CHAPITRE III
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Retraités, personnes âgées et personnes handicapées

Art. 11
(Loi n° 97-277 du 25 mars 1997 ; art. 83, 158, 206, 209 bis, 219 quater et 235 ter du code général des impôts et L. 242-1 du code de la sécurité sociale)
Abrogation de la loi n° 97-277 du 25 mars 1997
créant les plans d'épargne retraite, dite « loi Thomas »

Objet : Cet article tend à abroger la loi n°97-277 du 25 mars 1997 créant les plans d'épargne retraite, dite « loi Thomas ».

En deuxième lecture, le Sénat avait une nouvelle fois supprimé cet article, qui constitue le « troisième essai » d'abrogation de la loi Thomas.

Lors de la réunion de la commission mixte paritaire, le mardi 30 octobre 2001, M. Nicolas About, président, a constaté que le premier désaccord majeur entre les deux assemblées intervenait à l'article 11. Cet article a été ainsi examiné en priorité.

La commission mixte paritaire a ainsi échoué à adopter un texte commun sur un article abrogeant une loi restée virtuelle, faute de décrets d'application.

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a rétabli cet article.

C'est dire le symbole que représente pour le Gouvernement et sa majorité plurielle l'adoption définitive de l'article 11, qui permettra de tenir l'une des promesses du discours de politique générale de M. Lionel Jospin, Premier ministre, du 19 juin 1997.

Votre commission dénonce l'argumentation selon laquelle l'abrogation de la loi Thomas serait justifiée par « la volonté d'assurer en priorité la pérennité des régimes de retraite par répartition » . Une telle volonté ne passe pas par l'abrogation d'une loi restée virtuelle, faute de décrets d'application. Une telle volonté nécessite, en revanche, des mesures correctrices ou anticipatives, c'est-à-dire une « réforme » des retraites.

Non seulement, cette réforme des retraites n'a pas eu lieu, mais elle n'a pas été engagée. Les deux piliers de la politique gouvernementale, le Conseil d'orientation des retraites (COR) et le Fonds de réserve pour les retraites, viennent de montrer cruellement leurs limites.

En créant le COR, en lui faisant rendre son premier rapport le 6 décembre 2001, et en annonçant que la majorité issue des élections de 2002 prendrait le problème « à bras le corps », le Gouvernement n'a cherché qu'à gagner du temps.

Quant au fonds de réserve, même s'il avait été abondé conformément aux prévisions initiales et même si le cap des 1.000 milliards de francs était atteint en 2020, ce qui semble pour le moins incertain, ce montant sera bien insuffisant au regard des besoins de financement des régimes d'assurance vieillesse au cours des années 2007 à 2040.

Dans ces conditions, refuser obstinément la possibilité à 14,5 millions de salariés du secteur privé de pouvoir préparer l'avenir par un supplément de capitalisation, alors que d'autres catégories socioprofessionnelles ont déjà la possibilité de le faire, apparaît irréaliste et injuste.

Votre commission vous propose d'adopter à nouveau un amendement de suppression de cet article.

Art. 11 bis
(art. L. 135-3 du code de la sécurité sociale)
Prise en charge par le Fonds de solidarité vieillesse des cotisations
versées à l'ARRCO/AGIRC au titre des périodes de chômage
et de préretraite indemnisées par l'Etat

Objet : Cet article a pour objet de mettre à la charge du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) le règlement de l'engagement pluriannuel pris par l'Etat à l'égard des organismes de retraite complémentaire ARRCO/AGIRC.

En première comme en deuxième lectures, le Sénat s'était élevé avec force contre cet article, qui impose au Fonds de solidarité vieillesse (FSV), de manière indue, une charge supplémentaire de 2 à 3 milliards de francs par an pendant une période supérieure à quinze ans, qui conduit le FSV à intervenir dans le domaine de la protection sociale complémentaire, ce qui n'est pas sa raison d'être et qui, de surcroît, s'inscrit dans un ensemble de ponctions inadmissibles sur ses ressources.

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a rétabli cet article.

Le FSV sera déficitaire de 4,7 milliards de francs en 2002. L'Assemblée nationale, si attachée à l'abondement du Fonds de réserve pour les retraites, serait particulièrement inspirée d'alléger les charges du FSV, en renonçant à ce qui n'est rien d'autre qu'une prise en charge d'une dette de l'Etat à l'égard des régimes complémentaires vieillesse.

Votre commission vous propose d'adopter à nouveau un amendement de suppression de cet article.

