3. Améliorer le réseau des accords de pêche sans occulter leur dimension commerciale
En termes voilés, le Livre vert amorce une remise en cause du volet externe le la PCP -c'est-à-dire, notamment, des accords de pêche communautaires (APC) conclus avec les pays du Sud-, au nom de la préservation mondiale de la ressource.
Les APC -accords signés entre l'U.E. et un pays tiers visant à définir les conditions d'accès aux ressources halieutiques situées dans la zone économique exclusive (ZEE) du pays tiers signataire- relèvent de la politique commune des pêches dont ils constituent l'un des volets.
Depuis le premier accord de pêche communautaire (APC) signé en 1977 avec les Etats-Unis, 29 accords au total ont été signés.
Les APC ne constituent pas une catégorie homogène. Se retrouvent sous cette même appellation différents accords que distinguent les modes de compensation mis en oeuvre.
On parle d' accords de réciprocité -cas de ceux signés avec des pays d'Europe du Nord- lorsque l'APC repose sur un échange de possibilités de pêche de part et d'autre. Ces possibilités portent sur des espèces différentes et permettent en général une continuité des activités de pêche de chacun à l'intérieur de sa ZEE en fonction de spécialités d'exploitation et d'intérêts commerciaux distincts.
Avec les pays tiers qui souhaitent concéder une part importante de l'exploitation de leurs ressources dans leur propre ZEE, sans réciprocité de droits d'accès, les APC se fondent sur le versement d'une contrepartie financière à charge du budget de l'U.E. et des armateurs qui bénéficient des droits d'accès. L'ensemble des APC avec les pays africains et ceux de l'Océan Indien entrent dans cette catégorie ainsi que l'accord avec le Groënland.
Un autre aspect des APC est constitué par des dotations pour des actions d'accompagnement de la coopération ou de contributions pour la dotation directe de services publics propres au secteur des pêches : recherche, formation ou administration.
Le budget communautaire consacré aux APC est passé de 5 millions d'euros en 1991 à près de 300 millions en 1997 et 276,1 millions en 2000. La contrepartie communautaire (intervention publique) a été en moyenne, sur la période 1992-2000, de l'ordre de 270 millions d'euros (stabilité), tandis que les redevances payées par les armateurs s'élevaient en moyenne à plus de 32 millions d'euros (à la hausse). En 2000, les accords de pêche représentaient environ 28,5 % du budget communautaire consacré à la politique commune de la pêche (PCP). La contrepartie financière est de plus en plus consacrée au financement d'actions ciblées telles que la recherche, la formation, les appuis institutionnels, le contrôle et la surveillance, les infrastructures à terre ou le soutien à la pêche artisanale.
Pour la France, la politique communautaire des accords de pêche est un élément essentiel de la PCP . En effet, la flotte française participe à deux types d'accords : les accords « nord » constituent un accès indispensable aux stocks (principalement lieu noir, cabillaud, maquereau, hareng, chinchard et espèces profondes) de l'Atlantique nord pour nos navires basés à Boulogne, Fécamp, Saint Malo, Lorient, et les accords « ACP » permettent à la flotte thonière d'avoir accès aux ZEE des Etats partenaires et ainsi de poursuivre la ressource thonière du nord au sud de l'océan Atlantique et à travers tout l'océan Indien occidental. L'exploitation de la flotte française dans le cadre des accords permet ainsi à la France de participer directement à l'approvisionnement de son marché et de ses industries ; les aspects positifs des accords pour l'Union européenne, notamment en matière de retombées économiques et d'emplois, ont également été mis à jour.
Ces accords contribuent, en outre, à favoriser une pêche durable et responsable, en luttant contre la pêche illégale et en protégeant l'environnement et représentent un apport financier appréciable, pour des pays peu développés -jusqu'à 15 % des recettes budgétaires de certains pays africains-.
- Les accords de pêche de première génération (essentiellement commerciaux, prévoyant un accès contre redevance) négociés entre les pays riverains et l'Union européenne sont le gage d'une bonne gouvernance qui évite la privatisation rampante au profit des pavillons tiers et de complaisance de la rente qui pourrait être dégagée d'une exploitation des ZEE des pays en voie de développement contraire aux objectifs de pêche responsable et au principe de précaution.
Votre rapporteur souhaite que la Commission affirme en la matière plus de détermination et de volonté à participer activement, dans le respect du droit international et du principe de la pêche responsable, à l'exploitation des ressources halieutiques du globe partout où elles sont disponibles et accessibles, tant pour assurer l'approvisionnement de la population que pour réduire sa dépendance dans ce domaine vis-à-vis de l'extérieur.
- En ce qui concerne les accords dits de deuxième génération , comportant un volet « coopération et développement » et signés essentiellement avec les pays tiers en voie de développement, votre rapporteur insiste sur leur caractère prioritairement commercial, et estime que les intérêts de la pêche communautaire doivent prévaloir. Ceci n'empêche pas de favoriser le développement des pêcheries locales, mais exige de soumettre les sociétés mixtes aux mêmes règles sanitaires ou environnementales afin d'éviter toute distorsion de concurrence.
C'est pourquoi il appelle le Gouvernement français à plaider pour une politique européenne ambitieuse d'accords de pêche. Il souhaite également que le secteur de la pêche soit mieux associé aux négociations internationales et que la participation des professionnels au financement de ces accords soit stabilisée. En effet, la part de la redevance pour l'accès à la ressource pèse de plus en plus dans les coûts de production des professionnels concernés.