N° 129

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 11 décembre 2001

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires sociales (1), sur le projet de loi de modernisation sociale , ADOPTÉ AVEC MODIFICATIONS PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN NOUVELLE LECTURE,

Par MM. Gérard DÉRIOT, Bernard SEILLIER,
Alain GOURNAC et Mme Annick BOCANDÉ,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gilbert Chabroux, Jean-Louis Lorrain, Roland Muzeau, Georges Mouly, vice-présidents ; M. Paul Blanc, Mmes Annick Bocandé, Claire-Lise Campion, M. Jean-Marc Juilhard, secrétaires ; MM. Henri d'Attilio, Gilbert Barbier, Joël Billard, Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Jean Chérioux, Mme Michelle Demessine, M. Gérard Dériot, Mme Sylvie Desmarescaux, MM. Claude Domeizel, Michel Esneu, Jean-Claude Étienne, Guy Fischer, Jean-Pierre Fourcade, Serge Franchis, Francis Giraud, Jean-Pierre Godefroy, Mme Françoise Henneron, MM. Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, André Lardeux, Dominique Larifla, Jean-René Lecerf, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Mme Valérie Létard, MM. Jean Louis Masson, Serge Mathieu, Mmes Nelly Olin, Anne-Marie Payet, M. André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Mmes Janine Rozier, Michèle San Vicente, MM. Bernard Seillier, André Vantomme, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vézinhet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : Première lecture : 2415 rect., 2809 et T.A. 608

Deuxième lecture : 3052 , 3073 et T.A. 686

Commission mixte paritaire : 3358

Nouvelle lecture : 3316 , 3385 et T.A. 738

Sénat : Première lecture 185 , 258 , 275 , 276 et T.A. 89 (2000-2001)

Deuxième lecture : 384 , 404 , 424 (2000-2001) et T.A. 1 (2001-2002)

Commission mixte paritaire : 48 (2001-2002)

Nouvelle lecture : 128 (2001-2002)

Politique sociale.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Déposé le 24 mai 2000, le présent projet de loi devrait faire l'objet d'un « dernier mot » par l'Assemblée nationale avant la fin de l'année.

Il est probable qu'il comporte alors, dans son texte définitif, 224 articles 1 ( * ) , soit près d'un quintuplement du nombre (48) des articles du projet de loi initial.

Le Gouvernement lui-même est l'auteur direct de 71 articles additionnels, soit l'équivalent d'un substantiel projet de loi qui est venu se greffer sur son texte initial, sans délibération en conseil des ministres, ni avis du conseil d'Etat.

D'emblée, l'histoire du présent projet de loi est confuse. Il comportait en effet, lors de son dépôt, 70 articles.

Mais, avant de gonfler démesurément, le texte a commencé par se rétrécir : le 12 décembre 2000, soit quelques jours avant l'examen du texte en première lecture à l'Assemblée nationale, le Gouvernement communiquait « la liste des articles dont l'examen (n'était) plus envisagé ». Il s'agissait de 22 articles « hébergés », pour certains d'entre eux, dans divers autres textes en navette : proposition de loi relative à la lutte contre les discriminations ( loi n° 2001-1066 du 16 novembre 2001 ), proposition de loi relative à l'égalité entre les femmes et les hommes ( loi n° 2001-397 du 9 mai 2001 ), proposition de loi relative à la prolongation du mandat et à la date du renouvellement des conseils d'administration des services incendie et de secours ( loi n° 2000-628 du 7 juillet 2000 ), projet de loi relatif à la résorption de l'emploi précaire et au recrutement dans la fonction publique ( loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001 ), projet de loi de finances rectificative pour 2000 ( loi n° 2000-1353 du 30 décembre 2000 ), projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 ( loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 ).

Certains articles ont d'ailleurs réintégré le présent projet de loi. Ainsi en a-t-il été de l'article 4 dont « l'examen (n'était) plus envisagé » (création de l'agence technique de l'information sur l'hospitalisation) parce qu'il avait été inscrit dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. Annulé par le Conseil constitutionnel car constituant un « cavalier social », il a été réinséré dans le présent projet de loi sous la forme d'un article additionnel. L'article 11 (abrogation de la loi « Thomas ») n'a jamais fait partie -on le comprend- des articles dont « l'examen (n'était) plus envisagé » . Mais il a tenté de prendre un raccourci en empruntant la navette du même projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, sans plus de succès : comme il était certain, le Conseil constitutionnel a censuré cette tentative de resquille du domaine des lois de financement.

Mais d'autres articles ont été également retirés pour des raisons plus anecdotiques. Ainsi en a-t-il été de l'article 7 du présent projet de loi, relatif à l'établissement thermal d'Aix-les-Bains qui a, semble-t-il, déplu car trop caractéristique d'un texte portant diverses dispositions d'ordre social.

Le présent projet de loi se voulait en effet -comme son titre pompeux le souligne- « de modernisation sociale » . Par la suite, cet article a, naturellement, été réintroduit par voie d'amendement.

Ainsi ramené à 48 articles , le présent projet de loi a, dès sa première lecture à l'Assemblée nationale, commencé sa carrière de « crocodile » 2 ( * ) .

A l'issue de ce premier examen par l'Assemblée nationale, il comportait déjà 106 articles . En première lecture, le Sénat a adopté conformes 46 articles, et a enrichi le texte de 77 articles additionnels, transmettant ainsi 141 articles à l'Assemblée nationale.