Art. 14
(Titre premier, articles premier, premier-1 nouveau et 5 ;
titre II, articles 2 et 12 ; titre III, article 13 et titre IV
de la loi n° 89-475 du 10 juillet 1989)
Réforme de l'accueil familial à titre onéreux de personnes âgées
ou handicapées

Objet : Cet article vise à moderniser le régime de l'accueil à titre onéreux des personnes âgées ou handicapées adultes par des particuliers à leur domicile.

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a rappelé, pour coordination, cet article voté conforme par les deux assemblées afin d'adopter deux amendements prenant en compte les modifications apportées au code de l'action sociale et des familles par le projet de loi rénovant l'action sociale et médico-sociale qui a fait l'objet d'un accord en commission mixte paritaire le mardi 4 décembre 2001.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Art. 14 quater A
(art. L. 132-8, L. 245-6 et L. 344-5 du code de l'action sociale et des familles)
Conditions d'exercice des recours en récupération
au titre de l'aide sociale

Objet : Cet article résulte d'une initiative prise par le Sénat en première lecture afin d'améliorer le régime des recours en récupération sur l'aide sociale effectués auprès des personnes handicapées.

En deuxième lecture, le Sénat n'a pas rétabli intégralement le dispositif qu'il avait mis en place en première lecture au profit des personnes handicapées.

Afin d'aligner le régime de l'allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) sur celui de la nouvelle allocation personnalisée d'autonomie (APA), le Sénat a adopté en deuxième lecture un amendement dispensant les sommes versées au titre de l'allocation compensatrice d'un recouvrement sur la succession du bénéficiaire, sur le légataire ou sur le donataire ainsi que de tout recours à l'encontre du bénéficiaire lorsque celui-ci est revenu à meilleure fortune.

Par ailleurs, l'amendement du Sénat prévoyait la compensation intégrale de la dépense nouvelle pour les départements par un abondement de la dotation globale de fonctionnement.

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale n'a pas souhaité suivre le Sénat qui avait pourtant fait un pas en direction d'un compromis. Le rapporteur, à l'Assemblée nationale, a estimé que l'extension éventuelle de la suppression des recours sur succession devait « trouver sa place dans le cadre plus large de la réforme de la loi d'orientation en faveur des personnes handicapées du 30 juin 1975 ».

L'Assemblée nationale a donc adopté un amendement rétablissant le texte adopté par elle en deuxième lecture, limitant ainsi la portée de la mesure à la suppression du recouvrement de l'aide sociale auprès du bénéficiaire de l'allocation compensatrice seulement en cas de retour à meilleure fortune.

Votre commission vous propose d'adopter un amendement afin de rétablir le texte adopté par le Sénat en deuxième lecture qui constituait un compromis honorable par rapport au texte voté en première lecture et dont on regrettera que l'Assemblée nationale n'ait pas su s'y rallier en nouvelle lecture au risque de décevoir profondément les personnes handicapées.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Art. 14 quinquies
(art. L. 5232-3 du code de la santé publique)
Agrément des loueurs ou revendeurs de matériel de maintien à domicile

Objet : Cet article vise à imposer des obligations de formation ou d'expérience professionnelle aux distributeurs de matériels de maintien à domicile.

Cet article appelle un commentaire particulier.

En deuxième lecture, votre commission avait adopté un amendement tendant à supprimer la notion d'agrément, introduite dans cet article par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, au motif que les conditions de l'agrément n'étaient pas clairement définies dans le texte. Toutefois, en séance publique, le Sénat avait adopté un amendement modifié, à la demande du Gouvernement, afin « d'inscrire dans la loi la notion d'agrément en tant que modalité de contrôle du respect des obligations de qualité en la matière », pour reprendre les termes mêmes de Mme la secrétaire d'Etat.

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par le Gouvernement tendant à supprimer purement et simplement la notion d'agrément. M. le ministre délégué, après un examen sans doute approfondi, a donné le motif suivant pour justifier un amendement en totale contradiction avec celui présenté au Sénat cinq mois auparavant : « Cette nouvelle disposition 8 ( * ) n'est pas compatible avec le droit communautaire, car ces matériels constituent de fait des dispositifs médicaux dont la mise sur le marché ne peut être subordonnée qu'au marquage CE attestant leurs performances ainsi que leur conformité à des exigences essentielles concernant la sécurité et la santé des patients, des utilisateurs et des tiers, conformément aux dispositions de l'article L. 5211-3 du code de la santé publique qui transpose la directive 93/42/CEE modifiée . »

« Ce n'est que dans le cadre des conditions de prise en charge par l'assurance maladie que les Etats membres peuvent imposer le respect de spécifications techniques complémentaires ou de conditions particulières de prescription et d'utilisation, comme le prévoit l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale issu de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 ».

