreprise de formation privilégiant la recherche de recettes financières.
Soulignant les graves faiblesses de la forme associative, peu adaptée à l'ampleur des missions et exposant l'institution à des paralysies liées à des rivalités de personnes et d'institutions, il l'excluait, de même que la formule du groupement d'intérêt public.
Il déplorait également que l'établissement public entraîne bien souvent des organes de direction pléthoriques afin d'assurer la représentativité de l'ensemble des institutions et secteurs intéressés, le risque étant celui d'une administration lourde dépourvue de toute souplesse de gestion. De plus, cette formule pourrait semer la confusion avec les établissements d'enseignement supérieur et de recherche.
Par ailleurs, il rappelait que les impératifs des programmes internationaux de coopération impliquaient de ne pas être enfermé dans les contraintes de la comptabilité et de la gestion publiques.
Il concluait donc dans le même sens que le rapport Badinter, en appelant à la création d'une fondation nationale placée sous l'égide de l'Etat .
En effet, si les fondations sont principalement des oeuvres caritatives ou de mécénat, elles peuvent être un instrument de collaboration des activités privées avec les services publics. L'unique -et illustre- précédent- constitue en fait la Fondation nationale des sciences politiques (FNSP) créée par l'ordonnance du 9 octobre 1945, et dont l'objet est de favoriser l'étude des sciences politiques et économiques.
Une fondation reconnue d'intérêt public est une personne morale de droit privé créée avec l'autorisation des pouvoirs publics et résultant de l'affectation irrévocable d'un patrimoine en vue de la réalisation d'une oeuvre d'intérêt général à but non lucratif. Elle est soumise à la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat et au décret n° 91-1005 du 30 septembre 1991.
Le statut juridique de fondation permet de conjuguer la personnalité morale accordée par décret en Conseil d'Etat, gage d'une réelle autonomie d'action, et un régime de droit privé, afin de ne pas enfermer ce nouvel organisme dans les contraintes de la comptabilité et de la gestion publiques.
Cette Fondation des études comparatives déroge cependant au régime des fondations reconnues d'utilité publique.