Celle-ci, en deuxième lecture, en adoptait 39 conformes mais en insérait 56 nouveaux, de sorte que le Sénat était saisi à son tour de 158 articles . En deuxième lecture, le Sénat adoptait encore 55 articles conformes mais se contentait de 26 articles additionnels : au terme de cette deuxième lecture, 129 articles étaient donc en navette.

La deuxième lecture du projet de loi a été particulièrement chaotique. Elle s'est interrompue le 29 mai 2001 à l'Assemblée nationale pour être reprise quinze jours plus tard et donner lieu à une seconde délibération le 12 juin. A cette occasion, le Gouvernement a porté à 24 articles le volet du projet de loi relatif aux licenciements économiques qui ne comportait à l'origine que 6 articles.

Aussi, votre commission avait-elle souhaité le 21 juin que l'examen de ces dispositions du projet de loi soit réservé jusqu'à ce qu'elle puisse auditionner l'ensemble des partenaires sociaux. Ces auditions se sont déroulées les 27 et 28 juin ; elles ont été particulièrement riches d'enseignements sur un dispositif d'une grande fragilité juridique. La commission a alors adopté un rapport supplémentaire consacré aux articles 29 A à 34 bis constituant les sections 1 à 3 du chapitre premier du titre II du présent projet de loi 3 ( * ) . La deuxième lecture au Sénat, entamée le 26 juin, s'est ainsi achevée le 9 octobre 2001.

En dépit du grand nombre des articles adoptés conformes à ce stade de la navette (136), la commission mixte paritaire réunie le 30 octobre 2001 à l'Assemblée nationale n'est pas parvenue à un accord sur le nombre équivalent (129) des articles restant en discussion.

Elle a échoué -d'un commun accord- sur l'article 11 portant abrogation de la loi « Thomas », les uns voyant dans cette mesure emblématique le respect d'un engagement solennel pris par le Premier ministre dès sa déclaration de politique générale du 19 juin 1997, les autres trouvant, dans l'abrogation laborieuse d'une loi jamais appliquée, l'illustration même de l'impuissance du Gouvernement à garantir l'avenir des retraites.

Le présent projet de loi s'est désormais stabilisé sous l'effet d'un double phénomène.

En premier lieu, les contraintes constitutionnelles limitent l'introduction, après la commission mixte paritaire, de nouvelles dispositions : l'Assemblée nationale n'a ainsi inséré « que » 6 articles additionnels en nouvelle lecture. 4 ( * )

En second lieu, les points d'accord entre les deux assemblées se raréfient -l'Assemblée nationale n'a adopté conformes que 24 articles dont le quart constitue des suppressions conformes -tandis que les désaccords se figent : l'Assemblée nationale n'a ainsi, semble-t-il, pas souhaité ne serait-ce que commenter la suppression du dispositif, pourtant mesuré et de bon sens, introduit par le Sénat et relatif au service minimum dans le secteur public : ces articles 39 ter à 39 sexies ne sont pas même évoqués dans le rapport en nouvelle lecture de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale.

La navette s'enrichit toutefois d'une nouvelle catégorie d'articles : les rappels pour coordination . Cinq articles, pourtant adoptés conformes, sont ainsi réintroduits dans la navette, dont deux pour être supprimés, confirmant le désordre né de l'hypertrophie qui caractérise la gestion des textes sociaux.

Ainsi, l'Assemblée nationale a-t-elle souhaité remettre en navette, pour le supprimer, l'article 66 bis qui réforme l'interprétation litigieuse faite par le Gouvernement lui-même du dispositif de l'allocation spécifique d'attente (ASA). L'Assemblée nationale a entendu, ce faisant, tenir compte d'un dispositif équivalent successivement « gravé dans le marbre » du projet de loi de financement de la sécurité sociale (article 26 A supprimé peu après car constituant à l'évidence un cavalier social) puis du projet de loi de finances (article 70 bis rattaché aux crédits de l'emploi et de la solidarité).

La nouvelle Allocation équivalent retraite (AER) présente en effet l'indéniable mérite pour le Gouvernement d'apparaître comme une avancée nouvelle alors qu'elle ne fait que revenir sur une interprétation abusivement restrictive de l'ASA faite par le Gouvernement et déjà corrigée par le présent article 66 bis.

Au total, le Sénat est ainsi saisi en nouvelle lecture de 116 articles dont 37 articles supprimés par l'Assemblée nationale.

Votre commission vous en propose un examen attentif.

Evolution de la navette du projet de loi de modernisation sociale

Transmis

(1)

Conformes

(2)

Dont suppressions conformes

Additionnels

(3)

Dont à l'initiative du Gouvernement

en navette (1) - (2) + (3)

1 ère lecture AN

48

58

23

106

1 ère lecture Sénat

106

42

-

77

16

141

2 ème lecture AN

141

39

1

56

22

158

2 ème lecture Sénat

158

55

3

26

9

129

Nouvelle lecture AN

129

24

6

6

1

116 (1)

TOTAL

160 (1)

10

223

71

(1) Y compris 5 articles conformes rappelés pour coordination en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale dont deux suppressions.

* 1 Après confirmation probable de la suppression de 35 articles introduits par le Sénat en cours de navette.

* 2 Selon la formule d'Herodote qui disait du crocodile : « c'est, de tous les êtres vivants qui nous sont connus, celui qui passe de la plus petite taille à la plus grande » (Enquête II, 68).

* 3 Rapport supplémentaire de M. Alain Gournac, rapporteur, Sénat n° 424 (2000-2001).

* 4 Dont un article 17 bis AAAA nouveau qui ne laissera pas indifférent les amateurs d'une gastronomie traditionnelle.

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