Se réjouissant que le Gouvernement ait finalement rejoint la position exprimée par le Sénat, votre commission vous propose donc d'adopter cet article sans modification.

Art. 15 ter
(art. L. 351-12 du code de la sécurité sociale)
Majoration de pension pour avoir élevé des enfants

Objet : Cet article prévoit un montant forfaitaire minimum pour la majoration de pension de retraite attribuée aux salariés ayant élevé au moins trois enfants.

En première comme en deuxième lectures, le Sénat avait adopté cet article, à l'initiative de MM. Jean Faure et Charles Descours. Il prévoit un montant forfaitaire minimum pour la majoration de pension de retraite attribuée aux salariés ayant élevé au moins trois enfants. Ce dispositif aurait bénéficié essentiellement aux retraités du régime agricole ; en effet, la bonification calculée comme actuellement en pourcentage (10 %) d'une faible pension de retraite aboutit à un montant faible, particulièrement dans le cas des conjointes survivantes d'exploitants agricoles.

Après avoir souhaité sa suppression en première lecture, M. Philippe Nauche, rapporteur, n'a pas eu suffisamment de louanges pour conseiller à la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale d'adopter cet article conforme en deuxième lecture : « C'est une bonne disposition (...) C'est une très bonne initiative qu'il convient de conserver » .

Malheureusement, le Gouvernement est intervenu par voie d'amendement en séance, en faisant appel à un premier argument : « Une telle démarche devrait faire l'objet d'une large concertation avec le mouvement familial, car elle va dans le sens d'une forfaitisation des avantages familiaux ».

Votre rapporteur constate que, pour le Gouvernement, la « large concertation » avec le mouvement familial est nécessaire lorsque la disposition prévue est favorable aux assurés, mais que le Gouvernement passe outre l'opposition du mouvement familial, lorsqu'il décide que cet avantage vieillesse sera financé par la branche famille, et non plus par le FSV.

Mais le Gouvernement a dû sentir que cet argument n'était pas suffisant : « Du reste, le Gouvernement est favorable à une révision des règles d'attribution des avantages familiaux de retraite, lesquels constituent un élément majeur de notre politique familiale depuis 1945. En outre, le Conseil d'orientation des retraites, où le mouvement familial est représenté, a engagé une réflexion sur la question spécifique des avantages familiaux de retraite » 9 ( * ) .

L'existence du Conseil d'orientation des retraites n'a pas fini de servir d'alibi à l'immobilisme : il justifie ainsi des diagnostics à répétition.

Le Gouvernement a également considéré que l'objectif d'améliorer le montant des retraites agricoles était en partie atteint. Mais, cette amélioration ne concerne pas, par exemple, les monopensionnées à carrière courte. L'instauration d'un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les exploitants agricoles n'aura probablement aucune influence sur les situations des retraitées actuelles.

N'hésitant pas à faire feu de tout bois, le Gouvernement a fini par expliquer doctement que « la mesure poserait d'importantes difficultés d'application et risquerait d'être anticonstitutionnelle puisqu'elle modifierait les comptes de la branche vieillesse, arrêtés dans la loi de financement de la sécurité sociale » . Un tel argument apparaît peu opératoire, au regard de la décision n° 97-388 DC du 20 mars 1997 « Loi créant les plans d'épargne retraite » . La dépense supplémentaire représentée par cet article n'est pas certaine : elle dépendrait du montant minimum fixé par le pouvoir réglementaire.

En définitive, tous les arguments du Gouvernement étaient susceptibles d'être discutés point par point.

Hélas, M. Philippe Nauche s'est laissé convaincre : « La commission n'a pas examiné cet amendement. Elle avait souhaité conserver le texte du Sénat, car la proportionnalité directe des majorations pour enfants dans le droit à pension pose indéniablement un problème de justice sociale. A titre personnel, et étant donné les assurances données par le Gouvernement sur la concertation en cours, notamment avec les associations familiales et la CNAV, je propose d'adopter l'amendement gouvernemental » .

L'Assemblée nationale a finalement supprimé cet article en nouvelle lecture. Espérant que sa « résistance » aux arguments gouvernementaux sera plus consistante en lecture définitive, votre rapporteur vous propose de rétablir cet article.

Votre commission vous propose de rétablir, par amendement, cet article.

* 8 Il s'agit de l'agrément.

* 9 CRA, 3 ème séance du jeudi 6 décembre 2001.

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